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SUR CETTE NOUVELLE EDITION.

OICI une Edition des Oeuvres de Mr. DESPRÉ'Aux qui fera, fans doute, très-bien reçûë du Public, La plus exacte de toutes les Editions précédentes, c'est celle que publia à Geneve en 1716.' un célèbre Avocat de Lion, Ami de Mr. Defpréaux. Elle eft enrichie d'un ample Commentaire, qui contient outre les Remarques de l'Editeur, celles que Mr. Defpréaux avoit mises dans les dernieres Editions de fes Ouvrages; & plufieurs Eclairciffemens qu'il avoit communiquez à cet Ami, tant en Conversation, que par Lettres. On trouve auffi dans cette Edition quelques petites Pièces de Mr. Defpréaux qui n'avoient point vû le jour; & même quelques Ouvrages, où il n'a eu aucune part.

La nouvelle Edition que l'on donne ici in quarto & in folio, a tous les avantages de celle de Geneve: elle contient les mêmes Remarques & les mêmes Pièces : & elle la surpasse encore à bien des égards.

I. L'Impreffion en eft plus belle & plus correcte. Les Tailles-douces font deffinées & gravées par le fameux Picart. Il ne fe peut rien ajouter à la beauté de l'in folio. Les bordures; les ornemens des Figures; les Vignettes & les Culs-deLampes: tout eft digne de l'admiration des Connoiffeurs.

II. Cette Edition eft augmentée de plufieurs nouvelles Remarques, que l'Imprimeur a diftinguées des autres en les renfermant entre deux crochets, avec ces mots à la fin, Addition de l'Edition d'Amfterdam. En parcourant les Notes de l'Edition de Geneve on s'eft aperçu que le Commentateur n'avoit pas jugé à propos d'expliquer les endroits où Mr. Defpréaux défigne certains Dogmes de Morale, que Mr. Pascal

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1 Elle fut réïmprimée en 1717. à Amfterdam chez David Mortier, en 4 voll. in 12. & avec quelques Additions.

a reprochez aux Jéfuites dans fes Provinciales. On a même trouvé qu'il deguifoit quelquefois la pensée de notre Poëte, lorsqu'il s'agit de ce qu'on apelle le Fanfenifme. On l'a relevé fur ce dernier Article : & dans les autres endroits, on a éclairci & commenté les expreffions de Mr. Defpréaux, qui étoient auparavant inintelligibles à la plupart des Lecteurs. Ces Remarques font purement hiftoriques. On n'y épouse aucun parti: on se contente de fixer le véritable fens de Mr. Defpréaux, & de marquer les paffages citez par Mr. Pascal, qu'il avoit en vue. On a fait d'autres Remarques hiftoriques, qui servent à éclaircir divers endroits des Ouvrages de Mr. Defpréaux *.

On a aussi ajouté des Remarques critiques. Dans quelquesunes on releve Mr. Defpréaux: liberté que fon Commentateur ne s'est pas toujours refufée. Dans d'autres on critique le Commentateur: foit qu'il paroiffe avoir mal pris la pensée de Mr. Defpréaux foit qu'il ne raporte pas certains faits avec affez d'exactitude 7. On a quelquefois indiqué les fources d'où il a tiré les particularitez qu'il raporte. On eût pû y ajouter les Remarques fuivantes.

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Dans une des Notes fur la IV. Epitre', le Commentateur dit que les Hollandois avoient fait fraper une Medaille en 1668, dans laquelle ils prenoient les titres faftueux d'AR BITRES DES ROIs, de REFORMATEURS DE LA RELIGION de PROTECTEURS DES Loix, &c. Pour le prouver, il ajoute qu'au revers de cette Medaille on lit cette Infcription qui contient tous ces titres ambitieux: ASSERTIS LEGIBUS; EMENDATIS SACRIS; ADJUTIS, DEFENSIS, CONCILIATIS REGIBUS, &c. Mais il ne faut qu'avoir une connoiffance médiocre du Latin, pour voir que

2 Voyez les Remarques fur la Satire XI. vers 146. & Satire XII. vers 1. 328.

3 Satire XII. vers 269, 273, 250, 287, 289, 290, 291, 293, 294, 296, 298, 301, 312, 313, 314. 4

Satire XII. vers 148,268, 343. Art poë

ces

tique Chant III. vers 86, Chant IV. vers 36. Lutrin Chant IV. vers 188. Epigrammes XXXI. XLIX.

5 Sarire XII. vers 64, 150, 158. Epitre V.

vers 28.

6 Art poëtique Chant III. vers 91. Lettre:

ces expreffions veulent feulement dire que les Etats des Provinces-Unies avoient affuré leurs Loix; reformé les Abus de leur Religion; affifté, defendu & reconcilié des Rois, &c.

Dans la Lettre à Mr. Perrault fur la difpute touchant les Anciens & les Modernes, Mr. Defpréaux dit: Je pafferois condamnation fur la Satire quoi qu'il y ait des Satires de Regnier admirables. Son Commentateur fait là-dessus cette Remarque: Mr. Defpréaux ne parle point ici de fes Satires; ce filence a bien de la grandeur. Mais s'il avoit joint ici fes Satires à celles de Regnier, & en avoit fait lui-même l'éloge, n'auroit-on pas eu raifon de dire; il y a là bien de la petitesse!

Le Commentateur, dans une de fes Notes fur la premiere Reflexion fur Longin", remarque que Mr. d'Orbay mourut en 1689. Cependant Mr. Defpréaux, dans l'endroit même auquel cette Note fe raporte, parle de cet Architecte comme d'un homme plein de vie en 1693.

