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tèle, et ainsi s'explique, sans en rendre responsable la contrefaçon, ce nuage de banalité qui s'étend sur l'industrie du monde et qui a frappé tous les yeux à l'Exposition de Londres.

L'organisation générale de l'enseignement du dessin, surtout l'extension de ces études dans la classe ouvrière, nous délivrera de ce fléau, et nous permettra de rendre à notre industrie une originalité vraie qui l'élèvera au-dessus des atteintes de la concurrence.

DE L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR DES ARTS DANS LES CARRIÈRES SPÉCIALES.

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Si je ne me trompe, nous avons marché régulièrement, progressivement. Nous avons désormais toute une génération artiste qui, depuis le simple ouvrier jusqu'au bachelier ès sciences et és lettres, jusqu'à l'élève de l'École polytechnique, s'avance dans la bonne voie, nous avons détruit les craintes qu'inspirait à quelques esprits une société composée uniquement de peintres et de sculpteurs. N'a-t-il pas été démontré qu'il surgirait de cette génération artiste une élite d'autant plus forte, d'autant plus puissante, qu'elle ne pourra se croire supérieure à la foule qu'en se signalant par des œuvres de premier ordre?

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En effet, voyez combien par cette suite d'enseignements progressifs, déduits d'un même principe, toutes les forces Vitales du pays sont sollicitées aucun germe de talent n'est étouffé, et, ce qui est capital, chaque vocation trouve par échelons successifs, et comme par couches superposées, la voie ouverte et l'avenir devant elle. Tel qui, dans le premier feu de son ardeur, aspire à la mission d'artiste voit peu à peu surgir le néant de ses prétentions; alors, sans découragement, sans humiliation, sans rien perdre de sa considération personnelle et de sa dignité, sans changer ses études, sans condamner les enseignements qu'il a reçus et les modèles qu'il a pris l'habitude d'admirer,bil s'arrête en chemin à l'une des belles étapes de cette noble carrière des arts. Dans notre langue actuelle, nous dirons qu'il s'abaisse au rang d'industriel; dans le langage de l'avenir, on dira simplement qu'il applique son talent

artiste à la céramique, à l'ébénisterie, aux tissus; et si ce talent est remarquable, il aura une large part dans la gloire distribuée par l'opinion publique et dans les distinctions honorifiques accordées par l'Etat.ha onog mother ser I sem'

Ces doux échelons de l'enseignement qui conduisent tout le monde à la fois au même but, mais qui portent, comme soutenu par des mains áilées, l'élève que signalent son aptitude naturelle ou ses instincts développés par la ténacité du travail aux sommités de l'art; ces échelons qui permettent à la grande nation d'adopter les plus dignes de ses enfants sans distinction d'origine ni de patrons, de les envoyer au milieu des spłendeurs de la villa Médicis vivre sans aucune préoccupation matérielle au sein de cette bonne société des vieux maîtres, au milieu de cette aristocratie du génie, d'où il reviendra avec une originalité fortifiée par l'expérience de tous les siècles, pour diriger à son tour l'enseignement de la génération suivante, soit en manifestant sa pensée dans toute sa splendeur sur les murs de la place publique, soit en exposant les résultats de son expérience du haut de la chaire des vastes amphithéâtres; ces doux échelons nous conduisent! nous-mêmes, dans cette étude théorique, à l'enseignement supérieur de l'art réclamé par l'élite de la jeunesse artiste. yo/04 1ifts al

Quel sera l'enseignement de cette élite? un enseignement supérieur et en même temps un enseignement pratique. Il n'est plus question des éléments de l'art; il s'agit du métier dans ses conditions les plus sérieuses, et des théories de l'art dans leur sphère la plus élevée. Ce que j'ai dit et proposé pour l'industrie, je le dis et je le propose pour l'art, car ce sont frère et sœur, de même origine et de même nature. L'artiste a autant besoin que l'apprenti de connaître son métier ́et de reporter dans l'atelier de son maître, pour le mettre en œuvré et en pratique, l'enseignement qu'il a reçu à l'école des beaux-arts. De là deux nécessités à ces débuts de la carrière artiste : l'apprentissage chez les maîtres ou enseignement pratique; l'étude en commun à l'école, ou enseignement supérieur. Examinons l'un et l'autrejme sub no zinalabayaa

Je ne veux pas revenir sur le tableau général des arts aux époques antérieures : j'ai montré comment se sont formés pendant vingt-cinq siècles, d'après des principes arrêtés, mais dans une heureuse confusion, l'artiste et l'industriel. Je ne ferai ressortir que deux ou trois particularités qui ont trait à l'enseignement. En Grèce, les élèves de Pamphile, au nombre desquels il faut compter Apelle, lui payaient dix talents, une grosse somme, pour travailler sous sa direction, et ils lui consacraient les dix, années les plus précieuses de leur vie avant de se produire eux-mêmes. Aux grandes époques du moyen àge et de la renaissance, mêmes sacrifices, même abnégation soumise et dévouée. Le XVII siècle organise l'enseigne ment académique, qui ne fait que compléter, en lui donnant plus d'unité, l'enseignement particulier dans les ateliers. Cette époque, grande encore, continue à voir régner l'autorité du maître et la soumission de l'élève.

