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traire, mieux les arroser avec de l'eau lorsqu'elles | ont subi l'action des rayons solaires. M. Reynal a démontré par des expériences très-concluantes que c'est là le meilleur moyen de prévenir les accidents causés par les fourrages verts, notamment par la luzerne, en même temps qu'il a rattaché ces accidents à leur véritable cause, à savoir la fermentation plus facile des fourrages sucrés dans les organes digestifs, amenée par leur échauffement préalable.

L'enseignement à tirer de ces faits est bien simple: c'est que les fourrages verts ne doivent être coupés qu'en quantité juste suffisante pour une journée de consommation, et conservés durant cette journée dans un local aéré, en couche peu épaisse et bien à l'abri du soleil. Mieux vaut encore, lorsque le champ qui les produit est à proximité, les couper au moment même de leur distribution. Quel que soit leur état alors, ils ne sont point dangereux.

vement à la nourriture qui, il ne faut pas l'oublier, est la base fondamentale de l'hygiène des animaux de travail. Si, a écrit avec raison M. Lecouteux, bien nourrir coûte, mal nourrir coûte encore davantage, car le temps des attelages c'est de l'argent. Et s'il est une limite de résistance au delà de laquelle l'alimentation ne peut plus compenser les forces dépensées, il n'en est pas moins vrai qu'en thèse générale les services sont toujours en rapport avec les aliments consommés, ainsi que la durée des individus auxquels on les demande. Bien nourrir est donc le plus sûr moyen de conserver le capital représenté par ces individus. Cela conduit à ce résultat, d'obtenir encore pendant longtemps de bons services après que le capital est complétement amorti, et de diminuer par conséquent le prix de revient du travail d'une quotité équivalente de la somme à laquelle s'élève la prime d'amortissement. Cette considération ne saurait échapper au sens pratique des agriculteurs qui savent calculer.

Nous en sommes arrivés maintenant, dans l'ordre adopté, à nous occuper de ce qui concerne les soins de la peau. En raison de l'importance qui se rattache à la bonne exécution des fonctions de celle-ci, autant pour la conservation de la santé qu'en vue des effets utiles de la nourriture, dont les parties alibiles sont d'ailleurs plus complétement absorbées lorsque l'appareil tégumentaire extérieur exécute normalement son office d'élimination des matériaux usés par le jeu des organes; en raison de cette importance, disons-nous, les diverses opérations relatives à l'entretien de la peau méritent de notre part une grande attention. Nous avons à passer en revue dans ce but l'ensemble des opérations qui constituent le pansage, soit qu'elles se rapportent directement à son exécution, ou qu'elles aient pour effet de la seconder ou de la rendre plus facile et plus com

Ce serait aussi exposer les animaux à des inconvénients plus ou moins graves, et souvent funestes, que de substituer brusquement et sans transition le régime du vert à celui des fourrages secs. L'économie animale ne supporte pas sans dommage ces changements brusques qui ne sont nulle part dans la nature. Une sage hygiène commande de ménager la transition en habituant progressivement les organes digestifs aux aliments aqueux. Il est nécessaire, pour cela, de ne faire entrer d'abord ceux-ci dans la ration que pour une faible quantité, en mélange avec le foin, puis d'en augmenter chaque jour la proportion de manière à arriver bientôt à la substitution complète. Une transition analogue, mais en sens inverse, doit être observée de même quand il s'agit de passer du vert au sec. Il est important, en outre, d'observer attentivement les animaux ainsi nourris, et de ne point hésiter à augmenter la ration d'avoine, si l'on remarquait qu'ils eussent une ten-plète. dance à travailler plus mollement.

Le régime du vert augmente beaucoup les déjections et les urines. I rend même celles-là liquides quelquefois et toujours un peu ramollies. Il nécessite pour ce motif un redoublement de propreté dans les écuries.

En résumé, donner le vert tout à fait à l'état frais, en ne l'introduisant que progressivement dans la ration, de même qu'en ne le cessant que progressivement aussi, tels sont les moyens d'éviter les accidents qu'il cause lorsqu'il est mal administré. Autre recommandation: augmenter la ration d'avoine pendant le régime du vert plutôt que de la diminuer ou de la cesser, comme font beaucoup de personnes, sous prétexte de rafraîchir les animaux, et tout au moins la continuer entière. C'est à cette seule condition que le travail peut être continué sans dommage; et quand même, au reste, les chevaux devraient rester au repos pendant le régime du vert, il y aurait encore indication d'agir ainsi, car à part les propriétés toniques particulières de l'avoine, il n'est pas possible de faire consommer en une seule journée, sous forme de fourrages verts, l'équivalent d'une ration entière.

