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Saint-Julien, et range quelques pièces (entre autres l'agréable récit des barricades) « parmi les plus spirituelles et les meilleures du temps. » On peut l'en croire, car les importants travaux qu'il a déjà publiés sur cette époque lui ont rendu cette littérature plus familière qu'à aucun autre.

Le volume que nous annonçons se compose du Courrier burlesque et des trois premiers Courriers françois, le tout soigneusement annoté et accompagné de nombreuses variantes. En tête se lit une excellente introduction contenant, outre les indications bibliographiques, des observations générales sur l'esprit de la Fronde et le mouvement des esprits à cette époque. Nous la louerons bien sincèrement, tout en faisant nos réserves au sujet de quelques points sur lesquels nous ne partageons nullement les idées du savant éditeur.

N'oublions pas de mentionner, mais seulement en passant, car nous comptons y revenir plus tard, la savante édition de Floire et Blanceflor, par M. du Méril; les Œuvres françoises de Bonaventure des Periers, le premier volume des Euvres complètes de Ronsard (1), et la suite des Variétés historiques et littéraires (par M. Ed. Fournier) et des Anciennes poésies françoises (par M. A. de Montaiglon). Arrivons maintenant au livre mystique de l'Internelle consolacion (2), qui doit se trouver assez étonné de figurer en pareille compagnie.

On sait quelles vives controverses ont soulevées, depuis plusieurs siècles, les questions relatives à l'auteur inconnu de l'Imitation de Jésus-Christ. On a successivement mis en avant une quinzaine de noms, dont le nombre est aujourd'hui réduit à trois : Thomas à Kempis, le chancelier Jean Gerson, et un très-problématique abbé de Verceil, Jean Gersen, autour desquels on se livre encore actuellement un combat opiniâtre, chaque agresseur démontrant fort bien la faiblesse des arguments de ses adversaires, sans pouvoir parvenir à établir solidement l'opinion qu'il leur oppose. MM. Moland et d'Héricault, sans entrer dans le détail de cette discussion, repoussent péremptoirement ces trois noms. Pour eux, l'Imitation n'est pas une

œuvre individuelle, mais collective. Un thème primitifa été successivement élaboré et remanié de génération en génération, depuis le XII siècle jusqu'à la fin du XIV° ou le commencement du xv, époque où il reçut définitivement la forme sous laquelle il nous est parvenu. Ils s'appuient, entre autres, sur un argument qui nous semble avoir une assez grande valeur : le caractère encyclique d'une partie de la littérature du moyen âge (1). On peut ne pas adopter leurs raisonnements dans toutes leurs particularités, mais leur hypothèse me paraît jusqu'à présent fort admissible. Je dis jusqu'à présent, car enfin la découverte d'un manuscrit, d'un passage inédit, peut venir jeter tout à coup un nouveau jour sur la question.

Maintenant quelle est la patrie de l'auteur ou des auteurs de l'Imitation? Ici encore il y a incertitude et discussion. De ceux qui regardent l'auteur comme inconnu, les uns penchent pour l'Italie, d'autres pour les Pays-Bas ou l'Allemagne, d'autres pour la France (2). C'est à cette dernière opinion, soutenue par MM. Michelet et V. Leclerc, que se rallient MM. Moland et d'Héricault, et j'avoue que sur ce point je serais assez porté à ne pas me séparer d'eux. La statistique des éditions et des traductions (3) prouve que nulle part le livre n'a reçu et ne reçoit encore l'accueil qu'il a obtenu chez nous.

