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total entre les vingt-cinq marchés de la localité,
ne donne que 97 ventes pour chacun, tandis
que, d'après les hommes les plus compétents con-
sultés par l'auteur, ces ventes s'élèvent de 100
à 150 par marché. L'évaluation approximative
n'est donc pas exagérée (1).

Le Lot-et-Garonne et le Tarn-et-Garonne sont assez avancés déjà pour réformer de bonne heure leurs bœufs du travail et les livrer à l'engraissement. L'extension qu'y a prise cette spéculation, d'après ce que nous venons de voir, en est une preuve convaincante. En outre, les concours de boucherie de Bordeaux ont bien des fois démontré que ces contrées n'étaient même pas étrangères à l'engraissement précoce. Tout indique qu'il doit s'établir dans cette région un centre considérable de production de viande, où l'engrais à l'étable, de pouture ou autre, mais de pouture principalement, est destiné à prendre un grand développement. Sa situation entre les villes de consommation comme Bordeaux, Toulouse, Montpellier, Marseille, etc., et les voies de fer qui relient entre elles ces villes en traversant la région, sont on ne peut plus favorables à une telle conclusion, en grande partie vraie dès à présent.

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cisément dans la contrée dont il s'agit, ces animaux, souvent maigres, étiques, après les semailles d'automne, ordinairement leur dernier travail, doivent avoir atteint un état de graisse satisfaisant en quelques mois, afin d'être vendus avant le carême; rarement on attend jusqu'à Pâques. Le propriétaire pousse donc les bœufs (pour me servir de l'expression adoptée en cette circonstance), et les pousse outre mesure.

« Les premiers jours de son repos, le bœuf à engraisser reçoit du fourrage à discrétion; à cela s'ajoute une petite portion, soit d'aliments farineux, soit de racines. Lorsqu'il a été tenu à ce régime durant quelque temps, qu'il a pris un peu de chair, son alimentation change totalement; il n'a plus alors que des féveroles en graine ou en farine, de la betterave, quelquefois des pommes de terre cuites et de la farine de froment de qualité inférieure; tout cela en quantité tellement considérable, qu'après quelque temps de ce régime, l'estomac n'a plus assez de force pour digérer cette masse d'aliments; aussi voit-on les excréments remplis des graines dont on nourrit ces animaux. Dans la plupart des cas, le propriétaire ne tient pas compte de cela, et continue d'augmenter la ration (1). »

M. Vialas donne ensuite à cet égard d'excellents conseils, dont le principal est relatif à la néces

que progressivement. Nous n'y insisterons pas, car ces prescriptions sages résultent de l'exposé que nous faisons des bonnes méthodes usitées..

Mais en pénétrant plus loin dans la même direction, le long du canal du Midi, on trouve dans les plaines du Lauraguais l'engraissement de pou-sité de graduer la nourriture et de ne l'augmenter ture pratiqué dans des conditions bien moins avantageuses. Là, le cultivateur tire du travail de ses attelages de bœufs tout le parti possible, et ne se décide à les engraisser que pour s'en défaire à des conditions moins onéreuses, lorsqu'ils sont à peu près exténués. Il les achète entre quatre et cinq ans et les garde jusqu'à ce qu'ils aient accompli leur dixième ou leur douzième année. Ces animaux ont alors perdu plus de la moitié de leur valeur marchande. C'est-à-dire qu'une paire de bœufs garonnais payés 1,000 francs à cinq ans, ne valent plus à dix que 400 ou 450 francs. Il a fallu durant ce temps amortir la différence, et le prix de revient du travail a été grevé de l'amortissement. On voit tout de suite quel avantage il y aurait à renouveler plus souvent les attelages, en livrant aux engraisseurs, comme le font les cultivateurs dont nous avons parlé plus haut, des animaux qui n'ont pas encore subi de moinsvalue. Les travaux seraient assurément tout aussi bien exécutés, et même mieux, par des bœufs toujours dans la plénitude de leur force, les risques de maladie et de mortalité considérablement diminués, et en somme les bénéfices plus grands pour les individus comme pour la société. C'est un progrès que le temps réalisera, là comme ailleurs.

