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On ne doit célébrer qu'un objet si charmant
Dans tous les lieux ou règne son amant.

CHOEUR.

Que les forêts, que les monts applaudissent Au choix qu'a fait le dieu des monts et des forêts; Que les antres les plus secrets

Sans cesse retentissent

De Diane et de ses attraits;

Que tous les autres chants finissent:
On ne doit célébrer qu'un objet si charmant
Dans tous les lieux ou règne son amant.

(Danse des Faunes.)

DIANE à Pan.

A recevoir vos soins j'ai voulu me contraindre;
Peut-être en les fuyant j'aurais paru les craindre :
Quand on est trop sévère, on se croit en danger;
Je veux vous annoncer d'une âme plus tranquille,
Que votre amour est inutile,

Et qu'il faut vous en dégager.

(Elle sort.)

SCÈNE V I.

PAN, FAUNES ET SYLVAINS.

PAN.

AI-JE bien entendu ? C'est ainsi qu'on m'outrage;

O ciel! où me vois-je réduit?
J'avais pris de l'espoir, il est soudain détruit:
Ah! quelle honte! quelle rage!

CHOEUR DES FAUNES.

Guérissez-vous d'un feu si mal récompensé,
Des Faunes vos sujets l'honneur en est blessé :
On ne voit point entre eux paraître

De malheureux amans.

Ah! verra-t-on leur maître
Soupirer dans de longs tourmens?

PAN.

Soins qu'on a méprisés, vains efforts de mon zèle
Ne cessez point de vous offrir à moi ;

Vous n'avez pu toucher une âme trop cruelle,
Servez du moins à m'inspirer contre elle
Tout le courroux que je lui dois.

ACTE I V.

SCÈNE PREMIÈRE.

ISMÈNE.

SOMBRES forêts qui charmez la déesse,
Doux asile où coulent mes jours,

Plaisirs nouveaux qui vous offrez sans cesse,
Pourquoi ne pouvez-vous surmonter ma tristesse?
Ah! j'attendais de vous un plus puissant secours.
Qui peut me rendre encore incertaine, inquiète ?
J'aimais un insensible, et ce que j'ai quitté
Ne doit pas être regretté;

Cependant sans savoir ce que mon cœur regrette, Je le sens toujours agité.

Sombres forêts qui charmez la déesse,

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Doux asile où coulent mes jours, Plaisirs nouveaux qui vous offrez sans cesse Pourquoi ne pouvez-vous surmonter ma tristesse? Ah! j'attendais de vous un plus puissant secours. SCÈNE II.

DIANE, LICORIS, ISMÈNE.

DIANE.

ISMÈNE, parlez-moi sans feinte,

Endimion vous redemande à moi :
D'une tendre douleur j'ai vu son âme atteinte :
Ismène, parlez-moi sans feinte,
Voulez-vous renoncer à vivre sous ma loi?

ISMÈNE.

O ciel que ma surprise est grande! Quoi! cet ingrat... non, non, je ne le puis penser.

DIANE.

A son amour naissant, il veut que je vous rende; Répondez, je vous le commande,

A vivre sous ma loi voulez-vous renoncer?

IS MÈNE.

Vous savez qu'à jamais je m'y suis asservie,
Rien ne peut ébranler ma foi;

A suivre d'autres lois si l'amour me convie,

L'amour sans votre aveu ne peut plus rien sur moi.

DIANE.

J'entends ce que vous n'osez dire,
J'userai bien de mon empire:

Je verrai votre amant; allez, attendez-vous
A recevoir les ordres les plus doux.

AINSI

SCÈNE III.

DIANE, LICORIS.

LICORI S.

INSI vous permettez qu'Ismène soit contente; Votre cœur à jamais reprend sa liberté :

J'ai vu par son amour ce grand cœur agité;

Mais la gloire a vaincu, Diane est triomphante.

DIANE.

Cesse de présenter ce triomphe à mes yeux,
Il me coûte trop cher pour être glorieux.

DIANE ET LICORI S.

Qu'on est faible quand on aime!
Qu'il est difficile, hélas !

De vaincre un amour extrême !

