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glais, comparoissant devant ce tribunal atroce, et interrogé sur son nomi, se contenta de répliquer: Il est assez connu ž quand vous m'aurez fait trancher la tête, envoyez-la aux Anglais, ils ne la mécon“ nottront pas et vous la paieront cher.

Par les massacres, journellement établis par l'accusateur public, le président, les juges et les jurés du tribunal révolutionnaire, on voit assez quelle étoit la férocité de tous ces monstres; on pourroit placer ici la liste de tous ces scélerats, pour les youer à l'exécration publique, mais il nous suffira d'en faire connoître un plus particu lièrement et d'après lequel on pourra les juger tous. C'étoit un nommé Payan sorti des contrées méridionales de la France, que Robespierre connoissoit pour un homme digne de le seconder, et qui jouera tout à l'heure un rôle plus important parce que le comité de salut public, après la mort d'Hébert et de Chaumette, le tira du tribunal révolutionnaire, pour en faire un agent national près de la commune de Paris.

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Voici comme ce Payan écrivoit à un cer◄

tain Roman - Fonrousa, devenu membre de la commission populaire d'Orange, et qui conservoit quelque scrupule dans les fonctions de sa place.

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Payan, ex-juré au tribunal révolutionnaire et maintenant agent national près la commune de Paris, à Roman-Fonrousa, juge de la commission populaire d'Orange. « J'ai été long-tems, mon cher ami, membre du tribunal révolutionnaire, et je crois te devoir, à ce titre, quelques ob. servations sur la conduite des juges ou des jurés, Il est bon de t'observer d'abord, que les commissions chargées de punir les conspirateurs, n'ont absolument aucun rapport avec les tribunaux de l'ancien régime, ni même avec ceux du nouveau. Il ne doit y exister aucune forme ; la conscience du juge est là, et les remplace. Il ne s'agit point de savoir și l'accusé a été interrogé de telle ou telle manière, s'il a été entendu paisiblement et long tems lors de sa justification, il s'agit seulement, de savoir s'il est coupable. En un mot, ces commissions sont des commissions révolutionnaires, c'est-à-dire, des tribunaux qui doivent aller au fait et frapper sans pitié les conspirateurs elles doivent être aussi des tribunaux politiques: elles doivent se rappeler que tous les hommes qui n'ont pas été pour la révolution ont été pour cela même contre elle, puisqu'ils n'ont rien fait pour la patrie. Dang une place de ce genre, la sensibilité individuells

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doit ĉesser; elle doit prendre un caractère plus grand, plus auguste; elle doit s'étendre à la république. Tout homme qui échappe à la justice nationale est un scélérat qui fera un jour périr des républicains que vous devez sauver. On répéte sans cesse aux juges, prenez-garde, sauvez l'innocence; et moi je leur dis, au nom de la patrie, tremblez de sauver un coupable.

Dans la position où tu te trouves, je soutiens qu'il est impossible, avec la plus grande sévérité, que tu condamnes jamais un patriote. Le tribunal est entoured d'hommes probes, de citoyens du pays même, et la démarcation est tellement établie entre les amis de l'humanité et ses ennemis, que tu ne frapperas jamais que ses en nemis. Je t'en conjure au nom de la république, au nom de l'amitié que je t'ai vouée, je t'en conjurerois au nom de ton intérêt particulier lui-même, si l'on devoit en parler lorsqu'il s'agit de l'intérêt général : laisse des formes étrangères à ta place, n'aies de l'humanité que pour ta patrie, marches d'un pas égal avec tes collègues. Fauwetty sait l'impulsion qu'il faut donner au tribunal, il a acquis l'estime et l'amitié de tous les républicains. On applaudit toujours à sa justice, et les aristocrates seuls dont il détruisoit les partisans, lui reprochèrent sa rigueur. Il n'y a point de milieu, il faut être totalement révolutionnaire, ou renoncer à la liberté. Les demi-mesures ne sont que des palliatifs qui augmentent sourdement

les maux de la république. Tu as une grande mission à remplir, oublie que la nature te fit homme et sensible. Rappele-toi que ta patrie t'a fait juge de ses ennemis. Elle élèvera un jour sa voix contre toi, si tu as épargné un seul conspirateur, et dans les commissions populaires, l'humanité individuelle, la modération qui prend le voile de la justice, est un crime. Je n'ai vu dans ces genres de tribunaux que deux sortes d'hommes, les uns qui trahissoient les intérêts de la liberté, et les autres qui vouloient la faire triompher. Tous ceax qui prétendoient être plus sages et plus justes que leurs collègues,étoient des conspiratçurs adroits, ou des hommes trompés, indignes de la république. Choisis entre l'amour du peuple et sa haîne. Si tu n'as pas la force et la fermeté -nécessaires pour punir des conspirateurs, la nature ne t'a pas destiné à être libre; tu sens, mon ami, que ces réflexions me sont inspirées par l'amour de la patrie et par l'estime que j'ai conçue de toi ; elles sont jetées à la hâte sur le papier, mais elles sont bonnes. Lis-les sans cesse et surtout avant le jugement des scélérats que vous avez à frapper ».

Cette lettre suffit pour donner une idée de l'agent national Payan, et prouver qu'il étoit à la hauteur des principes professés par les comités de gouvernement et particulièrement par son patron Robespierre.

Le peu de tems qu'il passa à la commune, après la chûte de Chaumette et d'Hébert, jusqu'à celle de Robespierre, fut employé à propager les principes du tyran et à lui faire des partisans. Vil instrument des atrocités sanglantes des oppresseurs de la France, sa tâche, à la commune, étoit sur-tout de célébrer, comme un bienfait, le gouvernement révolutionnaire, de préparer l'esprit du peuple aux exécutions sanguinaires qui convenoient aux vues des scélérats qui règnoient, et d'applanir, à l'incorruptible, le chemin de la dictature, Semblable à son maître, il avoit adopté le langage de l'hypocrisie la plus perverse; à l'entendre, dans ses réquisitoires, la France n'avoit jamais eu un gouvernement plus juste et plus humain; tout avoit été remis dans l'ordre ; la république entière étoit un temple consacré à la justice et à la probité; jamais la divinité n'y avoit eu un culte plus pur, ni reçu des hommages plus dignes d'elle,

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Autrefois, (disoit il, dans un dis cours prononcé dans le temple qu'on ap peloit alors le Temple de la raison) au

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