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DEUXIÈME PARTIE

ZOOTECHNIE ET ZOOLOGIE AGRICOLE.

CHAPITRE PREMIER

DEFINITION ET OBJET DE LA ZOOTECHNIE.

toute la zootechnie, moins la connaissance des lois économiques qui doivent diriger son action. >>

On donne maintenant, d'après M. de Gasparin, | Prise en ce sens, la physiologie vétérinaire est le nom de zootechnie à l'ensemble des connaissances relatives à l'économie du bétail. L'expression est heureuse, et l'on s'étonne qu'elle n'ait pas été plus tôt adoptée. Ces connaissances ont en effet pour véritable objet, l'art de tirer des animaux domestiques le meilleur parti possible, non pas par conséquent tels que l'homme les a trouvés dans la nature, mais bien tels que la science lui permet de les perfectionner, en vue d'une civilisation et d'une industrie plus avancées.

L'art d'exploiter le bétail a cessé effectivement d'être à présent, comme il l'a été pendant longtemps, seulement un corps de préceptes empiriques, déduits des tâtonnements de la pratique, ou inspirés par les suppositions de l'histoire naturelle. La zootechnie s'est fondée sur la science; elle est, en propres termes, la physiologie industrielle des animaux. Elle comporte done, comme toutes les sciences, des principes généraux, qui sont ceux de la physiologie subordonnés à ceux de l'économie rurale, et des applications particulières, qui constituent l'art spécial formant son objet.

bord l'importance scientifique et pratique de ces principes, et distingué les diverses fonctions économiques du bétail dans l'exploitation rurale. Nous aurons soin de bien définir nos termes, pour éviter toute confusion; puis nous passerons en revue les moyens de perfectionnement applicables à toutes les espèces et à toutes les fonctions ou spécialités. Enfin, nous examinerons les influen

Ce n'est pas seulement le mot de M. de Gasparin qui est nouveau. Sans méconnaître l'importance des services rendus à l'exploitation du bétail par les travaux, en général si remarquables, de nos devanciers; sans oublier que depuis la fondation des écoles vétérinaires, les Bourgelat, Gilbert, Tessier, Nous commencerons notre travail, en conséHuzard, Grognier, Yvart, Magne, et tant d'autres, quence, par l'exposition des principes généraux de se sont toujours efforcés de baser l'art de multi-la zootechnie, après avoir toutefois fait sentir d'aplier et d'améliorer les animaux domestiques sur la connaissance de leur organisation anatomique et physiologique; on peut dire néanmoins que la véritable doctrine zootechnique est de date toute récente. Il ne nous en coûte rien de reconnaître que cette doctrine ne remonte guère plus loin que la création de l'enseignement agricole, en 1849, et que M. Émile Baudement en a été, sinon le premier, au moins l'un des plus judicieux interprètes. Nous avons exprimé quelque part (1), en définissant la physiologie vétérinaire ou la physiologie des animaux domestiques, le caractère propre de cette nouvelle doctrine, qui n'avait été certainement qu'à peine entrevu, avant l'époque dont je viens de parler. «La physiologie vétérinaire, avonsnous dit, doit avoir constamment en vue que les animaux domestiques sont entre nos mains comme une sorte de matière malléable, dont nous pouvons modifier la forme pour ainsi dire à notre guise, au plus grand avantage de nos besoins sociaux.

(1) Discours prononcé à la séance publique de la Société impenale et centrale de médecine vétérinaire, le 28 avril 1861.

ces destinées à s'exercer directement ou indirectement sur les applications de la zootechnie, en général, et à provoquer ou stimuler ses progrès.

Après cela sera faite successivement la technologie de chacune de nos espèces animales domestiques, sans exception. Le cheval, le bœuf, le mouton, la chèvre, le porc, la volaille, le lapin, les poissons, les abeilles, les vers à soie, seront c'est-à-dire quant à la connaissance de leurs types, étudiés au point de vue agricole et industriel, de leurs races, des procédés de multiplication, d'amélioration et d'exploitation de leurs produits. A ces matières, dont l'ensemble forme l'objet naturel de la zootechnie, le Livre de la ferme doit

joindre, pour être complet sur ce qui intéresse le cultivateur relativement aux animaux, les notions concernant les bêtes sauvages et les insectes nuisibles ou utiles, à la réunion desquelles notions

on a donné le nom de zoologie agricole. Il importe que l'agriculteur puisse discerner, parmi ces bêtes, quels sont ses amis et ses ennemis.

CHAPITRE II.

DE L'IMPORTANCE DE LA ZOOTECHNIE.

