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répondit à son collègue Gauthier, qui lui demandoit si les comités ne craignoient pas que Paris n'ouvrît enfin les yeux et ne se mit en insurrection: Nous le voudrions bien, nous traiterions Paris comme nous avons traité Lyon. Cet état désespérant dans lequel ils étoient plongés ne pouyoit durer plus long-tems. Déjà plusieurs d'entr'eux, qui s'étoient mis plus en avant que les autres, et qui, d'après cela, n'avoient plus rien à ménager, conspiroient sourdement pour assassiner Robespierre et renverser les comités de gouvernement, ces comités si épouvantables qui, au lieu d'être renouvelés tous les mois, comme le portoit la loi de leur institution, avoient inspiré une telle frayeur, qu'au lieu de les renouveler, on n'osoit pas même, dans la crainte de leur déplaire, introduire parmi eux un nouveau membre pour rem-plir la place vacante par la mort de Hé, rault-de-Séchelles qu'ils avoient fait guil

lotiner.

Parmi ceux qui vouloient porter le pres mier coup à Robespierre, et qui s'assem-. blorent clandestinement pour exécuter cq.

projet hardi, on doit distinguer les dépu tés suivans: Laurent Lecointre, Fréron, Barras, Courtois, Garnier de l'Aube, Rovère, Thirion, Tallien et Guffroi. D'autres ne furent pas moins généreux. Peu de tems avant la chûte du tyran, les membres qui composoient le comité de division, créé après la destitution totale des ministres s'étoient réunis un soir dans leur local accoutumé. Gayvernon, qui étoit de ce comité, demanda, par motion d'ordre, qu'on levât la séance pour s'occuper d'une manière plus directe du salut de la république, et aviser aux moyens de renverser Robespierre et sa tyrannie : animés du même esprit, tous les membres du comité se lèvent aussitôt, et conviennent entre eux de ne point se séparer sans avoir auparavant décidé qu'ils ne s'occuperoient d'aucune matière étrangère à ce grand objet, que la patrie ne fût sauvée ; er fidèles à leur serment, chaque jour ils se rassemblèrent pour y travailler. La justice et la reconnoissance nous font un devoir de nommer les députés qui composcient ce comité, voici leurs noms ?

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Gayvernon, Laboissière, Basoche, Allafort, Deydier et Siblot. Ainsi donc les comités de gouvernement sont paralysés pressés, entre deux feux, et ont tout à perdre si Robespierre est vainqueur og vaincu Robespierre, désireux de commettre le crime, est épouvanté du forfait, et du supplice qui l'attend, s'il échoue; la convention terrifiée aussi, tire au contraire son énergie du trépas inévitable dont elle est menacée. Telle étoit la situation des choses, lorsque la foudre qui devoit pulvériser l'un des partis éclata.

Le 8 thermidor, Robespierre prononce un long discours, dont la moitié est employée à faire l'éloge de sa vertu. Il se plaint d'être calomnié, et signale comme ennemis du peuple, tous ceux qui lui paroissent contrarier ses projets; il supplie en même tems l'assemblée, de ne pas croire qu'il aspire à la dictature, et s'emporte ensuite contre ceux dout il voudroit se défaire, il déclame successivement contre les comités de salut public, de sûreté gé nérale et des finances, et accuse Cambon, l'ame de ce dernier comité, d'avoir contre

révolutionné les finances de la république,. et promet qu'il proposera les seules mesures propres à sauver la patrié. C'étoit attaquer bien des personnages; ceux qu'il vouloit proscrire, ne furent que plus convaincus que leur perte étoit jurée, et ne ménagèrent plus rien.

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Depuis quelque tems Robespierre ne prononçoit pas un discours, qu'on n'en décrétât sur-le-champ l'impression, et qu'on n'en ordonnât souvent l'envoi à toutes les communes de la république ; Lecointre de Versailles demanda, comme à l'ordinaire, mais dans une toute autre inten tion, l'impression de celui-ci. Bourdon de Oise s'y oppose, et demande qu'avant Pimpression, ce discours soit renvoyé aux deux comicés de salut public et de sûreté générale, pour lesquels il est injurieux. Ce coup étoit adroit, c'étoit mettre les comirés de gouvernement contre Robespierre, Barrère, encore indécis, insiste pour l'impression, et Couthon, l'ame damnée du tyran, demande l'envoi de ce même discours à toutes les communes de la république. Cette dernière proposition est

adoptée, mais elle est si outrageante pour lès comités de gouvernement, qu'il faut que ce décret soit rapporté, ou qu'ils, succombent. Vadier, l'infâme Vadier qui étoit du comité de sûreté générale, et qui depuis quelques jours avoit encouru l'animadversion de Robespierre, lui porte le premier coup, et l'accuse de vouloir perdre les patriotes. L'attaque étoit indirecte, Cambon va droit au fait : « Si j'avois voulu servir des intrigues, s'écrie-t-il, il m'auroit été facile, dans des circonstances critiques, d'exciter des mécontentemens utiles au parti que j'aurois embrassé; mais, étranger à toutes les factions, je les ai dénoncées tour-à-tour, er en dernier lieu on, n'a rien négligé pour chercher à connoître, jusqu'où pouvoit aller ma fermeté. Il est tems de dire la vérité toute entière, un seul homme paralyse la volonté de toute, la convention, et cet homme, c'est Robespierre ».

Attaqué de front, Robespierre balbutie; Billaud de Varennes, Bentabole, Charlier, Amar, Thirion, lui portent de nouveaux coups. Panis reproche au

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