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et qu'elle n'arriverait tout au plus qu'à l'altérer dans son unité et à diminuer ainsi sa fécondité et les proportions de ses avantages.

« Mais quelle peut être la supériorité du travail du cheval sur celui du bouf? C'est ce que nous allons voir.

« Comparons d'abord leurs forces. Dans les races de chevaux de trait, l'effort ne s'éloigne pas du poids de l'animal lui-même. Christian l'a fixé à 360 kilogr.; Tredgold, à 400 kilogr. avec des chevaux moyens; mais ce n'est là, bien entendu, qu'un effort qui ne peut durer qu'un instant, et qui ne mesure pas la force de traction d'un cheval avec continuité, sans fatigue extraordinaire, et telle qu'elle se dépense dans un travail journalier exécuté à l'allure du pas. Cette dernière traction doit être réglée de 50 à 100 kilogr., suivant la force du cheval, la nature du travail et sa durée. Les expériences faites à cet égard, dans des conditions différentes, me font apprécier que, pour un cheval de labour, l'effort peut aller à 100 kil.; mais l'allure de ce cheval se ralentit alors presque à la moitié de ce qu'est celle d'un cheval traînant une charrette sur une route avec un effort de 50 kilogr.

M. de Gasparin dit que « deux chevaux de <«< charrue, d'un poids moyen de 320 kilog., et « qu'il a vus travailler en automne, ouvraient, << par journée de 10 heures, 16,495 mètres de sil« lon; ils marchaient à une vitesse de 0,46 par « seconde, et produisaient un effort de 98 kilog. >> << Il en est du bœuf comme du cheval sa force musculaire est supposée être égale à son poids (sous sa forme absolue, cette appréciation est nécessairement inexacte, elle ne peut s'appliquer qu'aux races également aptes au travail, le poids n'étant pour rien dans l'aptitude dont il s'agit pour l'espèce bovine, bien au contraire); mais, poursuit M. de Dampierre, l'effort considérable que cette appréciation indique ne peut durer qu'un instant et ne donne pas la mesure de la force de l'animal dans un travail constant, régulier, et qu'on peut prolonger sans abuser de l'animal. Je crois, cependant, que l'effort continu que peut faire un boeuf, comparé à sa force musculaire et statique, est supérieur à celui du cheval, et j'explique ce fait par la différence de caractère de ces deux animaux.

« Le bœuf travaille d'une manière constamment égale; la résistance ne rebute pas ses efforts, sa patience est à toute épreuve si l'effort devient plus considérable, il ralentit sa marche sans impatience, sans découragement. Le cheval, au contraire, a une vivacité qui le rend capable d'un vigoureux coup de collier; mais aussi une résistance continue et considérable l'irrite, l'épuise, et finit par le rebuter. »>

Après avoir cité sur ce sujet un passage emprunté à M. de Gasparin, l'auteur conclut ainsi sur ce premier point: « On peut donc admettre que si, pour un cheval du poids moyen de 320 kilog., l'effort peut être de 100 kilog., pour un bœuf de 450 à 500 kilog., il peut aller de 200 à 220 kilog. De là, ce me semble, la constatation évidente de la supériorité du bœuf sur le cheval pour tous les ouvrages qui exigent un fort tirage et un effort constant. >>

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C'est à cette conclusion que M. de Dampierre est arrivé, en comparant les résultats obtenus du travail des boeufs et des chevaux employés simultanément dans son exploitation de Plassac, en Saintonge.

Mais la question est plus générale et plus haute. Quand on l'envisage avec les lumières de l'économiste, on est conduit à s'apercevoir que dans sa généralité la préférence accordée au cheval ou au bœuf, dans les travaux des champs, est, comme l'a dit excellemment M. Édouard Lecouteux, « une véritable question de système de culture. » Laissons développer cette thèse par le savant praticien.

