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des observations suivies, que Vénus également tourne sur son axe. Il fit, en observant Jupiter, une découverte qui était entièrement nouvelle : l'aplatissement du globe de cette planète. Jupiter comme la terre, et probablement aussi comme toutes les autres planètes, est aplati vers ses pôles. La nature, qui se diversifie à l'infini dans les détails, semble toujours revenir à son plan général. Cassini se livra à l'observation des satellites de Jupiter, pour la recherche des longitudes terrestres. Il étudia avec une attention scrupuleuse les éclipses des satellites, etc. Il vit que leurs orbes sont inclinés sur l'écliptique de Jupiter, etc. On peut voir les détails de ces observations dans les ouvrages de Delambre et de Bailly. Les tables des mouvements des satellites de Jupiter construites par Cassini, furent publiées en 1666.

L'abbé Picard, un des premiers astronomes de l'Académie des sciences de Paris, observa, avec Gassendi, l'éclipse de soleil du 25 août 1645. Picard remplaça Gassendi comme professeur d'astronomie au Collège de France. Il est l'auteur de la première mesure de la terre, digne de confiance. Il commença les opérations qui, après lui, prirent un si grand développement pour la formation de la carte de France. Ce fut à sa recommandation que Cassini fut appelé en France.

Picard était né à la Flèche le 21 juillet 1620. On ne sait rien sur sa jeunesse. C'était un homme savant, laborieux et désintéressé. Pendant son voyage à Uraniebourg, chez Tycho Brahé, il se lia avec Roemer, jeune Danois, chez qui il reconnut un remarquable talent pour l'observation. Il l'amena à Paris, et le fit recevoir membre de l'Académie des sciences. Ce fut en observant, avec Cassini, le premier satellite de Jupiter, que Roemer, comme nous l'expliquerons plus loin, détermina la vitesse de la lumière.

Il était résulté de plusieurs observations, une certaine incertitude relativement à la longueur du pendule et à la détermination de la réfraction. La grande question qu'il s'agissait de résoudre, était la distance de la terre au soleil. Il fut décidé qu'un observateur irait, en un point éloigné du globe, faire des observations correspondantes à celles qui seraient faites en même temps à Paris et dans les autres observatoires de l'Europe. Par l'ordre de Louis XIV, Richer, membre de l'Académie des sciences, partit, en 1672, pour Cayenne, muni de tous les ins

T. IV.

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truments dont il pouvait avoir besoin. Il revint en 1673, rapportant des connaissances utiles et une découverte importante. D'après Richer, la distance des tropiques était de 46° 57' 4" et l'obliquité de l'écliptique. par conséquent 23° 28' 32". Mais cette quantité est trop petite. Et en effet, l'équateur étant presque au zénith de Cayenne, à des distances respectivement égales des deux tropiques, il s'ensuit que ces deux termes de la course solaire sont élevés et rapprochés l'un de l'autre par la réfraction. Dans l'hypothèse de Cassini, l'intervalle observé devait être augmenté de 45", ce qui donnait pour l'obliquité de l'écliptique 23° 28' 54"1/2.

Un fait important, qui frappa Richer dès les premiers jours de son arrivée à Cayenne, c'est que son horloge retardait chaque jour de 2' 28". Après en avoir soupçonné la cause, il raccourcit le pendule d'une ligne et un quart, et alors ce pendule battit exactement les secondes, et l'horloge marqua 24 heures dans la durée du jour. Quand il rapporta à Paris ce même pendule raccourci, il ne battait plus les secondes, et l'horloge avançait de la même quantité dont elle avait retardé à Cayenne avant le raccourcissement. Huygens expliqua ce phénomène par une diminution progressive de la pesanteur depuis le pôle jusqu'à l'équateur.

En 1677, Halley, s'étant transporté à l'ile Sainte-Hélène, constata de nouveau que le pendule, pour battre les secondes, devait y être raccourci. Plus tard, Varin et Deshaies, se trouvant à Cayenne, remarquèrent que la longueur du pendule devait y être diminuée un peu, plus encore que ne l'avait cru Richer.

