Page images
PDF
EPUB

Nous pourrions entreprendre à notre tour une nouvelle description de la race béarnaise, qu'il nous a été permis de bien étudier. La trouvant toute faite en grande partie, nous croyons inutile de recommencer celles de ses portions qui peuvent nous servir.

Voici les caractères exacts que M. Magne attribue à la race béarnaise; ce ne sont que les principaux : « Poil jaune ou rouge pâle, unicolore ou seulement d'une nuance plus claire autour des yeux et à la face interne des membres; cornes fortes, longues, généralement très-relevées ; membres bien d'aplomb, solides et cependant fins; corps un peu long et variant beaucoup de poids et de formes, selon le pays et les individus. »>

Après cela, l'auteur divise les bêtes bovines du bassin de l'Adour en cinq groupes qu'il caractérise de la manière suivante.

Le bœuf tarbais ou bigorrais est, dit-il, « de taille moyenne, à tête un peu forte, plus propre au travail qu'à la lactation, il fournit de bons bœufs de boucherie et prend, quand il est exporté dans un bon pays, un fort développement. Nous avons vu, ajoute M. Magne, dans quelques vallées fertiles des environs de Saint-Girons, des bœufs très-forts qui en provenaient.

« Cette sous-race, appelée tarbaise sur les marchés de Béziers, de Nismes, d'Aix-en-Provence, est élevée dans les vallées de Bagnères-de-Luchon, de Bagnères-de-Bigorre. Les villages situés dans ces vallées ont un nombreux bétail, qu'ils envoient, en été, sur les montagnes. Les animaux sont, en général, vendus jeunes et conduits dans les pays de plaine, du côté du nord et quelquefois vers l'est. » Il s'agit seulement de la région, bien entendu.

« On trouve plusieurs variétés de bêtes bovines dans le département des Basses-Pyrénées, poursuit M. Magne. Les trois grandes vallées, situées au sud d'Oloron, possèdent chacune son type de bétail (il eût mieux valu dire sa variété), que les habitants du pays distinguent.

« Vers l'est, se trouve le bœuf d'Ossau, qui tire son nom de la vallée qui le produit. Les animaux, généralement à corps décousu, sont moins recherchés pour être importés dans la plaine. La tête est petite, carrée et gracieuse; les yeux sont à fleur de tête; le bassin est étroit, par conséquent le train postérieur manque d'ampleur.

« C'est à Laruns, vers le centre de la vallée, que l'on produit le plus de bétail, et le nombre considérable d'animaux élevés dans ce pays s'explique par l'espèce d'émigration dont nous allons parler.

« La vallée d'Ossau a le grand avantage de pouvoir, conformément à un édit de Henri IV, envoyer en hiver, quand les montagnes sont couvertes de neige, tout son bétail sur la lande du Pont-Long, à 4 kilomètres de Pau, sur la route de Bordeaux. Elle possède même le droit de le faire parquer deux fois par an sur une des places de la ville de Pau. Annuellement, en octobre et en mai, passent dans cette ville, pendant quinze ou vingt jours, des troupeaux de vaches, quelques-unes suitées, allant au parcage du Pont-Long ou retournant à la montagne (Mousis).

[ocr errors]
[ocr errors][ocr errors]

Voilà pour ce qui concerne la première des trois variétés des environs d'Oloron. La seconde est celle qui se trouve dans la vallée d'Aspe. Celle-ci, dit M. Magne, « possède plusieurs conditions favorables à la production du bétail, et livre au commerce des bœufs appelés aspois, fort estimés: de vastes montagnes nourrissent les troupeaux en été, et la belle plaine de Bedons fournit des ressources pour l'hiver. »

Ces bœufs, ajoute l'auteur, ont le corps trapu, le bassin ample, la croupe relevée, la tête courte, l'œil grand, bien ouvert, les membres courts, << bien d'aplomb, garnis de muscles gros et puissants dans les rayons supérieurs. Vigoureux, énergiques, agiles et très-robustes, les bœufs résistent longtemps aux plus rudes travaux. Ils sont employés au transport des marbres et des bois pour la marine. Ils conviennent, à cause de leur sobriété, pour les labours dans les contrées pauvres en fourrages, et dans les coteaux vignobles. Ils n'ont pas une lourde corpulence, mais conduits dans les contrées où, par le produit des prairies artificielles, on nourrit abondamment, ils prennent rapidement un grand développement, deviennent forts, lourds, tout en restant près de

terre.