Il y a pourtant contre cette opinion une petite difficulté de détail que n'ont point mentionnée les éditeurs, et qui a été signalée il n'y a pas trèslongtemps, par je ne sais plus quel archéologue. Au livre IV, ch. 5, de l'Imitation, il est dit : « Le prêtre revêtu des ornements sacrés, tient la place de Dieu.... Il a devant et derrière lui la croix du Seigneur.... Il porte devant lui la croix sur sa

(1) MM. Moland et d'Héricault vont infiniment trop loin

quand ils disent que « ce qui avoit lieu en littérature, l'art nous le montre encore avec plus d'éclat. Croit-on que ces grandes cathédrales qu'un siècle ne suffisoit pas à bâtir s'élevoient sur un plan dessiné à priori par un architecte? Non, sans doute." Voilà une théorie qu'il leur sera, je crois, bien difficile, sinon impossible, de faire admettre par les archéologues. Pour ne citer qu'un

(1) Des Periers est édité par M. Louis Lacour; Ronsard exemple, on possède encore le plan fait à priori de l'un par M. Blanchemain. des plus grands monuments de l'architecture du moyeu âge, de la cathédrale de Strasbourg.

(2) Le livre de l'Internelle consolacion, première version françoise de l'Imitation de Jésus-Christ, nouvelle édition, avec une introduction et des notes par MM. L. Moland et Ch. d'Héricault.

(2) L'Angleterre est toujours restée en dehors du débat. (3) Nous regrettons que les éditeurs ne nous aient pas donné ici des chiffres qui auraient été fort concluants.

chasuble... " Or, pendant le moyen âge, je ne crois pas que la chasuble ait jamais été en France ornée de ces deux croix. Cela n'a eu lieu que dans les liturgies italienne et allemande. Un Français ne peut donc avoir écrit ce passage, qu'il est possible de regarder comme interpolé.

Lexve siècle, c'est-à-dire précisément l'époque où les manuscrits nous donnent pour la première fois le texte de l'Imitation, vit aussi naître l'Internelle consolacion, qu'on doit appeler une traduction de l'Imitation, ou pour mieux dire une paraphrase avec arrangements, commentaires et additions, destinée à faire un livre populaire d'un traité monastique. Cette œuvre d'une très-grande valeur, écrite avec une grâce infinie, est l'un des morceaux les plus remarquables de la littérature religieuse au moyen âge. Quel en est l'auteur? Ici encore règne la plus grande incertitude. Il est vrai pourtant que dans une édition de 1498, le livre est donné comme ayant été « translaté (du latin de l'Imitation) en françois, par un religieux demeurant en le comté de la Marche, à la requête de Bernard d'Armignac, comte de la Marche en 1447. » Mais on peut à la rigueur conserver quelques doutes sur la valeur d'un pareil témoignage, qui est vraisemblablement la reproduction d'une note écrite sur un manuscrit.

Je regrette d'analyser d'une manière aussi incomplète la savante introduction des éditeurs, et de n'avoir pu traiter plus longuement les questions qu'ils ont abordées, car cette introduction est une étude consciencieuse sur la littérature mystique du moyen âge. Le texte de l'Internelle consolacion scrupuleusement revu et rétabli d'après les manuscrits et les anciennes éditions,

complète ce travail qui, à nos yeux, est destiné à leur faire grand honneur.

Oxford-Street, Belgravia et Pall-Mall devraient donc, comme au temps jadis, resplendir de bottes vernies, ondoyer de crinolines, et embaumer d'essence de mousseline. Mais non; le quartier fashionable est tout à fait abandonné, et, cette année-ci, les étrangers qui voudront frayer avec la haute société anglaise devront aller à Manchester. Manchester!... qui a pu avoir l'idée excentrique, biscornue, ridicule, d'ouvrir une exposition de tableaux, de sculpture, d'objets d'art, au milieu de deux ou trois mille usines dont les cheminées vomissent jour et nuit la fumée du charbon de terre?... Qui a pu...? Mais voilà ce que c'est que l'argent. La seconde ville du Royaume-Uni se passe une fantaisie de millionnaire, et, à parler franchement, l'exposition de Manchester sera, au point de vue artistique, extrêmement remarquable. La nation anglaise n'a pas de collection à comparer au musée du Louvre; d'un autre côté, les galeries particulières du duc de Devonshire, de lord Ellesmore, du marquis de Westminster, etc., renferment des chefs-d'œuvre que la grande majorité du public ne connaît pas, et que l'on aura maintenant le loisir d'admirer pendant quelques mois dans le véritable palais construit à cet effet par la ville de Manchester. Naturellement, au lieu de venir dépenser de l'argent à Londres, nos élégants et nos élégantes se réserveront pour une fête qui ne doit pas se renouveler.