En France, vers 1666, Picard et Auzout observèrent, à l'aide du micromètre inventé par ce dernier, une variation de la lune qu'on n'avait pas encore soupçonnée. Cette variation consiste en un accroissement de sa grandeur apparente à mesure qu'elle s'élève de l'horizon au zénith. On l'expliqua par une diminution graduelle de sa distance à la terre. Ces observations ramenèrent à une nouvelle étude de la réfraction astronomique.

Le 6 novembre 1671, on ne connaissait encore qu'un satellite de Saturne, lorsque Cassini en découvrit un second. Le 23 décembre de l'année suivante, il en découvrit un autre, et en 1684, deux autres encore, ce qui portait à cinq le nombre

des satellites de Saturne. Les lunettes, dont Cassini fit usage pour découvrir les deux derniers, étaient de cent et même cent trente-six pieds de long. On n'eût pas été jusque-là, si Huygens, Hévélius, Campani n'étaient parvenus déjà à faire d'excellents télescopes de cent et de cent cinquante pieds.

On avait créé des observatoires dans divers pays de l'Europe. Celui de Paris, commencé d'après les plans de l'architecte Perrault, fut achevé sous la direction de Cassini.

On multiplia les observations relatives aux mondes de Saturne et de Jupiter. On calcula les révolutions des satellites; on chercha, dans les apparences que présentent ces différentes. lunes, les analogies qu'elles peuvent avoir avec la nôtre.

Cassini découvrit, sur le globe de Saturne, une bande obscure semblable à celle de Jupiter; il la vit s'étendre d'orient en occident. Cette bande était l'ombre que l'anneau projette sur la planète. Il distingua la ligne obscure qui divise l'anneau, dans sa largeur, en deux parties. Il trouva que celle qui est extérieure a beaucoup moins d'éclat que l'autre. Il aperçut d'autres bandes qui ne provenaient pas de l'ombre projetée par l'anneau. Leur couleur obscure ne tranchait pas assez sur la surface médiocrement lumineuse de la planète, pour l'aider à découvrir sa rotation. Il lui sembla même qu'elles n'adhéraient pas au globe de Saturne, mais qu'elles étaient comme suspendues. en dehors et au-dessus.

Le 18 mars 1683, Cassini ayant dirigé, le soir, son télescope vers les points de l'horizon d'où le soleil venait de disparaître, remarqua dans le ciel une lumière blanche, assez semblable à celle qui distingue la voie lactée. Elle s'étendait obliquement dans le sens du zodiaque, et couvrait les signes où le soleil devait entrer au commencement du printemps. Aussi lumineuse, mais aussi rare que la queue d'une grande comète, elle laissait voir, à travers sa clarté, les plus petites étoiles. Elle avait de dix à douze degrés de largeur. Sa figure était à peu près celle d'une pyramide s'appuyant sur l'horizon, et, par son sommet aigu, touchant aux Pléiades et aux étoiles du Taureau. Elle disparut vers ces étoiles, mais pour reparaître les jours suivants; elle sembla même s'avancer le long de l'écliptique et y précéder le soleil. Cassini soupçonna qu'elle émanait de la lumière du soleil. Il remarqua qu'elle est toujours renfermée dans le zodiaque,

et, pour cette raison, il la nomma lumière zodiacale. Il y vit pétiller des étincelles, et un peu plus tard, de Mairan fit la même observation.

