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Pour tout ce qui regarde la rédaction et l'administration, s'adresser à M. LUDOVIC LALANNE, directeur-gérant.

SOMMAIRE.

LUD. LALANNE. Le droit du seigneur, par M. Jules DELPIT, 241. Dix-huit lettres inédites de Mme de Pompadour, 244.— G. de BeauCOURT. Chants historiques du xv siècle, 248. ED. COURNAULT. Channing et l'unitairianisme, 250.— G. BRUNET. La dernière édition de Rabelais, 252.- Journal du marquis de Dangeau, 254.- Lettre inédite de Béranger, 257.

Nouvelles littéraires de la Grande-Bretagne, par M. G. MASSON, 257. — Manuscrits sur peau humaine, 258.

Bulletin bibliographique. Sagas du Nord, par
M. L. de BAECKER, 259.— Histoire-musée de la ré-
publique française, par M. A. CHALLAMEL, 259,- La
relation des trois ambassades du comte de Carlisle, par
M. le prince A. GALITZIN, 260.- Les mosaïques chré-
tiennes des églises et basiliques de Rome, par M. A.
BARBET DE JOUY, 260. - Le prince de Ligne, par
PEETERMANS, 260.- Les prêtres français émigrés aux
États-Unis, par M. C. MOREAU, 261.— Aline, par
M. Valery VERNIER, 261.
Publications nouvelles. Livres français, etc., 261.
-Journaux français, 262.-Périodiques français, 262.

LE DROIT DU SEIGNEUR, PAR M. JULES DELPIT (1).

Au mois d'avril 1854, M. Dupin, dans un rapport présenté par lui à l'Académie des sciences morales sur les Coutumes locales du bailliage d'Amiens, publiées par M. Bouthors, fut conduit tout naturellement à parler avec quelques détails du célèbre droit féodal, trop connu sous le nom du droit du seigneur, pour que nous ayons besoin de l'expliquer.

Les termes de ce rapport furent, en ce qui concernait ce droit odieux, relevés dans l'Univers par M. Veuillot, qui attaqua avec sa verve et sa violence habituelles les assertions de l'ancien procu

(1) Réponse d'un campagnard à un Parisien, ou réfutation du livre de M. Veuillot sur le droit du seigneur. Paris, Dumoulin, 1857. in 8.

1857.

reur-général à la Cour de cassation. Plus tard, le journaliste revit et augmenta ses articles de manière à en faire un volume qu'il intitula : Le Droit du seigneur au moyen âge.

Si, pour triompher dans la discussion d'un fait historique, il suffisait de manier le sophisme avec une rare habileté, d'éblouir les lecteurs par un grand appareil de recherches et d'érudition, de manière à leur faire croire qu'on a tout vu et tout lu; s'il suffisait de s'écrier à chaque instant que la démonstration est faite quand elle est encore à faire, d'altérer les textes ou de les passer sous silence quand ils sont gênants; si, enfin, le talent déployé par l'avocat pouvait empêcher une mauvaise cause d'être une mauvaise cause, M. Veuillot aurait le droit de chanter victoire, comme il l'a fait sur tous les tons. Malheureusement pour lui, son argumentation, si spécieuse qu'elle soit au premier abord, ne tient pas devant l'examen des faits, et elle vient d'être réduite à sa juste valeur par un érudit fort versé dans l'étude des textes du moyen âge, M. Jules Delpit (1), à qui nous reprocherons seulement d'avoir employé parfois une vivacité de langage que l'on doit toujours regretter de rencontrer dans une discussion scientifique.

vains d'un certain parti une ère de bonheur, de justice et de vertu vers laquelle nous serions trop heureux de revenir, bien que ses bienfaits aient été tellement méconnus par les générations qui en jouissaient, qu'elles ont fait tous leurs efforts pour en sortir. Sans aucun doute l'époque où la féodalité s'est constituée et où le servage a remplacé l'esclavage, a été un immense progrès sur la barbarie et l'anarchie des temps antérieurs, comme la renais

On sait que le moyen âge est aux yeux des écri

(1) M. Jules Delpit a publié en 1847 Collection générale des documents français qui se trouvent en Angleterre in-1.