«Que trouvons-nous, en effet, dit M. Lecouteux, dans les pays réputés arriérés? Ici des terres argileuses, difficiles à labourer, des terres plus

ou moins en friche où la charrue rencontre des roches, des racines, un sous-sol résistant, des terres que leur état habituel d'humidité rend inabordables une partie de l'année, des terres inclinées, à relief tourmenté, où les charrois et les labours sont pénibles. Là, en dehors comme

à l'intérieur des fermes, des chemins naturels où les roues enfoncent jusqu'aux moyeux. - Puis, des fourrages mal récoltés et de mauvaise nature, une population nonchalante, donnant en quelque sorte ses allures aux animaux qui partagent ses travaux. Quelquefois même, et comme pour aggraver la situation, un pays malsain, dangereux pour tout ce qui n'est pas indigène : bêtes et gens.

Bref, partout un état de choses qui fait obstacle à l'organisation d'un travail accéléré, c'est-àdire à l'emploi d'attelages qui, grâce à la spécialité de leur conformation, pousseraient les opérations avec vigueur.

« Le bœuf, comme il est facile de le comprendre, est donc le moteur obligé de l'agriculture qui se trouve placée dans une telle situation. Cet animal crée constamment de la valeur. S'il marche attelé, cette valeur, c'est du travail. S'il se repose, cette valeur, c'est de la viande. Viennent donc des chômages forcés par suite de pluie, de neige, de sécheresse, de gelée, le bœuf change de rôle de bête de travail, il devient bête de rente. C'est, dans toute la force du terme, un animal à deux fins, qui, ne subissant pas de moins-value en prenant de l'âge, n'exige conséquemment pas de capital d'amortissement destiné à le remplacer. Est-il au travail? rien ne l'arrête. Se présente-t-il un mauvais pas à franchir? il s'enfonce sans crainte jusqu'au ventre dans la terre mouvante. Une racine, une roche ? il s'arrête si la résistance est trop forte; mais différant en cela du cheval qui s'arrête au premier coup de collier infructueux, il se remet en marche lorsque son conducteur a tourné la difficulté. S'agit-il de descendre une pente rapide? il se laisse glisser. De franchir une montée ? il tire d'une manière soutenue. Veut-on des labours corrects, tirés au cordeau, régulièrement profonds, aux arêtes d'égale hauteur, au relief général uniformément soutenu? C'est à la patience, à l'allure modérée des bœufs qu'il faut les demander.

« Et puis, raison décisive pour des cultivateurs au-dessous de leur position, ou tout au moins

forcés de suivre une culture extensive, le bœuf, tionnant sous la pression de circonstances favoest à la portée des petites fortunes. Soit qu'il s'é- rables à une grande activité industrielle, rachètent lève dans les communaux, dans les bois, dans les l'inconvénient de leurs dépenses par l'avantage pacages, soit qu'il s'achète avant ou après le dres- d'une fabrication plus prompte, plus considérasage, toujours est-il qu'il coûte moins cher que le ble, plus économique ? cheval et qu'il peut se revendre après avoir travaillé plusieurs années. Donc, pour le bœuf, pas ou presque pas d'amortissement.

«Transportons-nous maintenant dans ces pays de petite culture, où la division des fermes est un effet, non de la fertilité du sol et de l'activité des échanges, mais de la multiplication sur place d'une population privée de chemins, de débouchés, de capitaux, et consommant, dès lors, presque tous ses produits en nature. Là, encore, nous retrouvons le bœuf. Pourquoi ?

-

« Ainsi donc, la question du boeuf et du cheval, prise dans ses points extrêmes, peut se résumer comme il suit: Il y a des attelages qui ne donnent qu'un seul produit: le travail,- et d'autres attelages qui donnent deux produits : le travail et la viande. Les premiers décroissent de valeur en vieillissant et consomment sans rien produire lorsqu'ils ne travaillent pas : il faut toujours les amortir, et, quelquefois, les nourrir sans compensation correspondante. Les seconds n'ont pas besoin d'être amortis et convertissent toujours leur nourriture, soit en travail, soit en viande. Or, le che val est dans cette première catégorie, et le bœuf dans la seconde. Donc le cheval convient aux cultures assez riches pour spécialiser le rôle de chacun de ses agents, et pour fournir aux attelages une occupation soutenue, tandis que le bœuf véritable antipode du cheval, est le partage des cultures à travail intermittent, à labours et charrois difficiles, à fourrages médiocres, à terres morcelées, à débouchés restreints. D'où il suit, finalement, que l'effet du progrès agricole, ce sera de refouler le boeuf de travail et d'agrandir

