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traite que remplissaient les exercices de la piété et la culture de la poésie. Ame tendre et contemplative, ce fut par dévouement qu'il accepta les fonctions laborieuses de l'épiscopat; il les remplit avec zèle, et il les quitta sans regret. Les monuments de ses prédications sont nombreux, et présentent des modèles aux orateurs chrétiens. L'onction habituelle de ses paroles n'exclut pas l'énergie, et, dans ses discours contre Julien l'Apostat, il a atteint la véhémence des Catilinaires et des Philippiques.

BASILE, né à Césarée en 329, mort en 379, condisciple et ami de Grégoire, fut le successeur d'Eusèbe au siége de Césarée, qu'il occupa pendant vingt ans. «Sa vie, dit M. Villemain, n'offre pas ces vicissitudes aventureuses qui attachent à l'histoire d'Athanase ou de Jérôme, mais elle impose par le spectacle d'une vertu constante et d'un beau génie. Saint Basile fut le véritable évêque de l'Évangile, le père du peuple, l'ami des malheureux, inflexible dans sa foi, mais infatigable dans sa charité. Pauvre lui-même de cette pauvreté qui devenait rare dans l'Église chrétienne, il n'avait qu'une seule tunique et ne vivait que de pain et de grossiers légumes; mais il employait des trésors à embellir Césarée. »

Citons encore: «Saint Basile et Grégoire de Naziance sont les premiers modèles de cette docte et pieuse éloquence consacrée à l'enseignement régulier du peuple. Dans leur bouche, la religion n'a plus cette ardeur où se consumait le zèle d'Athanase; elle n'est plus le glaive qui coupe et qui divise, mais le lien qui rapproche et unit doucement les ames. Moins occupée du dogme, elle s'applique surtout à la réforme des mœurs et à la consolation des affligés : souvent c'est le langage simple et tout moral des chaires protestantes, mais animé de cette grâce orientale et de ce jeune enthousiasme dont brillait le christianisme à sa naissance. >>

Le chef-d'œuvre de saint Basile est l'Hexameron, ou ouvrage des six jours, qui contient neuf homélies dans lesquelles

l'orateur chrétien célèbre et explique les merveilles de la création. Ses œuvres se composent d'homélies dogmatiques et morales, de panégyriques, d'écrits polémiques, de traités ascétiques et de lettres, véritable trésor pour l'histoire et la morale.

GRÉGOIRE de Nysse, frère puîné de Basile, courut la même carrière avec un éclat presque égal. Les mêmes études développèrent son génie; et, après avoir enseigné la rhétorique et pratiqué le barreau, il entra dans les ordres et devint, en 372, évêque de Nysse, siége qu'il occupa jusqu'à sa mort, en 396. Né vers 331, il mourut âgé de soixante-cinq ans environ. La pureté, la force et la magnificence de son style, le placent à un rang élevé parmi les orateurs chrétiens.

Le plus célèbre des Pères grecs, JEAN CHRYSOSTOME, n'a de rival dans l'éloquence chrétienne que saint Basile, qu'il surpasse au moins par sa fécondité. Chrysostome, né à Antioche vers l'an 344, fut formé à l'éloquence par Libanius, dont il conserva toujours l'amitié. Il passa par le barreau avant d'aborder la chaire chrétienne, dont il fut l'oracle pendant vingt ans à Antioche. Son éloquence se signala surtout pendant la révolte de cette cité, pour apaiser les passions du peuple, consoler ses misères et calmer les ressentiments de Théodose. Appelé plus tard au siége de Constantinople, il y déploya le même zèle et la même éloquence; mais les intrigues d'une cour corrompue parvinrent à le déposséder, et ce glorieux apôtre de la foi chrétienne mourut dans l'exil, abreuvé d'outrages. Cette vie de dévouement et d'éloquence. terminée par le martyre, est une des plus belles pages de l'histoire du christianisme, comme les discours de l'orateur sont les plus magnifiques monuments du génie chrétien. On a souvent comparé Chrysostome à Cicéron, et l'orateur romain n'a pas à se plaindre de la comparaison. La connaissance approfondie des œuvres de Chrysostome peut suffire à former un théologien consommé et un excellent orateur;

c'est par l'étude assidue des Basile et des Chrysostome que l'éloquence chrétienne peut refleurir et produire de nouveaux miracles 1.

