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les Ligueurs, dissipa leur faction, conserva l'héritage de ses pères, et maintint ses vassaux dans l'obéissance de Henri IV. Ce prince la combla de louanges et de bienfaits.

Le règne de Henri IV ne pouvait manquer d'être glorieux pour les femmes. Ce monarque avait les mœurs d'un preux chevalier; il avait reçu de sa mère une éducation très-soignée ; de ses deux épouses, l'une fut savante; l'autre, amie des beaux-arts, gratifia Malherbe d'une pension de 500 écus, fit bâtir le palais du Luxembourg et chargea Rubens d'embellir

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une galerie de ce château.

Le cardinal de Richelieu, durant son ministère, érigea l'Académie Française, fonda l'lmprimerie Royale, établit le Jardin des Plantes, et prépara les merveilles du règne de Louis le Grand. Il dut son élévation à la marquise de Guercheville et à la maréchale d'Ancre qui la commencèrent, et à Marie de Médicis qui l'acheva, dirai-je pour sa gloire ou pour son malheur? J'écris : pour l'une et pour l'autre.

L'influence des femmes ne fut peut-être jamais plus sensible que sous le règne de Louis XIV. Ce prince les aima toute sa vie, et finit par épouser sa maîtresse. Pendant sa minorité, elles prirent une part très-active à la guerre

de la Fronde, dont elles se distribuèrent les principaux agens. Le duc de Beaufort échut à Madame de Montbazon, le duc de la Rochefoucault à Madame de Longueville, Nemours et Condé à Madame de Châtillon, le Coadjuteur à Mademoiselle de Chevreuse, le duc d'Orléans à Mademoiselle de Saujon, et le duc de Bouillon à la duchesse son épouse. Ces Dames joignirent à leur parure les écharpes qui distinguaient leur parti. Les Parisiens sortaient en campagne ornés de plumės, de devises et de rubans; les troupes du Coadjuteur s'appelaient le régiment de Corinthe, et la cabale du prince de Condé portait le nom de cabale des Petits-Maîtres : On se croit retourné au tems de la chevalerie. La reine-mère mit fin à cette guerre ridicule. en renvoyant le cardinal Mazarin. Les femmes abandonnèrent les factions pour ne s'occuper que de littérature et de galanterie. Henriette d'Angleterre, élevée à la cour de France, y introduisit une politesse et des grâces inconnues au reste de l'Europe; la cour, dit Racine, la regardait comme l'arbitre de tout ce qui se faisait d'agréable. C'est de cette princesse que Louis XIV apprit à mettre de la dignité. dans ses plaisirs, et à couvrir même la volupté du voile de la décence. Le nom d'Henriette d'Angleterre

d'Angleterre doit être mis dans la liste brillante des protectrices des gens de lettres; elle s'empressa de réparer l'oubli du monarque dont les bienfaits allèrent étonner les savans du nord, et qui négligea La Fontaine. Plusieurs autres femmes réclament la gloire d'avoir été les bienfaitrices ́du poëte qui place au Tartare ›

Ceux dont les vers ont noirci quelque belle.

Je vous nommerai la duchesse de Bouillon, et sur-tout Madame La Sablière, dont le nom est devenu inséparable de celui de La Fontaine. Il n'est point d'homme de génie, dans ce siècle, qui n'ait eu sa providence : Quinault la trouva dans Mesdames de Thiange et de Montespan, Lulli dans Mademoiselle de Montpensier, Racine et Boileau dans Madame de Maintenon. L'hôtel de Rambouillet, celui de Madame la duchesse du Maine, la maison de Mademoiselle Ninon de Lenclos peuvent être désignés sous le nom de Volières des Muses et des Grâces.r

On ne peut guères parler du siècle de Louis XIV, sans dire un mot du mérite des ouvrages des femmes de lettres qui l'ont illustré. Vous serez charmée de l'esprit et de la fécondité de Mademoiselle de Scudéry, du style et du

la plus hideuse de l'hydre de la terreur L'ouvrage commencé par une femme, une autre femme l'acheva: Madame Cabarus fut en partie la cause de l'évènement connu sous le nom de neuf thermidor. La postérité confirmera sans doute le jugement que nos contemporains ont porté sur le mérite littéraire des Dames Genlis, Staël, Flahaut, St-Léon, Cotin, Keralio-Robert, Beauharnais, Pipelet, Viot, Laférandière, Joliveau, etc.

Tel est, chère Elise, tel est à-peu-près l'aperçu que vous m'aviez demandë. Si mon esquisse est fidelle, vous devez y voir que, jusqu'à présent, les siècles où les femmes ont eu le plus d'empire, sont presque toujours ceux qui ont jeté le plus d'éclat.

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HISTORIQUE,

BIBLIOGRAPHIQUE ET LITTÉRAIRE

DES FRANÇAISES ET DES ÉTRANGÈRES

NATURALISÉES EN FRANCE,

Connues par leurs écrits, ou par la protection qu'elles ont accordée aux Gens de Lettres.

A.

AGNÈS DE POITIERS, fille de Guillaume V, duc d'Aquitaine et comte de Poitiers, surnommé le Grand, et d'Agnès de Bourgogne, vit le jour en 1025. Elle épousa l'empereur Henri III, dit le Noir, fils de Conrad le Salique. Henri IV, le Vieil et le Grand, et Conrad, duc de Bavière, furent ses fils. Elle hérita des talens, du courage et de la sagesse de Guillaume V. Ses eminentes qualités lui donnent le premier rang parmi les femmes célèbres de son siècle. Après la mort de son époux, arrivée l'an 1056, elle prit pendant la minorité de son fils les rênes de l'état. Elle égala dans son gouvernement la sagesse de Théodora,

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