Par quelle fatalité, par suite de quel enchaînement de fausses mesures, les meilleures ressources de l'enseignement ont-elles été enlevées à la jeunesse? Faut-il accuser les élèves, les maîtres ou l'administration? Nous n'accuserons personne; peut-être le temps, qui modifie les idées, les manières d'être et les habitudes, est-il le seul coupable. En fait, un désaccord profond s'est peu à peu établi entre les élèves et les maîtres. La révolution de 89, en bouleversant la hiérarchie de l'ancienne société, a produit une jeunesse nouvelle, qui se révolte contre toute idée de soumission, et ne veut entendre parler ni de lenteur dans la conquête de ses droits ni de progrès dans la jouissance de son indépendance; il lui faut tout et tout de suite. Ce qui fut général dans la jeunesse, dès les débuts de ce siècle, se produisit avec une véhémence particulière dans les ateliers et parmi les élèves: là on vit la soumission respectueuse faire place à l'arrogance discoureuse, le dévoûment filial à des prétentions de pair et de compagnon, la collaboration désintéressée aux empiétements les plus ridicules. Est-il donc étonnant que les maîtres, qui ne recevaient, en échange de leur peine et d'un temps précieux dérobé à leurs

travaux, qu'une rétribution dérisoire, et qui, loin de se créer des aides et des partisans, nourrissaient dans leur sein, des, émules dédaigneux et des traîtres jaloux, aient fermé, leurs ateliers? Personne n'oserait leur en faire un reproche, surtout après avoir été initié aux mauvais procédés dont ils ont été les victimes et qui ne saliront pas ces pages.

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De tant d'ateliers d'architectes, de sculpteurs et de peintres auxquels nous devons tout ce qu'il y a eu en France de bons dessinateurs, de peintres distingués, de sculpteurs de talent, il reste aujourd'hui, en tout et pour tout, celui de M. Labrouste pour les architectes, celui de M. Rude pour les sculp teurs, celui de M. Picot pour les peintres; trois hommes de talent qui, jusqu'au déclin de l'âge, persévèrent dans la voie traditionnelle des grandes époques et se consacrent1à l'éducation d'une centaine d'élèves: telles sont les ressources d'un enseignement sérieux pour l'école, pour Paris et pour la France. En dehors de ces trois ateliers; je ne mentionne pas les quelques élèves qui entrent chez les professeurs de l'Ecole des beaux-arts, avec l'espérance de profiter de leur protection pour obtenir le prix de Rome; ce sont en général de bons sujets, des imaginations calmes, des travailleurs décidés, mais il n'y a pas en eux le germe du génie et le feu tour, mentant du talent : celui-ci s'égare, voici où et comment. De vieux modèles se procurent un misérable local, et ils ouvrent des académies où, moyennant une faible rétribution, on des sine d'après le modèle vivant. Les jeunes gens vont travailler là, le soir, sans autre guide que leur admiration réciproque; puis ils s'associent et louent des ateliers où ils travaillent en commun, dans une fièvre d'ambition sans mesure, dans un parti pris d'opposition systématique aux règles les plus sainės de l'art, de dénigrement déclaré à tous les talents consacrés. Stimulés par la séve de leur jeunesse, encouragés par la chaleur de la liberté, soutenus par leurs dispositions naturelles, quelques hommes de talent vivace surgissent de temps à autre de ce chaos, originaux quand même, et frappant juste parfois, malgré la fausse direction des études et les profondes

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lacunes de l'éducation. Qu'en est-il résulté? Un motif de plus pour persévérer dans cette voie funeste; motif d'autant plus fort, que l'Administration, qui n'avait pas trouvé une récome pense ou seulement une marque d'estime à donner aux maîtres pour les encourager à persévérer dans leur enseignement, l'Administration, qui aurait dû condamner et proscrire par tous les moyens à sa disposition cette bohême délétère, ést venue s'associer à ce désordre en commandant à des jeunes gens dont elle ignorait l'origine, l'éducation, les principes, et sur la simple, inspection de quelques croquis séduisants, des tableaux religieux pour les églises, ou bien, en retour de faciles bambochades, des tableaux, d'histoire et des statues monumentales. Cela s'est appelé, je ne l'ignore pas, sortir des routines académiques; les critiques du temps ont approuvé, le public a applaudi ce n'en était pas moins créer un fâcheux précédent, et contribuer, en précipitant l'enseignement dans l'état pitoyable où nous le voyons, à produire toute une génération, qui n'apprend plus, qui sait.

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Où trouver le remède? comment l'appliquer? Si l'art étaittout d'inspiration, s'il suffisait pour bien peindre d'être doué de ces qualités brillantes qu'on résume dans le mot facilité,' nous aurions une foule de grands peintres, tandis que nous n'en comptons qu'un petit nombre dans la foule des jeunes gens qui donnaient de si grandes espérances. C'est que les plus belles dispositions naturelles exigent les plus fortes études, parce que concevoir et rendre sont deux procédés très diffé rents et presque antipathiques, en ce sens que l'imagination exubérante s'allie difficilement à un caractère tenace, l'idée prompte à l'étude patiente, la facilité à la persévérance. De là tant d'artistes incomplets, tant d'hommes inspirés qui ne sayent pas leur métier, tant d'artistes consommés dans lear art qui manquent d'imagination., tad nezjy omar sh, alan

Le fait de l'enseignement, le devoir de l'État est donc d'astreindre tous les élèves à une étude sérieuse, patiente, complète, de manière à tirer le meilleur parti possible des facultés naturelles; vienne, ensuite l'âge où l'artiste se sent créateur, et

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