49 nature donne à chaque homme un pouvoir MAIS outre la personne publique, nous a- ON CONVIENT que tout ce que chacun aliéne par le pacte social de sa puissance de ses biens de fa liberté, c'est seulement la partie de tout cela dont l'usage importe à la communauté, mais il faut convenir aussi que le Souverain seul est juge de cette importance. Tous les fervices qu'un citoyen peut ren dre à l'Etat, il les lui doit fitôt que le Sou verain les demande; mais le Souverain de fon côté ne peut charger les sujets d'aucune chais ne inutile à la communauté; il ne peut pas * Lecteurs attentifs, fs, ne vous pressez pas, je vous prie de m'accufer ici de contradiction. Je n'ai pu Péviter dans Jes termes, va la pauvreté de la langue; mais attendez. 1 même le vouloirs car sous la toi de raison rien ne se fait fans cause, non plus que sous la loi de nature כל ? LES ENGAGEMENS qui nous lient au corps social ne font obligatoires que parce qu'ils sont mutuels, & leur nature est telle qu'en les remplissant on ne peut travailler pour autrui fans travailler aussi pour foi. Pourquoi la vo lonté générale est-elle toujours droite, & pourquoi tous venlent-ils constaniment le bonheur de chacun d'eux, fi ce n'est parce qu'il n'y a personne qui ne s'approprie ce mot cha oun, & qui ne fonge à lui-même en votant pour tous? Ce qui prouve que l'égalité de droit & la notion de justice qu'elle produit détive de la préférence que chacun se donne & par conféquent de la nature de l'homme, que la volonté générale pour être vraiment relle doit l'être dans fon objet ainsi que dans fon effence, qu'elle doit partir de tous pout s'appliquer à tous, & qu'elle perd fa rectitu de naturelle lorsqu'elle tend à quelque objet individuel & déterminé; parce qu'alors jugeant de ce qui nous est étranger nous n'avons au cun vrai principe d'équité qui nous guide. EN EFFET, bröt qu'ils s'agit d'un fait ou d'un droit particulier, sur un point qui n'a pas été réglé par une convention générale & antérieure, l'affaire devient contentieuse. C'est 12 un 1 : un procès où les particuliers intéresses font ut ne des parties & le public l'autre, mais où je ne vois nì là lòi qu'il faut suivre, ni le juge qui doit prononcer! Il seroît ridicule de vouloir alors s'en rapporter à une expreffe décifion de la volonté génerale, qui ne peut être que la conclusion de l'une des parries, & qui par conféquent n'est pour l'autre qu'une volonré étrangere, particuliere, portée en cette occasion à l'injustice & sujette à l'erreur. Ainsi de même qu'une volonté particuliere ne peut représenter la volonté générale, la volonté générale à fon tour change de nature ayant un objet particulier, & ne peut comme générale prononcer ni fur un homme ni fur un fait. Quand le peuple d'Athenes, par exemple, nonmoit on caffoit ses chefs, décernoit des honneurs à l'un, imposoit des peines à l'autre, & par des multitudes de décrets particuliers exerçoit indistinctement tous les actes du Gouvernement, le peuple alors n'avoit plus de volonté générale proprement dite; il n'agiffoit plus comme Souverain mais comme Magiftrat. Ceci paroîtra contraire aux idées communes, mais il faut me laisser le tems d'exposer les miennes. ON DOIT concevoir par là, que ce qui généralise la volonté est moins le nombre des voix, que l'intérêt commun qui les unit: cat dans cette institution chacun fe foumer nécef faire > fairement aux conditions qu'il impose aux aucres; accord admirable de l'intérêt & de la justice qui donne aux délibérations communes un caractere d'équité qu'on voit évanouit dans la discussion de toute affire particuliere, faute d'un intérêt conmun qui uniffe & identifie la regle du juge avec celle de la partie -OVPAR quelque côté qu'on remonte au principe, on arrive, toujours à la même conclufion; savoir, que le pacte social établit entre les citoyens une telle égalité qu'ils s'engagent tous sous les mêmes condition, & doivent jouïr tous des memes droits. Ainsi par la nature du pacte, tout acte de souveraineté, c'està-dire tout acte authentique de la volonté générale oblige ou favorise égalément tous les Citoyens, renforte que le Souverain connoit seulement le corps de la nation & ne diftingue aucun de ceux qui la composent. Qu-eftce donc proprement qu'un acte de souveraineréa Ce n'est pas une convention du supérieur avec l'inferieur, mais une convention du corps avec chacun de ses membres: Convention lé gitime, parce qu'elle a pour base le contract focial, équitable, parce qu'elle est commune à tous, utile, parce qu'elle ne peut avoir d'autre objet que le bien général, & folide, parce qu'elle a pour garant la force publique & le pouvoir fuprême. Tant que les sujets ne font foumis qu'à qu'à de telles conventions, ils n'obéiffent à personne, mais seulement à leur propre volonté; & demander jusqu'où s'étendent les droits respectifs du Souverain & des Citoyens, c'est demander jusqu'à quel point ceux-ci peuvent s'engager avec eux-mêmes, chacun envers tous & tous envers chacun d'eux. ON VOIT par-là que le pouvoir Souverain, tout absolu, tout facré, tout inviolable qu'il est, ne paffe ni ne peut paffer les bornes des conventions génerales, & que tour homme peut disposer pleinement de ce qui lui a été laiffé de ses biens & de sa liberté par ces conventions; de forte que le Souverain n'est jamais en droit de charger un sujet plus qu'un autre, parce qu'alors l'affaire devenant particuliere, son pouvoir n'est plus compétent CES distinctions une fois admises, il est si faux que dans le contract social il y ait de la part des particuliers aucune renonciation véritable, que leur fituation, par l'effet de ce contract se trouvé réellement préférable à ce qu'elle étoit auparavant, & qu'au lieu d'une aliénation, ils n'ont fait qu'un échange avantageux d'une maniere d'être incertaine & précaire contre une autre meilleure & plus fûre, de l'indépendence naturelle contre la liberté, du pouvoir de nuire à autrui contre leur propre fûreté, & de leur force que d'autres pouvoient fur D |