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CHEZ ARTHUS-BERTRAND, Libraire, rue Haute-
feuille, N° 23, acquéreur du fonds de M. Buisson
et de celui de Mme Ve Desaint.

1811.

SEINE

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DE L'IMPRIMERIE DE D. COLAS, rue du VieuxColombier, N° 26, faubourg Saint-Germain.

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N° DVII. - Samedi 5 Avril 1811.

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Légers oiseaux, venez ne craignez plus :
Les noirs frimas qui vous fesaient la guerre,
Loin de ces bords sont enfin disparus.

Dans le vallon ia rose vient d'éclore;
Ses doux parfums appellent le zéphyr;
L'onde murmure, et la naissante aurore,
En s'éveillant, vous invite au plaisir.

Ne tardez plus, cédez, troupe fidelle,
Cédez encore à de nouveaux désirs;
Chaque arbrisseau, chaque feuille nouvelle
Vous redira de touchans souvenirs.

Voici l'ormeau dont le mobile ombrage
Vous protégea durant vos premiers jours;
Ce marronier couvrit de son feuillage
Le doux secret de vos jeunes amours.
Enfans de l'air, que je vous porte envie !
Dans votre essor échappés au vautour,

Vous reverrez demain votre patrie,
Elle entendra votre chant de retour.

Et moi, traînant mes ennuis solitaires,
J'appelle en vain mes tranquilles vergers:
Pauvre exilé, loin du toit de mes pères,
Je vais pleurant sur des bords étrangers.

DELISLE SEJOURNÉ.

LE TROUBADOUR ET LA BERGÈRE.

ROMANCE.

TROUBADOUR de belle apparence
Cherchait aventure d'amour :
Dans les montagnes de Provence,
Par hasard il errait un jour;
En sortant de joli bocage,
Tout au bas d'un riche coteau,
Il voit assise sous l'ombrage
Fillette gardant un troupeau.

Désir que jeunesse fait naître
Brûle déjà le troubadour :
L'espoir vient, avant de connaître
L'objet de son nouvel amour.
Tant de beautés du haut parage

Ont loué sa témérité !

Doit-il craindre près d'un village

D'éprouver la sévérité ?

LE TROUBADOUR.

Dieu vous gard' jeune pastourelle....

Que faites seule en ce vallon?

LA BERGERE.

Je caresse la fleur nouvelle

Et la garantis du frelon.

LE TROUBADOUR.

Chantiez, me semble, une romance....
Et tant doux étaient vos accens!

LA BERGERE.

Si voulez que la recommence,
D'un peu loin écoutez mes chants.

AVRIL 1811.

LE TROUBADOUR.

Eh quoi! gentille pastourelle,

24 Craignez de me voir près de vous?

LA BERGÈRE.

Veux plaire à mon ami fidelle,
Dont le cœur est un peu jaloux.

LE TROUBADOUR.

Vous ignorez, fille innocente,
Qu'amour s'accroit par le tourment.
LA BERGERE.

L'amour de mon ami s'augmente
Quand lui donne contentement.

LE TROUBADOUR.

Me direz votre nom, la belle?
Faut qu'il se grave dans mon cœur.

LA BERGERE, en souriant,
Long-tems on me nomma cruelle,
Ne la suis plus pour mon bonheur.

LE TROUBADOUR.

Montrez un peu trop de finesse,
Bergère ; parlez sans détour.
LA BERGERE.

Pour bien-aimé n'ai que simplesse,
Pour les trompeurs ai plus d'un tour.

LE TROUBADOUR.

Voyez-vous dans cette aumonière
Bourse pleine de pièces d'or ?
LA BERGERE.

Mon ami n'a que la rivière
Et ses filets pour tout trésor ;
Mais à votre bel équipage,
A tous vos anneaux de rubis,
Préfère le bien d'être sage :
Jamais il ne baisse de prix.

Le Troubadour avec instance,
Priait Nice de l'écouter:
La pastourelle avec prudence
S'enfuit sans vouloir s'arrêter.
Amant léger, va, ta conquête,
Dit-elle, n'a rien de flatteur:
Point ne verras femme coquette
Quand amour vrai règue en son cœur.

Par Mme DE MONTANCLOS.

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