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Cils qui du faire n'a courage
Li respont et dist comme sage:
Le pecheur pour fol je tendroie
Qui ainsi laisseraist sa proie;
Et cils est plus fos la moytié
Qui ce requiert qu'il a gettié.

Qui ce qu'il tient jette a ses piés,
Bien en doist estre courrouciés.
Qui laisse ce qu'il a, chéoir,

Il li en doit bien meschéoir.

Proverbe est : Qui tiengne, si tiengne :
Que mescheance ne li aviengne :
Plus aim de mon profit denrée,
Qu'a autre viengne grant marée.

3

Ain, hameçon, de hamus.- - Lingue, ligue.

- 3 Aim,

aime.

FABLE IV. — (86.)

Les Oreilles du Lièvre.

Un animal cornu blessa de quelques coups
Le lion, qui, plein de courroux,
Pour ne plus tomber en la peine,

Bannit des lieux de son domaine
Toute bête portant des cornes à son front.
Chèvres, béliers, taureaux, aussitôt délogèrent;
Daims et cerfs de climat changèrent :
Chacun à s'en aller fut prompt.

Un lièvre, apercevant l'ombre de ses oreilles,
Craignit que quelque inquisiteur
N'allât interpréter à cornes leur longueur,
Ne les soutînt en tout à des cornes pareilles.
Adieu, voisin grillon, dit-il, je pars d'ici :
Mes oreilles enfin seroient cornes aussi;

Et quand je les aurois plus courtes qu'une autruche,
Je craindrois même encor. Le grillon repartit:
Cornes cela! Vous me prenez pour cruche!

Ce sont oreilles que Dieu fit.

On les fera passer pour cornes,

Dit l'animal craintif, et cornes de licornes.
J'aurai beau protester : mon dire et mes raisons
Iront aux petites maisons.

LATINS. Faern., 51; Als., 226.

ITALIENS. Ces. Pav., 87; Verdizz., 94.
ORIENTAUX. Saadi, Guhlistan.

FABLE V. — (87.)

Le Renard ayant la queue coupéc.

Un vieux renard, mais des plus fins, Grand croqueur de poulets, grand preneur Sentant son renard d'une lieue,

Fut enfin au piége attrapé.

Par grand hasard en étant échappé,

de lapins,

Non pas franc, car pour gage il y laissa sa queue ;
S'étant, dis-je, sauvé, sans queue et tout honteux,
Pour avoir des pareils (comme il étoit habile),
Un jour que les renards tenoient conseil entre eux :
Que faisons-nous, dit-il, de ce poids inutile,
Et qui va balayant tous les sentiers fangeux?
Que nous sert cette queue? Il faut qu'on se la coupe:
Si l'on me croit, chacun s'y résoudra.

Votre avis est fort bon, dit quelqu'un de la troupe;
Mais tournez-vous, de grâce; et l'on vous répondra.
A ces mots il se fit une telle huée,

Que le pauvre écourté ne put être entendu.
Prétendre ôter la queue eût été temps perdu :
La mode en fut continuée.

GRECS. ES.-Cor, 7; II 7.

LATINS. Faern., 70.

FRANÇAIS. Guill. Haud., 210; G. Corr., 72; Bens., 53.

ITALIENS. Ces. Pav., 58; Verdizz., 27.

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