Page images
PDF
EPUB

fentir le frivole des récits fabuleux.

[ocr errors]

"

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

eft dangereux, dit-il, de débuter par - là dans la plus tendre enfance, & d'occu,, per de pareils contes une raison toute ,, neuve, dans laquelle on n'a encore mis en ordre aucune vérité..... Il faut, ajoute-t-il, donner aux perfonnes & aux faits un afr de ridiculé, de crainte que ces folies ne frapent l'imagination par des ima"ges trop vives. Il fuffit d'appuier toujours fur l'abfurdité de la merveille, pour en affoiblir l'impreffion. C'eft prodiguer le tems & la raifon que de les livrer plufieurs années de fuite à de pareilles fadaifes. On ne fauroit trop dépêcher une étude fi miférable.

[ocr errors]

"

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

دو

[ocr errors]

Ce que dit Mr. de Voltaire fur la quef. De Mr de tion propofée mérite d'autant plus d'être ra- Voltaire, porté ici, qu'il fait voir en peu de mots les principaux avantages qu'on peut retirer de tant de Fables qui font par elles-mêmes inftructives, & qui ont fait l'admiration de toute l'Antiquité.

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

,, Quelques perfonnes, dit cet illuftre Auteur (a), plus triftes que fages, ont voulu profcrire depuis peu l'ancienne Mythologie, comme un recueil de contes puériles, indigne de la gravité reconnue de nos mœurs. Il feroit trifte pourtant de bruler Ovide, Homère, Héliode, & toutes nos belles Tapifferies, & nos Tableaux, & nos Opéra: beaucoup de Fables, après tout, font plus philofophi,, ques que ces Meffieurs ne font philofophes. S'ils font grace aux contes fami

[ocr errors]
[ocr errors]
[merged small][ocr errors][merged small]

(a) Dans Tes Oeuvres, Tome VI, Discours fur

la Fable.

Ee 4

"

[ocr errors]

وو

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

وو.

[ocr errors]

دو

[ocr errors]
[ocr errors]

,, liers d'Efope, pourquoi faire main-baffe fur ces Fables fublimes qui ont été ré,, fpectées du Genre- humain, dont elles ont fait l'inftruction? Elles font mêlées de beaucoup d'infipidité, car quelle chofe eft fans mêlange? Mais tous les Siècles adopteront la Boite de Pandore, au fond de laquelle fe trouve la consolation du Genre-humain; les deux Tonneaux de ,, Jupiter, qui verfent fans ceffe le bien & le mal; la Nue embraffée par Ixion, em,, blême & châtiment d'un Ambitieux; & là mort de Narciffe qui eft la punition de l'amour-propre. Y a-t-il rien de plus fublime que Minerve, la Divinité de la Sageffe, formée dans la tête du Maître des Dieux. Y a-t-il rien de plus vrai & de plus agréable que la Déeffe de la Beauté, obli,, gée de n'être jamais fans les Graces ? Les Déeffes des Arts, toutes Filles de Mémoire, ne nous avertiffent-elles pas auffi bien que Locke, que nous ne pouvons fans mémoire avoir le moindre jugement, la moindre étincelle d'efprit? Les fleches de l'Amour, fon bandeau, fa jeuneffe, Flore careffée par Zéphire, &c. ne font-ils pas les emblêmes fenfibles de la Nature entière? Ces Fables ont furvécu aux Religions qui les confacroient; les Temples des Dieux d'Egypte, de la Grèce, de Rome, ne font plus, & Ovide fubfifte. On peut détruire les objets de la crédulité, mais non ceux du plaifir; nous aimerons à jamais ces images vraies & riantes. Lucrèce ne croyoit » pas à ces Dieux de la Fable, mais il célébroit la Nature fous le nom de Vé

دو

دو

"

دو

[ocr errors]
[ocr errors]
[merged small][ocr errors][ocr errors][ocr errors][ocr errors][merged small][merged small][ocr errors][merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small]

Alina Venus Cæli fubter labentia figna

Quæ mare navigerum, quæ terras frugi ferentes, Concelebras, per te quoniam genus omne ani

mantum

Concipitur, vifitque exortum lumina folis, &c.

[ocr errors]

"

[ocr errors]

Si l'Antiquité dans fes ténèbres s'étoit bornée à reconnoître la Divinité dans ces images, auroit-on beaucoup de re» proches à lui faire? L'Ame productrice du Monde étoit adorée par les Sages; ,, elle gouvernoit les Mers fous le nom de » Neptune, les Airs fous l'emblême de Ju » non, les Campagnes fous celui de Pan. Elle étoit la Divinité des Armées fous le nom de Mars; on animoit tous ces ,, attributs: Jupiter étoit le feul Dieu. La Chaîne d'or avec laquelle il enlevoit les " Dieux inférieurs & les Hommes, étoit » une image frapante de l'amitié d'un Etre "Souverain. Le Peuple s'y trompoit, mais » que nous importe le Peuple?