En attendant, les cultivateurs de la plaine fertile du Lauraguais, entre Toulouse et Castelnaudary, n'entreprennent l'engraissement de leurs bœufs, répétons-le, que pour s'en défaire avec moins de désavantage lorsqu'ils ne peuvent plus travailler.

« Ces animaux, nous apprend M. J. E. Vialas, vétérinaire à Montgiscard (Haute-Garonne), pré

(1) Voy. La Culture, t. II, 1860-1861, p. 189.

Du reste, il faut dire que l'engrais de pouture est usité à peu près partout sur une petite échelle, dans toutes les situations où le bœuf est le principal agent du travail agricole Dans le Limousin, en Auvergne, dans la Bresse, dans la Nièvre, l'Allier, le Cher, le Charolais et la Normandie même, où les embouches dominent, on le pratique dans des proportions plus ou moins grandes. L'alimentation est au fond semblable dans tous ces pays, puisque le foin en forme la base; la différence n'est que dans les matières qui y sont ajoutées. Ici, comme dans le Limousin, par exemple, ce sont des raves, remplacées bientôt par de la farine; ailleurs, ce sont des betteraves unies à des farineux et à des tourteaux; en Bresse, les engraisseurs donnent par jour de 15 à 20 kilogr. de fourrage sec, 10 kilogr. de pommes de terre cuites et 10 kilogr. de farine mélangée avec du son. Et partout on excite les animaux à boire, à l'aide de condiments dont nous nous occuperons particulièrement plus loin, à propos de l'emploi du sel.

Disons à cette occasion, pour ce qui concerne les boissons, qu'elles ont une part considérable dans les bons résultats de l'engraissement à l'étable. « Dans les bouveries, dit M. Magne, il est à désirer que les boeufs aient de l'eau à discrétion, et même que l'on mélange au liquide ou de la farine, ou des tourteaux pour les exciter à boire. L'eau, chargée de farine, devient aigre, mais graduellement; les animaux s'habituent ainsi facilement à la boire dans cet état et s'en trouvent très-bien. »

(1) La Culture, t. II, 1860-1861, p. 75.

«Dans le premier cas, les 2,400 kilog. de fourrage seraient consommés comme ration d'entretien et perdus pour la production, tandis qu'il n'y en a de perdus que 1,200 kilog. dans le second cas, et seulement 800 dans le troisième. »

DE L'ENGRAISSEMENT DES ANIMAUX DE L'ESPÈCE BOVINE. 799 M. L. de Fontenay a donné sur l'engraissement | 2,400 kilog. de foin, sans donner aucun produit des bœufs à l'étable, dans le nord de l'Écosse, des utile excepté un peu de fumier; tandis que, si l'on détails fort intéressants (1). Là, comme en France, double sa ration, la même quantité de nourriture l'opération commence à l'entrée de l'hiver. Dans produira, en 150 jours, 120 kilog. de viande, à le plus grand nombre des cas, les animaux sont 1 kilog. par 10 kilog. de foin consommé en sus de attachés par paires dans des stalles, et n'en sortent la ration d'entretien. Si, au moyen de bons aliplus que pour aller à l'abattoir. La base de l'ali- ments, de grains, de tourteaux, de farine, de sel, mentation est formée de paille d'avoine et de tur- on parvient à faire consommer à ce même bœuf neps. A sept heures du matin, chaque bœuf reçoit l'équivalent de 24 kilog. de foin, cette même quanune poignée de paille, puis une forte ration de tité de fourrage sera consommée en 100 jours et turneps. Les animaux sont laissés en repos jus- produira 160 kilog. de viande. qu'à trois heures du soir, après avoir reçu, toutefois, vers neuf heures ou neuf heures et demie, au moment où les bouviers se retirent après avoir nettoyé l'étable, une seconde poignée de paille. A ce moment, tous les boeufs sont déjà couchés. Entre deux et trois heures, on donne une nouvelle ration de paille, puis vient la distribution de farine ou de tourteaux. Si les animaux en doivent recevoir deux fois par jour, une moitié a été déjà donnée le matin, dès que la première poignée de paille a été mangée. Le reste du pansage est en tout semblable à celui de la matinée, sauf que la quantité de turneps est plus forte. Vers cinq heures, on fait la litière, et à sept heures, la journée se termine par la distribution d'une poignée de paille. Cela ne ressemble guère à ce qui se pratique chez nous, où l'on est bien loin de laisser aux boeufs à l'engrais autant de tranquillité.

