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Le Soleil nous luit tous les jours:

Tous les jours fa clarté fuccede à l'ombre noire,
Sans que nous en puiffions autre chose inférer
Que la néceflité de luire & d'éclairer,

D'amener les faifons, de mûrir les femences,
De verfer fur les corps certaines influences.
Du reste, en quoi répond au fort toujours di-

vers,

Ce train toujours égal dont marche l'Univers ? Charlatans, faifeurs d'horofcope,

Quittez les Cours des Princés de l'Europe. Emmenez avec vous les fouteurs tout d'un

temps.

Vous ne méritez pas plus de foi que ces gens.
Je m'emporte un peu trop : revenons à l'hif-

toire

De ce Spéculateur qui fut contraint de boire. Outre la vanité de fon art mensonger,

C'est l'image de ceux qui bâillent aux chimeres, Cependant qu'ils font en danger,

Soit pour eux, foit pour leurs affaires.

FABLE XIV.

Le Lievre & les Grenouilles.
UN Lievre en fon gite fongeoit,

Car que faire en un gîte à moins que l'on ne

fonge?)

Dans un profond ennui ce Lievre se plongeoit :
Cet animal eft trifte, & la crainte le ronge.

Les gens de naturel peureux,
Sont, difoit-il, bien malheureux.

Ils ne fauroient manger morceau qui leur prôfite..

Jamais un plaifir pur : toujours affauts divers.
Voilà comme je vis: cette crainte maudite
M'empêche de dormir, finon les yeux ouverts.
Corrigez-vous, dira quelque fage cervelle.
Et la peur fe corrige-t-elle ?
Je crois même qu'en bonne foi
Les hommes ont peur comme moi.
Ainfi raifonnoit notre Lievre ;
Et cependant faifoit le guet.
Il étoit douteux, inquiet:

Un fouffle, une ombre, un rien, tout lui donnoit la fievre.

Le mélancolique animal,

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En rêvant à cette matiere,

Entend un léger bruit: ce lui fut un fignal
Pour s'enfuir devers fa tanniere.

Il s'en alla paffer fur le bord d'un étang.
Grenouilles auffi-tôt de fauter dans les ondes:
Grenouilles de rentrer dans leurs grottes pro-
fondes.

Oh, dit-il, j'en fais faire autant

Qu'on m'en fait faire! Ma présence

Effraie auffi les gens ! Je mets l'alarme au camp! Et d'où me vient cette vaillance?

Comment, des animaux qui tremblent devant moi!

Je fuis donc un foudre de guerre ?

Il n'eft, je le vois bien, fi poltron fur la terre, Qui ne puiffe trouver un plus poltron que foi.

FABLE X V.

Le Coq & le Renard.

SUR la branche d'un arbre étoit en sentinelle

Un vieux Coq adroit & matois.
Frere, dit un Renard adouciffant sa voix,
Nous ne fommes plus en querelle :
Paix générale cette fois.

Tome I.

H

FABLE

Le Lievre & l.

UN Lievre en fon

Car que faire en un gîte
fonge?)

Dans un profond ennui ce
Cet animal eft trifte, & la c
Les gens de naturel peur
Sont, difoit-il, bien ma
Ils ne fauroient manger mor
fite..

Jamais un plaifir pur: toujours
Voilà comme je vis: cette crain
M'empêche de dormir, finon les
Corrigez-vous, dira quelque fag
Et la peur le cortige-t-ell

Je crois même

Les hommes on

qu'er

Ainfi raifo

Et cep

Cou

En rêvant à cette matiere,

Entend un léger bruit: ce lui fut un fignal
Pour s'enfuir devers fa tanniere.

Il s'en alla paffer fur le bord d'un étang.
Grenouilles auffi-tôt de fauter dans les ondes:
Grenouilles de rentrer dans leurs grottes pro-
fondes.

Oh, dit-il, j'en fais faire autant

Qu'on m'en fait faire! Ma présence Effraie auffi les gens ! Je mets l'alarme au camp! Et d'où me vient cette vaillance?

Comment, des animaux qui tremblent devant moi !

Je fuis donc un foudre de guerre ?

Il n'eft, je le vois bien, fi poltron fur la terre, Qui ne puiffe trouver un plus poltron que foi.

FABLE X V.

Le Coq & le Renard.

SUR la branche d'un arbre étoit en sentinelle

Un vieux Coq adroit & matois.
Frere, dit un Renard adouciffant fa voix,
Nous ne fommes plus en querelle :
Paix générale cette fois.

Tome I.

H

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