Au premier coup l'arbre lui dit: Respecte mon grand âge, et souviens-toi du fruit Que je t'ai donné chaque année. La mort va me saisir, je n'ai plus qu'un instant; N'assassine pas un mourant Qui fut ton bienfaiteur. Je te coupe avec peine, Répond le jardinier; mais j'ai besoin de bois, Alors, gazouillant à la fois, De rossignols une centaine S'écrie: Epargne-le; nous n'avons plus que lui. Si tu nous laisses cet asile, Un miel délicieux dont tu peux à la ville Cela te touche-t-il? J'en pleure de tendresse, Eh! que ne dois-je pas à ce pauvre poirier Ma femme quelquefois vient ouïr ces oiseaux; Je veux pour vous de fleurs semer tout ce canton. Et laisse vivre le vieux tronc. UN babillard d'épi, sec, alongé, sans grain, Avec le sens commun ainsi toujours en guerre, Rempli, baisse la sienne, et regarde la terre. DANS un des plus rudes hivers Qu'eût depuis plus d'un siècle essuyés sa patrie, Se passe à réformer par écrit l'univers, 8 Sur le calendrier exerçant son génie, Mois, semaines et jours, y mit tout à l'envers: Et crut, d'une autre part, en reculer la fin: Mais, pour voir au tombeau courir le genre humain, Aussitôt morte, aussitôt née, Cet homme avait un maître Jacques << Calculez, monsieur, jusqu'à Pâques; « Vous ne reculerez ni n'avancerez rien; Mon jardin me l'apprend, et sa science est sûre: << Tout y meurt, voyez-vous, dans cette saison dure; << Mais tout y renaîtra, dieu merci, bel et bien << Au tems fixé par la nature. « Ainsi va l'an, le mois, la semaine et le jour; << L'un à peine est passé que l'autre est de retour. Ces ormes, ces tilleuls reprendront leur verdure; «Je verrai ces lilas, ces jasmins refleurir: « << La nature en secret travaille à leur parure, << Et ce bosquet par eux doit encor s'embellir. « L'homme seul ici bas s'en va sans revenir; << Une fois dans la sépulture, << Au diable s'il reprend, monsieur, sa chevelure. » Lucas eût desiré plus long-tems discourir; Mais son maitre confus tout à coup le fit taire, Et sur ses almanachs se mit à réfléchir: Ce valet n'est pas sot; il se pourrait bien faire Je veux mieux employer désormais mon loisir; A ce mot dont Lucas me fait ressouvenir: (Tant le valet souvent peut en apprendre au maître!) Naltre est commencer à mourir; Mourir est achever de naître. 9000€ L. AUBERT. CHLOÉ ET LE PAPILLON. Sous un ciel serein et tranquille, A ses mœurs, comme à ses attraits. Son oreille n'a point encore Un papillon au même instant Caresse la vive fraîcheur; |