Là se termine ce que nous avions à dire relati

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Pansage. On a déjà fait ressortir dans plusieurs occasions, notamment au sujet de l'hygiène des étalons, des poulinières et des poulains, l'influence qu'exercent sur l'économie animale les soins de propreté donnés à la peau. On y a insisté surtout à propos des juments mulassières et des baudets. Dans ce dernier cas, il a été mis en évidence des faits qui tendent à établir d'une manière assez nette les graves inconvénients que peut entraîner l'absence de ces soins. Il serait donc superflu d'y revenir en ce moment. En s'occupant en outre des pratiques de l'entraînement du cheval de course, on a montré les effets du pansage méthodique sous un autre aspect que celui de la propreté. Il a été établi que les frictions, les massages, effectués sur le corps et surtout sur les membres, ont pour résultat d'augmenter la tonicité des muscles, de faciliter leur nutrition et de les délasser lorsqu'ils sont fatigués. Toutes ces considérations, formulées en vue de l'élevage et de l'éducation des jeunes animaux, ne sont pas moins applicables aux adultes utilisés pour le travail. Nous pouvons même ajouter qu'elles sont dans ce cas encore plus nécessaires, car s'il ne s'agit plus de développer des aptitudes,

il y a lieu de les conserver, ce qui est pour l'or-, terminer des congestions. Au point de vue de la dinaire au moins aussi difficile, si ce n'est même plus.

Nous ne croyons pas nécessaire de décrire les instruments à l'aide desquels s'effectue le pansage. Ces instruments sont connus de tous. Qui ignore, parmi les lecteurs auxquels s'adresse ce livre, ce que c'est qu'une étrille, une brosse, un peigne, une époussette, une éponge, un bouchon, un curepied? Avant de donner quelques indications sur la meilleure manière de panser les chevaux de travail au moyen de ces divers instruments, nous ferons cependant une remarque à propos de l'un d'eux.

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propreté, si nécessaire à la bonne exécution des fonctions éliminatrices de l'organe, elles sont suffisantes à la condition de débarrasser ses pores des produits d'élimination tels que la sueur, qui peuvent les obstruer en s'accumulant à sa surface et sur les poils agglutinés.

Là est la première raison du pansage. L'enlèvement des souillures étrangères par lequel commence l'opération n'a pour but que d'y aboutir.

En thèse générale, il est préférable de panser les animaux en dehors de leur écurie, en plein air quand la température est douce, dans un lieu abrité s'il en est autrement. On les préserve ainsi de l'influence de la poussière. Mais la nécessité

aussi bien que celui des hommes qui les soignent, force le plus ordinairement à profiter pour cela du moment où ils prennent leur nourriture du matin. On exécute alors un pansage complet, puis un nettoyage plus superficiel le soir, après la rentrée des attelages. Cela dépend du reste des nécessités du service; et il importe peu que l'ordre de ces opérations soit renversé, pourvu qu'elles soient exécutées d'une façon régulière et convenable. Ce que nous avons dit des effets du massage montre cependant que le meilleur instant pour le pratiquer sur les membres est celui qui suit le travail. Les chevaux qui l'ont subi se reposent mieux et éprouvent plus de bien-être quand ils ont la peau du corps propre. Il est donc toujours bon de leur donner un coup de bouchon un peu prolongé, après qu'on les a débarrassés de leurs harnais.