« Je ne parle pas de donner à boire, dit M. de Fontenay, car les animaux, depuis le jour où ils commencent à manger des turneps jusqu'au moment où ils partent pour Londres ou retournent aux herbages, ne reçoivent pas une goutte d'eau; on la regarde même comme nuisible. J'ai vu plusieurs cours à bœufs où l'eau passait naturellement et où on l'avait arrêtée avec intention. »> Tous les engraisseurs de l'Écosse ne rationnent pas leurs animaux. La plupart donnent des turneps à discrétion. La quantité de tourteau de lin est ordinairement par jour de 1 kilog. à 1kil,500. Celle de farine d'avoine qui remplace le tourteau est de 4 à 5 litres. La ration de paille varie de 2 à 3 kilog. ; celle de turneps est en moyenne de 70 à 80 kilog.

On ne voit point, en effet, quelle pourrait être l'utilité de fixer à cet égard une limite, si ce n'est celle qui est imposée par la puissance digestive de l'animal et par la nécessité de ne pas perdre des aliments rebutés et qui peuvent s'altérer. « La fixation des rations, dit M. Magne, ne doit avoir d'autre limite que l'appétit des animaux, c'est la première règle à suivre; il faut même, non-seulement donner à manger à discrétion, mais distribuer les aliments de manière à exciter l'appétit, car il y a avantage à faire consommer la nourriture dont on dispose dans le temps le plus court possible. Les animaux à l'engrais qui consomment le plus de nourriture sont, en général, ceux qui la payent le mieux. Il est facile de comprendre pourquoi.

« Un bœuf de 500 kilog. nourri avec 8 kilog. de foin par jour consommerait, en dix mois,

(1) Voy. Annales de l'agriculture française, 5e série, t. XIX, p. 18 et suiv.

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C'est en vertu de ce principe extrêmement simple et facile à comprendre qu'il importe beaucoup, dans l'alimentation des animaux d'engrais, de régler la succession des matières alimentaires dont on dispose, de manière à ce que les plus nutritives, en même temps que les plus faciles à digérer, soient administrées les dernières. La capacité de l'estomac a des bornes qu'il n'est pas possible de dépasser. A mesure que le poids vif de l'animal augmente, la richesse relative de sa ration doit s'accroître sous le même volume; sans cela, elle ne saurait plus être en rapport avec la nécessité de son accroissement. C'est la raison qui fait ajouter les grains, les farineux, les tourteaux vers la fin de la période d'engraissement.

On peut prendre pour type, à ce point de vue, des rations qui étaient usitées dans le temps à l'Institut agricole de Hohenheim. Au commencement de l'opération, les bœufs y recevaient, par jour, 7kil,500 de regain, 2kil,500 de paille, 15 kil. de betteraves et pommes de terre, et 3 kilog. de grain moulu ; vers le milieu, le regain et la paille restaient au même taux, les racines et tubercules étaient portés à 22kil,500 et le grain à 5 kilog.; vers la fin, la quantité des betteraves et pommes de terre était réduite à 10 kilog., et toujours avec la même proportion de paille, le regain s'élevait à 10 kilog. et le grain moulu jusqu'à 7kil,500. Dans ces conditions, on voit que, pour un volume sensiblement égal dans l'estomac, la puissance digestive s'exerce sur des aliments dont la valeur nutritive est beaucoup plus élevée.