« Le taureau d'Aspe est recherché comme type reproducteur, par les cultivateurs des plaines des Basses-Pyrénées, et par ceux des Landes et du Gers. La foire de Bedons, à la Saint-Michel, où l'on conduit le jeune bétail qui descend de la montagne, est renommée dans plusieurs départements. »

Enfin, la troisième variété est celle de Barétous, élevée dans la vallée du même nom. C'est cette vallée que l'on appelle dans le pays le jardin du Béarn. Le type de l'espèce bovine y prend des caractères de conformation qui le font préférer parmi toutes les variétés si nombreuses de la race béarnaise. Là, il a le corps un peu long, svelte quoique près de terre, dit M. Magne, la poitrine ample, l'encolure mince avec un fanon peu développé, la corne blanche, les membres fins, mais la croupe haute et la queue relevée, comme chez tous les béarnais. Le pelage est plus clair que celui du boeuf aspois. Le caractère particulier de sa physionomie est la fierté.

«On peut lui reprocher, fait remarquer notre savant maître, d'être souvent ensellé, conséquence de la longueur de son corps, et de manquer de taille. Mais comme tous les bœufs des contrées montagneuses à base de silice, il prend facilement du corps quand il est conduit dans des plaines où il est bien nourri. » C'est ce qui lui arrive dans une partie des Landes, où les jeunes animaux de la prétendue race baretoune sont élevés concurremment avec ceux du même type produit dans le pays basque, vers l'ouest de la vallée de Barétous.

Il faut consacrer quelques détails à la variété des Landes de la race béarnaise, qui tend à se faire admettre bien à tort comme une race distincte, avant de parler de la famille laitière de Lourdes. M. le marquis de Dampierre, propriétaire et éleveur dans ce département, nous fournira ces détails sous une forme très-intéressante. Et ce n'est pas seulement pour cela que nous les lui emprun

[merged small][merged small][graphic][subsumed][merged small][ocr errors][merged small]

pierre, est assez petit, trapu, parfaitement pris dans ses membres, leste et énergique; sa couleur grain de blé, plus claire autour des yeux et aux extrémités, est nuancée d'un rouge plus foncé ou de brun chez quelques animaux. Il a les cornes fort longues, minces, déliées et souvent contour nées, de couleur blanc mat et noires vers le bout. -Les animaux de cette race, fine et rustique tout à la fois, sont d'une vivacité, d'une énergie, d'une résistance extraordinaire au travail; leur sobriété est fort grande, et leurs membres, secs et nerveux comme ceux des boeufs anglais de Devon, ont un caractère à part et dénotent une extrême légèreté.

«L'agriculture est peu avancée dans le département des Landes : les prairies naturelles y sont rares et de peu d'étendue, les prairies artificielles, bien plus rares encore, et la culture du blé et du maïs absorbe tous les soins de ses laborieux paysans. Le bétail n'a guère, pour se nourrir, que l'herbe rare et dure qu'il pâture dans les touyas annexés à chaque métairie. Pendant l'hiver seulement, on donne aux animaux qui travaillent un peu de foin, aux autres, de la paille de blé ou de maïs. Dans un grand nombre de métairies, dans celles de la Chalosse surtout, les boeufs sont nourris à la main. Plusieurs guichets sont pratiqués dans le mur de la pièce de la maison qui donne sur la cour entourée d'abris et de barrières où le bétail vit toujours en liberté ; c'est par ces guichets que toutes les personnes de la maison, à tour de

|

rôle, présentent, bouchée par bouchée, la nourriture aux animaux, et Dieu sait l'industrieuse économie qui préside à la formation de chaque bouchée, qu'on introduit avec soin jusqu'au fond du gosier de l'animal qui ne peut ainsi la rejeter: on le tente par la vue d'une feuille de maïs encore verte, de quelques brins d'un foin appétissant ou d'un morceau de navet; mais ces apparences sont trompeuses, et la pauvre bête n'ayale qu'une paille bien sèche qui fût restée intacte dans son râtelier, où lui eût servi de litière sans la supercherie de ses gardiens.