"

"

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

On demande tous les jours pourquoi "les Magiftrats Grecs & Romains permet toient qu'on tournát en ridicule fur le » Théatre ces mêmes Divinités qu'on ado» roit dans le Temple. On fait-là une fu » pofition fauffe; on ne fe moquoit point » des Dieux fur le Théatre; mais des fot » tifes attribuées à ces Dieux, par ceux qui avoient corrompu l'ancienne Mythologie. Les Confuls Romains trouvoient , bon qu'on plaifantât, fur la Scène, de ,, l'avanture des deux Sofies; mais ils n'au"roient par fouffert qu'on eût attaqué de» vant le Peuple le culte de Jupiter & de » Mercure. C'est ainsi que mille chofes Ec 5 » qui

[ocr errors]

"

[ocr errors]
[ocr errors]

,, qui paroiffent contradictoires, ne le font ,, point. J'ai vu fur le Théatre d'une Nation très favante & fpirituelle, des avan tures tirées de la Légende Dorée; dira-ton pour cela que cette Nation permet » qu'on infulte aux objets de la Religion? Il n'eft pas à craindre qu'on devienne Payen pour avoir entendu à Paris l'Opéra de Proferpine, ou pour avoir vu à Rome les Noces de Pfiché peintes dans "7 le Vatican par Raphaël. La Fable forme le goût, & ne rend perfonne idolâ

"

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

tre.

رو

[ocr errors]

"

[ocr errors]

39

Les belles Fables de l'Antiquité ont ,, encore ce grand avantage fur l'Histoire, » qu'elles préfentent une Morale sensible; ce font des leçons de Vertu, & prefque toute l'Hiftoire eft le fuccès des Crimes. Jupiter, dans la Fable, defcend fur la Terre pour punir Tantale & Licaon; ,, mais dans l'Histoire, nos Tantales & nos Licaons font les Dieux de la Terre. Baucis & Philémom obtiennent que leur Cabane foit changée en un Temple: nos Baucis & nos Philémons voient vendre ,, par le Collecteur des Tailles les Marmites que les Dieux changent en Trépieds d'or dans Ovide.

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

"

[ocr errors]

De ces raifons & de quelques autres Mr. de Voltaire conclut qu'on trouve dans la Fable & l'utile & l'agréable; que ceux qui, dans ce monde, ne font ni l'un ni l'autre, crient contre elles; que nous devons lire Homère auffi bien que Tite-Live & de Rapin-Thoiras; que le Goût donne des préfé rences, & le Fanatifime les exclufions.

[ocr errors]

Tous les Arts font amis, ainfi qu'ils font divins.
Qui veut les féparer, eft loin de les connottre.
Hiftoire nous apprend ce que font les bumains,
La Fable ce qu'ils doivent être.

D. Quels font les principaux avantages Avantages qu'on peut retirer de la connoiffance de la que procuFable?

re la con

noiffance

Auteurs.

R. 1. L'un de ces avantages, c'eft de fa- de la Fab'e. ciliter l'intelligence des Auteurs foit Grecs, Elle facilifoit Latins, foit François même, dans la te l'intellecture desquels on eft fouvent arrêté tout ligence des court, fi l'on n'a quelque teinture de la Fa-1 ble. Je ne parle pas feulement des Poètes; dont elle eft comme le langage naturel: elle eft fouvent employée auffi par les Orateurs, auxquels elle fournit quelquefois par d'heureufes applications des traits fort vifs & fort éloquens.

connoître

ges de

2. Les Ouvrages de Peinture & de Sculp. Elle fait ture, tous ces Tableaux, ces Eftampes, les Ouvraces Tapifleries, ces Statues, qui contribuent à la magnificence des Palais des Rois, Peinture & autant par la beauté des sujets qu'ils éta- de Sculplent à nos yeux, que par les emblêmes in- ture. génieux qu'ils nous donnent à pénétrer, feroient la plupart du tems de véritables énigmes, fi on n'étoit pas verfé dans la Mythologie, Les Galeries, les Plat-fonds, les Bas-reliefs, les Monumens de toute efpece, dont les maifons des Grands Seigneurs font ordinairement remplies, repréfentent des fujets empruntés de la Fable: ils nous rappellent le fouvenir de ces anciennes fictions; ainfi c'est une néceffité & une fatisfaction d'en être inftruit.

3. Un troisième avantage de la Fable; Elle four
Ee 6
c'est nit des ins

« PreviousContinue »