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sans délai. Il fut enjoint à tous les tribu

naux civils et à toutes les administratious, de terminer dans trois mois

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compter de la promulgation du présent décret, les affaires pendantes, à peine de destitution, et à l'avenir toutes les affaires privées, dans le même délai, sous la même peine. Il fut enjoint aux nobles, non encore reclus, et aux étrangers de quitter Paris, de ne point approcher de cette ville ni des places fortes, de les vuider sous trois jours, sous peine de mort ; et l'on prononça la peine de déportation à la Guyanne, contre ceux qui vivroient sans travailler.

En ordonnant que tous les prévenus de conspiration seroient envoyés des départemens à Paris, pour y être jugés par le tribunal révolutionnaire, les comités avoient pour but d'empêcher que quelques détenus ne leur échappassent; car, encore bien que la mort planât sur tous les points de la république, et particulièrement dans toutes les villes où il y avoit des représentans en mission, il est vrai de dire qu'il existoje quelques communes où les tribunaux cri

minels ne jugeoient pas aussi révolutionnairement qu'a Paris, et sauvoient la vie à quelques victimes ; et en les faisant conduire à Paris pour être jugées par Fouquier, il étoit certain qu'elles n'échapperoient pas à la mort.

Cette loi barbare ne laissoit effective ment plus d'espoir aux détenus. Ceux des départemens se voyoient déjà condamnés en arrivant à Paris. Comment d'ailleurs auroient-ils pu conserver quelqu'espérance ? Couthon, le vil complaisant de Robespierre, annonçoit lui même à la tribune, que les innocens qui se trouvoient parmi les incarcérés étoient en si petit nombre, que d'après les renseignemens donnés par la commission populaire en activité, ils se trouvoient seulement dans la proportion d'un a quatrevingt; en sorte que si, tant dans Paris que dans les départemens, il se trouvoit encore quatre-vingt mille suspects ou in carcérés, il falloit en égorger soixante-dixneuf mille.

Plus on abattoit de têtes, plus les tyrans se mettoient dans la nécessité d'en abattre l'extermination de la Vendée,

les mitraillades de Lyon, les noyades et fusillades de Nantes, tout cela dépeuploit le sol de la France au gré de leurs desirs, mais les effets étoient encore trop lents; la guillotine, quoiqu'elle abattît soixante tères dans soixante minutes, n'étoit point encore un instrument assez expéditif. On vouloit multiplier et accélérer encore da❤ vantage ces asssasinats, mais il falloit des ménagemens ; le sang qui ruisseloit de l'échafaud, empestoit l'air, le murmure étoit sur les lèvres de quelques gens du peuple qui commençoient à s'appercevoir que Fouquier et son tribunal tuoient les gens sans les entendre. Cependant les dignes membres des comités de gouvernement, qui ne se décourageoient pas pour si peu, envoyèrent chercher Fouquier pour savoir si, au lieu de condamner à mort soixante individus par jour, il ne pourroit pas en faire périr cent cinquante, ou au moins cent par fournée.

Il faut dire à la louange de ce misérable Fouquier, que cette proposition le ré volta; il se mit dans une fureur étrange, il accusa les membres des comités d'être des

monstres qui avoient l'impudeur de le char ger de l'odieux de tous leurs assassinats et sortit du lieu où ils étoient, en leur déclarant qu'il n'en condamneroit pas à mort મે plus de soixante par jour. Fouquier avoua même depuis, lors de son procès, qu'en sortant de ces comités où l'on venoit de lui faire une pareille proposition, son boŋ sa raison l'abandonnèrent; qu'en traversant le pont royal, il lui sembloit que la Seine ne rouloit que du sang et dès cadavres, que ses cheveux se hérissèreng et qu'il croyoit voir sortir de chaque pávé sur lequel il marchoit, les spectres mutilés de tous ceux qu'il avoit égorgés.

sens,

Justice du ciel, tu te fais donc sentir aux scélérats! Ah! cette certitude est la seule consolation de l'homme de bien, puisque tu ne peux exister contre le crime, sans exister aussi pour la vertu.

Parmi les nombreuses victimes frappées par le tribunal de Fouquier, et dont nous ne pouvons donner les noms à cause de leur multiplicité, il en est une pourtant sur laquelle nous ne pouvons nous dispenser de dire quelque chose. Nous parlons de la

sœur du roi, madame Elisabeth. Louis XVI et sa femine avoient été condamnés seuls, mais à l'époque que nous avons atteint, le tribunal ne pouvoit pas perdre une séance pour un seul individu. On accola donc à madame Élisabeth beaucoup d'autres gens qu'on vouloit assassiner, entr'autres, toute la famille des Loménie de Brienne, à l'exception du cardinal ar chevêque de Sens et ancien premier ministre, qui s'étoit donné la mort quand on vint pour l'arrêter.

La relation exacte de l'interrogatoire fait à cette princesse, par le président du tribunal révolutionnaire, suffira pour don ner l'idée des crimes qu'on lui imputoit, ou plutôt pour prouver, s'il en étoit besoin, que les formalités que ce tribunal, observoit encore pour la condamnation des accusés n'étoient plus que des simulacres faits pour en imposer au vulgaire.

Le président. Où étiez-vous dans les journées des 12, 13 et 14, c'est-à-dire aux époques des premiers complots de la cour contre le peuple.

Elisabeth. J'étois dans le sein de ma famille je n'ai connu aucuns des complots dont vous me parlez, et ce sont des événemens que j'étoit

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