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lége du 20 février, «< il est permis à I. B. P. DE MOLIERE de faire imprimer, par tel libraire ou imprimeur qu'il voudra choisir, une pièce de théâtre de sa composition, intitulée LE MARIAGE FORCÉ, pendant le temps et espace de cinq années.... Et ledit sieur DE MOLIERE a cédé et transporté son droit de privilége à IEAN RIBOU, marchand libraire à Paris, pour en jouir suivant l'accord fait entre eux. »

Le livret du ballet, que l'édition de 1734 a la première reproduit et que nous donnons comme elle à la suite de la comédie, a été imprimé l'année même de la représentation, c'est-à-dire quatre ans avant l'impression de la comédie, en un volume in-4o, de 12 pages, dont voici le titre :

LE MARIAGE
FORCÉ
BALLET

DV ROY.

Dansé par sa Maiesté, le 29. jour
de Ianvier 1664.

A PARIS,

Par ROBERT BALLARD, seul Imprimeur
du Roy pour la Musique.

M. DC. LXIV.

Avec Privilege de sa Maiesté.

Nous avons comparé les deux textes de la comédie et du ballet à une ancienne copie, qui, suivant l'ordre même des premières représentations à la cour, les a mêlés l'un à l'autre, et y a joint encore la partition que Lully écrivit pour ce divertissement royal. Ce manuscrit, que possède la bibliothèque du Conservatoire de musique, et qu'une reproduction, en général très-fidèle, donnée par M. Ludovic Celler', a déjà fait

1. Nous devons toute la fin de cette notice à notre ami et collaborateur M. Desfeuilles, qui a bien voulu se charger de cette longue et minutieuse étude sur les recueils de Philidor.

2. En 1867, chez MM. Hachette : « MOLIÈRE-LULLY. Le Mariage forcé..., nouvelle édition publiée d'après le manuscrit de Philidor l'aîné........ » M. L. Celler a réduit pour le piano et annoté la partition de Lully.

connaître, porte la date de 1690, mais paraît avoir été une mise au net de copies originales ou primitives; il est dû à André Danican, dit Philidor l'aîné, le père du plus illustre des Philidor'. «< Ordinaire de la musique du Roi, » et, pendant de longues années, « garde de sa Bibliothèque de musique, »> André Philidor avait entrepris un triple recueil : le premier de vieux airs et concerts faits sous le règne de François Ier, et depuis, à l'occasion de diverses solennités, de divers carrousels et divertissements; le second, d'anciens ballets mis en musique par les prédécesseurs immédiats de Lully; le der-. nier, de toute la musique que Lully avait fait exécuter, avant ses opéras, dans les fêtes ordonnées par Louis XIV 2. Les trois recueils, bien réduits par suite de l'incurie des anciennes administrations du Conservatoire (on parle même de l'infidélité d'un bibliothécaire), sont fondus actuellement en une seule collection3. C'est au tome XIII, heureusement échappé

.

1. André, père du grand joueur d'échecs et compositeur François-André, mourut fort vieux en 1730. Dès 1681, il prenait sur le titre du tome devenu le XLIVe de sa collection (ce numérotage n'est pas de lui) la qualité de « l'un des deux gardiens de la bibliothèque de Sa Majesté. Voyez sur les Philidor, dont Fétis avait fort embrouillé la généalogie, et sur la collection d'André, les très-consciencieux et très-intéressants articles que M. E. Thoinan a publiés dans la France musicale, du 22 décembre 1867 au 16 février 1868.

