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Tout contrefacteur ou débitant de contrefaçons de cet Ouvrage sera poursuivi conformément aux lois.

Toutes mes Editions sont revêtues de ma griffe.

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Les questions traitées dans ce volume forment le texte d'un programme sur lequel les aspirants au baccalauréat doivent être interrogés. Ce programme a engagé l'enseignement secondaire dans une voie qu'on doit suivre; car quelques théories générales et des notions d'histoire littéraire s'ajoutent convenablement aux exercices qui sont la base et le fond des études classiques. L'expérience appelait cet utile complément. Depuis longtemps on remarquait avec surprise qu'au sortir des colléges, les élèves, même les plus distingués, ignoraient presque entièrement l'histoire des littératures dont ils avaient étudié les chefs-d'œuvre, et qu'ils soupçonnaient à peine qu'il y eût, au fond et au-dessus de l'enseignement de la rhétorique, de hautes questions qui sont déjà du domaine de la philosophie. Il convenait de ne pas laisser cette lacune, et c'est pour cela que le programme dont nous nous occupons nous a paru une amélioration réelle.

La principale difficulté que devait rencontrer cette innovation était dans la limite du temps réservé à l'étude des lettres. Le programme nouveau signale et remplit une lacune; mais cette lacune n'existait pas sans cause; et cette cause n'était ni dans l'indifférence des maîtres, ni dans la répugnance des élèves, puisque les matières qu'on traite aujourd'hui sont familières aux professeurs, et que, par leur nature, elles sont pleines d'attraits pour celui qui donne et pour ceux qui reçoivent l'instruction. On a donc, avec raison, réduit dans l'enseignement quelques branches secondaires qui tenaient trop de place. En effet, on ne gagne rien à étendre la surface des études; ce qu'il faut leur donner, c'est de la force et de la profondeur. Un esprit qui sait bien une seule chose a plus de vigueur, et, par conséquent, plus d'aptitude générale à bien savoir le reste, qu'une intelligence qui, disséminée, éparpillée sur un grand nombre d'objets, les a tous effleurés sans en saisir aucun d'une vive étreinte. La tendance à tout apprendre en même temps est une cause permanente d'affaiblissement pour les esprits. Or, le véritable but de l'instruction n'est pas de faire des intelligences

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un magasin public, un répertoire banal, mais un instrument énergique, capable de manier et d'améliorer le savoir qu'il possède. « Ce qu'il faut faire, dit Montaigne, ce n'est pas loger la science chez soi, il la faut épouser. >>

Je pense avoir fait une chose utile en remplissant le cadre qui m'était tracé. Je m'y trouvais comme engagé par la publication d'un premier ouvrage sur une matière qui m'était moins familière. Le succès de mon Cours de Philosophie m'avait paru d'un heureux augure, et les soins que j'ai donnés à ce nouveau travail, le plaisir que j'ai trouvé à recommencer et à compléter ainsi mes études classiques, me faisaient espérer que ce qui m'a été agréable et utile pourrait servir à nos élèves et ne pas déplaire à mes collègues. L'empressement avec lequel ce livre a été accueilli m'a prouvé que ces espérances n'étaient pas chimériques.

L'histoire littéraire, dans les limites où je devais me renfermer, présentait de grandes difficultés. En aspirant à être complet, on était certain d'être sec, obscur et fastidieux; en choisissant, on rencontrait un double écueil, admettre des noms et des ouvrages de peu d'importance, ou omettre ce qui serait réellement digne d'attention. Je me suis tenu en garde contre ces deux inconvénients, que je n'espère pas avoir toujours évités; je me flatte cependant qu'on trouvera, en général, dans ces sommaires historiques, des notions exactes et importantes. Le bien que j'en attends, c'est surtout d'inspirer, avec l'admiration des modèles, le désir de les étudier directement.

Nous avons, dans notre littérature, bon nombre d'ouvrages propres à former le goût et à éclairer l'intelligence des élèves; c'est là que, pendant leurs loisirs, s'ils en ont, ils doivent aller chercher une instruction solide et complète. L'histoire littéraire est devenue de nos jours une véritable science, pleine de charme et d'enseignement. Pour moi, je ne sais pas de lecture plus utile et plus attrayante que ces tableaux où le promoteur et le maître de la critique moderne montre l'enchaînement des faits dans la puissance des idées, et éclaire d'un jour nouveau les révolutions des empires, en les rattachant aux mouvements de la pensée, exprimés tantôt par les essais imparfaits, tantôt par les chefs-d'œuvre de la litté

rature.