Nous n'avons encore rien dit des étables qui conviennent le mieux pour l'engrais de pouture, du moins n'en a-t-il été question qu'en passant, à propos de l'usage suivi dans le nord de l'Écosse. Deux conditions essentielles sont à observer, c'est que la tranquillité et la plus minutieuse propreté soient assurées aux animaux. Il n'est pas néces| saire d'insister sous ce dernier rapport, quant au nettoyage de l'étable et à l'entretien de la litière. Les prescriptions sont les mêmes que pour tous les autres animaux. Il faut dire, toutefois, que l'aérage devant être moindre, la température plus élevée et la lumière moins vive, les soins de ce genre ont besoin d'être encore plus attentifs. L'enlèvement du fumier, le nettoyage des crèches qui ont contenu surtout des aliments farineux, doivent être pratiqués chaque matin, l'air des étables étant d'autant plus facile à vicier par les

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émanations qui s'en échappent qu'il est plus chaud. L'activité de la respiration est défavorable à l'engraissement, mais les animaux ne se trouvent pas moins bien de respirer un air pur. C'est surtout la quiétude parfaite qui hâte l'accumulation de la graisse. Tout doit être, pour ce motif, disposé dans l'étable de manière à ce que les animaux ne soient que le moins possible dérangés. Nous en avons dit la raison en commençant ce chapitre, et nous n'y reviendrons pas. On peut recommander à cet égard la pratique de l'Ecosse.

L'usage généralement suivi, dans ce même pays, d'étriller légèrement les bœufs à l'engrais mérite aussi l'attention. Des expériences maintenant assez nombreuses faites dans les étables des engraisseurs du Nord tendent à prouver que le tondage exerce sur la marche de l'engraissement une influence bienfaisante. Les boeufs tondus, paraît-il, profitent mieux de la nourriture qu'ils absorbent en un temps donné. Nous n'avons aucune peine à l'admettre, pour des raisons que nous avons déjà fait valoir. Les animaux tondus sont au moins exempts de ces démangeaisons qui les tourmentent quand ils ont la peau sale et qui leur font dépenser, par l'agitation qu'elles causent, une partie de leur alimentation.

Si donc on ne croit pas devoir adopter la pratique du tondage, il faut au moins tenir par un pansage journalier la peau des animaux à l'engrais dans un grand état de propreté. Les engraisseurs français ont beaucoup à gagner sous ce rapport, car il est vrai de dire que, dans la presque totalité des contrées où se pratique la pouture, la peau des animaux n'est l'objet d'aucune espèce de soin. Il sera bon maintenant de faire connaître les données économiques de quelques opérations bien conduites.

Voici d'abord un compte d'engraissement opéré sur trois bœufs de six ans, en moyenne, par M. Gallemand, propriétaire à Beaumont près Valognes (Manche). L'opération commença le 20 novembre 1861 et fut achevée le 27 avril 1852. Elle avait duré par conséquent 159 jours. Les trois bœufs pesaient ensemble 2,940 kilogr. poids vif, au début, et furent estimés 950 francs, ce qui est un prix peu élevé, il faut le remarquer. Leurs consommations se raisonnent de la manière suivante :

Valeur initiale des 3 boeufs

Trèfle sec, 1,840 kilogr. à 26 fr. les 500 kilogr.. Betteraves, du 20 novembre au 1er décembre, de 32 à 48 kilogr. par tête, puis 112 à 144 kilogr. par jour, en totalité 19,200 kilogr. à 18 fr. les 100 kilogr..... Féveroles, 1 litre par tète du 20 novembre au 7 décembre, puis 2 litres par jour pendant 142 jours, en totalité 852 litres, à 14 fr. les 100 litres... Farine d'orge donnée en eau blanche à partir du 8 décembre et à raison de 2 litres par tète, en totalité 950 litres à 18 fr. 50 c. l'hectolitre....

Paille pour litière, 954 bottes valant.

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950 fr.