« Cette méthode de soigner le bétail prend un temps énorme et absorbe presque les nuits des pauvres laboureurs, dont le jour tout entier est réclamé par les travaux des champs; mais il est merveilleux de voir avec combien peu de fourrages, de la plus médiocre qualité, on entretient dans un excellent état des bœufs qui, cependant, exécutent les labours les plus pénibles et les plus répétés.

« Les vaches, beaucoup moins fortes que les bœufs, ne résistent pas moins bien qu'eux à la fatigue; on les soumet à un dur travail, pendant même qu'elles nourrissent leur veau, sans leur donner aucun supplément de nourriture, et sans que cela paraisse en rien les faire souffrir.

-«La légèreté de ce bétail est extraordinaire; il marche parfaitement au trot sans s'essouffler ; j'ai vu, dit M. de Dampierre, des boeufs qui n'étaient nullement habitués aux charrois, faire, sans au

cune fatigue, pour le transport de la chaux, dont on use beaucoup pour l'amendement des terres, jusqu'à soixante-quinze et quatre-vingts kilomètres dans une nuit et un jour. On ne choisit même pas les attelages pour ces transports; dix ou douze charrettes partent quelquefois du même endroit pour Roquefort, elles en reviennent chargées : jamais un bœuf ne reste en route.

« Ceux qui, poursuit le même auteur, dans le département des Landes, ont pris leur part d'un plaisir qui y est populaire avant tous, les courses, ont pu juger de l'agilité merveilleuse de la charmante race bovine de ces contrées. Les taureaux figurent rarement dans ces jeux, bien qu'ils portent le nom de courses de taureaux. Il est plus ordinaire d'y voir des bœufs ou des vaches aux prises avec les écarteurs, et faire avec eux assaut de légèreté ou d'adresse. » M. de Dampierre décrit ensuite les diverses péripéties de ces courses; mais nous devons nous en tenir là de notre citation. Elle suffit pour faire voir qu'il n'y a aucune différence entre le boeuf landais et tous ceux que nous avons vus précédemment dans les vallées pyrénéennes.

Il en est de même des bêtes bovines qui se produisent aux environs de Lourdes, dans la vallée d'Argelès. On en fait une race à part, parce que, contrairement aux autres familles du type béarnais, celle-ci donne des vaches qui possèdent l'aptitude laitière à un degré relativement élevé, par rapport à leur taille et à leur volume. Mais leur physionomie et leur conformation ne diffèrent du type pyrénéen que par des détails tout à fait accessoires dans la caractéristique des races; et il suffit d'avoir vu ensemble des taureaux inscrits aux catalogues des concours de la région, ou généraux, dans la catégorie des prétendues races basquaise, pyrénéenne, landaise et analogues, où se rangent les animaux de Lourdes, pour s'apercevoir que tous ces animaux, sauf le volume peut- | être, sont faits sur le même patron et se présentent avec les mêmes caractères typiques. Il n'y a donc, dans le bétail indigène du bassin de l'Adour, qu'une scule race, dont le type se trouve dans l'ancienne province de Béarn. Et il était impor- | tant de l'établir, pour ce motif que cela donne toute latitude dans le choix, parmi les diverses tribus qui ont été examinées, des reproducteurs qui peuvent être employés à l'amélioration. En accouplant un taureau de la vallée de Baretous avec une vache d'Aspe, d'Ossau, ou de la Chalosse, on ne fait point un croisement, non plus qu'avec toute autre de la région où s'étend la race béarnaise.