Dans une Remarque fur la Preface de la Traduction de Longin, le Commentateur de Mr. Defpréaux dit 1. que Ge-rard Langbaine a traduit en Latin le Traité du Sublime de Longin, avec des Notes fort eftimées:. 2. que cet Ouvrage fut imprimé à Oxford en 1638 : & 3. que Langbaine mourut en 1657. Mais 1. Langbaine n'a point traduit Longin: il a feu-lement fait réimprimer la Traduction de Gabriel de Petra.. 2. Les Notes de Langbaine fur. Longin n'ont pas été imprimées en 1638.. pour la premiere fois; comme il paroit que le Com-mentateur l'a crû, par la maniere dont il s'exprime. La pre-miere Edition est de 1636. 3. Langbaine ne mourut pas en: 1657: mais en 1658. Pour être exact, il falloit dire, que Langbaine mourut le 10. de Février 1658. fuivant notre manie-re de compter; & 1657. felon la maniere de compter établie

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quera en paffant que les Notes qui fe raportent à ces Réponses, & cinq ou fix autres placées ailleurs ", ne font pas de la même main que celles dont on vient de parler. On a auffi joint au Sonnet de Mr. de Nantes contre la Satire fur l'Equivoque, deux autres Pièces du même Auteur; & dans une Remarque on a fait l'histoire de ces trois Ouvrages. Le Commentateur n'a publié dans l'Edition de Geneve que la feconde Piece, qui eft contre Mr. Defpréaux: nous avons crû devoir l'accompagner de la premiere, qui contient fon éloge. C'est dans le même efprit d'équité & de desintéreffement qu'on a mis à la fuite des Remarques fur l'Epigramme LI. un Extrait de la Défenfe du Grand Corneille contre le Commentateur de Mr. Defpréaux, par Meffieurs les Journalistes de Trevoux.

Le Commentateur a divifé les Notes en trois parties. La premiere contient les Changemens que Mr. Despréaux a faits dans les differentes Editions de fes Ouvrages: la feconde les Remarques qui expliquent les faits dont la connoiffance eft néceffaire pour l'intelligence du Texte: & la troifième les Imitations, c'està-dire, les paffages que notre Poëte a imitez des Anciens. On trouvera ici la même divifion. Mais au lieu que dans l'Edition de Geneve, on a fait des Articles feparés de chacune de ces parties, & par là interrompu très-fouvent la fuite naturelle des Notes; on a placé dans celle-ci " chaque Note fuivant l'ordre & la fuite des Vers: mettant au commencement en groffe lettre les termes distinctifs de CHANGEMENT, ou d'IMITATION. Si cette distinction ne se trouve pas par tout où elle devroit être, c'est parce qu'on a suivi fcrupuleufement l'Edition de Geneve, où elle n'est pas toujours obfervée. Le Commentateur s'eft éloigné ici de fes propres regles. Son plan l'obligeoit à comprendre fous le Titre de CHANGEMENT, tous les Vers que Mr. Despréaux a retranchez dans les Editions pofterieures de fes Ouvrages: il les produit néanmoins très-fouvent fous le titre de REMARQUES 20

18 Satire III. vf. 107. Satire VII, vf. 40. Satire X, vf.428. &c.

19 On a obfervé la même chofe dans l'E

AVERTISSE

dition in 12. de 1717. citée ci-deffus.

20 Comparez Lutrin Chant II. vf.8.57 avec Chant IV.vf.105. & Satire I. vf.65.94.132.&c,

AVERTISSEMENT

DE L'EDITEUR

DE GENE V E.

N publiant un Commentaire fur les Oeuvres de Monfieur Boileau-Defpréaux, j'ai eu deffein de donner une édition du Texte, plus parfaite que toutes celles qui ont paru. Pour la rendre telle, j'ai raffemblé avec foin tout ce qui eft forti de la plume de cet illuftre Ecrivain. Je donne des Pièces entieres qui n'avoient pas encore vû le jour, je conferve les endroits qu'il avoit retranchez de quelques éditions: enfin, jufqu'aux moindres fragmens, tout fe trouve ici, revû plus exactement que jamais.

J'ajoûte des Eclairciffemens hiftoriques au Texte de l'Auteur; & je n'impofe point quand j'annonce dans mon titre, qu'ils m'ont été donnez par l'Auteur lui-même : car je n'avance prefque rien qui ne foit tiré, ou des converfations que j'ai euës avec lui, ou des Lettres qu'il m'a écrites. La haute idée que j'avois de fes Ouvrages, m'aïant fait souhaiter de le connoître, je ne trouvai en lui ni cette fauffe modestie, ni cette vaine oftentation, fi ordinaires aux perfonnes qui ont acquis une réputation éclatante: &, bien different de ces Auteurs renommés qui perdent à être vûs de près, il me parut encore plus grand dans fa Converfation que dans fes Ecrits.

Cette premiere entrevûë donna naiffance à un commerce intime qui a duré plus de douze années. La grande inégalité de fon âge & du mien, ne l'empêcha point de prendre confiance en moi: il m'ouvrit entierement fon cœur; & quand je donne ce Commentaire, je ne fais proprement que rendre au Public le dépôt que cet illuftre Ami m'avoit confié.

S'il eut la complaifance de m'apprendre toutes les particularitez de fes Ouvrages, je puis dire que de mon côté je ne négligeai rien de ce qui pouvoit me donner d'ailleurs une connoiffance exacte de certains faits, qu'il touche légerement, & dont il m'avouoit qu'il ne favoit pas trop bien le détail. Mes recherches ne lui déplaifoient pas; de forte qu'un jour, comme je lui rendois compte de mes découvertes: A l'air dont vous y allez, me dit-il, vous faurez mieux votre Boileau que moi-même.

Tom. I.

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