S'il est possible de concevoir, comme l'a fait M. de Gasparin pour distinguer la zootechnie de l'agriculture, une exploitation agricole sans bétail et bornée pour ce motif à la production spéciale de quelques denrées particulièrement avantageuses, en raison de conditions exceptionnelles, on n'en peut pas moins dire d'une manière presque absolue que la production animale est la base fondamentale de l'industrie du sol. C'est là maintenant une vérité banale. L'ancienne formule allemande, qui considérait le bétail, en agriculture, comme un mal nécessaire, a fait son temps. L'influence de l'école économique a remis, ici comme partout, chaque chose à sa place. En montrant l'enchaînement scientifique des faits dont l'ensemble aboutit à l'exploitation lucrative de la terre, les agronomes pénétrés des principes de cette école n'ont pas eu de peine à établir que le problème de la culture rationnelle du sol se réduit, en définitive, à la fabrication des engrais au meilleur compte possible; ils ont montré que c'est le seul moyen d'obtenir des récoltes abondantes et à bas prix, par l'élévation et l'entretien de la terre au plus haut degré de fertilité qu'elle puisse atteindre.

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tence de l'agriculture et de ses progrès, c'est dire que tout, dans celle-ci, lui est subordonné ; mais c'est faire entendre en même temps une autre vérité qui est bien loin, à coup sûr, d'avoir été suffisamment comprise par le plus grand nombre de ceux qui, jusqu'à présent, se sont occupés de l'économie du bétail. Ce lien étroit, qui unit la culture du sol à la production animale, et réciproquement, n'a été aperçu que d'un petit nombre de zootechniciens ; la plupart ne semblent pas se douter que les formes et les aptitudes des animaux soient subordonnées, dans une mesure quelconque, au milieu dans lequel ces animaux se forment et se développent. Imbus d'une physiologie idéaliste, sorte de métaphysique zootechnique basée sur de pures conceptions de l'esprit, ils font abstraction complète de ce milieu et demeurent dans l'absolu. Les faits sont lettre morte pour eux; ils ne les voient pas, ils ne veulent pas les voir; le dogme qu'ils supposent est tout; et si les résultats ne sont pas conformes aux promesses de celui-ci, c'est qu'il n'a pas été assez religieusement observé dans l'application.

Le principal de ces dogmes, dont nous aurons bien des fois l'occasion de nous occuper, est celui du pur sang, agent universel, ainsi qu'on l'affirme, de toute amélioration en zootechnie, et qui a été déjà si funeste à la production animale de notre pays.

Nous n'entreprendrons pas de développer ici cette thèse; elle a reçu ailleurs sa démonstration; il suffit de l'énoncer. M. Édouard Lecouteux mieux que personne, dans ses ouvrages d'économie rurale (1), a mis le fait dont il s'agit en lumière Avant l'introduction des idées économiques, d'une façon qui défie toute contestation. On sait de la méthode expérimentale, dans l'industrie d'ailleurs, à n'en plus douter, que l'état d'avan-agricole, on pouvait facilement concevoir de pacement de l'agriculture d'un pays se mesure assez exactement à la quantité du bétail qu'il possède, eu égard à l'étendue de son sol, et aussi à la qualité de ce bétail. La même formule s'applique également à l'appréciation d'une exploitation particulière; car il est bien vrai, ainsi que l'écrivait naguère encore M. Moll, que le bétail est « la base fondamentale » et « la condition première d'existence et de progrès » de l'agriculture.

reilles aberrations. On le pouvait d'autant mieux, qu'elles étaient le fait de gens absolument étrangers aux études sans lesquelles il n'est point possible d'aborder avec compétence aucune des questions qui se rapportent à l'amélioration des animaux. La définition exacte de la zootechnie nous paraît donner une idée suffisante de cette difficulté. La zootechnie, répétons-le ici, c'est la physiologie vétérinaire, subordonnée aux lois économiques qui régissent la production et l'exploitation lucrative des animaux. Il ne faut pas, par conséquent, avoir la prétention d'aborder avec succès les questions doctrinales relatives à la zootechnie, en l'absence des connaissances phy

Or, on concevra facilement, après cela, quelle doit être l'importance de cette branche de l'industrie rurale à laquelle a été donné dans ces derniers temps le nom de zootechnie, et dont nous avons à nous occuper. Avancer qu'elle est la base fondamentale et la condition première de l'exis-siologiques qui en forment la base. Et c'est là le

(1) Principes de la culture améliorante, et Traité des entreprises de grande culture, Paris, 1860 et 1861.

secret de l'insuffisance de tant de travaux entrepris sur cette matière, quelle que fût d'ailleurs l'aptitude pratique de leurs auteurs; c'est aussi

celui des qualités solides qui distinguent particulièrement les études de M. Emile Baudement, un des interprètes les plus brillants, comme on l'a déja dit, de la nouvelle école, que nous appellerons scientifique.

Dans cette école, où tout est nécessairement ramené à la rigueur d'une démonstration expérimentale; où les mots vides et les affirmations arbitraires sont impitoyablement écartés; où les théories ne sont que ce qu'elles doivent toujours être, des interprétations logiques des faits que la pratique et l'observation enseignent, au lieu de conceptions à priori; dans cette école scientifique, la zootechnie est devenue une branche sérieuse de nos connaissances, qui exclut nécessairement tous ces amateurs auxquels on accorde trop volontiers la compétence, parce qu'ils en parlent le jargon. Il faut espérer que les agriculteurs éclairés ne s'y méprendront pas plus longtemps, et que, se pénétrant davantage des difficultés d'un problème aussi complexe que celui de l'exploitation du bétail, ils exigeront de ceux qui visent à leur enseigner des préceptes sur cet objet, de plus grandes garanties.