Dans plusieurs communications faites au comice de l'arrondissement d'Orthez, M. J. Ducuing a indiqué aux éleveurs des Pyrénées la meilleure voie à suivre pour améliorer leur bétail. Cette voie est celle de la sélection, basée dans le cas particulier sur la nécessité du travail, mais en tenant compte aussi de la destination finale de l'espèce bovine. « Nous sommes donc obligés, a dit quelque part M. Ducuing après avoir exposé la situation, par la nature des choses d'avoir des animaux de travail; et subsidiairement nos animaux allant à la boucherie après nous avoir rendu dans

le cours de leur existence tous les services que nous leur avons demandés, il est essentiel à nos intérêts qu'ils soient aptes à être engraissés sans trop de dépenses, parvenus à un certain âge. » Le but será atteint, d'après l'habile agriculteur des Basses-Pyrénées, surtout par l'amélioration de la situation agricole, et il exhorte ses concitoyens à y travailler sans relâche : « Car ne nous dissimulons pas, leur dit-il, que l'alimentation abondante est la base de l'amélioration aussi bien que de la multiplication. Pour le bien comprendre, il suffit de considérer que, quelle que soit la part que l'on veuille attribuer aux animaux procréateurs, elle n'est autre, néanmoins, que la loi de la répétition de l'être engendré par son semblable; tandis que la tâche est toute différente pour l'éleveur qui a pour mission d'introduire dans le jeune produit, au moyen de la nourriture, la matière qui doit l'amplifier, le grandir et lui donner des aptitudes supérieures à ses ascendants (1). »

Nous ne pouvons que nous associer à ces excellents conseils, qui découlent naturellement de nos principes. S'ils sont bien compris, ils conduiront la race béarnaise à un degré de perfectionnement qu'aucun croisement ne saurait jamais faire acquérir même aux individus qui en seraient directement issus. L'usage de la chaux et l'irrigation peuvent être dans le bassin de l'Adour, pour la race béarnaise, ce que la culture des turneps a été en Écosse pour la race d'Angus. C'est pour cela que nous avons quelque peu insisté sur l'étude de cette race, qui est le principal, sinon l'unique produit des vallées pyrénéennes dont il a été question à son sujet.

Race bazadaise. Les auteurs ne sont pas d'accord pour reconnaître les caractères d'une race distincte à ces bœufs si remarquables par leur aptitude au travail, qui se produisent aux environs de la petite ville de Bazas, et qui sont employés plutôt aux charrois des produits forestiers du département des Landes qu'aux travaux agricoles, peu importants dans les coteaux de cette partie du département de la Gironde. M. Magne les considère comme formant une sous-race du type garonnais, que nous décrirons plus loin; mais il ne nous paraît pas possible d'adopter à cet égard son avis. Le bœuf de Bazas a, en effet, comme le garonnais, le cornage dirigé en avant, et le plus souvent en bas : c'est là le seul caractère qui rapproche les deux races. Quant à la physionomie et surtout au pelage, il est absolument impossible de les confondre. Sous ce rapport, le bazadais serait moins éloigné du gascon, quoiqu'il en diffère cependant par assez de points pour que l'on doive en faire un type à part.

Ce qui constitue le caractère distinctif de la race bazadaise, c'est l'uniformité de sa robe également brune sur tout le corps, de nuance uniformément charbonnée, sans qu'aucune partie soit plus claire, ainsi que cela s'observe dans le typo gascon. On n'y rencontre jamais, par exemple, ce que nous avons appelé la cocarde, non plus que cette espèce de cupule noire qui enveloppe

(1) La culture, t. III, 1861-62, p. 403 e. 404.

DE le fond des bourses blanches du taureau gascon. La conformation du bazadais est remarquablement belle, au point de vue de sa double destination. Il est de taille moyenne; le corps est près de terre, la poitrine profonde, les lombes larges, la croupe épaisse et les cuisses bien descendues, les membres, quoique bien pris dans leurs articulations, ont une certaine finesse relative. Ce qu'on peut lui reprocher seulement, c'est d'avoir les parties antérieures un peu trop développées, la ligne supérieure souvent fléchie, la peau épaisse et un fanon trop développé.