2. Voyez son épître Au Roi, ci-après, p. 67 et 68.

3. Voyez le catalogue détaillé de ce que contient encore la précieuse collection, et le navrant relevé des pertes qu'elle a subies, dans deux articles insérés au tome IV de la Chronique musicale (1874, p. 159-163, et p. 224 et 225) par M. J.-B. Wekerlin, le bibliothécaire actuel du Conservatoire, le savant musicien auquel le public a dû récemment de connaître tout le prix de quelques-unes des compositions que Molière a inspirées à Lully. La collection paraît avoir compté cinquante-neuf volumes (y compris trois numéros doubles "); mais on a trouvé moyen de faire main basse sur vingt-cinq. En 1827, Fétis' parlait de la destruction ou disparition

a Et non compris, ce semble, le volume d'Esther, qui est également de la main de Philidor et appartient aussi au Conservatoire : voyez, dans le tome de musique du Racine, à la seconde page de la Notice.

b Voyez son article reproduit par M. Farrenc dans la Revue de musique de 1856, p. 470-474.

au pillage, que se trouve le Mariage forcé, comédie, ballet et musique entremêlés. Comme on le verra, le manuscrit Philidor non-seulement offre quelques variantes et indications intéressantes, il a probablement sauvé toute une page de Molière, inédite jusqu'à la publication de M. L. Celler, et que notre édition des OEuvres est la première à recueillir.

C'est un bel in-folio, relié aux armes royales1; il est d'une ⚫ écriture très-soignée; il a 3 feuillets préliminaires et 89 pages. Le titre est celui-ci : « Le Mariage forcé, comédie et ballet du Roi, dansé par Sa Majesté le 29° jour de janvier 1664. Recueillie par Philidor l'aîné, en 1690. » Molière n'est pas nommé. Lully est suffisamment désigné dans l'épître dédicatoire Au Roi comme l'auteur de la musique. Après l'épître

de six volumes (les nos 17, 25, 26, 30, 54, 52 a). En 1856, M. Farrenc déplorait l'absence de quinze autres volumes (les nos 19, 22, 27, 37-43, 46, 50, 53, 55, 56*). Enfin, en 1874, M. Wekerlin constatait publiquement une nouvelle perte de quatre volumes : du no 4 bis, du no 23 (qui « renfermait le ballet de la Princesse d'Élide, le Mariage forcé... » de ce dernier il reste par bonheur une autre copie), du no 34 (qui « contenait les paroles des ballets de Pourceaugnac, des Jeux Pythiens, du Bourgeois gentilhomme, l'Accommodement de l'Amour et de Bacchus........ »), et du no 48. Deux autres volumes que M. Wekerlin croyait détruits en 1874 ont été heureusement retrouvés ou recouvrés depuis le no 33, qui, malgré des lacérations, contient encore George Dandin, et le n° 47', qui contient les Plaisirs de l'Ile enchantée.

1. L'étiquette imprimée suivante, qui a été collée sur la première page de l'ouverture, et qui se trouve de même dans la plupart des volumes, semble indiquer que Philidor avait repris possession du recueil d'abord offert au Roi : « Ce livre appartient à Philidor l'aîné, Ordinaire de la musique du Roi, et garde de tous les livres de sa Bibliothèque de musique, l'an 1702. »

2. Il ne peut y avoir de doute à cet égard : les deux autres col

a Un septième, qu'il disait également disparu (le n° 54), a été retrouvé depuis. Article de la Revue de musique, 1856, p. 474-478.

• Deux, signalés aussi comme absents par M. Farrenc (les nos 24 et 47), pour nous des plus intéressants, comme on en pourra juger dans ce volume même (à la Princesse d'Élide) et plus tard (au Sicilien), ont été retrouvés depuis (le premier non intact).

d Voyez le VI intermède des Amants magnifiques.

e Numéro déjà mentionné ci-dessus, note c.

et après l'argument général, vient la liste des personnages de la comédie presque seuls; Philidor n'y a joint ni les noms des acteurs qui les jouaient, ni la liste des danseurs qui figuraient dans les entrées du ballet; et même, à la différence du livret de 1664, aucun de ces danseurs n'est nommé aux diverses entrées; mais aux deux récits, le copiste musicien n'a pas négligé de constater qu'ils avaient été chantés par Mlle Hilaire et par d'Estival. Les arguments particuliers, à peu près tels qu'ils sont rédigés dans le livret, se lisent en tête des scènes de la comédie, données intégralement; elles sont, comme dans le livret, distribuées en trois actes; le manuscrit en contient une, au début du III' acte, dont il n'y a pas trace dans le livret 2. Quant à la partition, voici l'énumération et la place des morceaux dont elle se compose. Tout d'abord, avant la re scène de la comédie, une Ouverture. - Après le Ier acte,

