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DISCOURS

lier avec les réflexions néceffaires, premiérement ceux qui SUR L'HIS- nous font entendre la durée perpétuelle de la Religion, TOIRE UNI- & enfin ceux qui nous découvrent les caufes des grands changemens arrivés dans les Empires.

VERSELLE.

Après cela, quelque partie de l'Hiftoire ancienne que vous lifiez, tout vous tournera à profit. Il ne passera aucun fait dont vous n'apperceviez les conféquences. Vous admirerez la fuite des confeils de Dieu dans les affaires de la Religion : vous verrez aufli l'enchaînement des affaires humaines, & par-là vous connoîtrez avec combien de réflexion & de prévoyance elles doivent être gouvernées.

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L

Les Epoques, ou la fuite des Tems.

PREMIERE ÉPOQUE.

Adam, ou la Création.

PREMIER AGE DU MONDE.

DISCOURS

SUR L'HIS-
TOIRE UNI-

VERSELLE.

du

Ans dev.

monde. 7. C.

A premiere Epoque vous préfente d'abord un grand fpec Ans tacle: Dieu qui crée le Ciel & la Terre par fa parole, & qui fait l'Homme à fon image. C'eft par où commence Moyfe, le plus ancien des Hiftoriens, le plus fublime des Philofophes, & le plus fage des Légiflateurs.

Il pofe ce fondement tant de fon hiftoire, que de fa doctrine & de fes Loix. Après il nous fait voir tous les hommes renfermés en un feul homme, & fa femme même tirée de lui: la concorde des mariages & la fociété du genre-humain établie fur ce fondement la perfection & la puiffance de l'homme, tant qu'il porte l'image de Dieu en fon entier : fon empire fur les animaux: fon innocence tout ensemble, & fa félicité dans le Paradis, dont la mémoire s'eft confervée dans l'âge d'or des Poëtes : le précepte divin donné à nos premiers parens : la malice de l'efprit tentateur, & fon apparition fous la forme du ferpent: la chûte d'Adam & d'Eve, funefte à toute leur poftérité le premier Homme juftement puni dans tous fes enfans, & le genre-humain maudit de Dieu la premiere promeffe de la rédemption, & la victoire future des hommes fur le démon qui les a perdus..

:

I. 4004.

La terre commence à fe remplir, & les crimes s'augmentent. 129. 3875. Caïn, le premier enfant d'Adam & d'Eve, fait voir au monde naif- Gen. V. 32 fant la premiere action tragique : & la vertu commence dès-lors 4, 8.

TOIRE UNI

VERSELLE.

Ans Ans du dev.

à être perfécutée par le vice. Là paroiffent les moeurs contraires DISCOURS des deux freres : l'innocence d'Abel, fa vie paftorale, & fes offranSUR L'HIS- des agréables: celles de Caïn rejettées, fon avarice, fon impiété, fon parricide, & la jaloufie mere des meurtres : le châtiment de ce crime: la confcience du parricide agitée de continuelles frayeurs: la premiere ville bâtie par ce méchant, qui fe cherchoit un afyle monde. J.C. contre la haine & l'horreur du genre-humain : l'invention de quelques arts par les enfans: la tyrannie des paffions, & la prodigieufe malice du cœur humain toujours porté à faire le mal: la postérité 87. 3017. de Seth fidéle à Dieu malgré cette dépravation: le pieux Hénoch miraculeusement tiré du monde qui n'étoit pas digne de le pofféder: la diftinction des enfans de Dieu d'avec les enfans des hommes, c'est-à-dire, de ceux qui vivoient felon l'efprit, d'avec ceux qui vivoient felon la chair : leur mélange, & la corruption univerfelle du monde la ruine des hommes réfolue par un jufte jugement de Dieu fa colère dénoncée aux pécheurs par : fon ferviteur 1536. 2468. Noé, leur impénitence, & leur endurciffement puni enfin par le 2656. 2348. déluge, Noé & fa famille réfervés pour la réparation du genre

humain.

:

Voilà ce qui s'eft paffé en 1656. ans. Tel eft le commencement de toutes les Hiftoires, où fe découvre la toute-puissance, la sageffe, & la bonté de Dieu : l'innocence heureuse fous fa protec tion: fa juftice à venger les crimes, & en même tems fa patience à attendre la converfion des pécheurs : la grandeur & la dignité de l'homme dans fa premiere inftitution: le génie du genre-humain, depuis qu'il fut corrompu : le naturel de la jaloufie, & les caufes fecrétes des violences & des guerres, c'est-à-dire, tous les fondemens de la Religion & de la Morale.

Avec le genre-humain, Noé conferva les arts, tant ceux qui fervoient de fondement à la vie humaine & que les hommes fçavoient dès leur origine, que ceux qu'ils avoient inventés depuis. Ces premiers arts que les hommes apprirent d'abord, & apparem(a) Gen. 11. ment de leur Créateur, font (a) l'agriculture, l'art (b) paftoral, 15. III. 17, celui (c) de se vêtir, & peut-être celui de fe loger: auffi ne voyons nous pas de commencement de ces arts en Orient vers les lieux d'où le genre-humain s'eft répandu.

II.

18, 19. IV. 2. (b) Ibid. IV,

2.

(c) Ibid, III.

21.

La tradition du Déluge univerfel fe trouve par toute la terre, L'Arche où fe fauverent les reftes du genre-humain, a été de tout tems célébre en Orient, principalement dans les lieux où elle s'arrêta après le Déluge. Plufieurs autres circonstances de cette fa

meufe

meuse Histoire * fe trouvent marquées dans les annales & dans les traditions des anciens peuples : les tems conviennent, & tout fe DISCOURS rapporte autant qu'on le pouvoit efpérer dans une antiquité fi re

culée.