11.

comme

sance a été un progrès sur le moyen âge,
le XIXe siècle est un progrès sur le XVII et sur le
XVIII; mais, en lui laissant la part de gloire et de
travail qui lui revient dans la grande transforma-
tion de l'humanité, il semblerait bien permis de
trouver que tout n'était pas alors pour le mieux
dans le meilleur des mondes. Tel n'est pas l'avis
de M. Veuillot et de quelques-uns de ses amis qui
regardent la moindre attaque contre le moyen âge
comme un blasphème, une impiété, et de plus une
preuve flagrante d'ignorance. De là leur colère
quand on a osé rappeler l'attention sur le droit du
seigneur.

naissance feodale de Jean, seigneur de Mareuil, en 1228:

« Et mi comme sire de Mareuil puet et doit avoir le droit de braconage sur filles et fillettes en medite seigneurie, si se marient; et si ne les bracone, echent en deux solz enver ledite seigneurie.

Passons à d'autres :

Un acte du XVe siècle porte que le seigneur de Rivière-Bourdet a le droit, si on ne lui paye pas certaine redevance « de aler, s'il lui plaist, couchier avec l'espousée. »

Les coutumes d'Amiens, rédigées en 1507 et

publiées par M. Bouthors dans le livre dont nous avons parlé plus haut, ne sont pas moins expli

cites :

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Quant aucun des subgiets ou subgiettes du dit lieu de Drucat se marye... le marié ne peult couchier

sans le congié, licence et autorité dudit seigneur

Suivant M. Veuillot, ce droit n'a jamais existé. Si on l'a cru longtemps, si on le croit encore dans tous les pays de l'Europe, c'est la faute des protestants et des catholiques, qui travaillèrent « à couvrir le passé d'ignominie »; les premiers « avec l'instinct sûr de la haine", les seconds avec l'ar-la première nuyt avec sa dame de noupce (noce deur de l'ignorance.... » Les gens de loi ne furent pas les moins ardents à cet ouvrage. La justice ayant toujours été « un peu jalouse de la religion. Voilà une malédiction qui débarrasse M. Veuillot d'une foule de témoins incommodes; mais, quoi qu'il fasse, ces témoins existent, et pour les évoquer nous n'avons qu'à faire un choix parmi les textes que M. Delpit a recueillis (1). Procédons par ordre. Voici ce que dit un trouvère normand du XIIe siècle, dans un fabliau intitulé : Les Vilains de Verson:

Se vilain sa fille marie
Pardehors de la seignorie,
Le seignour en a le culage :
Trois sols en a del mariage.

- Trois sols en a! Reison por quoi?
-Sire, je l'vos di par ma foi.

Jadis advint que le vilein
Ballout sa fille par la mein
Et la livrout à son seignor,
(Ja ne fut de si grant valor)
A faire idonc sa volonté,
Anceis qu'il li eust el doné
Rente, chatel ou héritage

Por consentir le mariage.

Ce texte nous paraît suffisamment clair; ce qui ne l'est pas moins, c'est celui que le savant Dom Carpentier a mentionné dans le supplément au glossaire de Ducange, et qu'il a tiré d'une recon

(de Rambures) ou que le dit seigneur ait couchié avecque la dite dame de næupce, lequel congié il est tenu de demander audit seigneur et à ses officiers; pour lequel congié obtenir ledit maryé est tenu baillier un plat de viande........ avec deux los de bruvaigne... et est le dit droit appellé droit de culage.»

Du nord transportons-nous au midi; voici ce que fournit le dénombrement des droits du seigneur de Louvie, en 1538. Nous traduisons le passage:

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Item, quand aucuns de telles maisons mentionnées ci-dessus déclareront se marier, avant que de connaître leurs femmes, ils seront tenus de les présenter pour la première nuit à notre dit seigneur de Lobie pour en faire à son plaisir, ou autrement lui payer redevance (1).

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Item, à chaque enfant qui naîtra, ils sont tenus d'apporter une certaine somme d'argent, et s'il advient que le premier né soit un mâle, il est franc, parce qu'il peut avoir été engendré des œuvres du dit seigneur de Lobie en la première nuit de ses susdits plaisirs (2).

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(1) Item que quant auguns de tals maisons qui part dessus seran declarades se mariden, daban que conescen lors molhers, son tenguts de los presentar per la prumère neyt à nostre dit senhor de Lobie per en far a son plaser, o autrement lor balhar son tribut.