Le mois de mai nous amène aussi l'inauguration de la nouvelle salle de lecture du British museum, et à ce sujet l'amour-propre national de vos chers alliés est dans un état de jubilation que vous ne sauriez vous imaginer. Ils auraient inventé la

poudre qu'ils ne seraient pas plus fiers. Je dois rendre hommage à la vérité, et déclarer bien net

Nous parlerons très-prochainement, de la col-tement, que pour la politesse, la célérité et l'exaclection des Mémoires que M. Jannet va joindre à sa Bibliothèque elzevirienne, et dont la publication a commencé par deux volumes fort intéressants : les Mémoires de Campion, et les Mémoires et le Journal inédit du marquis d'Argenson.

LUD. LALANNE.

NOUVELLES LITTÉRAIRES DE LA GRANDE-BRETAGNE.

Monsieur le directeur,

Nous voici bien et dûment entrés dans ce qui s'appelle la saison de Londres; Regent-Street,

titude du service, les employés du British museum sont irréprochables. La magnifique salle circulaire, dont l'ouverture aura lieu le 8 du mois prochain, est bâtie de manière à contenter les plus exigeants, et si les autorités voulaient seulement imposer à certains lecteurs un silence complet, je n'aurais pas le moindre grief à enregistrer.

D'une bibliothèque aux livres qu'elle doit contenir, la transition est toute naturelle; je commence par un ouvrage dont j'ai déjà parlé dans un des premiers numéros de ce bulletin, et qui a une importance historique fort réelle ; je veux dire la cor

respondance d'Horace Walpole (1). Le deuxième volume vient de paraître, et comprend l'espace de dix années, 1746-1756, à savoir ce qui se 'rapporte à l'insurrection jacobite, aux procès qui s'ensuivirent, à la campagne des Pays-Bas, au tremblement de terre de Lisbonne. Détails sur les événements publics, anecdotes frisant quelquefois le scandale, bons mots, critiques souvent fort justes sur les hommes et les choses, tout cela se trouve en abondance dans un livre qui prendra sa place parmi les monuments de la littérature anglaise. L'éditeur, M. Cunningham, s'est parfaitement acquitté de sa tâche; ses notes sont amusantes, judicieuses, exactes, et les nombreux portraits gravés pour chaque volume, d'après des tableaux authentiques, en forment le complément nécessaire.

Vous avez entendu parler sans doute de feu sir Charles Napier, lieutenant général, chevalier de l'ordre du Bain et gouverneur des possessions anglaises dans l'Inde? En voilà un dur-à-cuire! Quatre volumes de ses mémoires sont déjà imprimés, et gare à ceux dont il croit avoir à se plaindre. Vraiment, sir Charles, vous ne vous gênez pas! Quoi! les éditeurs de journaux sont des blackguards! lord Brougham, un drôle ! sir James Graham, un sot!... Allons donc ! Eh bien! malgré tout cela, les mémoires de sir Charles Napier méritent d'être lus; ils sont pleins d'anecdotes très-piquantes sur la société anglaise, et on y trouve expliqués et justifiés beaucoup d'incidents relatifs aux dernières campagnes dans les Indes (2).

Toutes les fois que la presse de Londres se distingue par quelque nouveauté, les imitateurs surgissent en foule. Après la publication des Oxford Essays et des Cambridge Essays, nous devions tout naturellement voir poindre à l'horizon des Edinburgh Essays. Cela n'a pas manqué. Sous sa couverture chocolat, ce troisième recueil s'annonce avec vigueur (3). Le premier article, qui traite de la philosophie platonicienne, et l'essai biographique de sir William Hamilton, sont des morceaux achevés. Puisque j'en suis à la métaphysique, je signalerai la nouvelle réimpression

(1) The life of Horace Walpole, Earl of Oxford. Edited by Peter Cunningham. Vol. II. London, Bentley.