Ce fut en 1676 que Roemer, s'apercevant que les éclipses des satellites de Jupiter, toujours calculées d'après la même méthode, arrivaient, dans certains temps de l'année, constamment plus tard qu'elles n'étaient prédites, eut l'idée d'en chercher la cause. Il compara les différentes distances qui nous séparent de Jupiter, et il reconnut que les époques où cette planète est le plus rapprochée de la terre sont précisément celles où les éclipses des satellites retardent le plus. La différence entre la plus petite et la plus grande distance de Jupiter à la terre est égale au diamètre de l'orbite terrestre. Or, Roemer s'aperçut que le retard des éclipses des satellites de Jupiter est le plus grand dans le moment où cette planète est le plus éloignée de la terre, et en outre, il vit que ce retard correspondait au temps que la lumière devrait mettre à parcourir le diamètre de l'orbite de la terre. De là, il conclut que la vitesse de la lumière n'est pas instantanée, comme le croyait Descartes: il calcula le temps qu'elle emploie pour venir du soleil jusqu'à nous, et l'espace qu'elle parcourt en une seconde.

Cette découverte ne fut pas d'abord admise comme vraie par les savants. Cassini lui-même la rejeta, bien qu'il n'eût pu trouver aucune autre manière d'expliquer les retards périodiques qu'éprouvaient, d'après ses propres tables, les éclipses des satellites de Jupiter. Au commencement du dix-huitième siècle, le doute à l'égard de la vitesse de la lumière existait encore parmi les astronomes.

Dans la seconde moitié du dix-septième siècle, les principaux centres d'où jaillirent les plus grandes lumières pour l'étude de l'astronomie furent les académies et les observatoires de Paris et de Londres. L'astronomie avait été fondée en France par Dominique Cassini, aidé de Picard et Auzout; elle fut inaugurée en Angleterre, par Flamsteed et Halley. Après eux, devait venir l'immortel Newton.

Mécanique.

Cette science était encore, au commencement du seizième siècle, à peu près telle que l'avaient laissée les anciens, et pendant ce siècle, elle fit peu de progrès. On employait, dans la pratique des arts de construction, le levier, le

plan incliné, la poulie, la corde, le coin, machines simples, connues et appliquées de tous temps. En l'absence d'idées justes et vraies en théorie, la pratique se réduisait à une routine aveugle. On n'avait encore que des notions vagues et incomplètes de la force et des lois du mouvement.

Dans la seconde moitié du seizième siècle, le marquis Guido Ubaldi, ami et protecteur de Galilée, en posant quelques principes vrais, répandit quelques lumières sur la statique (partie de la science qui a pour objet les conditions de l'équilibre). Sa mécanique, quoique n'étant pas exempte d'erreurs, fut un progrès. Dans l'antiquité, les mécaniciens avaient adopté, selon Pappus, une méthode qui consiste à ramener au levier toutes les machines; Guido Ubaldi a plusieurs fois appliqué heureusement cette méthode. Il composa un traité spécial sur la vis d'Archimède.

Plusieurs mécaniciens du seizième siècle traitèrent du mouvement des projectiles; mais comme les principes fondés sur l'expérience, l'observation et le calcul, manquaient totalement dans cette partie de la science, ils tombèrent dans les plus grossières erreurs. On trouve au sujet de l'artillerie, dans quelques livres de ce temps, des théories fondées sur des principes ridicules. Le mathématicien Tartaglia, bien que raisonnant parfois d'après des principes erronés, découvrit une partie de la théorie des projectiles. Il trouva qu'une bouche à feu doit avoir une inclinaison de 45 degrés pour que le boulet soit lancé le plus loin possible par la même quantité de poudre. Mais il raisonnait à peu près aussi mal que l'avait fait Cardan sur le plan incliné.

Un homme qui, dans cette période, eut en mécanique des idées plus justes et d'un ordre plus élevé que toutes celles qu'on trouve exposées par ses contemporains, fut Benedetti (1). Il attribue la force centrifuge à la tendance qu'ont les corps à se mouvoir en ligne droite, ce qui fait que, livrés à eux-mêmes, ils s'échappent par la tangente. Il mesure parfaitement la force dans le levier recourbé, en démontrant qu'elle est proportionnelle à la longueur de la perpendiculaire tirée du centre du mouvement ou du point d'appui à la ligne de direc

(1) J.-B Benedetti diversarum speculationum math. et phys., etc. 1585, in-folio.

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