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de paix, par où finiffait cette cérémonie, fe donnât entre les perfonnes de fexe différent. (r) Mais divers autres abus dont se plaignait déjà St Paul, (s) & que le concile de Gangres, l'an 324, entreprit en vain de réformer, firent enfin abolir les agapes l'an 397, par le troifième concile de Carthage dont le canon quarante-unième ordonna de célébrer les faints myftères à jeun.

On ne doutera point que la danfe n'accompagnât ces feftins, fi l'on fait attention que fuivant Scaliger, les évêques ne furent nommés præfules dans l'Eglife latine, à præfiliendo, que parce qu'ils commençaient la danfe. Le picpus Héliot, dans fon hiftoire des ordres monastiques, dit auffi que pendant les perfécutions qui troublaient la paix des premiers chrétiens, il fe forma des congrégations d'hommes & de femmes, qui, à l'exemple des thérapeutes, fe retirèrent dans les déferts; là ils fe raffemblaient dans les hameaux les dimanches & les fêtes, & ils y dansaient pieusement en chantant les prières de l'Eglife.

En Portugal, en Espagne, dans le Rouffillon, l'on exécute encore aujourd'hui des danfes folemnelles en l'honneur des mystères du chriftianifme. Toutes les veilles des fêtes de la Vierge, les jeunes filles s'affemblent devant la porte des églifes qui lui font dédiées, & paffent la nuit à danser en rond, & à chanter des hymnes & des cantiques en fon honneur. Le cardinal Ximenes rétablit de fon temps dans la cathédrale de Tolède l'ancien ufage des messes mosarabes pendant lefquelles on danfe dans le choeur &

(r) Thomaffin, difcip. de l'Eglife, part. III, chap. XLVII, n. 1. (s) Corinth. chap. II.

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dans la nef avec autant d'ordre que de dévotion. En France même on voyait encore vers le milieu du dernier fiècle les prêtres & tout le peuple de Limoges danfer en rond dans la collégiale en chantant: Sant Marcian, pregas per nous & nous epingaren per bous ; c'eft-à-dire, St Martial, priez pour nous, & nous danferons pour vous.

Enfin le jéfuite Meneftrier, dans la préface de fon Traité des ballets publié en 1682, dit qu'il avait vu encore les chanoines de quelques églifes, qui le jour de pâques prenaient par la main les enfans de chœur, & dansaient dans le chœur en chantant des hymnes de réjouiffance. Ce que nous avons dit à l'article Kalendes des danfes extravagantes de la fête des fous, nous découvre une partie des abus qui ont fait retrancher la danfe des cérémonies de la messe, lefquelles plus elles ont de gravité, plus elles font propres à en imposer aux fimples.

СЕТ

M ESSI E.

AVERTISSEMENT.

GET article eft de M. Polier de Bottens d'une ancienne famille de France, établie depuis deux cents ans en Suiffe. Il eft premier pafleur de Laufanne. Sa fcience eft égale à Ja piété. Il compofa cet article pour le grand dictionnaire encyclopédique, dans lequel il fut inféré. On en fupprima feulement quelques endroits, dont les examinateurs crurent que des catholiques moins favans & moins pieux que l'auteur pourraient abuser. Il fut reçu avec l'applaudissement de tous les fages.

On l'imprima en même temps dans un autre petit dictionnaire, & on l'attribua en France à un homme qu'on n'était pas fâché d'inquiéter. On fuppofa que l'article était impie, parce qu'on le fuppofait d'un laïque, & on fe déchaîna contre l'ouvrage & contre l'auteur prétendu. L'homme accufe fe contenta de rire de cette méprife. Il voyait avec compaffion fous fes yeux cet exemple des erreurs & des injuf tices que les hommes commettent tous les jours dans leurs jugemens, car il avait le manufcrit du fage & favant prêtre, écrit tout entier de fa main. Il le poffède encore. Il fera montré à qui voudra l'examiner. Ony verra jufqu'aux ratures faites alors par ce laïque même, pour prévenir les interprétations malignes.

Nous réimprimons donc aujourd'hui cet article dans toute l'intégrité de l'original. Nous en avons retranché pour ne pas répéter ce que nous avons imprimé ailleurs ; mais nous n'avons pas ajouté un feul mot.

Le bon de toute cette affaire, c'est qu'un confrère de l'auteur refpectable écrivit les chofes du monde les plus ridicules contre cet article de fon confrère, croyant écrire contre un ennemi commun. Cela ressemble à ces combats de nuit, dans lefquels on fe bat contre fes camarades.

