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aux exploits de tant de mauvais sujets et de méchants citoyens,

Il est à présumer que quand ils se mirent en route pour les environs de Paris, avant que d'aller mitrailler les Lyonnais, ils reçurent des ordres particuliers de Chaumette ou de tel autre révolutionnaire de sa trempe, de ne laisser subsister sur leur passage aucun vestige des signes qui pourroient rappeler le catholicisme. Ce qu'il y a de certain, c'est qu'ils s'acquittèrent merveilleusement des missions qu'ils avoient reçues à cet égard.

Dans tous les villages, bourgs et petites villes où ils passèrent, ils commencèrent par visiter les églises, pour en arracher, y lacérer, briser les effigies des saints; y insulter de la manière la plus grossière aux objets de la vénération du peuple, dont une partie n'étoit point encore détrompée. Ils brisoient toutes les croix qui se trouvoient sur leurs routes, ils insultoient aux cendres des morts, pour faire disparoître de dessus feurs tombes des inscriptions ou des signes religieux qui leur déplaisoient ; mais c'étoit particulièrement dans les

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petites villes qu'ils mettoient toute leur valeur à opérer ces prodiges, parce que dans les communes populeuses, ils craignoient que la majorité des habitans ne se tournât contre eux, dans le cas où leurs excès viendroient à l'indisposer. Les girouettes les fleurs-de- lys, ou autres signes féodaux qui se trouvoient encore sur quelques maisons ou sur la flêche d'un clocher, étoient pour ces braves un grand sujet de scandale, et nous les avons vus dans la petite commune de Villeneuve sur Yonne, braquer toute leur artillerie contre une seule fleur-de-lys qui restoi: au sommet d'un clocher, tandis qu'à Auxerre, ville beaucoup plus populeuse, où il subsistoit encore beaucoup de ces signes sur les croix des églises, ils n'osèrent pas brûler une amorce, parce que le représentant du peuple Maure qui s'y trouvoit alors en mission, menaça de faire fusiller le premier coquin de l'armée révolutionnaire qui oseroit sourciller.

La disparution, l'enlèvement des croix, dont toutes nos voies publiques étoient encombrées, n'étoit point en soi une chose

déplacée. La piété de quelques hommes religieux, mais bien plus le fanatisme des prêtres et leur esprit de domination avoient multiplié ces signes religieux ; il étoit bon de les reléguer dans les temples, mais il falloit le faire avec décence, ce n'est pas en outrageant d'une manière baibare ce qui est l'objet de la vénération du vulgaire, qu'on lui persuade qu'il avoit tort de vénérer cet objet; au contraire on le soulève, on l'aigrit, ou si l'on ne produit pas, en lui ce sentiment, on lui en fait naître un plus dangereux, celui de l'incrédulité.

Si, à cette époque, la totalité du peuple ne devint pas incrédule ou athée, assurément ce ne fut pas la faute des Hébert, des Chaumetre, des Anacharsis Clootz, des Dupont et de tant d'autres énergumènes qui, soit dans les clubs, soit à la convention, soit dans les séances de la commune, firent tout ce qui étoit en eux pour anéantir l'amour de la divinité. On eût dit que ces Aristarques de nouvelle fabrique, nés pour le malheur de l'humanité, n'avoient puisé leur philosophie que dans les ouvrages des Freret, des Boulanger, des

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Lamettrie, des Mirabeau, matérialistes trop fameux, qu'il étoit réservé à notre siècle d'engendrer, pour combler la mesure de nos désastres,

Voici comme s'exprimoit, dans le sein même de la représentation nationale, l'athée Anacharsis Clootz qui se berçoir de l'idée de fonder une république universelle, et de l'espoir de rendre libre tout le genre humain. « Je dois à mes voyages conti nuels, à mon cosmopolisme indépendant d'avoir échappé à la vengeance des tyrans sacrés et profanes. J'étois à Rome quand on vouloit m'incarcérer à Paris : j'étois à Londres quand on vouloit me brûler à Lisbonne; c'est en faisant la navette d'un bout de l'Europe à l'autre que j'ai échappé aux sbirres, aux alguazils, à tous les maîtres et à tous les valets; et moi aussi j'ai émigré, j'ai eu l'ingratitude d'abandonner mon pays natal, pour ne songer qu'à la république universelle, si toutefois c'est ou blier son pays natal que de propager les lumières dans le chef lieu du globe. (Clootz ércit Prussien et parloit alors dans Paris) Quoi qu'il en soit, mes émigrations

cessèrent quand l'émigration des scélérats commença; Paris régénéré étoit le port de l'orateur du genre humain et je ne l'ai pas quitté depuis 1789. C'est alors que je redoublois de zèle contre les prétendus souve rains de la terre et du ciel: je prêchois haurement qu'il n'y avoit pas d'autre Dieu = que la nature, d'autre souverain que le = genre humain, que le peuple Dieu. Le

peuple se suffit à lui même, il est toujours debout, la nature ne s'agenouille point »,

Après avoir continué quelque tems sur ce ton emphatique, et prêché le matérialisme dans des phrases inintelligibles, Clootz fit hommage à la convention d'un ouvrage rédigé dans les principes qu'il venoit de poser: il étoit intitulé; Certitude des preuves du Mahométisme, et la convention rendit le décret suivant ; « Anacharsis Clootz, député à la convention, ayant fait hommage d'un de ses ouvrages intitulé: Certitude des preuves du Mahométisme, ouvrage qui constate la nullité de toutes les religions, l'assemblée accepte cet hommage, en ordonne la mention ho

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