(2) The life and opinion of Sir Charles Napier, by Lieutenant general Sir William Napier. Vols I-IV. London, Murray.

(3) Edinburgh Essays. Edinburgh, Black.

des œuvres complètes de lord Bacon (1); les trois premiers volumes, conprenant le texte latin des traités philosophiques, sont édités et annotés par M. Ellis. La préface générale est une analyse succincte, mais très-suffisante, du système de Bacon, et j'ai vu avec plaisir que M. Ellis rend justice à votre compatriote, M. Bouillet, dont l'excellente traduction fut remarquée, il y a quelques années. La vie d'une femme d'esprit, écrite par une autre femme d'esprit ! — cela ne se rencontre pas tous les jours; voilà pourquoi nous recommandons à nos lecteurs la biographie de Charlotte Bronté (2). Miss Gaskell était, sans contredit, la personne la plus capable d'entreprendre cette tâche; elle s'en est admirablement acquittée. La première édition de ce livre a paru il y a quelques semaines, et elle a été épuisée immédiatement. La seconde vient d'être mise en vente.

Harrow on the Hill, 27 avril.

GUSTAVE MASSON.

BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE.

Mémoires sur les contrées occidentales, traduits du sanscrit en chinois, en l'an 648, par HIOUENTHSANG, et du chinois en français, par M. STANISLAS JULIEN. Tome I, contenant les livres I à VIII, et une carte de l'Asie centrale. In-8, Paris, Benjamin-Duprat; A. Durand (3).

Sous le titre général de Voyages des Pèlerins bouddhistes, M. Stanislas Julien se propose de publier une suite de relations de voyages, écrites par des Chinois qui visitèrent l'Inde du IV* au Xe siècle de notre ère. Le volume qui paraît aujourd'hui est le deuxième de la collection. Il contient les mémoires de Hiouen-Thsang, qui passa dix-sept ans (de 629 à 645) dans les contrées situées à l'occident de la Chine et surtout dans l'Inde. C'est la relation la plus étendue et la plus importante de celles qui ont été conservées ; elle embrasse la description de cent trente-huit royaumes ou pays.

Quoique le voyageur chinois, en faisant son

(1) The Works of Francis Bacon, a new edit. Vols I-III. London, Longman.

(2) The life of Charlotte Bronté, by Mrs Gaskell. 2 vols. London, Smith, Elder and Co.

(3) Les mémoires de Hiouen - Tsang formeront les volumes II et III de la collection des Voyages des pèlerins bouddhistes.

voyage, ait eu surtout en vue ce qui regarde le | bouddhisme, et qu'il enregistre avec une pieuse exactitude le nombre des couvents qu'il rencontre sur sa route, et celui des religieux qui les habitent; quoiqu'il ne laisse passer aucun stoupa (monument qui renferme des reliques) sans raconter la légende relative à sa fondation, il ne néglige pas pour cela de donner des détails de tout genre sur les mœurs et les usages, sur le climat et les productions du pays qu'il traverse.

Si, par exemple, il vous dit (p. 101): qu'auprès du stoupa qui renferme l'ombre du Bouddha, se trouve celui qui renferme ses cheveux et ses ongles, il n'a pas, en commençant la description du pays où se trouvent ces monuments, oublié de dire quelle est son étendue de l'est à l'ouest, et du sud au nord; qu'il est riche en grains et produit une quantité de fleurs et de fruits; que le climat est d'une chaleur tiède; que les mœurs y sont simples et honnêtes, etc. Les personnes que le bouddhisme intéresse trouveront dans cet ouvrage, en même temps qu'un grand nombre de légendes indiennes, une foule de détails de tout genre qu'il ne faut pas espérer rencontrer ailleurs, car les bouddhistes ayant été chassés de l'Inde vers la fin du VIIe siècle, les brahmanes se sont empressés de faire disparaître, en même temps que les livres du culte rival, tous les monuments élevés par leurs adversaires. Ils avaient assez bien réussi dans cette œuvre de destruction pour que les savants européens n'aient pu, qu'à une date relativement très-récente, reconnaître comme appartenant au culte bouddhique quelques monuments échappés à la destruction.