Si nous ne consultions que nos propres impressions sur le sujet qui nous occupe, nous n'hésite-d'économiser le temps de ceux qui travaillent, rions nullement à déclarer d'une manière absolue, qu'en raison des faibles avantages que peut offrir pour certains cas l'usage de l'étrille, comparativement aux inconvénients graves qu'il présente le plus ordinairement, cet usage nous paraît devoir être proscrit, du moins quant à l'application directe de l'instrument sur la peau. Si l'on conçoit que l'étrille puisse être utile, lorsqu'il s'agit de panser de gros chevaux à peau épaisse, à poils longs et rudes et fortement salis par le fumier, à la condition de n'atteindre, avec ses lames dentées, pas au delà de la surface de l'épiderme, cette limite est si difficile à garder, que les cas doivent être bien rares où elle n'est pas franchie. Toujours est-il que quand on examine avec soin la poussière qui s'échappe d'une étrille lorsqu'elle est frappée sur un corps dur par l'un de ses marteaux, on y trouve toujours en abondance des lames d'épiderme violemment détachées de la peau. En outre de l'irri- | tation périodique causée à cette membrane par les atteintes des dents de l'étrille, elle est ainsi privée d'une partie de son revêtement épidermi- | que protecteur, et plus exposée aux actions des agents extérieurs qu'il a pour but de modérer. La sensibilité normale de la surface cutanée est ainsi exagérée. Il en résulte nécessairement une perturbation de la transpiration insensible, qui ne peut manquer d'avoir à la longue des effets pernicieux. Peut-être n'y a-t-il pas lieu de chercher une autre cause pour expliquer la facilité avec laquelle les chevaux de travail contractent des affections de poitrine plus ou moins intenses, lorsqu'ils sont exposés à des courants d'air un peu froids.

Cela doit au moins faire sentir la nécessité de n'user de l'étrille, dans tous les cas, qu'avec une grande modération, si l'on ne croit pas pouvoir s'en passer, ce qui nous paraîtrait assurément préférable, la peau pouvant toujours être suffisamment nettoyée avec la brosse de chiendent un peu dure. Pour les animaux à peau fine, et sur les régions non garnies de chairs de tous les autres, il n'y a pas à hésiter. Les impressions toujours désagréables que produit le passage de l'étrille, si léger qu'il soit, témoignent assez de ses inconvénients. Il faut songer que si les frictions du pansage peuvent avoir de bons effets, ce n'est qu'à la condition d'être douces et plutôt prolongées qu'intenses. Elles ont pour but d'activer la circulation périphérique, non pas d'irriter la peau et d'y dé

Quoi qu'il en soit, tout doit être ouvert dans l'écurie pendant le pansage, afin d'entraîner aussitôt au dehors la poussière qui se produit. S'il est absolument indispensable de se servir de l'étrille, pour détacher les souillures qui peuvent adhérer fortement aux poils, il faut borner exclusivement son action aux parties salies, et, autant que possible, ne pas atteindre la peau. Après l'étrille, on passe sur toutes les parties du corps, sans en négliger aucune, le bouchon de paille rude, en frottant fortement, puis on donne un coup d'époussette pour faire sortir la poussière résultant de l'action du bouchon. Cela fait, arrive le tour de la brosse, qui doit passer sur toutes les parties dans le sens du poil, en commençant par les joues, le front, la partie supérieure de l'encolure, et en suivant les autres régions. L'étrille sert alors avantageusement pour débarrasser la brosse de la poussière qui y demeure adhérente. Tenue dans la main gauche, elle reçoit alternativement les frottements de la brosse, chaque fois que celle-ci a été passée sur le poil. Ensuite, on peigne la crinière et la queue, puis avec l'éponge mouillée on lave les yeux, les tempes, les naseaux, l'anus, le fourreau, la base de la queue et quelquefois aussi le bord supérieur de l'encolure. Enfin, les pieds étant débarrassés du fumier qui peut remplir les lacunes de la fourchette et toute leur surface plantaire, le pansage est terminé.

Ainsi se pratique l'opération pour les gros chevaux de trait, si l'on veut qu'elle soit complète. Chez les chevaux de selle et d'attelage, qui ont la peau plus fine et plus sensible, les poils moins

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longs en général, et qui sont généralement l'objet de soins plus minutieux, quant à leur logement et à leur habillement, si l'on peut ainsi dire, l'usage des couvertures et même des camails étant poussé avec eux même jusqu'à l'abus; chez ces chevaux, le pansage comporte quelques modifications. D'abord, il n'y a pas à hésiter pour remplacer absolument l'étrille par la brosse de chiendent, qui dans ce cas suffit amplement pour nettoyer les poils. Après son action et celle de l'époussette, vient le tour de la brosse en crin, puis celui du bouchon de foin légèrement humide longtemps passé dans le sens du poil sur toutes les régions pourvues de muscles, en appuyant assez fortement, et surtout sur les membres, depuis le haut jusqu'en bas; enfin le poil est essuyé et lustré avec une étoffe de laine, les crins sont peignés, la toilette des oreilles et des ganaches, celle des membres, quand il y a lieu, est faite avec les ciseaux courbes, et les lavages de l'éponge opérés comme nous l'avons dit plus haut. Ici, il faut insister surtout sur l'action du bouchon de foin, que les grooms anglais manient si bien simultanément des deux mains, en faisant entendre au cheval une sorte de bruissement de la bouche qui semble destiné à occuper son attention et à lui faire supporter le pansage avec docilité. Nous n'ajouterons qu'une remarque, c'est qu'il importe, dans l'intérêt même de l'hygiène, de ne pas abuser des couvertures. Nous avons durant plusieurs années entretenu en bon état de santé, dans la pratique civile et dans la pratique militaire, nos propres chevaux de selle, en les privant systématiquement et d'une manière absolue de l'usage de la couverture. Pourtant nous montions au régiment une bête extrêmement fine et impressionnable, qui faisait avec nous un service très-actif et rentrait le plus souvent à l'écurie étant en sueur. Mais elle ne savait pas non plus ce que c'était que l'étrille, et elle recevait chaque