96

345

120

88

95

1,694 fr.

Ils ont donc produit un bénéfice de 216 francs.

Dans cette opération, l'accroissement en poids vif avait été de 120 kilogr. La vente avait eu lieu à raison de 40 centimes le kilogr. sur pied, ce qui est bon marché.

Nous ferons remarquer que dans ce compte il n'est question ni de l'intérêt du capital engagé, ni des risques, ni des frais de `main-d'œuvre et accessoires. Il est par conséquent incomplet. Mais il suffit pour indiquer la marche de la spéculation. Il en résulte que le chiffre de 10 kilog. équivalant en foin sec, en sus de la ration d'entretien, est suffisant pour produire 1 kilogr. de viande, ainsi qu'on l'a dit plus haut. Dans une pratique bien conduite, 20 à 22 kilog. de fcin donnent en général 1 kilogr. de poids vif. L'on doit remarquer, cependant, que cette quantité s'augmente avec l'âge des animaux. D'où il faut conclure qu'il y a toujours avantage à choisir pour l'engraissement des bêtes encore jeunes.

Les comptes suivants dressés par M. Chamard pour l'engraissement à l'étable de la race charolaise ne laissent rien à désirer. Ils sont établis pour une seule tête.

Prix d'achat ou estimation.....

Intérêt de cette somme pendant cinq mois à 5 p. 100. Foin de pre, 10 kilogr. au début, 5 kilogr. vers la fin, soit 7,500 pendant 150 jours, ou en totalité 1,225 kilogrammes à 40 fr. les 1,000 kilog..... Betteraves, 50 kilogr. au début, 30 kilogr. vers la fin, soit en moyenne 40 kilogr. pendant 150 jours et en totalité 6,000 kilogr. à 12 fr. les 1,000 kilogr.. Farine d'orge, en moyenne, 6 litres pendant 75 jours, en totalité 4k,50, à 10 fr...............

Tourteaux. 2 kilogr. en moyenne pendant 60 jours, soit 120 kilogr. à 20 fr. l'hectolitre.. Soins, 150 jours à 12 c. l'un...............

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TOTAL de la dépense....... 539 f. 80

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A la fin de l'opération, l'animal pèse 423 kilogr. nets, ce qui met son prix de revient à 1 fr. 26 le kilogr. Ce prix est en général compensé par celui de vente. Les denrées consommées ont donc été bien payées au cours du marché, et il reste en sus la valeur du fumier comme bénéfice net de la spéculation. M. Chamard évalue les engrais en poids à 6,230 kilogr. et en argent à 31 francs environ, à raison de 5 à 6 francs les 1,000 kilogr., estination du compte de culture.

On voit par ce qui précède que la spéculation d'engraissement de pouture est en elle-même fort avantageuse. Nous ne sommes pas en mesure de raisonner, comme nous venons de le faire pour les opérations dans lesquelles entrent les betteraves, la pratique de la Vendée qui tire surtout parti des choux. Des évaluations exactes. nous manquent pour cela, les rations n'ayant pas été fixées, non plus que l'accroissement en poids des animaux. Mais il est permis d'admettre que cette pratique est encore plus productive, en raison du faible prix de revient de la denrée. Les engraisseurs de ce pays auraient à voir si elle ne le serait pas davantage encore en faisant intervenir plus largement les farineux et en y ajoutant une ration de tourteaux de lin qui sont produits en assez grande quantité dans la contrée, la culture de la plante y étant fort répandue. Cela diminuerait la durée de l'opération pour chaque bête et laisserait disponibles une forte part des fourrages verts qui, dans une

distillerie de betteraves dépendent autant de leur mode d'emploi que de leur richesse en azote.

période déterminée, pourraient être consommés | lieu d'admettre que les effets des divers résidus de par un plus grand nombre de bœufs à l'engrais. C'est un calcul à faire, et nous en recommandons l'expérimentation aux engraisseurs vendéens. Ici, le mieux n'est point l'ennemi du bien. Ils pourront peut-être faire leur profit des pratiques qui vont être indiquées ci-après, de manière à les combiner avec les leurs.