Le voyage de Hiouen-Thsang sera, pour ceux qui pourront visiter les lieux décrits par le voyageur, un guide excellent dans la recherche des monuments. Grâce à la restitution des noms sanscrits qui présentait une des plus grandes difficultés de la tâche du traducteur (difficulté que M. Julien a surmontée avec une habileté qu'on ne trouvera guère en défaut), les indianistes pourront suivre facilement la marche du voyageur chinois, et retrouver sans beaucoup de peine la trace des monuments qui peuvent exister encore, mais qui ont jusqu'ici échappé aux recherches des voyageurs et des savants. P. E. FOUCAUX.

Catalogue des actes de Philippe-Auguste, avec une introduction sur les sources, les caractères et l'importance historique de ce document, par LÉOPOLD DELISLE. Paris, Durand, CXVII et 656 pages in-8.

Ce gros volume est de tout point digne du savant maître Benjamin Guérard, à la mémoire duquel l'auteur l'a dédié. Le but est exposé en quelques lignes d'une manière fort simple. Les actes d'un souverain sont les documents les plus propres à éclairer l'histoire de son règne; et tout en servant à fixer des dates et à contrôler le récit des contemporains, ils nous font comprendre le jeu des institutions, les projets du prince, ses entreprises et leurs résultats. Le recueil de ces actes est donc d'une grande importance, et l'époque dont s'est occupé M. Delisle est bien choisie, car le règne de Philippe-Auguste est, à presque tous les points de vue, l'un des plus remarquables de notre histoire. Voici en deux mots comment le savant éditeur a compris son travail :

L'introduction, qui occupe plus de 100 pages, contient d'abord l'indication détaillée des sources où l'auteur a puisé, documents originaux conservés dans les bibliothèques et les archives, collections diplomatiques formées par les savants français et étrangers (p. I à LV). M. Delisle passe ensuite aux Caractères des actes de PhilippeAuguste (LV à CII), qu'il distingue d'après leurs formules, leur objet, et, chemin faisant, se livre à d'intéressantes discussions sur diverses formules de ces actes, leurs dates, et nous parle des grands officiers qui y figurent (sénéchal, bouteiller, chambrier, connétable, chancelier, etc.), des sceaux, de quelques actes faux ou douteux. La troisième partie enfin, intitulée : Importance historique de la collection des actes de PhilippeAuguste (CII à CXXIV), comprend, entre autres, un tableau chronologique des séjours de PhilippeAuguste, et des chapitres sur l'influence du roi en Allemagne, sur les Albigeois, la reine Ingeburge et la législation.

Vient ensuite un catalogue par ordre chronologique de 2,236 actes (p. 1 à 493), un appendice où est donné le texte de divers documents mentionnés au catalogue, une table des cartulaires et de quelques autres manuscrits, et enfin une table alphabétique des matières, ne formant pas moins de 150 colonnes.

On voit que rien ne manque à ce savant travail pour être d'une utilité incontestable à tous ceux qui auront désormais à s'occuper du règne de Philippe-Auguste.

Lettres sur l'agriculture, par M. VICTOR DE TRACY, ancien député de l'Allier et de l'Orne. Paris, librairie agricole de la Maison Rustique. 1857. In-12 de 227 pages. Prix : 2 fr. 50 c.