cette opinion, au moins singulière, que les bains froids sont capables de provoquer le développement de la morve et du farcin. »

fois un bon bouchonnement.

Bains. Nous avons ailleurs (1) envisagé ce sujet avec tous les développements qu'il comporte au point de vue de l'hygiène des animaux. Nous ne saurions mieux faire que de reproduire ici la partie de notre travail relative à l'usage des bains pour les chevaux de travail. Voici ce que nous avons écrit à cet égard :

« Dans toutes les localités où l'existence d'un fleuve ou d'une rivière suffisamment forte rend la chose possible, l'usage d'y faire baigner les chevaux après leur travail est adopté de temps immémorial. Cette pratique est usitée bien plus en vue de rendre plus facilé que par les autres moyens de pansage, l'enlèvement de la boue ou du fumier qui souille la peau, que pour répondre à des vues raisonnées d'une saine hygiène, qui malheureusement ne sont pas assez répandues dans le public. Ce n'est guère que dans l'armée que les bains hygiéniques d'eau courante ont été mis en pratique comme mesure générale, dans la saison chaude et les jours de manoeuvre, à la sollicitation des vétérinaires qui ne partagent point (1) Nouveau Dictionnaire pratique de médecine, de chirurgie

et d'hygiène vétérinaires, de H, Bouley et Reynal, art. BAINS, p. 860.

Après des considérations physiologiques sur les instincts manifestés à cet égard par tous les animaux, nous poursuivions ainsi :

«La plus grande importance de la question dont il s'agit ici se rapporte au cheval, dont la peau, en raison de la destination unique de cet animal comme agent locomoteur, a besoin de remplir toujours intégralement, et sans entrave aucune, cette fonction dont nous parlions tout à l'heure (la fonction respiratoire qui lui est en partie dévolue), et qui n'a été bien appréciée que dans ces derniers temps.

« Il règne encore au sujet des bains froids un préjugé fortement enraciné, et qu'il est de la plus grande utilité de chercher à détruire. Je sais qu'il me serait bien impossible de persuader à certaines personnes que cette pratique ne doit pas nécessairement déterminer des répercussions dangereuses. Je ne puis que les renvoyer notamment aux travaux de M. L. Fleury, sur l'hydrothérapie, où elles verront des quantités innombrables de faits qui prouvent que les bains froids ou les douches, même sur les individus en sueur, sont toujours sous ce rapport d'une innocuité parfaite, à la seule condition qu'ils soient généraux. Et cela se comprend de reste, puisque, l'action étant générale, la réaction l'est également, et que celle-ci est d'autant plus intense que le bain ou la douche ont été plus froids. On prend pour un inconvénient de la pratique en soi ce qui ne doit être imputé qu'à son usage irrationnel.

« A la condition donc que l'immersion soit générale et instantanée, les bains d'eau courante ne peuvent être que d'une grande utilité pour la conservation de la santé, quelle que soit du reste la température de cette eau; et je suis bien intimement convaincu, pour ma part, qu'on se trouverait fort bien d'en étendre l'usage. Rationnellement mis en pratique, c'est-à-dire de façon à ce que la réaction soit toujours rendue prompte, sûre et énergique, ces bains produiraient, depuis le printemps jusqu'à l'automne, sur l'hygiène du cheval en général, et du cheval de troupe en particulier, une influence conservatrice dont on n'aura pas de peine à se rendre compte, si l'on vent bien arrêter un instant son attention sur la cause la plus générale de ses maladies. Ce serait une façon d'agir diamétralement opposée à celle que nous voyons suivre partout, il est vrai; mais ne semble-t-il pas qu'on s'étudie actuellement, surtout chez les gens de luxe et dans l'armée, à rendre les chevaux de plus en plus impressionnables à l'action de cette cause générale occasionnelle de la plupart de leurs affections, en les enveloppant de camails, couvertures, guêtres, etc., en laine, pour lesquels ils n'avaient certes point été faits? L'usage des bains froids, en régularisant l'exercice des fonctions, imprimerait à l'appareil tégumentaire une tonicité et une force de résistance qui le mettraient à l'abri de ces troubles qui, sous l'influence du moindre courant d'air, se traduisent si facilement en une lésion grave des organes digestifs ou respiratoires, et surtout