« C'est qu'ici, en outre du manque de capitaux, viendra se faire sentir, plus rigoureusement encore que dans une grande culture, l'influence du manque de travail régulier. Tandis que, dans une ferme quelque peu vaste, l'application du principe de la division du travail permet d'affecter un personnel spécial au service des attelages; il faut que, dans la culture parcellaire, le maître fasse tout par lui-même et sa famille. Dans une même journée, il faut souvent conduire du fumier le matin, puis labourer, semer et herser une même pièce de terre. Arrivent ensuite les déplacements au marché, le fauchage, le liage des récoltes, le bat-la sphère d'activité du cheval. Seulement, il ne tage. C'est au maître de faire face à toute cette variété de travaux, et, pour qu'il en soit ainsi, il faut parfois qu'il laisse ses attelages au repos. Ici donc, le cultivateur est un véritable factotum; la spécialité n'est pas son fait: par conséquent, il importe que l'animal qui l'assiste dans cette tâche incessamment variée, ne soit pas lui-même une spécialité, un animal à une seule fin, une bête de travail seulement. C'est assez dire que le bœuf est seul possible, car, seul, il peut mettre à profit le temps du chômage que lui crée une pareille situation agricole.

<«< Dans une culture intensive, ce sont d'autres nécessités, d'autres ressources. La place d'honneur revient, en conséquence, de droit au cheval. Pourquoi ?

faut pas, dans cette substitution, vouloir marcher trop vite, trop en avant des besoins et des ressources de la société (1). »

Le lecteur, à coup sûr, n'aura pas trouvé la citation trop longue. Il nous eût été bien impossible de mieux établir la raison d'être du travail du bœuf dans l'état présent de notre économie rurale, et de mieux indiquer les circonstances qui devront la faire cesser. Ces considérations, appliquées aux situations extrêmes, sont marquées au coin de la plus rigoureuse observation. Mais, comme le fait remarquer ensuite M. Lecouteux lui-même, elles comportent aussi des situations intermédiaires, des états transitoires, dans lesquels les deux moteurs peuvent être avantageusement utilisés d'une manière simultanée, et dans des proportions qui varient comme ces situations. Ces notions d'économie rurale dominent de toute leur hauteur la question du travail de l'espèce bovine, et sont, ainsi que nous avons eu l'occa

«C'est que la culture intensive, sollicitée par les débouchés et secondée par le sol et le climat, demande et peut payer un travail régulièrement actif pour toute l'année: c'est que sa loi, son intérêt, c'est de marcher vite; c'est que, payant chersion de le faire remarquer précédemment, un des ses charretiers, elle est obligée de leur confier des attelages d'allure rapide: c'est que ses chemins sont bien entretenus: c'est que sa terre, mieux ameublie, mieux épierrée, mieux défoncée et défrichée, est plus facile à travailler: c'est que ces travaux soignés exigent de l'adresse et de la célérité. Elle préfère donc le cheval, malgré l'amortissement annuel de 16 à 17 pour 100, qui frappe cet animal à partir de l'âge de six ans. Peu lui importe cet amortissement, si, en fin de compte, le travail du cheval occasionne un excédant de plus de 16 à 17 pour 100 dans les recettes. Est-ce qu'il n'en est pas, en agriculture, du cheval comme, en industrie, de ces machines perfectionnées qui nécessitent un capital d'installation et d'entretien plus considérable, mais qui, fonc

éléments fondamentaux de la zootechnie de cette espèce. Elles priment toutes les déterminations relatives aux préférences à accorder entre les races travailleuses et les races de boucherie, et montrent que l'adoption de celles-ci doit suivre les changements dans les systèmes de culture qui les rendent profitables, non précéder ces changements. Les préconiser au détriment des autres et d'une manière absolue, c'est donc s'écarter des voies de la saine raison.