PRA

SECONDE ÉPOQUE.

Noé, ou le Déluge.

SECOND AGE DU MONDE.

SUR L'HIS-
TOIRE UNI-
VERSELLE.

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XCVI. Abyd.

Eufeb. lib.

II, 12.

Plut. Opufc.

Plufne Solert.

RE's du Déluge fe rangent le décroiffement de la vie hu- de Med. & maine : le changement dans le vivre, & une nouvelle nourri- Ayr. Ap. Jof. Antiq. l. 1. c. ture fubftituée aux fruits de la terre; quelques préceptes donnés 4. & l. 1. à Noé de vive voix feulement; la confufion des langues arrivée cont. Apion. à la tour de Babel, premier monument de l'orgueil & de la foi- IX. Prap. Ev. blesse des hommes; le partage des trois enfans de Noé, & la pre- c. 11, miere distribution des terres. La mémoire de ces trois premiers auteurs des Nations & des terr.an.aquat. Peuples s'eft confervée parmi les hommes. Japhet, qui a peuplé la Lucian. de plus grande partie de l'Occident, y eft demeuré célébre fous le 1656. 2348. nom fameux de Japhet. Cham & fon fils Chanaan n'ont pas été 1657. 2347. moins connus parmis les Egyptiens & les Phéniciens ; & la mé- 1757. 2247. moire de Sem a toujours duré dans le peuple Hébreu, qui en eft forti.

Gen. X. 9

Un peu après ce premier partage du genre- humain, Nemrod, homme farouche, devient par fon humeur violente, le premier des 10, 11. Conquérans, & telle eft l'origine des Conquêtes. Il établit son Royaume à Babylone, au même lieu où la Tour avoit été commencée, & déja élevée fort haut ; mais non pas autant que le fouhaitoit la vanité humaine. Environ dans le même tems Ninive fut bâtie, & quelques anciens Royaumes établis. Ils étoient petits dans ces premiers tems, & on trouve dans la feule Egypte quatre Dynasties ou principautés, celle de Thébes, celle de Thin, celle de Memphis & celle de Tanis: c'étoit la Capitale de la baffe Egypte. On peut auffi rapporter à ce tems les commencemens des loix & de la police des Egyptiens; celui de leurs Pyramides qui durent encore, & celui des observations aftronomiques tant de ces peuTome VIII.

B

ples, que des Chaldéens. Auffi voit-on remonter jufqu'à ce tems, DISCOURS & pas plus haut, les obfervations que les Chaldéens, c'eft-à-dire, fans conteftation, les premiers obfervateurs des Aftres, donnerent dans Babylone à Callisthène Ariftote. pour

SUR L'HIS

TOIRE UNI-
VERSELLE.

Ans Ans du dev.

Porphyr. ap.

de cœlo.

Tout commence : il n'y a point d'histoire ancienne où il ne paroiffe non-feulement dans ces premiers tems, mais encore longmonde. 7. C. tems après, des veftiges manifeftes de la nouveauté du monde. On 1771. 2233. voit les loix s'établir, les mœurs fe polir, & les Empires fe forSymp. lib. II, mer. Le genre-humain fort peu-à-peu de l'ignorance; l'expérience l'inftruit, & les arts font inventés ou perfectionés. A mesure que les hommes fe multiplient, la terre fe peuple de proche en proche: on paffe les montagnes & les précipices; on traverse les fleuves, & enfin les mers; & on établit de nouvelles habitations. La terre qui n'étoit au commencement qu'une forêt immense prend une autre forme : les bois abattus font place aux champs, aux pâturages, aux hameaux, aux Bourgades, & enfin aux Villes. On s'inftruit à prendre certains animaux, à apprivoifer les autres, & à les accoutumer au fervice. On eut d'abord à combattre les bêtes farouches. Les premiers Héros fe fignalerent dans ces guerres. Elles firent inventer les armes, que les hommes tournerent après Gen. X. 8, contre leurs femblables: Nemrod, le premier guerrier & le premier Conquérant, eft appellé dans l'Ecriture un fort chaffeur. Avec les animaux l'homme fçut encore adoucir les fruits & les plantes: il plia jufqu'aux métaux à fon usage, & peu-à-peu il y fit fervir toute la nature. Comme il étoit naturel que le tems fit inventer beaucoup de chofes, il devoit auffi en faire oublier d'autres, du moins à la plupart des hommes. Ces premiers arts que Noé avoit confervés, & qu'on voit auffi toujours en vigueur dans les contrées où fe fit le premier établissement du genre-humain, fe perdirent à mesure qu'on s'éloigna de ce pays. Il fallut, ou les rapprendre avec le tems, ou que ceux qui les avoient confervés, les reportaffent aux autres. C'eft pourquoi on voit tout venir de ces terres toujours habitées, où les fondemens des arts demeurerent en leur entier & là même on apprenoit tous les jours beaucoup de chofes importantes. La connoiffance de Dieu & la mémoire de la création s'y conferva, mais elle alloit s'affoibliffant peu-à-peu. Les anciennes Traditions s'oublioient & s'obfcurciffoient; les fables qui leur fuccéderent, n'en retenoient plus que de groffieres idées: les fauffes divinités fe multiplioient; & c'eft ce qui donna lieu à la vocation d'Abraham.

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