Mais ces défauts sont faciles à corriger, et ils s'amoindrissent de plus en plus chez les animaux améliorés. Au reste, le bétail bazadais est de la part des bouviers l'objet des soins les plus assidus et les plus pleins de sollicitude. C'est à cela, sans nul doute, qu'il doit ses excellentes qualités, en vertu desquelles les bœufs de cette race s'engraissent facilement et donnent une forte proportion de viande de première qualité, dès qu'ils cessent leur rude labeur. « Les soins, la douceur, fait remarquer M. Magne, contribuent à les produire autant que la nourriture, pourrait-on dire. Ces animaux travaillent des terres d'apparence sablonneuse, mais fortes et tenaces; ils sont entretenus avec de la paille de seigle, des feuilles de maïs desséchées sur pied et des sommités de cette plante récoltées après la maturité. Dans les neuf dixièmes de nos départements, on ne trouverait pas ces fourrages dignes d'être récoltés, et, cependant, c'est en les administrant avec méthode, avec goût, qu'on a créé et que l'on entretient une de nos plus précieuses races de bestiaux. Mais aussi les ménagères n'entrent jamais dans les étables sans porter une friandise à leurs bœufs, sans leur prodiguer quelques caresses, sans leur donner quelques soins de propreté. Et le bouvier, lui, pendant le travail, il les excite sans cesse à accélérer leur marche, mais ne les frappe jamais; il prononce plus de paroles que les animaux ne font de pas; là se bornent ses moyens de contrainte. Il les laisse aller à leur aise. Difficilement, d'ailleurs, il pourrait les faire marcher d'un pas rapide dans ces terrains argilo-sablonneux, que la charrue soulève en larges plaques, dures comme des bandes de tourbe. Comme dans les autres provinces du Midi, ajoute M. Magne, on fait travailler les vaches plus que les bœufs. Ces derniers sont toujours pourvus de couvertures de toile en été, en étoffe de laine pour l'hiver, et soigneusement appliquées afin de les préserver des insectes ailés et des intempéries. Si le bouvier est surpris dehors par un mauvais temps, que son attelage arrive mouillé à l'étable, et qu'il ne trouve pas une couverture de rechange, il remplace de suite celle qui est mouillée par de la paille artistement arrangée. » Avec de semblables habitudes, il est facile de prévoir ce que deviendra la race bazadaise, lorsque le progrès agricole aura réduit à de moindres proportions la part de travail qui lui est demandée et mis à la disposition des éleveurs une nourriture meilleure et plus abondante.

Au reste, on en peut juger par les résultats obtenus déjà dans cette direction. Partout où ils ont été montrés dans les exhibitious publiques,

concours d'animaux reproducteurs ou de boucherie, les bazadais ont excité l'admiration par le degré d'amélioration auquel les individus exposés étaient arrivés. L'élan est donné vers une sélection bien entendue par quelques éleveurs éclairés, il sera suivi, là comme ailleurs. La transformation des Landes par l'établissement des routes agricoles, par exemple, n'y contribuera pas pour peu, car elle fera cesser, du moins en grande partie, l'emploi du bœuf bazadais comme animal de roulage, et réduira de beaucoup les fatigues de ceux qui pourraient continuer le transport des bois de cette contrée vers Langon.

Avant de nous occuper de la race garonnaise, qui confine à celle-ci par l'un des points qu'elle habite, nous parlerons d'une autre qui lui est plus analogue, surtout par l'importance de sa population. Il s'agit de la tribu que l'on appelle race d'Aubrac. Nous avons à envisager la race garonnaise à un point de vue qui nous obligera de remonter un peu haut vers le centre de la France. Il est donc bon de faire en sorte que nous n'ayons plus à revenir dans la région du Midi dont nous décrivons les races en ce moment.

Race d'Aubrac. Encore ici, nous ne pouvons prendre un meilleur guide que M. Magne qui, pour le cas particulier, joint å ses profondes connaissances zootechniques le mérite de parler de son pays natal. « La race d'Aubrac, dit-il, est élevée dans la plus grande partie de la haute Auvergne, sur les plateaux et les montagnes situés à l'est du département du Cantal, au nord du département de l'Aveyron, et dans une partie do celui de la Lozère.