La tendance de l'économie rurale, dans les contrées de grande culture où le cheval avait été jusque-là le moteur exclusivement employé, est

(1) Traité des entreprises de grande culture, etc. T. I, p. 389 et suiv.

précisément d'y introduire le bœuf pour l'exécution de certains travaux que, dans ces conditions mêmes, il effectue plus économiquement. Dans la région de Paris, plusieurs cultivateurs éclairés et sachant compter en ont adopté la pratique. M. de Béhague, dans le Loiret, emploie des bœufs de travail, et il a fourni des calculs qui sont à cet égard fort significatifs.

«Si nous établissons par des chiffres, dit-il, la dépense du travail des bœufs au labour comparée à la dépense des chevaux, nous trouvons que l'avantage reste au travail exécuté par les bœufs. Nous allons citer les chiffres que nous donne notre comptabilité.

« Un cheval de ferme de 4 ans coûte, d'acquisition, 400 à 600 francs: prix moyen 500 francs; l'amortissement du prix de ce cheval de 500 francs représente, pour 10 ans, 50 francs par an, et l'intérêt à 5 pour 100 de ces 500 francs 25 francs; ensemble, 75 francs.

<< La ration journalière d'un cheval de charrue, fournissant, en moyenne, 10 heures de travail ou 3,000 heures pour l'année, est de

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ou, pour les 365 jours de l'année, 686 fr. 20 c., auxquels il faut joindre, pour ferrage, 18 francs; entretien du harnachement, 30 francs; amortissement et intérêts du prix d'achat de ce cheval, comme nous l'avons établi ci-dessus, 75 francs, qui donnent, avec les 686 fr. 20 c. de nourriture, la somme totale de 809 fr. 20 c., et, pour les deux chevaux composant l'attelage d'une charrue, donnant 3,000 heures de travail, 1, 618 fr. 40 c., ou 53 centimes 946 l'heure.

vaux coûte donc 53 cent. 916, et celle employant quatre bœufs se relayant et fournissant chacun 10 heures de travail, est donc de 16 cent. 146 par heure, et pour l'année, de 481 francs 38 cent. Bien que, dans la pratique, il soit reconnu que 2 bœufs donnent plus de travail en 5 heures qu'un cheval en 10 heures, nous avons pris cette comparaison d'un à deux pour rendre plus sensible notre calcul. A Grignon, par exemple, on compte 3 chevaux pour 4 bœufs.

« Dans notre pratique, ajoute M. de Béhague, nous avons reconnu qu'il y avait grand avantage à toujours avoir des bœufs frais et en bon état de chair, et que 5 heures de bon travail étaient tout ce qu'il est nécessaire de tirer d'un bœuf pour couvrir largement sa dépense; qu'à ce travail son capital s'augmente; qu'il se fortifie, et que l'engraissement, quand l'âge est venu, est plus économique et plus facile; ce qui ne nous empêche pas, quand la besogne presse, comme les moissons, les foins et quelquefois les semences, de leur demander, soit 9 heures, soit même 10 heures d'un jour l'un, et aussi d'augmenter les attelages d'un quart ou d'un tiers, ce qui ne peut se faire avec des chevaux, dont le nombre attelé est toujours le même : une heure ou deux est tout ce que l'on peut espérer en poussant le travail à l'extrême. »

De tout ce qui précèdé, il résulte que dans la plupart des conditions de notre économie rurale le travail du boeuf est une nécessité devant laquelle il faut s'incliner, sauf à concilier le mieux possible cette nécessité avec la destination finale de l'animal. Cela se peut et se réalise naturellement par la marche même du progrès. La culture plus des engrais, l'emploi des instruments perfectionsoignée des terres, l'usage des amendements et nés, des véhicules et des harnais mieux cons«Une bonne paire de bœufs limousins, de l'âge intenses les efforts à exiger des attelages pour truits, l'amélioration des chemins, rendent moins de quatre ans, coûte de 750 à 850 francs; disons l'exécution de la même quantité de travail, me800 francs. Comme le bœuf ne perd rien de son capital, nous n'aurons que l'intérêt du prix d'achat sultats produits. Le labourage ou le hersage d'un surée non pas à la force dépensée, mais aux réà ajouter à son entretien journalier; nous por-hectare de terre, le charroi d'un poids déterminé tons de même à 5 pour 100, soit à 40 francs, l'intérêt du prix d'achat de 800 francs.

