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dans le club des Cordeliers et dans la

A

société des Jacobins, que par l'audace avec laquelle ils se chargeoient de multiplied les victimes; Ronsin, commandant de l'armée révolutionnaire, étoit un scélérat déhonté, qui avoit fait consister son bonheur à égorger dans la Vendée, ainsi que dans les murs de Lyon, où il présidoit aux fusillades, comme nous serons obligés de le faire voir dans un moment. Vincent, agent principal des bourreaux et du ministre de la guerre, n'étoit recommandable que par ses excès, que par l'activité avec laquelle, lui et un nommé Maillard, son digne acolyte, encombroient les pri sons et les maisons-d'arrêts; chargés d'or, de diamans qu'ils voloient et pilloient partout, ils n'étoient occupés dans Paris que de deux objets capitaux, d'emplir les cachots d'hommes riches, et se livrer ensuite à la débauche la plus effrénée, aux plaisirs immodérés de la table; il n'étoit bruit, quand tout Paris mouroit de faim, étoit dans la misère, que des repas splendides que ces nouveaux Sardanapales dévoroient chez les traiteurs du Palais Royal. De

leur coterie étoit encore un homme biez digne de leur être accolé ; c'étoit un nommé Grammont, comédien de profession; être nul du côté du talent, porteur d'une physionomie atroce et d'un cœur d'acier, adjudant-général de l'armée révolutionnaire, il avoit toute la bassesse et le sang-froid convenables pour commander une pareille et renchérir sur les assassinats

troupe,
dont elle se faisoit un jeu.

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Quant à ce qui concerne le crédit que pouvoient avoir Chaumette et Hébert, au moment où Robespierre voulut les abattre ce crédit étoit peu de chose, ce crédit n'étoit plus ce qu'il avoit été, parce que chacun trembloit sous les comités de gouvernement. Chaumette avoit quelqu'influence sur le conseil - général de la commune, sur le peuple des tribunes de ce conseil-général; Hébert, par son journal ordurier, avoit également un peu d'influence sur la multitude qui le lisoit avec plaisir, mais encore une fois ce peu d'autorité étant isolé, étant séparé de l'autorité des comités de gouvernement, la puissance de ceux-ci ne pouvoit être mise

en balance avec celle de ces magistrats subalternes.

Il en étoit autrement de Danton et de

Camille Desmoulins. Bien

que

la conven

tion fût terrifiée, la popularité de Danton avoit été si considérable, il avoit rendu de si grands services à la liberté, il conservoit dans l'assemblée un si grand nombre d'amis, ou, si on l'aime mieux de partisans, que, quelle que fût l'autorité du comité de salut public, c'étoit de sa part un effort et un attentat inoui que de frapper cet homme jadis si prépondérant; d'un autre côté, Camille - Desmoulins, intime ami de Danton, outre qu'il étoit connu pour un patriote énergique, pour un ardent ami de la chose publique, venoit de tenter une entreprise qui lui concilioit tacitement tous les cœurs. Dans ces tems d'extermination, il avoit osé publier un journal dans lequel il s'élevoit contre les égorgemens, il comparoit l'époque sanglante dans laquelle nous vivions, à ces tems désastreux où les tyrans de l'ancienne Rome se vautroient dans le sang et la débauche. Tous les citoyens pressés dans l'é◄

tau de la peur, étonnés qu'un homme fût assez hardi pour parler de clémence et d'humanité, formoient des vœux pour l'intéressant Camille ; on trembloit pour lui, les bénédictions de tout un peuple courbé sous la hache des licteurs, s'élevoient en sa faveur ; les conventionnels qui n'étoient pas dévoués aux assassins du comité de salut public, mêloient leurs assentimens secrets aux vœux étouffés des Français ; un rien pouvoit enflammer l'espoir de ces partisans de l'humanité, que les atroces comités appeloient la faction des indulgens; un rien pouvoit produire une explosion et terrasser les comités de gouvernement en arrêtant le cours des massacres. Ces comités pressentirent le coup qui pouvoit leur être porté, et anéantirent tous ceux qui pouvoient encore leur donner quelque ombrage. Pour y parvenir, il étoit besoin de quelques tartuferies préliminaires ; Robespierre et son Seïde Saint-Just, membre du même comité, aiguisèrent leurs poignards.

Robespierre fit donc un très-long et très-fastidieux discours sur la morale ré

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publicaine, dans lequel, comme à son ordinaire, ne parlant que de lui, il annonça qu'il alloit mettre l'univers dans la confidence de ses principes politiques ; ces principes si longuement délayés se réduisoient à peu près à cette phrase: « Le ressort du gouvernement populaire, dans la paix, est la vertu le ressort du gouvernement populaire, en révolution, est la vertu et la terreur : la vertu sans laquelle la terreur est funeste; la terreur sans laquelle la vertu est impuissante ». Après avoir émis cette idée sublime autour de laquelle il échafauda une catilinaire in-folio, il désigna ceux qu'il vouloit frapper, il les désigna, non par leurs noms, mais par les vices qu'il leur reprochoit. Il se déchaîna contre les athées qui pervertissoient la morale, et de ce moment dûrent trembler les Hébert, les Chaumette, les Clootz; il attaqua les indulgens, et dès lors Camille, Danton, Phélippeaux, Fabre-d'É glantine dûrent prévoir le sort qui leur étoit réservé; il par'a des vicieux, de ces dîners splendides, de ces orgies scanda leuses où l'on déyofoit la subsistance da

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