<«< Quoique faisant partie de la même chaîne, les montagnes qui produisent la race d'Aubrac diffèrent de celles où est élevée la race de Salers; elles en diffèrent par leur constitution géologique comme par leur climat. Ces terrains volcaniques, qui donnent une si grande valeur aux pelouses des montagnes occidentales du Cantal, ne se trouvent, du côté de l'Aveyron et de la Lozère, que dans quelques localités limitées. Ils forment la base de la montagne d'Aubrac et du canton de Laguiole, où sont produits, du reste, les plus beaux types de la race; mais du côté de Murat et dans la Lozère, le sol est formé de sables ou de débris de roches schisteuses ou granitiques recouverts, ici de landes et de bruyères, là de pelouses arides ou d'herbages à fonds tourbeux. C'est à la race élevée sur ces terrains que faisait allusion le professeur Grognier quand il disait : « Celle de Murat, << s'il faut donner ce nom à une agglomération « chétive de bêtes bovines, ne mérite aucun in« térêt. »

་་

<< Plus rapprochés de l'Est et du Midi, poursuit notre savant maître, les plateaux de la Lozère et de l'Aveyron reçoivent moins directement les émanations de l'Océan que les montagnes du versant occidental de l'Auvergne. Assez élevés pour être très-froids en hiver (1,000 à 1,300m), ils le sont moins que le Plomb du Cantal et moins bien disposés dès lors pour condenser en été les vapeurs de l'atmosphère. Nous les avons toujours vus

[ocr errors]

moms brumeux et moins humides en septembre | marcher de front l'influence des reproducteurs que les sommets qui produisent avec toute sa beauté la race de Salers. >>

Là est la raison des caractères particuliers qui distinguent le type d'Aubrac et lui donnent son individualité. Cette tribu est décrite de la manière suivante par M. Magne, et nous ne saurions mieux faire que de lui emprunter sa description: <«< De taille moyenne et même petite, elle a le corps trapu, bas sur jambes, les os peu saillants, l'encolure courte, la tête épaisse et les cornes bien plantées, régulièrement contournées et noires au sommet. Elle a les membres forts aux articulations, les onglons durs, la peau épaisse, et le poil, d'une couleur plus foncée dans la jeunesse, est long, gros, fauve, jaunâtre, gris sur le dos, et noirâtre à la tête, aux membres, à la queue. Les yeux sont noirs et vifs, souvent entourés, ainsi que le mufle, d'une belle auréole blanche. » C'est celte auréole et l'absence de la cocarde qui distinguent principalement les sujets d'Aubrac de la race gasconne, avec laquelle ils ont plus d'un point de ressemblance. Le pelage, cependant, tire plus souvent sur le jaune.

Les animaux d'Aubrac s'élèvent en grands troupeaux sur les montagnes, où le lait des vaches est employé à la confection des fromages, dit fourmes ou de forme. Les laiteries y sont appelées mazuts. Les bœufs, d'après M. Magne, se répandent dans le sud et le sud-est de la France, où ils se mêlent avec les races des Pyrénées et de la Garonne, et servent finalement, après avoir travaillé dans leur jeunesse, à la consommation des villes du Languedoc et de la Provence.

[ocr errors]

et celle des soins qui forment les bons produits. En se plaçant au point de vue de l'aptitude laitière qui est utilisée dans les parties montagneuses de la région, on a conseillé des croisements avec la race de Schwitz, et surtout avec la variété carolaise de la race gasconne. Il serait malheureux que ces conseils fussent suivis, autant l'un que l'autre. Nous n'avons pas besoin de revenir, à ce propos, sur ce que nous avons dit au sujet du croisement appliqué particulièrement à l'espèce bovine. Les deux races dont il s'agit sont d'ailleurs connues maintenant du lecteur. Il peut en juger. Mieux vaut assurément choisir dans le type d'Aubrac même des reproducteurs bien doués sous le rapport de l'aptitude laitière. La consanguinité fera promptement constituer des familles qui la présenteront au plus haut degré qu'elle puisse atteindre dans les conditions où la race s'élève, et dont les mâles pourront ensuite servir à sa multiplication.