« La ration d'été d'un boeuf est de 50 kilogr. de vert, représentant 15 kilogr. de foin, à 50 fr. les 1,000 kilogr. ou 75 cent., et, pour la paire, 1 franc 50 cent.

« La ration d'hiver se compose de

20 kilogr. de racines, à 15 fr. les 1,000 kilogr. 30 c.
Foin, 5 kilogr. à 50 fr. les 1,000 kilogr....
Paille, 4 kilogr. à 25 fr. les 1,000 kilogr.

TOTAL...

.......

.......

25 10

65 c.

« Et, pour la paire, 1 fr. 30 c. « Ce qui constitue une moyenne par jour, pour la nourriture des deux bœufs, de 1 fr. 40 c., et, pour l'année de 365 jours, 511 francs, auxquels il faut ajouter les 40 francs pour l'intérêt du prix d'achat et 16 francs pour l'entretien du joug, etc., somme totale, 567 francs, et, pour les quatre bœufs formant l'attelage de la charrue marchant 10 heures par jour, 1,135 francs ou 37 cent. 080 par heure; l'heure de la charrue attelée de deux che

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de récoltes, nécessitent le déploiement d'une à mesure que tous ces perfectionnements s'acquantité de travail mécanique utile moins forte, complissent. L'emploi du boeuf à ces usages devient donc à mesure aussi plus compatible avec son amélioration dans le sens de la boucherie, en nécessitant de sa part une force musculaire moins grande, une aptitude moins prononcée au travail.

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Le progrès consiste, par conséquent, dans ces situations transitoires entre les conditions où l'animal est exclusivement travailleur et ne produit que de la force, conditions qui deviennent de plus en plus rares, et celles où il est exclusivement entretenu à titre de producteur de viande, - conditions qui ne se rencontrent guère que dans la culture herbagère; - le progrès consiste, disons-nous, à rapprocher sans cesse cet animal de la qualité de bête de rente, en le mettant dans le cas d'accroître son capital, tout en suffisant aux travaux de l'exploitation. La solution de ce problème est facile, et concorde parfaite

| fiques posés précédemment à propos du cheval, de l'âne et des mulets, simplifieront beaucoup notre tiche. Ils sont également applicables au bœuf. Ils n'ont donc pas besoin d'être répétés. Nous nous bornerons en conséquence à y renvoyer le lecteur (1).

ment avec le progrès agricole lui-même, en même temps qu'avec la nécessité sociale d'une production de viande plus abondante. Elle consiste à nourrir, dans chaque exploitation, un plus nombreux bétail et à y opérer son plus fréquent renouvellement. L'important est que les bœufs arrivent plus jeunes, ou plutôt moins âgés, à l'abattoir. Il faut qu'ils y arrivent au moment où leur valeur Logement. Les étables, bouveries ou vachen'est plus susceptible de s'accroître. C'est une ries, pour présenter de bonnes conditions hygié question d'économie de ce qu'on appelle en hy-niques, doivent être édifiées d'après les mêmes giène les rations d'entretien. Il faut que la nourriture consommée par ces animaux soit constamment productive en travail ou en viande. Lorsque l'état stationnaire arrive pour eux, état dans lequel leur capital doit commencer à être amorti, leur existence est achevée comme serviteurs économiques. Le moment de les livrer à l'engraissement pour la consommation est venu.

principes que ceux qui régissent la construction des écuries. L'espace, l'aération, la propreté, ne sont pas moins indispensables aux animaux de l'espèce bovine qu'à ceux de l'espèce chevaline. Une seule particularité, commandée par la conformation du bœuf, est celle qui se rapporte à la disposition des crèches et râteliers.