Après la victoire même,

On rend encor des combats.

DIANE.

Je sais qu'Endimion ne me fait point d'outrage:
Cependant son amour m'irrite malgré moi;

Je ne prétends point à sa foi,
Et ne puis souffrir qu'il l'engage.
Je me reproche à tout moment
Cet aveugle caprice;
J'ai honte de mon injustice,
Et je m'en punis en formant

Des noeuds qui font tout mon tourment.

LICORIS.

C'est une peine affreuse

De rendre une rivale heureuse,

C'est un effort cruel pour un cœur amoureux.
Mais lorsque la gloire est contente,
Songez quelle douceur charmante
Doit goûter un cœur généreux.

DIANE.

Endimion dans ces lieux ya paraitre :

Mon dessein va s'exécuter;

Je vais.... mais quoi! je sens mon feu se révolter, Je sens ma faiblesse renaître ;

Par de nouveaux combats faut-il la surmonter ? Dans quel désordre je retombe!

Que je crains qu'à la fin ma raison ne succombe!
Cruel amour, es-tu content?

Seule je te bravais dans la troupe céleste;
Mais sur mon cœur enfin ton empire s'étend.
Tu vois ce cœur si fier, interdit et flottant;
Le peu de force qui me reste

Peut me quitter en un instant.
Suis-je pour toi, dans cet état funeste,
Un triomphe assez éclatant?

Cruel amour, es-tu content?

LICORIS.

Je vois Endimion, paraissez plus tranquille ;
Prononcez un aveu qui vous fait soupirer;
Plus cet effort est difficile,
Moins vous devez le différer.

SCÈNE IV.

DIANE, ENDIMION.

DIANE.

VENEZ, Endimion, tout vous est favorable;

J'accorde Ismène à vos désirs.

ENDIMION.

Ah! que mon sort est déplorable!

DIANE.

Que dites-vous? D'où naissent ces soupirs?

ENDIMION.

Jusques dans vos bontés le destin m'est contraire.. Que ne rejettiez-vous des voeux si mal conçus?

DIANE.

Quelle plainte osez-vous me faire ?
Quoi! c'est ainsi que mes dons sont reçus?
Que devient dès ce jour cette flamme nouvelle,
Qu'Ismène en vous fuyant a su vous inspirer?

ENDIMION.

Hélas! pouvez-vous ignorer
Que je suis sans amour pour elle?

Mon trouble, mes vœux incertains,
Ces soupirs échappés, mes bizarres desseins,

Tout ne vous dit-il pas qu'un autre amour m'enflamme, Que j'ai voulu l'arracher de mon âme,

Et que tous mes efforts sont vains?

DIANE.

Vous voulez sortir d'esclavage, Suivez votre projet avec plus de courage.

On ne surmonte pas d'abord

Le doux penchant qui nous entraîne ;
Ce n'est pas un premier effort
Qui brise une amoureuse chaîne.

ENDIMION.

Non, je veux conserver un malheureux amour;
Que vous importe-t-il que j'en perde le jour ?

DIANE.

Je veux dans tous les cœurs, autant qu'il m'est possible,
Établir la tranquillité.

Il n'est rien de plus doux pour une âme insensible,
Que de voir en tous lieux régner la liberté.

ENDIMIO N.

Pourquoi, déesse impitoyable,

A combattre mes feux voulez-vous m'engager?
Je sais que je ne suis qu'un mortel, qu'un berger :
Mais lorsque j'ose aimer un objet adorable,

Du moins je ne suis pas coupable

D'un téméraire aveu qui devrait l'outrager.
De mon crime secret la peine est assez grande;
J'étouffe mes soupirs et mes gémissemens.
Déesse, par pitié, laissez-moi mes tourmens;
C'est tout le prix que je demande.

DIANE.

Qu'entends-je ? quoi, berger....

ENDIMION.

Qu'ai-je dit? quel transport?

Ciel ai-je rompu le silence?

L'amour à mon respect a-t-il fait violence?
Ah! vos yeux irrités m'instruisent de mon sort:
J'y vois tout mon forfait et toute mon offense;
Mon feu s'est découvert, j'ai mérité la mort.

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