(2) Item, si ben cascun enfant que engendren, lo son

(1) M. Delpit en a rassemblé soixante-douze; mais ils tenguts portar certane somme de diners, et si advien que ne sont pas tous également concluants.

lo premier nascut sic enfant mascle, es franc, perço qui

Dans un dénombrement donné par le seigneur | c'est-à-dire la coutume fut changée en amende. de Bizanos le 12 septembre 1674, on lit la clause suivante :

66

Enfin, pour affaiblir par des procédés du même genre le témoignage du jurisconsulte. « Boyer, dit-il, a pu être assez peu catholique. Il est pos

Item, temps passés les dits soubmis étoient en 'telle subjetion que les predecesseurs dudit dénom-sible aussi que ses ouvrages, publiés après lui, brant avoient droit toutes et quantes fois qu'ils (les dits soubmis) prenoient femme en mariage, de coucher avec l'espouse la nuict plus prochaine des nopces; ce devoir a esté pourtant converty par sesdits predecesseurs en cest autre, sçavoir: que les soubmis sont tenus et obligés, chaque fois qu'il se fait des nopces dans ledit lieu, de lui porter une poule, une épaule de mouton, deux pains et un gateau et trois ecuelles d'une sorte de bouillie, vulgairement bibaraou (1). »

Encore une citation.

Le président Nicolas Boyer, savant jurisconsulte du XVIe siècle, neveu du cardinal Guillaume de Cambray, archevêque de Bourges, raconte avoir été témoin du fait suivant, lorsqu'il était avocat de l'officialité de ce diocèse :

« Et j'ai vu moi-même dans la cour de Bourges, devant le métropolitain, un procès d'appel, dans lequel le recteur ou curé d'une paroisse prétendoit avoir, d'après la coutume, la première connaissance charnelle de la mariée; coutume qui fut annulée, et lui condamné à l'amende (2). »

Arrêtons-nous un instant sur ce fait, car il va

nous fournir un précieux échantillon de la manière

dont M. Veuillot discute les textes.

Boyer dit : J'ai vu moi-même, expression fort précise qui se change en j'ai entendu dire sous la plume du rédacteur de l'Univers, lequel parle encore ailleurs du ouï dire de Boyer. Ce n'est pas tout. Les éditions de l'ouvrage du savant président portent et in emendam condemnatus, le curé fut condamné à l'amende. Mais M. Veuillot a fait comme Sganarelle, il a changé tout cela et remplacé ces mots par in emendam commutata,

pourra star engendrat de las obras deudit senhor de
Lobie en ladite prumere neyt de sous susdits plasers.
(1) Voy. Bascle de Lagrège, Essai sur le droit du sei-
gneur et J. Delpit, p. 116.

(2) Et ego vidi in curia Bituricensi, coram metropolitano, processum appelationis, in quo rector, seu curatus parochialis prætendebat ex consuetudine primam habere carnalem sponsæ cognitionem, quæ consuetudo fuit annullata et in emendam condemnatus. N. Boyer, Decisiones, 297 no 17.- J. Delpit, p. 80-81.

aient été revus par des mains protestantes, » Or ce digne président était si bon catholique et ses ouvrages ont si peu été revus par des mains protestantes, que l'un de ses éditeurs s'exprime ainsi : «Si je voulois faire connoître sa piété et sa religion, ce livre ne suffiroit pas. Je me contenterai de dire qu'il haïssoit plus que chien et vipère cette nouvelle race de gens dont l'esprit est plein d'hérésies, la bouche de blasphèmes, et que tous mes collègues du parlement de Bordeaux l'ont connu si ardent à la prière, que jamais son livre d'Heures ne quittoit ses mains. » Que dire d'une pareille argumentation? Ce n'est pourtant là qu'un des moindres tours de passe-passe exécutés par M. Veuillot. M. Delpit en relève de semblables presque à chaque page.

Pour se faire, par comparaison, une idée de la manière dont au XIe ou au XIIe siècle le droit du

seigneur a dû être exercé dans quelques-unes des provinces de la France, il suffit de lire le passage où Fléchier, dans ses Mémoires sur les grands jours d'Auvergne, raconte la condamnation du comte de Montvallat, qui abusait singulièrement « d'un droit qui est assez commun en Auvergne, qu'on appelle le droit des noces. Autrefois on ne l'appeloit pas si honnêtement; mais la langue se purifie, même dans les pays les plus barbares. Ce droit, dans son origine, donnoit pouvoir au seigneur d'assister à tous les mariages qui se faisoient entre ses sujets; d'être au coucher de l'épousée; faire les cérémonies que font ceux qui des rois. Cet usage ne se pratique plus aujourvont épouser par procuration les reines de la part d'hui, soit parce qu'il seroit incompatible aux seigneurs d'être de toutes les noces de leur village et leurs jambes dans les lits de tant de bonnes gens qui se marient, que parce que cette coutume étoit un peu contraire à l'honnêteté et qu'elle exposoit les gentilshommes qui avoient l'autorité et qui n'avoient pas toujours la modération à des tentations assez dangereuses. Cette honteuse cérémonie a été changée en reconnoissance pécuniaire, et, par un accord mutuel, les seigneurs ont demandé des droits plus solides, et les sujets ont été bien aises de se rédimer de cette loi si dangereuse à leur