Dans une étable bien entendue, ceux-ci dispaparaissent et sont remplacés par un système de mangeoire qui en tient lieu. Il n'est pas bon que le boeuf ait à lever la tête pour prendre sa nourriture. La conformation de son encolure ne se prête pas à ce qu'il puisse sans gêne exécuter ce mou

Par la force des choses, les exigences du débouché ont déterminé dans l'exploitation de l'espèce bovine un mouvement en ce sens. On ne trouve plus guère de vieux bœufs sur les marchés d'approvisionnement des grandes villes. Les progrès de la culture aidant, ce mouvement ne pourra que s'accentuer davantage. Au moment actuel, il a déjà créé un état de choses que M. Le-tion, pour les mangeoires des bœufs ou des vacouteux exposé exactement de la manière suivante :

vement.

Le plus rationnel de tous les modes de construc

ches, est celui qui consiste dans une auge peu profonde, en maçonnerie étanche, élevée à peine de 40 à 45 centimètres au-dessus du sol, et reposant sur une base pleine. Cette auge, d'une largeur à peu près égale à son élévation, doit être disposéť dans sa coupe suivant une courbe légère, de manière à ce que les dernières portions des matières

blent facilement au centre et puissent être prises là par les animaux. Elle règne sur toute la longueur de l'étable, en laissant seulement un passage à chacune de ses extrémités.

«Les bœufs de travail, dit-il, figurent dans une ferme, sous trois situations principales. Tantôt, bouvillons, ils sont en voie de dressage et ne travaillent que très-modérément. Tantôt, boeufs adultes et dans la force de l'âge, ils sont employés sans discontinuité d'action, c'est-à-dire avec le mi-liquides qui y sont quelquefois mises se rassemnimum de repos possible. Tantôt, enfin, tenus en bon état de chair, ménagés au travail, ils sont, tout en comptant dans les attelages, préparés de longue main pour l'engraissement, et, dans ce cas, leur effectif plus nombreux que ne le réclameraient les besoins de la ferme, se compose d'un certain nombre de bœufs de rechange qui, chaque jour, ont mission de remplacer au travail les bœufs à ménager. Ce sont là les trois spéculations les plus fréquentes: il est acile de voir que, pour celles de ces trois qui reposent sur l'élevage ou l'engraissement pratiqués de front avec le travail, le prix de revient du travail est dégrévé d'une partie des frais d'amortissement, qui revient de droit aux comptes d'élevage et d'engraissement (1). » Notre conclusion doit donc être, sur la question du travail du bœuf, après tout ce qui vient d'en être dit, que c'est seulement dans ces dernières conditions que ce travail peut être maintenu, pour concilier comme il convient les nécessités de l'économie rurale avec les progrès de la zootechnie. Dans l'entretien de l'espèce bovine, en vue des plus grands avantages qu'elle peut procurer, le travail doit être l'accessoire, la production de la viande, 'le principal.

Ce point fondamental éclairci, nous allons maintenant passer rapidement en revue les objets relatifs à l'hygiène du travail, dans ses rapports avec les animaux dont il s'agit. Les principes scienti

(1) Ouvrage cité plus haut, t. II. p. 26.

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Sur son bord antérieur, celui qui fait face aux animaux, et dans toute son étendue, elle supporte une sorte de barrière élevée de 2 mètres environ et même moins, formée de pilastres en bois arrondi et lisse, d'un diamètre de 0,15 à 0,20, lesquels pilastres sont assez écartés l'un de l'autre pour que le bœuf y puisse tout juste passer sa tête, en introduisant successivement ses cornes. Il est bien entendu que la barrière est posée verticalement. Elle est divisée ou non, ainsi que la mangeoire, en com partiments pour chaque bête, comme les écuries. Le plus ordinairement elle ne l'est pas, par économie; mais il vaut toujours mieux qu'elle le soit.