de ceux-ci. Mais c'est là une grave question d'hygiène générale que je ne puis qu'effleurer ici, en indiquant seulement le sens dans lequel je crois qu'elle devrait être envisagée.

:

« Quoi qu'il en soit, pour être véritablement hygiéniques, ces bains doivent être administrés suivant quelques règles, dont voici les principales Les immersions, comme je l'ai dit, doivent toujours être, autant que possible, générales et instantanées; c'est-à-dire que le cheval ne doit jamais rester immobile dans l'eau froide au milieu de laquelle il s'est plongé; le mieux est de le faire passer à plusieurs reprises dans le lieu où le bain est établi. Lorsqu'il existe assez d'eau pour qu'un peu de natation soit indispensable, cela n'en vaut que mieux. Si la température extérieure est élevée au delà de la moyenne de l'été, l'animal peut être laissé sans inconvénient au repos, au soleil, en sortant du bain ; mais s'il en est autrement et que la différence entre la température extérieure et celle de l'eau ne soit pas très-sensible, il est indispensable de provoquer la réaction par l'exercice. C'est ici du reste qu'intervient le tact du praticien qui surveille l'opération.

« J'ai vu mettre en pratique ce mode de bains sur une assez large échelle, et jamais, à ma connaissance, il n'en est résulté que du bien. »>

C'est en 1856 que nous nous exprimions de cette façon, au sujet des avantages que les bains peuvent procurer à l'hygiène des animaux de travail. Rien n'est venu depuis nous faire sentir la nécessité d'y ajouter, mais non plus d'y retrancher quoi que ce soit. Nous pensons toujours qu'il ne faut pas négliger de tirer parti des circonstances qui permettent de faire baigner les chevaux le plus souvent possible, même en toute saison, sauf à faire suivre le bain, dans les temps froids, de vigoureuses frictions, dans le but de faciliter la réaction et de les sécher. Cela repose les membres fatigués, donne de la tonicité aux muscles, et stimule l'appétit,tout en rendant les digestions plus faciles et l'absorption des matières nutritives plus complète.

C'est dans le même sens qu'agit une autre pratique, contre laquelle s'est élevé longtemps un préjugé analogue à celui dont nous venons de parler, mais qui est maintenant fort répandue dans les grandes villes sur les chevaux de luxe. Nous voulons parler du tondage, dont nous allons maintenant nous occuper.

Tondage. Depuis bien longtemps, dans certaines contrées de l'Est et du Midi de la France, on avait la coutume de tondre les animaux de l'espèce chevaline, au moins sur une partie de la surface de leur corps, qui est celle sur laquelle portent les harnais. Les hygiénistes se sont plus d'une fois élevés contre cette coutume, en fondant leurs dissertations sur des considérations qui ne sauraient plus nous toucher, maintenant que nous sommes éclairés sur la véritable signification d'une telle opération. Les raisons théoriques opposées au tondage n'ont jamais pu prévaloir auprès de ceux qui l'avaient adopté. Ils ont continué, quoi qu'on leur ait dit, d'y soumettre leurs animaux. C'est que l'expérience, plus forte que toutes les conceptions hypothétiques, en avait

démontré les avantages. Ils ne voyaient point survenir sur leurs animaux les accidents qu'on affirmait devoir nécessairement être la conséquence de cette opération.

Et quand on examine en effet les objections opposées au tondage, on est frappé de leur peu de fondement. Le poil plus long et plus épais, disait-on, qui se montre à l'entrée de la saison froide, a pour but de protéger la peau contre les injures du temps. Enlever aux animaux cette sorte de manteau protecteur, c'est aller contre les vues de la nature, qui dispose pour le mieux tout ce qu'elle fait. L'animal qui en est dépourvu, doit nécessairement souffrir du froid et des intempéries, et subir une perturbation dans les fonctions de la peau.

