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Ne faut-il que délibérer ?

La Cour en Confeillers foisonne.
Eft-il befoin d'exécuter?

L'on ne rencontre plus perfonne.

FABLE III.

Le Loup plaidant contre le Renard pardevant le Singe. UN Loup difoit que l'on l'avoit volé.

Un Renard, fon voifin, d'affez mauvaise vie, Pour ce prétendu vol par lui fut appellé. Devant le Singe il fut plaidé,

Non point par Avocats, mais par chaque Partie. Thémis n'avoit point travaillé,

De mémoire de Singe, à fait plus embrouillé.
Le Magiftrat fuoit en fon lit de Justice.

Après qu'on eut bien contefté,
Répliqué, crié, tempêté,

I.c Juge inftruit de leur malice,

Leur dit: Je vous connois de long-temps, mes

amis ;

Et tous deux vous paîrez l'amende :

Car toi, Loup, tu te plains, quoiqu'on ne t'ait

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Et toi, Renard, as pris ce que l'on te demande.
Le Juge prétendoit qu'à tort & à travers,
On ne fauroit manquer, condamnant un per-

vers.

Quelques perfonnes de bon sens ont cru que l'impoffibilité & la contradiction qui eft dans le Jugement de ce Singe, étoit une chose à cenfurer, mais je ne m'en fuis fervi qu'après Phedre. C'est en cela que consiste le bon mot, felon mon avis.

FABLE IV.

Les deux Taureaux & une Grenouille.

DEUX

EUX Taureaux combattoient à qui poffe deroit

Une Géniffe avec l'Empire.

Une Grenouille en foupiroit.

Qu'avez-vous ? fe mit à lui dire

Quelqu'un du peuple croaffant.

Et ne voyez-vous pas,

dit-elle,

Que la fin de cette querelle
Sera l'exil de l'un, que l'autre le chaffant
Le fera renoncer aux campagnes fleuries?
Il ne régnera plus fur l'herbe des prairies,

Viendra dans nos marais régner fur les rofeaux ; Et nous foulant aux pieds jufques au fond des

eaux,

Tantôt l'une, & puis l'autre, il faudra qu'on

patiffe

Du combat qu'a caufé Madame la Géniffe,
Cette crainte étoit de bon fens.
L'un des Taureaux en leur demeure
S'alla cacher à leurs dépens,

Il en écrafoit vingt par heure.
Hélas! On voit que de tout temps
Les petits ont pâti des fottifes des Grands.

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La Chauvefouris & les deux Belettes. UNE Chauvefouris donna tête baiffée,

Dans un nid de Belette : & fitôt qu'elle y fut, L'autre envers les Souris de long-temps cour.

roucée,

Pour la dévorer accourut.

Quoi? vous ofez, dit-elle, à mes yeux vous

produire.

Après que votre race a tâché de me nuire?
N'êtes-vous pas Souris ? Parlez fans fiction,

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Oui, vous l'êtes, ou bien je ne suis pas Belette. Pardonnez-moi, dit la pauvrette,

Ce n'est pas ma profeffion.

Moi Souris ! Des méchans vous ont dit ces nouvelles :

Grace à l'Auteur de l'Univers,

Je fuis Oifeau: voyez mes aîles:
Vive la gent qui fend les airs.
Sa raison plut & fembla bonne.
Elle fait fi bien qu'on lui donne
Liberté de fe retirer.

Deux jours après, notre étourdie
Aveuglement se va fourrer

Chez une autre Belette aux Oiseaux ennemie.
La voilà de rechef en danger de fa vie.
La Dame du logis, avec son long museau,
S'en alloit la croquer en qualité d'Oiseau
Quand elle protesta qu'on lui faifoit outrage.
Moi, pour telle paffer! Vous n'y regardez pas■
Qui fait l'Oiseau ? c'eft le plumage.

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Je fuis Souris, vivent les Rats,

Jupiter confonde les Chats.

Par cette adroite repartie

Elle fauva deux fois fa vie.

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Plufieurs fe font trouvés qui d'écharpes chan

geans

Aux dangers, ainsi qu'elle, ont souvent fait la figue,

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L'Oiseau bleffé d'une fleche.

MORTELLEMENT

ORTELLEMENT atteint d'une fleche empennée,

Un Oifeau déploroit fa trifte destinée;

Et difoit en fouffrant un furcroît de douleur : Faut-il contribuer à fon propre malheur ?

Cruels humains, vous tirez de nos aîles De quoi faire voler ces machines mortelles : Mais ne vous moquez point, engeance fans pitié : Souvent il vous arrive un fort comme le nôtre. Des enfans de Japet toujours une moitié Fournira des armes à l'autre.

FABLE VII.

La Lice & fa Compagne.
UNE Lice étant fur fon terme,

Et ne fachant où mettre un fardeau fi pefant,

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