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loin de prévoir et de seconder-Lors de la fuite du tyran votre frère à Varennes, ne l'avezvous pas accompagné ? — Tout m'ordonnoit de suivre mon frère, et je me suis fait un devoir, dans cette occasion comme dans toute autre, de ne point le quitter. N'avez-vous pas figuré dans l'orgie infâme et scandaleuse des Gardesdu corps, et n'avez-vous pas fait le tour de La table avec Marie-Antoinette, pour faire répéter à chacun des convives le serment affreux d'exterminer tous les patriotes, pour étouffer la liberté dans sa naissance et rétablir le trône chancelant? J'ignore absolument si l'orgie dont il s'agit a eu lieu, mais je déclare n'en avoir été aucunement instruite et n'y avoir pris part pas la vérité, en aucune manière. Vous ne dites et votre dénégation ne peut vous être d'aucune utilité, lorsquelle est démentie, d'une part, par la notoriété publique , et de l'autre par la vrai semblance qui persuade à tout homme sense, qu'une femme aussi intimement liée avec MarieAntoinette que vous l'éticz, et par les liens du sang et par l'amitié la plus étroite, n'a pu se dispenser de partager ses machinations, et de les favoriser de tout son pouvoir; vous avez donc nécessairement, d'accord avec la femme du tyran, provoqué le serment abominable, prêté d'assassiner et d'apar les satellites de la cour, néantir la liberté dans son principe; et vous avez également provoqué les outrages sanglants faits

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aux signes précieux de la liberté qui ont été fou lés aux pieds par tous vos complices. — J'ai déjà dit que tous ces faits m'étoient étrangers. Où étiez-vous dans la journée du 10 août 1792? J'étois au château, ma résidence or dinaire et naturelle. N'avez-vous pas passé la nuit du 9 au 10 août dans la chambre de votre frère? et n'avez-vous pas eu avec lui des conférences secrètes qui vous ont expliqué le bur et le motif de tous les mouvemens et préparatifs qui se faisoient sous vos yeux ? J'ai passé chez mon frère la nuit dont vous me parlez; jamais je ne l'ai quitté, il avoit beaucoup de confiance en moi, et cependant je n'ai rien remarqué dans sa conduite ni dans ses discours qui pût m'annoncer ce qui s'est passé depuis. - Votre réponse blesse tout-à-la-fois la vérité et la vraisemblance: et une femme comme vous qui a manifesté dans tout le cours de la révolution, une opposition aussi frappante au nouvel ordre de choses, ne peut être crue, lorsqu'elle veut faire croire qu'elle ignore la cause des rassemblemens de toute es pèce qui se faisoient au château la veille du 10 août. Voudriez-vous nous dire ce qui vous a empêchée de vous coucher cette même nuit ? -Je ne me suis point couchée, parce que les corps constitués étoient venus faire part à mon frère de l'agitation des habitans de Paris et des dangers qui pouvoient en résulter. Vous dissimu lez en vain, sur-tout d'après les différens aveus Tome XII, 3°. part. Bb

de la femme Caper qui vous a désignée comme 'ayant assisté à l'orgie des gardes - du - corps comme l'ayant soutenue dans ses craintes et ses alarmes, le ro août, sur les jours de Capet et sur tout ce qui pouvoit l'intéresser. Mais ce que vous nicz infructueusement, c'est la pàrt active que vous avez prise à l'action qui s'est engagée entre les patriotes et les satellites de la tyrannie: c'est votre zèle et votre ardeur à servir les ennemis du peuple, et à leur fournir des balles, que vous preniez la peine de mâcher, comme devant être dirigées contre les patriotes et destinées à les moissonner: ce sont les vœux contre te bien public que vous fesiez, pour que la victoire demeurât aux partisans de votre frère, et les encouragemeus en tout genre que vous don niez aux assassins de la patrie. Que répondez-vous à ces derniers faits?-Tous ces faits qui me sont Imputés sont autant d'indignités dont je suis bien loin de m'être souillée. Lors du voyage de Va rennes, n'avez vous pas fait précéder l'évasion honteuse du tyran, de la soustraction des diaman's dits de la couronne, appartenant alors à la nation, et ne les avez-vous pas envoyés à votre frère d'Ar tois ? Ces diamans n'ont point été envoyés à d'Artois, je me suis bornée à les déposer entro les mains d'une personne de confiance. Voudriez-vous nous désigner le dépositaire de ces diamans, ou nous le nommer? Monsieur de

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Choiseuil est celui que j'avois choisi pour faire

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te dépôt. Que sont devenus les diamans que vous dites avoir confiés à Choiseuil ? — J'ignore absolument quel a pu être le sort de ces diamans, n'ayant point eu l'occasion de revoir monsieur de Choiseuil, et ne m'en suis nullement occa Vous ne cessez d'en imposer sur toutes les interpellations qui vous sont faites, et singu lièrement sur le fait des diamans; car un procès-verbal du 12 décembre 1792, bien rédigé ea connoissance de cause par les représentans du peuple, lors de l'instruction de l'affaire relative au vol de ces diamans, constate, d'une manière sans réplique que lesdits diamans ont été envoyés à d'Artois.

Ici l'accusée garde le silence.

Le président, N'avez-vous pas entretenu des correspondances avec votre frère, le ci devant Monsieur ? Je ne me rappelle pas en avoir entretenues, sur-tout depuis qu'elles sont prohi bées. N'avez vous pas secouru et pansé vous même les blessures des assassins envoyés par votre frère, aux Champs-Elisées, contre les braves Mar seillais ? Je n'ai jamais su que mon frère cût envoyé des assassins contre qui que ce soit; S'il m'est arrivé de donner des secours à quelques blessés, l'humanité seule a pu me conduire dans le pansenient de leurs blessures. Je n'ai point eu besoin de m'informer de la cause de leurs maux pour m'occuper de leur soula gement. Je ne m'en fais point un mérite, mais Bb&

je n'imagine pas que l'on puisse m'en faire un crime. Il est difficile d'accorder ces sentimens d'humanité dont vous vous parez, avec cette joie cruelle que vous avez montrée en voyant couler des flots de sang dans la journée du 10 août. Tout nous autorise à croire que vous n'êtes humaine que pour les assassins du peuple, et que vous avez toute la férocité des animaux les plus sanguinaires pour les défenseurs de la liberté. Loin de secourir ces derniers, vous provoquiez leur massacre par vos applaudissemens; loin de désarmer les meurtriers du peuple, vous leur prodiguiez, à pleines mains, les instrumens de la mort, à l'aide desquels vous vous Aattiez Vous et vos complices, de rétablir le despotisme et la tyrannie. Voilà l'humanité des dominateurs des nations, qui de tout tems ont sacrifié des millions d'hommes à leurs caprices, à leur ambition ou à leur cupidité. L'accusée Elisabeth, dont le plan de défense est de nier tour ce qui est à sa charge, aura t-elle la bonne foi de convenir, qu'elle a bercé le petit Capet de l'espoir de succéder au trône de son père, et qu'elle a ainsi provoqué la royauté ? Je causois dans ma prison, familièrement avec cet infortuné qui m'étoit cher à plus d'un titre; et je lui administrois, sans conséquence, les consolations qui me paroissoient capables de le dédommager de la perte de ceux qui lui avoient donné le jour.. C'est convenir en d'autics

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