Mais même parmi le petit nombre de zootechniciens qui ne méconnaissent point l'existence d'une solidarité entre la production animale et le milieu agricole où elle s'effectue, il en est quelques-uns qui, tout en proclamant cette solidarité, oublient le plus souvent d'en tenir compte et d'y subordonner leurs théories. Cela paraît pouvoir s'expliquer de deux façons ou bien ils négligent complétement le point de vue économique, qui doit cependant dominer toutes les questions zootechniques; ou bien ils demeurent absolument sous l'empire de ces conceptions arbitraires mentionnées plus haut. Le bon sens leur dit qu'il n'est pas possible de concevoir une production animale séparée de la matière première qui doit permettre de l'effectuer; mais dès qu'ils se mettent à l'œuvre, le bon sens fait place à la théorie abstraite, ou plutôt à l'hypothèse ; la matière première disparaît de leurs préoccupations, et ils sont naturellement amenés à élever à la hauteur d'un principe absolu d'amélioration ce qui, pour la science positive, ne peut être qu'un moyen de tirer le meilleur parti possible de cette matière première, dans les conditions agricoles et économiques où il s'agit d'opérer.

Nous aurons, dans la suite des études auxquelles nous allons nous livrer, bien des fois l'occasion | de faire ressortir cette déplorable contradiction, en l'appuyant sur des faits. Nous insisterons beaucoup, car elle est la source à peu près unique de tous les mécomptes auxquels ont été conduits la plupart des agriculteurs bien disposés pour le progrès, qui ont entrepris dans ces derniers temps l'amélioration de leur bétail, avec le parti pris d'arriver promptement à cette amélioration. On peut même dire, sans risquer trop d'être justement taxé d'exagération, que l'enseignement zootechnique le plus en vogue est demeuré en grande partie étranger à l'incontestable amélioration qui se remarque dans l'état actuel de notre bétail français. Cet enseignement n'y a pas du moins contribué d'une manière directe. L'amé

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lioration doit être plus exactement attribuée aux progrès introduits dans les méthodes culturales, et aux notions qui ont pénétré dans l'esprit des agriculteurs par le seul fait des exhibitions de types perfectionnés de nos différentes espèces d'animaux. Les éleveurs sérieux ont au contraire réagi de toutes leurs forces contre les principes que l'on cherchait à leur inculquer; et l'observateur impartial est obligé de reconnaître qu'ils ont bien fait.

Nous réagirons donc nous-mêmes contre ces faux principes, en exposant ici les véritables données scientifiques sur lesquelles s'appuie la partie doctrinale de l'amélioration du bétail, et qui constituent la zootechnie générale. On s'efforcera, dans cette exposition, d'être aussi simple et aussi clair que possible. Au reste, la science, dont on s'effraie peut-être un peu trop en agriculture, sans doute parce que c'est là qu'elle semble avoir compté le plus d'interprètes insuffisants et par ce fait même obscurs; la science positive a précisément ce caractère propre d'être accessible à toutes les intelligences saines, à la condition qu'elle soit exposée avec méthode et précision. Nous arriverons sans trop de peine à mettre à la portée de tout le monde les principes scientifiques de la zootechnie, en indiquant d'abord le but que l'on doit se proposer, lorsqu'on entreprend d'entretenir et d'améliorer des animaux domestiques, puis les divers moyens d'arriver à ce but. Toute la difficulté, dans ces matières, est d'établir les bases sur de bonnes définitions, ce dont les auteurs ne se sont à coup sûr point suffisamment préoccupés. De là les confusions si fréquentes et si regrettables, qui se commettent à chaque instant dans les questions de zootechnie; de là la part si grande faite à la fantaisie dans ces questions; de là toutes ces tentatives malheureuses qui retardent le progrès, en le déconsidérant par les échecs auxquels elles conduisent.

Combien, par exemple, savent au juste ce que c'est qu'une race, à quels caractères on reconnaît la réalité de son existence, quel est même le sens exact de l'expression? Il n'y a pas jusqu'aux zootechniciens les mieux posés, qui ne prouvent à chaque instant qu'ils n'ont pas une idée précise de la valeur accordée à ce mot par les naturalistes qui l'ont créé. De même pour un grand nombre des autres expressions usitées en zootechnie, que la fantaisie s'efforce de détourner de leur véritable sens, en dehors duquel il n'est plus possible de s'entendre et de progresser.

Il convient par conséquent de ramener toutes ces choses à leur signification réelle, si nous voulons demeurer dans les limites du sens pratique, où se maintient toujours la seule science digne de ce nom. C'est ce que nous tâcherons de faire en toute occasion, persuadé que la précision du langage est une des premières conditions de la clarté, comme l'exactitude des faits et la logique de leur enchaînement. Si nous réussissons à bien dégager la donnée simple de chacun des problèmes zootechniques que nous avons à étudier, nous avons confiance que le lecteur, en y consacrant seulement une dose moyenne d'attention, pourra nous suivre jusqu'à la fin de ces études générales,

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