Il est arrivé mille fois que des controverfifles ont condamné des paffages de St Auguftin, de St Jérôme, ne fachant pas qu'ils fuffent de ces pères. Ils anathématiferaient une partie du nouveau Teftament s'ils n'avaient pas ouï dire de qui eft ce livre. C'est ainsi qu'on juge trop fouvent.

MESSIE,

ESSIE, Meffias, ce terme vient de l'hébreu ; il est fynonyme au mot grec Chrift. L'un & l'autre font des termes confacrés dans la religion, & qui ne fe

donnent plus aujourd'hui qu'à l'oint par excellence, ce fouverain libérateur que l'ancien peuple juif attendait, après la venue duquel il foupire encore, & que les chrétiens trouvent dans la perfonne de JESUS fils de Marie, qu'ils regardent comme l'oint du Seigneur, le meffie promis à l'humanité : les Grecs emploient auffi le mot d'Elcimmeros qui fignifie la même chose que Chriftos.

Nous voyons dans l'ancien Teftament que le mot de Meffie, loin d'être particulier au libérateur après la venue duquel le peuple d'Ifraël foupirait, ne l'était pas feulement aux vrais & fidelles ferviteurs de DIEU, mais que ce nom fut fouvent donné aux rois & aux princes idolâtres, qui étaient dans la main de l'Eternel les miniftres de fes vengeances, ou des inftrumens pour l'exécution des confeils de fa fageffe. C'est ainsi que l'auteur de l'Eccléfiaftique dit d'Elifee, (a) qui ungis reges ad pœnitentiam, ou comme l'ont rendu les Septante, ad vindiclam. Vous oignez les rois pour exercer la vengeance du Seigneur. C'eft pourquoi il envoya un prophète pour oindre Jéhu roi d'Ifraël. Il annonça l'onction facrée à Hazaël roi de Damas & de Syrie, (b) ces deux princes étant les Messies du Très-Haut pour venger les crimes & les abominations de la maifon d'Achab.

Mais au XLVe d'Efaïe, v. 1, le nom de Messie eft expreffément donné à Cyrus. Ainfi a dit l'Eternel à Cyrus fon oint, fon meffie, duquel j'ai pris la main droite afin que je terraffe les nations devant lui &c.

Ezechiel, au XXVIIIe de fes révélations, v. 14, (a) Eccléfiaft. chap. XLVIII, v. 8.

(b) IV. des Rois, chap. XVIII, v. 12, 13 & 14.

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donne le nom de Meffie au re' de Tyr, qu'il appelle auffi chérubin, & parle de' & de fa gloire dans des termes pleins d'une emphase, dont on fent mieux les beautés qu'on ne peut en faifir le fens. Fils de , l'homme, dit l'Eternel au prophète, prononce à ,, haute voix une complainte fur le roi de Tyr, & lui , dis: Ainfi a dit le Seigneur l'Eternel, tu étais le ,, fceau de la reffemblance de DIEU, plein de fageffe ,, & parfait en beautés; tu as été le jardin d'Eden › du Seigneur, (ou suivant d'autres versions) tu étais " toutes les délices du Seigneur; ta couverture était ,, de pierres précieuses de toutes fortes, de fardoine, , de topaze, de jafpe, de chryfolite, d'onyx, de beril, ", de faphir, d'efcarboucle, d'émeraude & d'or. Ce ,, que favaient faire tes tambours & tes flûtes a été › chez toi; il ont été tout prêts au jour que tu fus " créé, tu as été un chérubin, un meffie pour fervir " de protection; je t'avais établi; tu as été dans la , fainte montagne de DIEU, tu as marché entre les ,, pierres flamboyantes, tu as été parfait en tes voies, ,, dès le jour que tu fus créé, jusqu'à ce que la perverfité a été trouvée en toi. "

Au refte, le nom de Meffiah, en grec Chrift, fe donnait aux rois, aux prophètes, & aux grands-prêtres des Hébreux. Nous lifons dans le Ier des Rois, ch. XII, v. 3: Le Seigneur & fon Meffie font témoins, c'eft-à-dire, le feigneur & le roi qu'il a établi. Et ailleurs : Ne touchez point mes oints, & ne faites aucun mal à mes prophètes. David, animé de l'efprit de DIEU, donne dans plus d'un endroit à Saul fon beau-père qui le perfécutait, & qu'il n'avait pas fujet d'aimer; il donne, dis-je, à ce roi réprouvé, & de deffus lequel l'efprit de l'Eternel

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