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Alimentation à base de résidus. L'engraissement des animaux de l'espèce bovine est devenu une conséquence nécessaire de l'annexion à la ferme de certaines industries agricoles, qui lais sent comme résidus de fabrication des matières alimentaires d'une valeur nutritive variable, mais qui ne peuvent autrement être mieux utilisées. Agricoles ou non, d'ailleurs, ces industries n'entraînent pas moins la nécessité de l'engraissement, lorsqu'elles sont pratiquées sur une certaine échelle. Les brasseries, les amidonneries, les distilleries de grains, mais surtout les sucreries et distilleries de betteraves, dont l'extension a été si grande dans ces derniers temps, toutes ces spéculations sont liées à celle du bétail d'engrais.

C'est surtout la dernière, qui, à ce point de vue, a donné lieu à de nombreuses discussions, sur la valeur comparative des résidus ou pulpes, suivant le système adopté pour la fabrication de l'alcool. La polémique a éclairé ce sujet de telle sorte qu'il ne laisse maintenant plus rien à désirer, et que l'on peut donner des chiffres précis sans qu'il soit nécessaire de les discuter à nouveau.

Nous n'avons pas à nous occuper incidemment ici de la préférence qui doit être accordée à tel ou tel système de distillation. L'expérience semble avoir prouvé que sous le rapport de la valeur alimentaire de leurs résidus, ils peuvent être considérés à peu près comme égaux, à la condition que chaque résidu soit consommé sous la forme la plus convenable, relativement à ses qualités propres. Quoi qu'il en soit, les pulpes sont conservées dans des silos ou fosses de 1,50 à 2 mètres de profondeur, subdivisées en compartiments de 2 mètres de large, séparés par de petits murs en briques. Ces fosses sont creusées sous un hangar et maçonnées. Chaque compartiment, recouvert d'un plancher, est vidé successivement. Les silos ne présentent aucune différence avec ceux qui ont été décrits précédemment (p. 280), si ce n'est que l'on place un petit drain sur l'un des côtés vers lequel est dirigée la pente du fond, pour recevoir l'excès d'humidité. La pulpe y est entassée et recou verte de terre; pour l'extraire ensuite du silo, on la coupe successivement par tranches à la bêche.

Les drêches des distilleries de diverses graines, depuis qu'on a la faculté d'employer pour les fermentations du malt d'orge, au lieu des acides qui en rendaient l'usage impossible, ont été restituées à l'alimentation des animaux à l'engrais. Ces résidus fluides se vendaient dans le Nord à raison de 30 à 50 centimes l'hectolitre. Enlevés dans de grands tonneaux, dit M. Lefour, ils étaient amenés à proximité de l'étable, et, à l'aide d'une gouttière en

L'emploi des résidus se pratique notamment en Belgique et dans la région du nord de la France, où les industries dont il s'agit existent depuis long-bois, on les faisait couler dans les auges. temps et prennent chaque année une nouvelle extension. Nous pouvons prendre pour type ce qui se passe dans cette dernière région, sur les opérations de laquelle M. Lefour a donné les renseignements les plus complets et les plus circonstanciés. Il nous suffira donc de les analyser.

Dans le Nord, dit-il, les résidus de sucreries, distilleries et brasseries, ainsi que les tourteaux de graines oléagineuses, font la base principale de l'engraissement; les farineux n'arrivent guère qu'en seconde ligne, et le foin ne joue qu'un rôle accessoire. C'est la pulpe de betteraves qui forme la masse la plus importante des matériaux employés. Depuis le développement des distilleries, celle qui résulte de l'extraction de l'alcool a pris sa place à côté de celle qui provenait de la fabrication du sucre ; mais des différences existent entre elles sous le rapport de la valeur nutritive : quant à la dernière, le mode d'extraction du jus exerce une influence sur sa qualité ; celle-ci est meilleure, lorsque la pulpe a été pressée sans lavage préalable; après la macération que subit la première, à l'état de pulpe ou à celui de cossettes, elle est inférieure. Eu se basant sur la proportion de matières azotées, les chimistes ont différé d'avis dans l'appréciation de la valeur nutritive des résidus provenant des divers procédés de distillation; mais il est loin d'être démontré que ce soit là un signe certain. Les résultats de la pratique n'ont pas toujours confirmé les appréciations chimiques, et cela prouve que la question est complexe. Il y a