Il est facile de voir jusqu'à quel point un pareil raisonnement pèche par la base. Sans doute, si la venue de l'hiver amène dans le système pileux des animaux les changements que nous observous, ce n'est pas sans motif. On conçoit fort bien que dans les conditions naturelles cela soit nécessaire. Les bêtes libres, qui n'ont en toute saison qu'à chercher leur nourriture, ne seraient pas suffisamment protégées contre le refroidissement, si, lorsque la température extérieure subit un abaissement constant et prolongé, leur corps ne se recouvrait pas d'une enveloppe plus épaisse, d'une sorte de vêtement mauvais conducteur de la chaleur. Le fait est, d'ailleurs, trop général, pour n'être pas l'expression d'une loi. Lorsqu'on observe à ce point de vue ce que l'on peut appeler la géographie des espèces animales, on constate toujours une relation exacte entre les caractères de la fourrure et ceux du climat. Sous les tropiques, les espèces sont à peu près dépourvues de poils; au voisinage du pôle, elles en ont au contraire d'abondants et fourrés. Il en est de même sous le rapport de l'altitude, avec des différences moins marquées toutefois.

Mais on s'expose aux plus étranges erreurs, toutes les fois que l'on veut appliquer aux conditions de la civilisation les faits observés dans l'état sauvage, sans tenir compte des éléments nouveaux que celle-là fait intervenir. N'est-il pas évident, par exemple, dans le cas dont il s'agit, qu'on ne saurait, sans offenser la logique, assimiler les animaux sauvages à ceux qui sont en état de domesticité ? Il intervient pour ceux-ci des conditions de logement, de nourriture, et surtout de travail, qui rendent toute comparaison impossible. Les animaux que leur fourrure protége contre les rigueurs du froid, ne portent point apparemment de harnais, ne produisent point un travail mécanique, qui est démontré aujourd'hui n'être qu'une transformation du calorique développé par les contractions de leur appareil musculaire. S'il leur fallait, pour maintenir l'équilibre de température nécessaire à l'exécution de leur fonction nutritive, exercer leurs muscles, on ne voit point comment il leur resterait assez de temps pour absorber en quantité suffisante les aliments indispensables à l'entretien de leur vie. C'est pour cela, sans doute, qu'ils sont protégés naturellement contre les déperditions de calorique, par ce que l'on appelle leur poil d'hiver.

Dans ces conditions, en outre, il est une remarque extrêmement importante à faire. Les exhalaisons normales de la peau s'exécutent d'une manière régulière et lente. La transpiration s'effectue dans les limites des nécessités fonctionnelles, et ses éléments liquides s'évaporent à mesure qu'elle se produit. Dans l'état de repos ou d'exercice modéré que comporte la vie sauvage, la transpiration est insensible; en d'autres termes, l'animal dans cet état ne sue pas.

En est-il de même des animaux domestiques, et surtout des solipèdes utilisés pour le travail? Il n'y a pas lieu de répondre à cette question. Nous savons précisément qu'à travail égal l'abondance de la sueur est en rapport avec celle de la fourrure, et que cette sueur s'accumule d'autant plus à la surface du corps que le poil est plus long et plus fourré. Or, s'il est normal que la transpiration cutanée demeure dans tous les cas insensible, par le fait de l'évaporation constante de ses produits à mesure qu'ils se forment, il ne l'est nécessairement plus que ceux-ci, condensés sur les poils, s'y accumulent et forment à la surface du corps comme une sorte d'enveloppe liquide. Cette enveloppe peut être sans danger tant que dure l'activité fonction nelle qui la provoque; elle peut encore être sans danger si l'activité ne cesse pas tout à coup, et si son évaporation s'effectue lentement et sous l'influence d'une température douce; mais elle ne l'est jamais lorsque l'évaporation a lieu rapidement, ou lorsque le liquide accumulé sur les poils se refroidit d'une façon brusque. Et c'est ce dernier cas qui se présente chez les animaux en sueur exposés à un courant d'air. Le moins qui puisse en advenir est un trouble dans la fonction de la peau, sur laquelle nous avons plus haut insisté.