On s'est efforcé, dans la composition de ce résumé, de ne pas s'exposer au reproche de plagiat et de compilation. Je ne pense pas que les écrivains que j'ai cités aient à se plaindre des emprunts que je leur ai faits, ayant usé, j'ose le dire, avec discrétion et reconnaissance des trésors qui m'étaient offerts. Quant aux idées qui sont du domaine public, je ne les ai jamais reproduites servilement. Comme je n'ai rien déguisé, on verra facilement la part qui peut me revenir dans ce travail. « Il ne faut pas, comme dit Montaigne, faire ce que j'ai découvert d'aucuns, se couvrir des armes d'autrui jusques à ne pas montrer seulement le bout de ses doigts. » Je n'avais pas besoin, pour respecter le droit des gens en matière littéraire, de me rappeler cette sévère sentence du même écrivain contre les déprédateurs qui se parent insolemment des dépouilles d'autrui : « A ceulx qui veulent cacher et faire propres les inventions anciennes rappiécées par cy par là, c'est premièrement injustice et lascheté, que, n'ayants rien en leur vaillant par où se produire, ils cherchent à se présenter par une valeur purement estrangière et puis, grande sottise, se contentants par piperie de s'acquérir l'ignorante approbation du vulgaire, se descrier envers les gens d'entendement, qui hochent du nez cette incrustation empruntée; desquels seuls la louange a du poids. »

La décision du conseil royal de l'instruction publique, qui a autorisé l'usage de ce livre dans les classes de rhétorique, n'est pas seulement une précieuse récompense des efforts de l'auteur, c'est aussi la solution d'une difficulté qui embarrassait la plupart des professeurs. Le texte de la circulaire annexée au nouveau programme du baccalauréat interdisait de traiter directement les questions de théorie et d'histoire littéraires qui forment la première et la troisième sections, et le but de cette défense était d'empêcher l'enseignement de la rhétorique de se confondre avec l'enseignement supérieur des facultés. Il importait d'éviter cet écueil. M. Dubois, membre du conseil royal, en proposant à ses collègues l'adoption de ce Cours de Littérature, a pensé que le texte même de l'ouvrage retiendrait dans des limites convenables l'heureuse innovation du programme, et le ministre de l'instruction publique, M. Villemain, en approuvant l'arrêté du conseil royal, a consacré cette opinion par un suffrage qui m'est doublement précieux. Ces encouragements m'imposaient le devoir d'améliorer la sub

stance de ce manuel, sans en changer ni l'esprit ni les proportions. C'est ce que j'ai essayé de faire par une révision scrupuleuse.

Avant de terminer, je dois acquitter quelques dettes de reconnaissance. Parmi les critiques qui ont bien voulu s'occuper de cet ouvrage, je ne puis m'empêcher de remercier particulièrement M. Jay, de l'Académie française. L'éloge qu'il a fait de cet essai a trop de valeur pour que je dissimule le plaisir que j'en ai ressenti. Je dois ajouter qu'un de mes plus chers amis, M. Lesieur, ancien élève de notre école normale, avait pris l'initiative avec une vivacité de bienveillance et un empressement d'autant plus méritoires, qu'il avait traité, avant moi, le même sujet. Au reste le mérite de son travail était comme un gage anticipé de la noblesse de son procédé. J'avais prié mes collègues de vouloir bien m'aider de leurs conseils. Cet appel n'est pas resté sans réponse, et parmi les auxiliaires désintéressés et habiles qu'il m'a amenés, je dois citer surtout M. L. Quicherat, dont les judicieuses remarques m'ont permis de réparer plusieurs inadvertances et quelques omissions.

On a dit, et cet éloge m'a singulièrement touché, parce que je n'avais pas d'autre ambition que de le mériter; on a dit que mon livre était tout ensemble un cours de littérature et un cours de morale : j'ose à peine croire qu'il en soit ainsi; mais, si je n'ai pas réussi au gré de mes désirs, je puis du moins affirmer que j'ai surtout voulu préparer mes jeunes lecteurs à la pratique du bien par le culte de la beauté littéraire.

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