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et sous le titre de 1er intermède: 1° une longue Ritournelle, et les deux couplets du Récit de la Beauté, séparés par la même ritournelle, qui a été recopiée en entier; 2° airs de danse pour la Ire et pour la II entrée, qui succèdent immédiatement au récit, entrée de la Jalousie, les Chagrins et les

lections des Ballets de Lully, qui sont à la Bibliothèque nationale, contiennent également celui du Mariage forcé. Les honoraires payés à Beauchamp par Molière (voyez ci-après, p. 74, note 4) le furent sans doute au même titre que ceux qu'il reçut en 1671 pour avoir ordonné les danses et dirigé la musique, composée par Lully, de la tragédie-ballet de Psyché : « Dans le cours de la pièce (dit la Grange, cité par M. Marty-Laveaux au tome VII de Corneille, p. 285), M. de Beauchamp a reçu de récompense, pour avoir fait les ballets et conduit la musique, onze cents livres, non compris les onze livres par jour que la troupe lui a données tant pour battre la mesure à la musique que pour entretenir les ballets. >> Quelques airs de danse du Mariage forcé néanmoins, et sans qu'il soit fait mention d'ailleurs de cette collaboration, pouvaient être de la composition de Beauchamp. Nous aurons l'occasion, dans ce volume même, de dire plus en détail qu'il fut l'auteur à peu près unique de la musique de ballet des Fácheux.

1. Entre tant de groupes et personnages du ballet, la liste ne mentionne que les Égyptiens de la IIIe entrée, le Magicien et ses Démons voyez p. 70, note 4.

2. La vie de la comédie: voyez ci-après, p. 82, note 2.

Soupçons, puis de quatre Plaisants ou Goguenards.

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Après la scène i du IIe acte, ou, plus exactement mais par maladresse du copiste, après la 4° réplique de la scène rv (voyez ciaprès, p. 78, fin de la note 5 de la page 77), deux airs de danse pour la III entrée, de deux Égyptiens et quatre Égyptiennes.— Après le II acte (après la scène avec les deux Bohémiennes), et sous le titre de II' intermède: 1o le Récit d'un Magicien chanteur (une basse), coupé par les réponses parlées de Sganarelle; 2o air de danse pour la IVe entrée, d'un Magicien danseur qui fait sortir quatre Démons. Après le III et dernier acte (qui se termine avec la scène x de la comédie, scène I du ballet), il y a ce qu'à l'exemple de M. L. Celler on pourrait appeler un Divertissement final, bien que ce titre général ne se trouve pas sur la copie, mais seulement le titre de V entrée : c'était la grande entrée de la mascarade arrivant en masse « pour honorer les noces » de Sganarelle, et commençant par contraindre le marié à payer de sa ridicule personne. La musique comprend : 1° deux airs de danse, le premier avec cette indication: le Mattre à danser; le second avec cette autre le Maître à danser montre cette courante à Sganarelle; à la suite de la courante, trois pages avec ce titre Concert espagnol, mais qui sont restées vides après avoir été réglées pour la musique, rappellent la place, et approximativement l'importance, d'un intermède dont le livret de 1664 nous a fait en partie connaître le programme1; 2o un Menuet pour deux Espagnols et deux Espagnoles (VIo entrée du livret); 3° un Rondeau pour le charivari, et un deuxième Air pour les mêmes (VII entrée du livret); 4° une Gavotte pour quatre Galants cajolant la femme de Sganarelle, et une Bourrée pour les mêmes (VIII et dernière entrée du livret).

:

Au tome XXXII de la collection Philidor se trouve encore une copie du livret de ballet seul ce n'est qu'une transcription de l'imprimé de 1664, devenu sans doute déjà rare en 1705, date de la copie.

Nous n'avons rien vu non plus à relever, en ce qui concerne le texte de Molière, dans deux recueils manuscrits que

1. Voyez ci-après, p. 84.

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