Tout autour d'elle, vers le midi et l'est, la tribu d'Aubrac en se mêlant avec les races voisines, forme des métis que l'on trouve dans le Tarn, dans la montagne Noire, dans l'Aude, dans le Gard, etc. Elle dérive elle-même de la race de Parthenay, dont elle a tous les caractères, ainsi que nous l'établirons plus loin, en décrivant cette race.

[ocr errors]

Race garonnaise. Il faut considérer, croyons-nous, comme appartenant à un seul et même type tout le bétail blond qui, peuplant le bassin de la Garonne depuis Toulouse jusqu'à Bordeaux, occupe les départements de la HauteGaronne, de Tarn-et-Garonne, de Lot-et-Garonne, de la Gironde, et s'est répandu vers le nord dans ceux du Lot, de la Dordogne, de la Creuse, de la Haute-Vienne, et jusque dans les moitiés méridionales environ de ceux de la Charente et de la Charente-Inférieure, comprenant les arrondissements de Barbezieux, d'Angoulême, de Cognac et de Jonzac. En s'implantant dans ces diverses localités, le type y a subi quelques modifications accessoires, qui ont donné lieu à des désignations de race dont la légitimité ne nous paraît en aucune façon justifiée.

Les prétendues races du Rouergue et du Mézenc dérivent du même type que celui d'où est dérivé l'Aubrac. Dans cette partie de l'Aveyron que l'on appelle le Causse, où l'agriculture est relativement assez avancée, le bœuf d'Aubrac prend un développement plus considérable, mais conserve ses autres caractères; il s'amoindrit, au contraire, dans la région moins fertile du Ségala. Dans la HauteLoire et l'Ardèche, sur la montagne qui porte le nom de Mézenc, il ne diffère que par une poitrine moins large, des aplombs du devant moins réguliers. Les vaches de cette variété passent aussi pour meilleures laitières. Au reste, sans être prédominante dans la race, cette aptitude est assez prononcée pour suffire à l'industrie des fromages qui, avec l'élevage des veaux, occupe les pâturages de montagnes où se produit la tribu d'Au-portant pour l'élevage et l'entretien du bétail une brac sous ses diverses formes.

La bête d'Aubrac est tardive, et l'on n'en saurait être surpris d'après son mode d'élevage. C'est le propre de toutes les races rustiques et sobres comme celle-là. Nous n'avons plus besoin de dire par quel moyen il serait possible d'y remédier. Les éleveurs éclairés du Causse ont montré qu'ils connaissaient parfaitement ce moyen, en exhibant dans nos concours des individus arrivés à un remarquable degré de précocité. Il n'y a qu'à généraliser les pratiques qu'ils ont suivies, et ce sera le fait du progrès agricole. Il ne s'agit encore dans ce cas que d'une pure affaire de sélection. Cette méthode d'amélioration peut seule donner des résultats certains et avantageux, parce qu'elle fait

Le caractère particulier de toute la région vignoble dont nous venons d'énumérer les divisions territoriales, est que l'exploitation du sol y est soumise à une petite culture industrieuse, com

extrême division qui le rapproche de l'homme et lui assure de sa part des soins continuels et minutieux. Les pâturages sont à peu près absents, et si la constitution géologique diffère dans quelques points, l'uniformité du travail et de la nourriture à l'étable explique l'adoption d'un type unique.

Le berceau de ce type paraît être les alluvions fertiles des bords de la Garonne, entre Marmande et Agen. C'est de là que lui vient son nom de garonnais, qui doit être conservé, sans qu'il soit permis d'admettre les sous-races qu'on lui attribue, encore bien moins les races qu'on en distrait. Cette opinion. va être justifiée par la description que nous allons donner du type et de ses variétés.

« PreviousContinue »