honneur. M. de Montvallat trouvoit que les anciennes coutumes étoient les meilleures, lorsque quelque belle villageoise alloit épouser, et ne vouloit pas laisser perdre ses droits. Et comme on le tenoit assez redoutable sur ce sujet et qu'on craignoit que la chose passât la cérémonie, on trouvoit encore plus à propos de capituler et de lui faire quelque présent considérable. Quoi qu'il en soit, il faisoit valoir ce tribut, et il en coûtoit bien souvent la moitié de la dot de la mariée. »

Dans presque toutes les contrées où la féodalité a été constituée, on retrouve les traces du droit du seigneur, qui fut de bonne heure, il est vrai, converti presque partout en une redevance; mais l'existence même de ce droit n'a jamais été révoquée en doute par les savants et les jurisconsultes des temps passés. Aussi M. le rédacteur en chef de l'Univers frappe-t-il de sa réprobation des hommes tels que Ducange, Laurière, Brodeau, etc., etc., qui ont eu le malheur de voir dans les textes ce qu'il fallait y voir, et il n'hésite pas

à formuler ainsi son jugement sur le Glossaire de la basse latinité : « C'est un travail immense, mais d'où la critique est absente, et où même elle ne pouvait se rencontrer. » Pour M. Veuillot, en effet, il n'y a guère d'autre critique que celle dont nous avons donné plus haut un spécimen, à propos de Boyer.

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DIX-HUIT LETTRES INÈDITES DE MADAME DE POMPADOUR. Jusqu'à présent on connaît peu de lettres de madame de Pompadour. Celles qu'on a publiées en 1774 (4 vol. in-12) sont depuis longtemps reconnues pour apocryphes, et le Dictionnaire des pseudonymes les attribue à Crébillon fils. De nos jours on a vu passer et repasser, dans les ventes d'autographes, une douzaine de pièces, cette fois très-authentiques, mais qui, je le pense, n'ont pas été publiées, et qui, sauf deux ou trois, ne présentent pas grand intérêt. Les lettres suivantes dont nous devons la communication à l'obligeance de notre collaborateur M. G. Masson, ne sont pas dans le même cas (1). Elles sont écrites à la même personne, au duc d'Aiguillon, le favori de la célèbre marquise qui n'eut point en général de bonheur dans le choix qu'elle fit de ses créaturres. Ce fut elle qui maintint si longtemps à la tête des armées le prince de Soubise, dont les échecs si nombreux pendant la guerre de Sept ans, et les malheurs domestiques faisaient dire à Louis XV qu'il ne lui manquait plus que d'être content (2). Ce fut encore elle qui défendit le duc d'Aiguillon, gouverneur de Bretagne, dont les exactions et l'arrogance avaient soulevé ce pays tout entier, dans les luttes violentes qu'il eut à soutenir contre le parlement et les états de cette province. Les lettres que voici en font foi :

Jay recu, monsieur, votre grande lettre ou je vois, au milieu de choses fort honêstes pour moy, cette petitte teste (que vous scavès) malade, et que jau

M. Delpit ne s'est pas contenté de traiter à fond les questions relatives au droit du seigneur, au formariage, etc., il a consacré trois chapitres à donner les particularités les plus intéressantes sur les mœurs, et, en particulier, sur la pudeur au moyen âge. Tout cela est fort instructif. Il y a entre autres une charte de Jacques de Montmorency, sei-ray bien de la peine atraiter, enfin je la prendray gneur de Crèvecœur-en-Auge, qui fait mention d'un droit que l'imagination la plus honteusement déréglée a seule pu faire inventer; et cela se passait en 1606!

Chemin faisant, M. Delpit a relevé quelques erreurs de son adversaire. L'une d'entre elle est trop curieuse pour que nous la laissions dans l'ombre. «M. Rymer, dit M. Veuillot, a publié à Londres, en 1816, un recueil de tous les actes du gouvernement d'Edouard Ier. » Or le M. Rymer en question est Thomas Rymer, né en 1650, mort en 1713, et dont le volumineux recueil Fœdera, conventiones, etc., publié à Londres en 1704, fut réimprimé de 1739 à 1745, puis enfin en 1816.

