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nées des 31 mai et 2 juin. Depuis longtems, dans la société des Jacobins, les V Renaudin, Brichet, Hébert et autres demandoient leur mort; mais pour la leur donner impunément, il falloit attendre que les troubles excités par leur proscription dans les départemens, fus ent appaisés, ou du moins fussent calmés au point qu'on n'eûr plus rien à en redouter. Tant qu'il y eur du danger pour les chefs des Jacobins, ils gardèrent les Girondins qui ne leur étoient point échappés, en otage. Mais Lyon soumis, les rassemblemens du Calvados anéan tis, Marseille rentré dans le devoir, Bordeaux sans force agissante, il n'y eut plus de danger, et Amar, membre du comité de sûreté-générale, Robespierre et Biliaud de Varennes, membres du comité de salut public, pressèrent à la convention le dénouement de cette scène tragique.

Dans la séance cu Amar lut son rapport contre les Girondins, il exigea en montant à la tribune, que, par un décret, la convention se consignât elle-même aux portes du lieu de ses séances et qu'aucun des spectareurs répandus dans les galeries publiques,

n'eût la faculté d'en sortir avant la décision qui alloit être prononcée. Cette mesure avoit pour but d'empêcher que plusieurs députés Girondins qui n'étoient point encore compris dans cette proscription et qui alloient y être enveloppés, ne pussent s'évader au moment où ils entendroient prononcer leurs noms. En effet, plusieurs de ces derniers, qui ne s'attendoient pas à ce coup d'autorité, voulurent élever la voix quand ils se virent signalés, mais leurs objections furent vaines, on leur répondit qu'ils feroient entendre leurs réclamations devant le tribunal révolutionnaire; et l'on décréta d'accusation, comme prévenus de conspiration contre l'unité et l'indivisibilité de la république, les députés ci-après nommés, savoir: Brissot, Vergniaud, Gensonné, Duperret, Carra, Sillery, Condorcet, Fauchet, Doulcet de Pontécoulant; Ducos, Boyer-Fonfiède, Gamon, Mollevaur, Gardien, Dufriche-Va lazé, Vallée, Duprat, Mainvielle, Delahaye, Bonnet, Lacase, Mazuyer, Savary, Lehardy, Boileau, Rouyer, Antiboul, Lasource, Lesterpt-Beauvais, Isnard,

Duchatel, Duval, Devérité, Bresson, Noël, Coustard, Andrey, Grangeneuve, Vigée, et Philippe d'Orléans dit Égalité.

Ce dernier fut décrété d'accusation sur la motion qu'en fit, à cette séance, Billaud de Varennes. On se rappelle qu'à cette époque, d'Orléans étoit renfermé à Marseille dans les prisons de cette ville, et, si les députés girondins durent être étonnés de quelque chose, ce fut de se voir accoler par le même acte d'accusation à ce d'Or léans, qui sans doute avoit pu conspirer contre l'unité de la république, et dont ils avoient si souvent eux-mêmes provoqué le bannissement; à cause des machinations que ce prince pouvoit tramer contre la liberté, lui et ses partisans.

Par l'article 3 de ce décret, il ne fut 3 rien changé à celui du 28 juillet précédent, qui avoit déclaré traitres à la patrie les députés fugitifs, tels que Buzot, Barbaroux, Gorsas, Lanjuinais, Salles, Louver, Bergoing, Pétion, Guader, Chasser, Lydon, Valady, Fermont, Kervelegan, Henry Larivière, Rabaut-Saint-Etienne, Lesage, Cussy, Meillan,Chambon et Biroteau ;

et comme par le décret du 28 juillet, ils étoient mis hors la loi, quelques-uns d'eux étant tombés entre les mains de ceux qui étoient à leur poursuite, on les conduisit au supplice, sans autre formalité de la part des juges, que de constater leur identité. Tel avoit été le sort de Gorsas à Paris, tel avoit été à Bordeaux celui de Cussy et de Biroteau.

Comme les chefs étoient en mesure de proscrire, il ne leur en coûtoit pas davantage d'assassiner un plus grand nombre des. députés opposés aux meneurs des Jacobins; en conséquence, on demanda aussi l'acte d'accusation et la translation au tribunal révolutionnaire de tous les membres de la convention qui avoient signé les protestations faites les 6 et 19 juin contre les événemens des journées des 31 mai et 2 juin. Peut-être ces nombreux patriotes eussentils été aussi conduits au tribunal de sang, si Robespierre, qui pressoit, comme on vient de le voir, le supplice de Brissot Vergniaud et autres, ne se fût opposé à la prompte exécution de ces derniers. Ce fut lui qui empêcha leur mort, en temporisant

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et en demandant qu'on attendit, avant que de les condamner, un rapport que devoit faire à leur égard le comité de sûreté-générale.

Si Robespierre qui, par la mort de d'Orléans et celle des hommes les plus instruits de la Gironde, alloit entièrement établir sa domination, prévoyoit, dès cette époque, qu'il auroit peut-être besoin, un jour, du reste de la Gironde pour contre-balancer où écraser les Jacobins, voulut sauver, dans cette intention, les signataires desprotestations, on doit en conclure qu'il n'étoit un homme ordinaire. Effectivement, ceux qui sont instruits à fond des dérails relatifs à la journée du 9 theřmidor, savent combien ce tyran, avant sa chûte, fit d'efforts pour rallier à lui les Girondins qui siégeoient encore dans la convention,

pas

et

combien il fit valoir à leurs yeux, que sans lui ils n'existeroient plus. Cette obligation réelle que le côté droit avoit à ce monstre manqua de faire avorter la mémorable journée du 9 thermidor.

Quoi qu'il en soit, ce fut lui qui, ce jourlà, sauva la vie aux nombreux signataires

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