Il ne faut pas chercher, dans ce volume, de nouvelles théories agricoles; il n'y faut pas chercher non plus des conseils pratiques aux agriculteurs. La philosophie de l'agriculture s'y trouve surtout mise en lumière. M. de Tracy combat cette opinion très-répandue, que « les entreprises agricoles sont des causes de ruine inévitable pour les propriétaires aisés qui seraient tentés de leur consacrer le temps et l'argent dont ils peuvent disposer. Est-ce là un préjugé? ou cette opinion est-elle fondée sur de tristes expériences? Tels sont les termes du débat.

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Pour nous, nous pensons que les chances de succès varieront suivant les aptitudes des personnes. Ici s'élève une question fort grave, et aujourd'hui pleine d'actualité : l'éducation publique tend-elle à développer ou à étouffer ces aptitudes? La solution n'est pas douteuse, et M. de Tracy déplore, avec raison, le système d'éducation, où l'utile est trop souvent sacrifié à l'agréable.

M. de Tracy, qui tient à prouver que l'on peut aisément joindre l'un à l'autre, a écrit un livre très-littéraire.

Nous ne savons trop quel jugement les gens du métier porteront sur ces études philosophiques et sociales de M. de Tracy; beaucoup crieront au paradoxe, mais tous seront obligés de reconnaître qu'elles sont sorties d'une pensée généreuse et libérale, et que, par suite, elles sont essentiellement louables et dignes de méditation.

Les Tragiques, par THÉODORE AGRIPPA D'AUBIGNÉ, nouvelle édition, revue et annotée par LUDOVIC LALANNE. Paris, Jannet, 1857, in-8 (Bibliothèque Elzevirienne).

Les deux seules éditions connues des Tragiques avaient été données par d'Aubigné lui-même, en 1616, in-4, et en 1623, in-8. La dernière contenait environ 400 vers de plus que la précédente, et

d'assez nombreuses variantes. Ces variantes et additions se retrouvent dans l'édition que nous annonçons. L'éditeur y a joint une notice contenant l'analyse du poëme, et environ 1000 ou 1100 notes destinées à éclaircir les obscurités philologiques ou historiques du texte. Le volume est terminé par un glossaire et une table alphabétique des matières.

Rejse igjennem Danmark (Voyage à travers le Danemark), par Me MARIA BOJESEN. 1 vol. in-8 (en danois) de 1,000 pages, avec 7 cartes et 1 planche. Copenhague, 1856.

Voici un livre qui vient de conquérir en Danemark une popularité méritée; c'est à la fois une œuvre littéraire et un ouvrage utile à consulter pour la géographie, la topographie et l'histoire de cet intéressant pays.

Dans sa description du Danemark, Mme Maria Bojesen a choisi la forme attrayante d'un récit de voyage. Elle visite successivement la capitale, l'île de Seeland; Laaland et Falster; le Jutland, le Slesvig, Fionie, Langeland, et les autres petites îles de l'archipel danois.

Elle ne se contente pas de donner des détails statistiques, mais elle s'arrête là où il s'est passé quelque fait historique important; elle en fait le récit avec un sentiment patriotique que nous aimons à retrouver sous la plume d'une femme, et elle emprunte à propos, aux poëtes qui ont illustré le Danemark, des citations propres à fixer l'attention du lecteur sur les points les plus importants.

Ce livre est accompagné d'une carte générale du royaume, de six cartes de détail, et d'un plan de Copenhague au moyen âge, fort curieux à consulter. Les cartes qui ne laissent rien à désirer sous le rapport de l'exécution, forment le complément indispensable de cet estimable ouvrage.

Petit Vocabulaire latin-français du XIIIe siècle. Extrait d'un manuscrit de la bibliothèque d'Évreux, par L. ALPH. CHASSANT. Paris, Aubry. XVI et 48 pages in-12.

Ce petit volume, que l'éditeur a fait précéder d'une introduction intéressante, ne peut manquer de piquer la curiosité des philologues, auxquels il pourra fournir quelques mots qui ne se trouvent pas dans les glossaires de notre vieille langue. Ce

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