Armé de diamans, qui tenta cette route Celui-ci, pendant fon voyage, Des Pirates, des vents, du calme & des rochers, La Fortune pour lors diftribuoit les graces. Qu'il tira de fes longs voyages, Ce fut cette leçon que donnent les Sauvages: Ce qui lui fit conclure en fomme, Revient en fon pays, voit de loin ses Pénates, Pleure de joie, & dit: Heureux qui vit chez foi, De régler les défirs faisant tout son emploi. Il ne fait que par ouï-dire Ce que c'eft que la Cour, la Mer, & ton Empire, Fortune, qui nous fais paffer devant les yeux Des dignités, des biens, que jufqu'au bout du monde On fuit, fans qne l'effet aux promeffes réponde. Et contre la Fortune ayant pris ce confeil, FABLE XIII. Les deux Coqs. DEUX Coqs vivoient en paix; une Poule furvint; Et voilà la guerre allumée. Amour, tu perdis Troie ; & c'eft de toi que vint Cette querelle envenimée, Où du fang des Dieux mêmes on vit le Xante teint. Long-temps, entre nos Coqs, le combat fe maintient : Le bruit s'en répandit par-tout le voisinage. Fut le prix du vainqueur : le vaincu disparut : Pleura fa gloire & fes amours; Ses amours qu'un rival, tout fier de fa défaite, S'armoit d'une jalouse rage. Il n'en eut pas besoin. Son vainqueur fur les toits Un Vautour entendit fa voix: Tout cet orgueil périt fous l'ongle du Vautour. Son rival autour de la Poule Car il eut des femmes en foule. La Fortune se plaît à faire de ces coups: L'ingratitude & l'injuftice des Hommes envers la Fortune. UN trafiquant fur mer, par bonheur s'entichit, Il triompha des vents pendant plus d'un voyage. Gouffre, banc ni rocher, n'exigea de péage On ne parloit chez lui que par doubles ducats ; Et mon homme d'avoir chiens, chevaux & carroffes : Ses jours de jeûne étoient des nôces. Un fien ami voyant ces fomptueux repas, De rifquer à propos, & bien placer l'argent. Un vaiffeau mal freté, périt au premier vent: Un troisieme, au port arrivant, Rien n'eut cours ni débit. Le luxe & la folic N'étoient plus tels qu'auparavant. Enfin, fes Facteurs le trompant; Et lui même ayant fait grand fracas, chere lie, Son ami le voyant en mauvais équipage, pas Que vous foyez heureux, tout au moins foyez fage. Je ne fais s'il crut ce confeil : Mais je fais que chacun impute, en cas pareil, Et fi de quelque échec notre faute est suivie, Chofe n'eft ici plus commune, Le bien, nous le faifons: le mal, c'eft la For tune. On a toujours raifon, le Deftin toujours tort. FABLE X V. C'EST fouvent du hafard que naît l'opinion; |