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moment présent, qui étoit tour pour eux. Il leur falloit des sicaires en sous - ordre, des Seïdes impies, ils en forgèrent; car du moment qu'ils eurent dévasté, dilapidé les églises, et qu'ils eurent transformé ces édifices en temples de la raison, dans ces temples de la raison, on n'osa plus proférer le nom de l'Être suprême, jusqu'au

moment où l'ame froidement scélérate du cannibale Robespierre, compta assez sur Ja stupidité des Français, pour se permettr● de décréter et de faire proclamer qu'il y avoit un Dieu.

Rien n'égale la fureur ni l'indécence avec laquelle on spolia les temples: ceux qui se portèrent plus particulièrement à ces excès, furent les individus enrégimentés dans un espèce de corps, nommé armée* révolutionnaire. Cette armée révolutionnaire, de l'invention du procureur de la commune, Chaumette, et entièrement composée de brigands et de coupe jarrets, n'étoit pas sans objet. D'abord, comme on manquoit ou qu'on feignoit de manquer de subsistance dans Paris, ces nouveaux militaires, indignes de porter ce nom,

furent destinés à protéger l'arrivage des subsistances, c'est-à-dire, destinés à piller le grain de ceux qui en avoient, En second lieu, comme ces prétendus soldats étoient aussi audacieux pour le crime que diffamés, les puissances du jour n'étoient point fâchées de trouver un moyen d'occuper et de salarier des êtres qui, non-moins versatiles que dangereux, pouvoient d'un moment à l'autre tourner leurs efforts contre elles; en troisième lieu, ces bataillons de nouvelle fabrique, qui n'avoient guère de courage que pour égorger comme on le verra par la suite, ou pour marcher au pas de charge contre des gens sans armes, étoient excellens pour intimider les citoyens paisibles et sans fortune qui mur"muroient hautement, (et l'on n'étoit pas accoutumé à entendre murmurer) de ce qu'une loi leur enlevoit leurs enfans, depuis l'âge de dix-huit ans jusqu'à vingt cinq.

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Cette loi qui plaçoit aux frontières, c'est-à-dire sous le feu du canon • toute une génération, avoit deux objets ; le premier d'opposer une résistance formidable

aux puissances de l'Europe que nous avions à combattre, le second d'empêcher que cette brillante jeunesse, soulevée contre les horreurs projetées, ne s'opposât au règne de sang qui alloit dévaster la Fiance. L'armée révolutionnaire étoit en soi une invention merveilleuse pour les Jacobins, qui avoient le timon du gouvernement; car il est bon de rappeler que les chefs des comités de salut public et de sûreté générale étoient Jacobins, et que ces comités se faisoient qualifier de comités de gouvernement; et effectivement, à dater du régime révolutionnaire, tous les rouages premiers de la machine politique résidèrent dans les comités de gouvernement, et en définitif dans le seul comité de salut public.

Nous avons dit que les murmures qu'occa sionnoit la réquisition des jeunes gens depuis dix-huit jusqu'à vingt-cinq ans, avoit effrayé la commune, qui depuis longtems étoit en possession de dicter des ordres absolus le premier acte de résistance aux ordres d'un tyran est pour lui un coup de foudre; il craint de se voir arras

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cher le sceptre sanglant dont il frappe ses esclaves; la commune trembla, et donnant le change sur les véritables motifs de sa frayeur, elle vint demander des mesures extraordinaires à la convention, dont les meneurs, pour renchérir sur elle, attendoient qu'elle se présenta. La commune qui, au moment où nous parlons, se croyoit encore toute puissante, ne l'étoit plus que pour faire le mal, ne l'étoit plus que pour commettre des crimes qui cadroient avec les plans des coriphées du comité de salut public et de la montagne ; mais dès-lors, si la commune eût voulu former quelque dessein qui eût été opposé aux projets des comités de gouvernement, elle étoit perdue.

De son côté la commune pressentoir déjà qu'elle n'avoit de force qu'autant que ses actions, que les actes émanés de son sein étoient d'accord avec les vues des comités de gouvernement; aussi dans la démarche qu'elle alloit faire près de la convention pour obtenir une armée révolutionnaire elle étoit sûre d'être fortement appuyée. Chaumette et le maire Pache se rendirent

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donc à la barre, où, après avoir parlé contre les égoïstes, les acapareurs, les modérés, (on appeloit ainsi ceux qui ne vouloient pas de sang) les affameurs du peuple et les royalistes, Chaumette fit entendre ces épouvantables paroles: « Montagne à jamais célèbre dans les pages de l'histoire, soyez le Sinaï des Français ; lancez au milieu des foudres les décrets éternels de la justice et de la volonté du peuple. Inébranlable au milieu des orages amoncelés de l'aristocratie, agitezvous et tressaillez à la voix du peuple. Assez long-tems le feu concentré de l'amour du bien public a bouillonné dans vos flancs; qu'il fasse une irruption violente. Montagne sainte, devenez un volcan dont les laves brûlantes détruisent à jamais l'espoir du méchant, et calcinent les cœurs où se trouve encore l'idée de la royauté. Plus de quartier, plus de miséricorde aux traîtres. Si nous ne les devançons pas, il nous devanceront: jetons entr'eux et nous la barrière de l'éternité ».

A ce cri de destruction, l'ange exterminateur paroît, l'armée révolutionnaire est

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