Sans nous arrêter aux divers modes de spéculation adoptés par les sucriers ou distillateurs du Nord pour tirer parti de leurs résidus, soit qu'ils engraissent des animaux à leurs risques et périls, soit qu'ils prennent en pension ces animaux appartenant à des tiers, qui sont ordinairement des bouchers, moyennant un prix journalier débattu par tête, nous indiquerons tout de suite le régime et les rations auxquels ces animaux sont soumis. A cet égard, il y a une distinction à faire entre les boeufs et les vaches, qui ne sont pas traités tout à fait de la même façon. Voici d'abord pour les bœufs.

L'engraissement dure ordinairement quatre

mois.

Dans un premier exemple donné par M. Lefour, et emprunté à la pratique de M. Fievet, de Masny, un boeuf de 700 kil. a été amené au poids de 850 kil. dans cette période, en le soumettant au régime journalier suivant :

Pulpe de betterave....
Drèche de bière.....
Tourteau.....

Farine de féveroles en bouillie.
Hivernage Foin haché, plus
3 kilogr. de paille en litiere..

fer Mois.

2e Mois. 3e Mois. Le Mois. 35k

40k

35

33k

5

7

5

5

2

3

4

5

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Un second exemple fourni par le même auteur diffère sensiblement, quant aux proportions des matières composant la ration. Il se rapporte à un boeuf du Hainaut, engraissé par M. Gouvion, de

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Dans ce mode d'engraissement, le régime comporte trois repas par jour, distribués de la manière suivante :

A quatre heures du matin, on donne d'abord 2kil,500 de foin. A cinq heures, l'animal reçoit de 5 à 8 kilog. de pulpe, de 2 à 5 kilog. de drêche, puis sa boisson avec le tourteau.

Après ce premier repas, il est étrillé et l'étable est curée, à moins que la paille ne reste sous les animaux.

A dix heures et demie, deuxième repas: pulpe, 5 à 8 kilog.; tourteau, 3 kilog.; racines, 6 kilog.; drêche, 2 kilog.; boisson avec tourteau.

A quatre heures du soir, troisième repas: pulpe, 7 kilog.; drêche, 2 à 5 kilog.; boisson avec tourteau; foin, 2kil,300.

Entre les repas, repos et isolement complets. Chaleur convenable dans l'étable.

On engraisse dans le Nord beaucoup plus de vaches que de bœufs. Nous prendrons pour exemple de cette spéculation l'étude qu'en a faite M. Lefour chez M. Demesmay, où elle se pratique sur une grande échelle et dans les meilleures conditions. Chez cet habile cultivateur, l'âge moyen des vaches engraissées est de sept ans, leur poids de 470 kilog., que l'on peut porter à 520 kilog. dans un engraissement de cent dix jours. M. Demesmay, dit M. Lefour, n'a pas de limites déterminées d'engraissement; il vend quand le prix offert lui présente de l'avantage. La nourriture de chaque bête se compose, par jour, de 25 kilog. de pulpe, 3 kilog. de tourteaux, 2 kilog. de foin et 3 à 5 kilog. de paille. La ration est distribuée en deux fois, à cinq heures du matin et à deux heures de l'aprèsmidi. De la paille est jetée dans le râtelier pour la nuit. On donne d'abord à boire environ 10 litres d'eau salée, à raison de 2 à 3 grammes de sel par litre, ensuite on distribue la pulpe, puis le tourteau. Celui-ci est, à l'état sec, concassé en petits morceaux de la grosseur d'une noisette. Une grande boîte prismatique de 1 mètre de long, 0,40 de large et 0,40 de haut, qui en est remplie, circule sur une brouette dans les étables, pour la commodité du service. Le vacher y puise à l'aide d'une mesure qui contient exactement 1kil,5, ration de chaque bête. Une petite pelle sert à remplir cette mesure, qui a 0,10 de haut et 0m, 30 de côté intérieur.