Après ces maîtres de la parole chrétienne, dans un rang inférieur, mais élevé encore, il convient de nommer SYNÉsius, que nous avons déjà cité comme poëte; saint ASTÈRE, archevêque d'Amasie, dont nous possédons six homélies pleines de mouvement et d'éclat ; saint CYRILLE, patriarche de Constantinople; THÉODORET, évêque de Cyr, en Asie; saint NIL, ami de saint Chrysostome.

1. Les œuvres de saint Jean Chrysostome forment treize volumes divisés en vingt-six tomes, dans la belle édition que les frères Gaume ont récemment publiée.

HISTORIENS GRECS.

XXVII.

Des principaux historiens grecs.

Les premiers historiens de la Grèce furent les poètes épiques et cycliques, qui embellissaient dans leurs récits les traditions des âges précédents. Ils eurent pour successeurs les logographes, qui commencèrent à recueillir en prose les faits contemporains, et qui préparèrent, par leurs travaux, la naissance de la véritable histoire, qui enregistre et qui apprécie les faits.

Parmi les logographes, il faut nommer HÉCATÉE de Milet et HELLANICUS de Lesbos, dont on a conservé quelques fragments. Hérodote, au début de son histoire, mentionne Hécatée; et, quoiqu'il le combatte à plusieurs reprises, cette mention exclusive est, pour le chroniqueur, un signe d'estime et un titre d'honneur. Hécatée avait composé deux ouvrages importants, une Périégèse, ou tour du monde, travail exclusivement géographique, et, sous le titre de Généalogies, la suite des faits héroïques et historiques.

HÉRODOTE1, réunissant ce qu'Hécatée de Milet avait séparé, renfermant dans un cadre unique la géographie, la chronologie et le tableau des événements dont il indique les causes et dont il montre les acteurs, Hérodote a été proclamé à juste titre, le père de l'histoire. Ce grand homme, témoin de la lutte qui mit aux prises l'Orient et l'Occident, formé par de longs voyages en Asie, en Egypte, en Grèce et en

1. Né à Halicarnasse, en Carie, 484, avant J. C., mort, selon Suidas, Thurium, en Italie.

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Italie, passa la première moitié de sa vie à recueillir les matériaux de son histoire, et la seconde, à les élaborer. Les premiers essais de son histoire, soumis au jugement de la Grèce assemblée aux jeux Olympiques, si toutefois cette tradition n'est pas une fable, mais certainement au peuple d'Athènes, excitaient déjà l'admiration; ces suffrages ne furent pour lui qu'un encouragement à perfectionner son travail. Son œuvre, telle qu'elle nous est parvenue, est divisée en neuf livres, auxquels les Grecs ont donné le nom des neuf Muses. Les quatre premiers livres traitent de l'histoire en général et servent d'introduction aux cinq derniers, qui renferment le récit de la guerre d'Ionie et des guerres médiques, ces grandes expéditions dirigées successivement contre la Grèce par Darius et par Xerxès. « Dans Hérodote, a dit M. Guigniaut', on sent presque partout, non pas l'imitation, mais l'inspiration d'Homère même clarté, même simplicité, même abondance, un peu diffuse quelquefois, mais pleine de naturel et d'harmonie; même grâce naïve, même variété pittoresque dans les descriptions comme dans les narrations. Quoique le but de l'histoire soit encore et pardessus tout, chez Hérodote, de raconter et de peindre; quoiqu'il juge rarement et se livre peu aux réflexions générales, pourtant la vie intérieure des hommes qu'il met en scène, leurs motifs, les causes des événements, se révèlent par le mouvement même et la vérité du récit. Il y sème, dans ce dessein, des discours, plus souvent encore des dialogues; mais ces discours ne ressemblent point aux harangues étudiées de Thucydide; comme ses dialogues, ils sont la simple exposition des faits avec leurs principes et leurs conséquences; ils en contiennent la moralité et quelquefois la philosophie. Le mélange de tous ces éléments donne à la narration d'Hérodote un caractère à la fois épique et dramatique. Tout vit dans ses tableaux, tout y est en action, tout y reproduit la nature avec fidélité et énergie. Pour tout dire en un mot, 1. ENCYCL. déja citée, art. Hérodote.

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