LUD. LALANNE.

volontiers parce je crois quelle le meritte, malgré tous ces deffauts. Je ne suis pas inquiette de ce moment, ou les ennemis sont devant vous, je rends justice à votre zêle, et ne doute pas de vos succès, je vous assure que je les désire de tout mon cœur, et pour le bien de la chose, et par l'intérêt très

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sincère que je prends à vous. Soyés en je vous prie, | j'en meurs de peur, car je suis sure que vous les monsieur, bien convaincu.

6 septembre 1758.

M. de la Chastre ne rendra surement pas SaintMalo (1). (Sans signature.) A monsieur, monsieur le duc d'Aiguillon.

25 au soir.

Vous jugerés, monsieur, par la reponce de M. Boulogne que je joins icy, que la lettre que je luy ay écritte hier, l'a déterminé a vous envoyer le sieur Dumesnil, je ne le connais pas, mais on en dit beaucoup de bien, et il a été élevé chez M. de Saint-Florentin, qui vous instruira davantage ce qu'il vaut. La lettre de M. Berryer vous fera voir qu'il désire autant que nous, la réussite de notre affaire; je crains bien qu'elle ne manque faute d'argent; le controlleur ne m'a pas répondu à cet article de ma lettre, je ne puis croire que M. de la Bolliere (?) ne puisse trouver un million dans tant de villes commerçantes. Vous avés raison, monsieur, il est tres vray que mon esprit et mon cœur sont continuellement occupés des affaires du Roy, mais sans l'attachement inexprimable que jay pour sa gloire et sa personne je serois souvent rebutée des obstacles continuels qui se rencontrent à faire le bien. J'aurois préféré la grande niche, et je suis fachée d'être obligée de me contenter de la petite, elle ne convient point du tout à mon humeur. Mandés moy la grâce que vous désirés pour M. de Pontval, je m'engage à la solliciter. Vos projets m'onts paru excellents, et il ma semblé que le maréchal pensoit comme moy. Vous voulés donc absolument que je conte sur votre cœur, mais vraiment je ne me feray pas une grande violence pour désirer que vous soyés capable d'une amitié digne de celle que je suis très-disposé à avoir pour vous. Bonsoir, M. Cavendish (2).

J'ay encore eu la fievre la semaine derniere et je reviens bien lentement.

(Sans suscription ni signature.)

Les vilains ne vous attendronts pas, monsieur,

(1) Les Anglais qui, au mois d'avril 1758, avaient fait une descente près de Saint-Malo, débarquèrent de nouveau à Saint-Lunar et à Saint-Cast; mais, le 4 septembre, ils furent battus par les troupes que le duc d'Aiguillon avait rassemblées. Voy. les lettres de la colonne suivante. (2) Nous ignorons quelle était la cause de ce surnom.

rosseriés magnifiquement. Vos lettres font plaisir à lire on y reconnait le cytoyen le sujet zélé et éclairé et une petite teste très bonne dans ce moment et dont je dis tous les biens du monde parceque je les pense; bonsoir, monsieur.

(Sans date ni sans signature.) A monsieur, monsieur le duc d'Aiguillon.

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Cest avec bien du regret, monsieur, que je ne vous ay pas dit tout ce que je pensois avant hier, sur la gloire dont vous venés de vous couvrir, mais ma têste estoit sy douloureuse, que je nus de force que pour vous dire un mot. Nous avons chanté aujourdhuy votre te deum et je vous assure que ça été avec la plus grande satisfaction; javois predit vos succès, et en effet comment étoit il possible, quavec autant de zèle, dintelligence, une teste aussy froide, et des trouppes qui bruloient (ainsy que leur chef), de venger le roy, vous ne fussiés pas vainqueur? Cela ne se pouvoit pas. Un petit billet que je vous ay ecrit, avant votre brillante journée, a dû vous faire connaitre ma façon de penser pour vous, et la justice dont je fais profession. Distes moy, je vous prie actuellement, si vous estes bien faché contre moy, de n'avoir pas cédé à vos instances, et aux belles raisons que vous m'avés conté, elles ne valoient rien dans ce temps, et je les trouverois encore plus détestables aujourdhuy. Un autre n'auroit pas fait aussi bien que vous, je serois dans la douleur au lieu d'etre dans la joye, vous vous seriés perdu, et il y auroit bien de quoy. Osés dire maintenant que ma teste ne vaut pas mieux que la votre, je vous en deffie.

MM. de Broc et d'Aubigny vous pourronts re

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