Entre les repas, on enlève le fumier et on arrose le sol avec de l'eau de chaux, avant de refaire la litière. Les vaches qui ont encore du lait sont traites; mais on- prétend, ajoute M, Lefour, que l'usage de l'eau salée les fait ordinairement tarir.

Le matin, les vaches reçoivent un pansage à la main. Chez M. Demesmay, l'on se sert pour cela de deux cardes, dont l'une, munie d'un manche

fixé dans son milieu est tenue à la manière d'une étrille et promenée sur le corps de l'animal; l'autre, en tout semblable à une carde à matelas, est tenue de l'autre main et sert à débourrer la première, de même que la brosse est employée pour faire sortir la poussière de l'étrille du cheval.

C'est dans le Nord, ainsi que nous l'avons dit, qu'ont été faits les essais qui paraissent être favo rables au tondage des bœufs et des vaches à l'engrais, notamment chez M. Gustave Hamoir, de Saultain, et chez M. Cheval, de Valenciennes.

La ration d'engraissement que nous venons de voir est évaluée, en équivalents, à 18 kilog. de foin, soit environ 4 p. 100 du poids moyen.

2

Une commission de la Société impériale et centrale d'Agriculture, dont M. Baudement était le rapporteur, a recueilli en 1855-1856 des renseignements sur la composition des rations d'engraissement à base de pulpe, usitées dans divers départements. Chez M. Giot, dans Seine-et-Marne, elle était de 70 kilog. de pulpe, 3 kilog. de foin, kilog. de paille et 3 kilog. de tourteau de colza; chez M. Pluchet, dans Seine-et-Oise, de 140 kilog. de pulpe, 5 kilog. de foin, 7 kilog. de paille, et 2 kilog. de tourteau; chez M. BordeBonjean, dans Indre-et-Loire, de 45 kilog. de pulpe, 10 kilog. de foin et 2 kilog. de grains ou farines, sans paille ni tourteau; chez M. Duplessis, dans la Marne, de 30 kilog. de pulpe, 5 kilog. de foin, 7,500 de paille, 1 kilog. de tourteau et 1 kilog. de grains et farines; chez M. Dargent, dans la Seine-Inférieure, de 32 kilog. de pulpe, 2,500 de foin, 1,500 de tourteau et 1,500 de grains et farines, sans paille; enfin, chez M. Delelis, dans l'Allier, de 56 kilog. de pulpe, 9 kilog. de foin, 4kil,200 de paille, 2 kilog. de tourteau, et 2 kilog. de grains et farines.

Quand on convertit tous ces chiffres en équivalents de foin, on voit que dans ces diverses rations la proportion de la pulpe varie, par rapport à l'équivalent total, entre 50 et 90 p. 100. Pour conserver à la viande les qualités qui la font estimer, il ne paraît pas que l'on puisse dépasser la plus faible des proportions qui viennent d'être indiquées. Plus forte au commencement de l'engraissement, la quantité relative des résidus doit être diminuée vers la fin de l'opération, à mesure que les matières sèches sont augmentées. Sans cela, l'on obtient de la viande molle, de la graisse peu ferme et de mauvais suif.

Calculons maintenant le prix de revient de la viande produite par le régime dont nous nous occupons, en prenant pour exemple quelquesunes des opérations dont nous avons donné plus haut le détail. Voici d'abord le compte du bœuf de 750 kilog., porté par M. Gouvion, de Roy, 900 kilog. de poids vif, ou 490 kilog. de poids net. Ce compte est emprunté, comme les suivants, à M. Lefour.

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