Dans les étables simples, qui ne contiennent qu'une seule rangée d'animaux, on ménage entre la face postérieure de la crèche et la muraille de l'étable, un couloir d'un mètre ou un mètre cinquante pour la circulation des personnes chargées de la distribution de la nourriture. Dans les étables doubles, disposées de façon à ce que les animaux soient opposés par la croupe, avec couloir central, la même chose est répétée de chaque côté. Mais il vaut infiniment mieux, pour l'économie de temps dans le service, que les deux mangeoires soient placées au centre de l'étable, les animaux

(1) Voy. p. 602 et suiv.

se faisant face, et séparées par un couloir. Un seul homme suffit alors pour distribuer la nourriture à un grand nombre d'animaux, surtout à l'aide d'un petit chariot roulant sur une voie ferrée établie sur le sol du couloir. Une prise d'eau, avec robinet, disposée à l'une des extrémités de ce couloir, permet de remplir les auges pour l'abreuvoir et de laver le sol de l'étable, en entraînant les purins dans la fosse à fumier ou dans le réservoir qui leur est destiné.

Nous recommandons aux hommes de progrès ce système d'étables, dont les principales dispositions sont usitées dans le Nord, et notamment en Belgique.

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Nourriture. L'alimentation du boeuf de travail varie suivant les systèmes de culture. Elle est nécessairement basée, dans sa composition, sur les ressources fourragères que ces systèmes comportent.

Nous avons vu plus haut celle qui est adoptée chez M. de Béhague, dans le Loiret. Elle peut être prise pour guide dans les exploitations avancées de la région du Centre et de celle de l'Ouest.

M. Lefour, qui a si profondément étudié tout ce qui se rapporte au bétail de la région du Nord, a consigné dans son magnifique travail sur la race flamande, des détails relatifs à la nourriture des bœufs employés dans les sucreries de cette région, qui se rapportent également aux fermes avec distillerie, dont le nombre est aujourd'hui si considérable. La nourriture journalière, dans ces conditions, s'estime à 3 p. 100 du poids vif des animaux. Le régime diffère, suivant qu'on le considère en été ou en hiver. Il est établi de la manière suivante :

Régime d'été pour une tête. Premier repas, à trois heures du matin, 15 à 20 kilog. de pulpe de betteraves mélangée de 5 à 6 kilog. de menue paille ou paille hachée. On y ajoute 2,50 de foin de prairie naturelle ou de trèfle hachés. Les bœufs sont conduits au travail de cinq à onze heures du matin. Ils font une légère halte à huit heures.

A onze heures, deuxième repas, avec foin 2kil,50, tourteau, 1 kilogr., ou l'équivalent en féveroles concassées. Reprise du travail à une heure jusqu'à sept heures du soir. Halte à quatre heures et de

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« Il suffit des indications qui précèdent, ajoute M. Lecouteux, pour établir que, par la nature de ses consommations, le bœuf, infiniment moins granivore que le cheval, pousse essentiellement à une culture fourragère, à la production de l'herbe et des racines. A ce titre, on le retrouve aux pôles agricoles les plus opposés: il est à la fois, et dans les contrées pastorales qui produisent de l'herbe à peine fauchable, et dans les riches pays herbagers, et dans les cultures arrivées à l'apogée du produit brut et qui sont basées sur une large production de racines. Partout, il tire parti de matières alimentaires que le cheval n'accepterait pas avec la même facilité, et que même il refuserait tout à fait. Ainsi se trouvent mêlées à la nourriture du bœuf, les pailles de toutes sortes, les cossettes de colza, les topinambours, les fourrages plus ou moins avariés, les menues pailles ; ainsi encore, sont utilisés des pâturages marécageux où les cultivateurs pauvres envoient leurs bœufs pendant les heures de repos, la nuit comprise. De là, tant de variations dans le prix de revient de la nourriture du bœuf. Fixée à 1 fr. et 1 fr. 20 dans la culture intensive, elle peut descendre à quelques centimes dans les fermes où le boeuf cherche lui-même sa nourriture dans des pâtures de très-faible valeur. Mais toujours est-il que, partout, la quantité du travail est proportionnelle à la quantité et à la qualité de la nourriture. Toujours est-il que, dans la culture intensive, la meilleure des économies, c'est de nourrir au maximum, sans sortir des limites de la ration de travail, sans pousser à la graisse. Toujours estil que, dans la culture extensive, la nourriture au meilleur marché est celle qui se prend à la pâture (1). »

(1) Ouvrage cité, t. II, p. 23

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