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l'instant de la résistance: donc il n'y a point d'instant où il ne perde de son mouvement; donc la vitesse de son mouvement est momentanée: donc ce corps ne peut se trouver dans plusieurs lieux à la fois.

Il est prouvé que la plus grande vîtesse possible du mouvement d'un corps quelconque, n'a lieu que dans la direction rectiligne de ce même corps.

Je suppose, pour un instant, que la surface de la terre contiène quatre – vingtdix milliards arpents d'étendue, et qu'au milieu de chacun de ces arpents il y ait un piquet planté : je demande s'il y a un homme raisonnable qui soutiène qu'une boule mue en direction rectiligne, puisse toucher tous ces piquets à la fois.

» D'ailleurs, dites-vous, le mouve>>ment est l'existence ou la création suc»cessive d'un corps dans différents points » de l'espace, et la création est un acte » de la volonté divine: or, qui peut douter >> que la volonté divine ne puisse créer >> si promptement, si rapidement, le » même corps, que dans le même temps

>> ce

>>ce corps existe en plusieurs lieux, sans >> passer par les intervalles qui séparent » ces lieux, quelle que soit leur dis>> tance ? >> Mais cette création successive des corps n'est encore qu'un systême, qu'une hypothèse, et je vous ai déjà dit qu'une hypothèse ne pouvait servir de principe fondamental et certain à la démonstration de la possibilité d'un fait......

J'allais répondre au troisième point, continua le vieillard; mais le théologien m'exempla de cette peine : il me dit adieu brusquement, et disparut. C'était aussi le meilleur parti qu'il eût à prendre. Car lorsque, dans une controversé, l'on n'a des absurdités à débiter, et de la conque fusion à attendre, il vaut mieux se taire, ou se retirer. Ce faisant, l'on répare, autant qu'il est possible, par sa prudence, les impressions que l'on a faites par son ignorance.

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CHAPITRE I X.

Suite du discours du Vieillard.

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UN des plus grands hommes que la France ait produits, un théologien pieux, sage, éclairé, dont les ouvrages sont remplis de raisonnements solides, d'une métaphysique profonde, et d'une érudition peu commune; en un mot, le célèbre Arnaud parle en ces termes de la trinité: Ce mystère confond la raison, et la révolte. S'il y a au monde des difficultés insolubles, ce sont celles qui suivent ce dogme, qui établit : « que >> trois personnes, réellement distinctes, >> n'ont qu'une même et unique essence; >> et que cette essence étant la même >> chose, en chaque personne, que les >> relations qui les distinguent, elle peut >>se communiquer, sans que ces relations >> qui les distinguent se communiquent. >> Si la raison humaine s'écoute ellemême, elle ne trouvera en soi qu'un soulèvement général contre ces vérités

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inconcevables. Si elle prétend se servir de ces lumières pour les pénétrer, elles ne lui fourniront que des armes pour les combattre. Il faut, pour les croire, qu'elle s'aveugle elle-même; qu'elle fasse taire tous ses raisonnements et toutes ses vues, pour s'abaisser et pour s'anéantir sous le poids de l'autorité divine. (1)

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Ce raisonnement me parut hardi, téméraire même, la première fois que je le lus. Mais lorsque je vins à réfléchir de bonne foi sur le dogme de la trinité lorsque j'eus examiné les sentiments de Cerinthe, des Ebinonites, de Théodoret, de Praxée, de Basilide, de Valentin, de Marcion, de Berylle, de Noet, de Sabellius, de Paul de Samosate, ainsi que ceux de leurs adversaires, sur le même sujet, je vis, à mon tour, que ce dogme était, non seulement contraire aux lumières les plus claires de la raison, mais qu'il anéantissait en même temps l'unité

(1) Arnaud, Perpétuité de la foi, pag. 18, Edit. de 1666.

de dieu. L'examen des opinions d'Arius, de Macedonius, de Théodore de Mopsueste, de Nestorius, et de quelques théologiens des siècles suivants, me confirma dans ce jugement; et la lecture des ouvrages de Socin, de Sandius, de Zuicker, de Biddle, de Sherlock, de Whiston, de Clarcke, et de leurs partisans, acheva de faire de moi le plus déterminé anti-trinitaire qui eût paru depuis la mort de Jesus-Christ, jusqu'à ce jour. (1)

(1) Ceux qui voudront s'instruire de tout ce que l'on a avancé pour et contre le dogme de la trinité, depuis la naissance du christianisme jusqu'aujourd'hui, pourront consulter:

I. Les anciens historiens ecclésiastiques, tels qu'Eusebe, Socrate, Sozomene, Théodoret,

des SS. Pères.

et les ouvrages

II. Les histoires et mémoires ecclésiastiques modernes, tels que le Nucleus Hist. Eccl. de SANDIUS. Les Mém. pour servir à l'Hist. Eccl. de M. DE TILLa Biblioth. Eccl. de M. DU PIN, — Hist. Eccl. FRID. SPANHEIM. - L'Hist. Eccl. de M. FLEURI. Le Diction. de BAYLE, aux noms des plus fameux Anti-trinitaires, etc.

LEMONT.

III. Les écrits des Anti-trinitaires et des Sociniens du XVIe siècle, tels que ceux de Michel Servet, de

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