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» possible que dieu fasse sur notre âme les >> impressions que nous rapportons au >> pain et au vin, quoiqu'il n'y ait ni >> pain ni vin; et celui qui le supposerait, » n'affaiblirait point la certitude du té>>moignage des sens, s'il supposait, en >> même temps, que dieu nous a avertis >> de ne pas croire nos sens dans cette oc>>casion: or, c'est ce que nous soutenons; >> car dieu nous ayant fait connaître que >> par la consécration, le pain et le vin » étaient changés au corps et au sang de >> J. C., il nous a suffisamment avertis de >> ne pas nous fier au témoignage de nos >> sens dans cette circonstance.

>> Nos sens ne nous trompent donc pas, >> quoiqu'ils nous avertissent qu'il existe, >> dans les espèces eucharistiques, toute >> autre chose que ce qui y existe réel>>lement.

Voici comment:

>> Dieu peut faire que les rayons de >> lumière qui tombent sur l'espace qu'oc>> cupaient le pain et le vin, soient ré» fléchis après la consécration, comme

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>> ils l'étaient auparavant: dieu peut faire >> encore que les particules subtiles, qui, >> en s'évaporant, occasionnaient l'odeur >> du pain et du vin avant la consécration, soient conservées, sans se dissiper: dieu >> peut faire enfin, qu'une force de ré>> pulsion, répandue autour du corps et » du sang de J. C. prène la forme des >> espèces eucharistiques, et produise la >> solidité que nos sens y découvrent. Or, >> dieu opère ces choses ou quelque >> chose de semblable, au moment de la >> consécration: donc nos sens ne nous >> trompent point dans cette occasion » puisqu'ils ne font que transmettre à >> notre âme l'impression des objets dont >> ils sont frappés: donc un corps peut >> être réellement différent de ce que nos >>_sens nous attestent qu'il est : donc le » dogme de la transsubstantiation n'affai>> blit point le témoignage de nos sens sur >> les miracles, et sur les faits qui servent » de preuve à la religion. »

Voilà de quelle manière les théologiens de l'église romaine prétendent démontrer

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la possibilité de la transsubstantiation. C'est aussi en ces mêmes termes que me parlait un de ces messieurs, dans le temps que je travaillais à me débarrasser la cervelle de toutes les opinions qui choquent le bon sens. Mais voici ce que je lui répondis:

sur

I. Vous vous fondez, monsieur l'hypothèse des points inétendus qui composent l'étendue, ou sur celle qui fait consister l'essence de la matière dans toute autre chose que l'étendue et l'impénétrabilité, pour prouver la possibilité d'un fait or, une hypothèse ne peut servir de principe fondamental et certain à la démonstration de la possibilité d'un fait, encore moins d'un mystère tel que celui de l'existence du corps de J. C. dans l'eucharistie. L'hypothèse sert seulement à interprêter un fait, de la réalité duquel l'on est invinciblement convaincu, C'est ainsi que Descartes expliquait une expérience , par le moyen de la matière subtile; Gassendi, par celui des atômes et du vuide; Newton, par celui de

l'attraction, etc. Pour qu'une conséquence possible soit évidente, il faut que le principe le soit de même: or, nous n'avons aucun principe évident qui établisse la possibilité du passage d'un chameau par le trou d'une éguille ; nous n'avons aucun principe évident que le corps de J. C. puisse être réduit à une telle petitesse, qu'il soit contenu, non seulement dans une hostie, mais encore dans la mille-millionième partie d'une hostie, ainsi que les catholiques le croient: donc votre raisonnement est faux en tout point.

de

Mais je vous accorde, pour un moment, la possibilité de la réduction du corps J. C. à une petitesse infinie: une possibilité n'est pas un fait; il n'est point prouvé que cette réduction se soit jamais faite ; et quand elle se serait faite et qu'elle se ferait encore tous les jours, il n'est point démontré qu'elle s'opère dans le cas dont il s'agit.

II. Un corps en mouvement existe certainement en plusieurs lieux dans un

temps déterminé; mais il est faux que la rapidité de son mouvement puisse être assez grande pour qu'il se trouve dans plusieurs lieux à la fois.

Un corps est, de sa nature, indifférent au mouvement ou au repos : par conséquent, un corps étant une fois mis en mouvement, ne se mettra jamais de luimême en repos; ainsi qu'étant une fois en repos, il ne se mettra jamais de luimême en mouvement.

Un corps est de sa nature tout-à-fait indifférent à quelque détermination ou à quelque vitesse que ce puisse être ; par conséquent, il ne changera jamais de luimême ni la vitesse, ni la détermination qu'il a eues en dernier lieu.

Il s'ensuit delà que le mouvement d'un corps est proportionnel à la force qui l'engendre, et que la diminution de ce mouvement est proportionnelle à la résistance que ce corps éprouve dans sa direction. Or, la constitution de l'espace qui nous environne est telle, qu'un corps ne peut y être mu sans éprouver à

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