Voilà la vraie raison scientifique et pratique des bons effets du tondage et de ses avantages. Cette opération, en diminuant l'abondance des poils, s'oppose à l'accumulation de la sueur. Elle maintient la transpiration insensible dans la plupart des cas. En un mot, elle empêche les animaux de suer et prévient les résultats pernicieux de cette atmosphère liquide dont nous venons de parler. De plus, lorsque réellement celle-ci se produit néanmoins sur le corps des sujets tondus, il est toujours plus facile d'en éviter les inconvénients par les procédés hygiéniques qui sont à notre disposition. Il n'est aucunement nécessaire de dire qu'un animal en sueur est d'autant plus facile à sécher que son poil est plus court et moins abondant.

Nous n'avons pas besoin de faire remarquer non plus que par l'opération du tondage le pansage de l'animal est rendu plus facile et plus complet. Il est évident que la peau peut alors être beaucoup plus aisément nettoyée, indépendamment de ce que les résidus de la transpiration cutanée s'y accumulent moins. A tous égards donc, le tondage des animaux de travail est une bonne opération, conforme aux plus sages prescriptions de la science hygiénique, et qui ne peut exercer sur la conservation de leur santé qu'une influence bienfaisante.

Au reste, l'expérience s'est maintenant prononcée là-dessus. Depuis que le tondage est pratiqué sur une large échelle, son heureuse efficacité ne

rencontre plus de contradicteurs parmi les hommes éclairés. Il est à désirer que sa pratique se généralise; et tous ceux qui ont souci de la bonne hygiène de leurs animaux doivent y avoir recours. Le seul obstacle à la propagation du tondage est sans doute dans les frais relativement considérables qu'il occasionne, La difficulté est dans les procédés à l'aide desquels il peut être opéré. Il a été fait beaucoup d'efforts, dans ces derniers temps, pour simplifier ces procédés. On a d'abord substitué aux forces et aux ciseaux l'action comburante du gaz enflammé. Des expériences nombreuses, dont les premières ont été exécutées à Vincennes sur des chevaux de l'armée, ont démontré les avantages de ce moyen. Mais il a été à son tour dépassé. MM. de Nabat ont inventé depuis une tondeuse mécanique fondée sur le principe de la tondeuse à drap, qui paraît destinée à faciliter considérablement la propagation de l'opération. Nous avons vu fonctionner la machine de MM. de Nabat. Il semble bien impossible de rien imaginer qui puisse permettre de tondre mieux et plus rapidement un cheval. Ce n'est pas, il faut le remarquer, un résultat purement expérimental que nous constatons. Il s'agit d'une chose passée dans la pratique, devenue tout à fait industrielle à Paris, et qui est sans nul doute destinée à se répandre partout, au plus grand avantage de l'hygiène des animaux de travail.

Ces animaux sont ordinairement tondus vers la fin de l'automne. Il est bon de procéder à l'opération préférablement un peu plus tôt que plus tard. Lorsqu'elle est débarrassée de sa fourrure avant la venue des grands froids, la peau s'habitue progressivement à supporter les atteintes plus directes de la température basse de l'air qui l'entoure, dans les moments de repos. Il n'y a pas de règle absolue sur la question de savoir si le tondage doit être renouvelé plusieurs fois dans le courant de l'année. Dans le midi de la France et en Espagne, on le renouvelle ordinairement jusqu'à quatre et six fois. Il y a lieu de se guider pour cela sur l'état des poils, et de se conduire suivant que ceux-ci repoussent avec plus ou moins de vigueur. On aura réalisé un grand progrès hygiénique, lorsque tous les animaux de travail seront seulement tondus une fois l'an.

Si le tondage partiel usité depuis si longtemps et si généralement sur les chevaux de la FrancheComté et du Dauphiné est un progrès considérable, il n'est point contestable que le tondage complet, celui qui s'applique à toute la surface du corps, constitue sur le premier un progrès non moins grand. C'est donc celui-là qui doit être préféré. Toutes les parties de la peau contribuant à peu près également à l'accomplissement de sa fonction, nous n'avons pas besoin d'insister pour démontrer l'utilité de les mettre dans les mêmes conditions. La raison d'économie pourrait seule être invoquée, mais elle ne serait point suffisante pour compenser les avantages du tondage général. Ce sont précisément les parties sur lesquelles on laisse subsister les longs poils, c'est-à-dire toute la moitié inférieure du corps et les membres, qui sont les plus difficiles à entretenir en état de propreté et qui exigent pour cela le plus de soins et de travail. Or, même au point de vue seulement

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