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DES PLANTES INDUSTRIELLES. maître, comme dans le maniement des instruments à la main, exige, au surplus, dės précautions minutieuses pour ne pas offenser les racines traçantes du houblon.

sur un grand nombre de rameaux. Après cela, il ne reste plus qu'à recouvrir.

Si l'on n'utilise pas les produits de la taille, il faut en faire de l'humus, en les amoncelant, afin qu'ils se décomposent par la fermentation; une légère addition de chaux active le travail de la nature. Le plus simple, dans ce cas, est de mêler ces débris aux mauvaises herbes et aux détritus orga

Les plants qui servent à la multiplication, consistent dans les pousses ou boutures retranchées des pieds anciens pendant l'opération de la taille. On en place un ou deux, pour plus de sûreté, dans chaque trou au moyen d'un plantoir; munis deniques destinés à faire du terreau. leurs racines, ils mesurent 20 à 25 centimètres de longueur, sur lesquels 4 ou 5 doivent rester hors de terre. Quand on a acquis la certitude qu'ils ont repris, on supprime le moins vigoureux, et s'ils ont péri tous deux, on les remplace.

Si, au contraire, le planteur a dessein de les employer à la reproduction à titre de boutures, il les choisira de préférence parmi ceux qui proviennent de plants vigoureux et féconds. Laissezleur, dans ce cas, une longueur de 10 à 12 centimètres avec des yeux à l'extrémité supéTravaux d'entretien. — La taille, dont nous rieure. Croiriez-vous que certains planteurs n'y venons de parler, doit être considérée comme le tiennent pas, et s'oublient jusqu'à les supprimer, premier des travaux d'entretien dans une hou- | laissant ainsi à la nature le soin d'en former de blonnière. L'objet de cette opération est double: nouveaux, car plus tendre pour les plantes que d'une part, augmenter la fécondité de la plante pour les animaux, elle rend des yeux à celles qui en forçant la séve, comme dans la taille des arbres, les ont perdus. Aveugler ainsi ses boutures, c'est à concentrer sur la tige restante toute l'énergie être aveugle soi-même; le moindre inconvénient de son action; de l'autre donner à la lupuline d'une pareille opération est de retarder la végétacette finesse d'arome, cette supériorité que les tion, en les forçant à reproduire des yeux qu'elles plantes obtiennent par la culture sur leurs congé- avaient déjà. nères restées simples enfants de la nature. On diffère d'opinion sur l'époque la plus favorable à cette opération. Certains cultivateurs la pratiquent en mars, tandis que d'autres prétendent qu'il faut la reculer jusqu'en mai. Cette opinion n'est point la nôtre. Il nous semble plus rationnel de n'adopter, pour la taille, aucune époque fixe, mais de se régler sur le travail de la végétation qui varie, quant à son point de départ, selon le climat de chaque contrée, la nature du sol et plus encore le caractère de l'année.

Les habiles pralinent, avant la plantation, les greffes à houblon avec de l'engrais concentré ou leur font prendre un peu de purin légèrement saturé de sel. Le procédé paraît bon.

Mais, en matière d'agriculture comme en toute autre matière, chacun fait la roue à sa manière, et prône le saint qu'il a choisi pour patron. Est-ce que nous nous appelons tous Pierre ou Joseph ? Il en est de nos méthodes comme de nos saints. Chacun encense la sienne. Nous entendions dernièrement un planteur critiquer la taille; savezvous la raison? C'est que dans son jardin il a une loge, et que le treillis de cette loge est festonné de houblon. Voyez cependant le caprice! ce houblon traité en sauvage, et vivant comme tel, s'est avisé, en 1859, de se couvrir de cônes comme pour nar

grais, la taille et les perches, eut bien de la peine
à conserver son feuillage jusqu'en octobre. De
cônes, il n'en fut pas question. Donc, notre
homme, tout comme s'il eût fait sa logique au
collége, et il l'avait peut-être faite, se posa le syl-
logisme suivant, pardon! syllogisme veut dire
raisonnement; vous le savez sans doute :
- «Mon

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La taille est peut-être l'opération la plus délicate de toutes celles qui constituent la culture du houblon. Vous avez, je pense, donné le fil au tranchant de votre serpette en le passant sur la pierre; il faut qu'elle coupe comme cet excellent rasoir qui, le matin de chaque dimanche, fonc-guer celui de la houblonnière qui, malgré l'entionne sur votre menton, devant le miroir accroché à la fenêtre; déchaussez-moi maintenant les souches, ou plutôt prenez-moi un de vos enfants; ce garçon-là fera la besogne par rigoles, si, comme en Lorraine, les plants sont très-rapprochés, et par fosses, en supposant qu'ils soient distancés, comme en Alsace, et si ce n'est assez de lui, prenez aussi son frère; mais recommandez à ces petits ouvriers de ne pas mettre à nu plus de souches que vous ne pouvez en tailler dans votre journée. Il ne faut pas qu'elles restent exposées à l'air froid de la nuit. Toutefois vos déchausseurs devront avoir sur vous assez d'avance pour que la terre, encore adhérente à la souche, se dessèche et s'en détache lorsque vous opérerez vous-même. Voyons maintenant comment il faut s'y prendre. Vous coupez, à 7 millimètres à peu près, la partie qui a fourni des tiges l'année précédente, ainsi que toutes les racines traçantes qui tendraient à produire des surgeons, en un mot, vous ne laissez que la racine pivotante munie de quelques yeux. Vous forcez, par ce moyen, la séve à se concentrer sur eux, et à leur communiquer une puissance végétative qu'ils n'auraient pas eue, si elle s'était répandue

<< houblon non taillé a porté fruit, mon houblon « taillé, néant, donc il ne faut pas tailler le hou«blon. » Une humble réflexion cependant, ou plutôt deux. Ces cônes du houblon de votre loge, les avez-vous soumis à l'épreuve ? Étaient-ils aussi riches en lupuline et cette lupuline avait elle un parfum aussi pénétrant que celui des cônes de votre houblonnière ? Nous en doutons. Les plantes incultes résisteront toujours mieux à l'intempérie des saisons. La culture produit sur les végétaux l'effet de l'éducation sur les animaux domestiques. Elle les rend plus féconds, et augmente la délicatesse de leurs produits, mais aux dépens de la rusticité.

Avant, pendant ou après, vous avez, nous supposons, donné à votre houblonnière la première façon de bêche. Abandonnez maintenant le reste à

lá Providence, du moins jusqu'à nouvel ordre, et livrez-vous à d'autres occupations. Elle fait luire son soleil pour votre houblon, comme pour les froments, les vignes, les arbres fruitiers, et sous l'influence de ses rayons vivifiants, il travaillera, travaillera, jusqu'à ce que ses tiges sortent de térre, et filent sur le sol. Mais quand elles ont atteint en hauteur 30 à 35 centimètres, un peu moins ou un peu plus, alors, parmi les brins les mieux réussis, les plus vigoureux, vous en choisirez quatre, deux pour la réserve, deux pour être mis en activité de service. Les autres seront supprimés, comme bouches inutiles. C'est le cas maintenant de passer une revue sévère. Si, parfi les monticules de vos plantations anciennes ou nouvelles, il en est qui n'offrent aucun indice de végétation, vérifiez le plant qu'ils renferment: si c'est une bouture de l'année, peut-être n'a-t-elle pas réussi; si c'est une souche ancienne, peut-être a-t-elle péri rongée par le ver blanc, par le rat de terre ou sous l'influence d'une cause délétère quelconque. Hâtez-vous de la remplacer, et pour ne pas être pris au dépourvu, ayez toujours quelques pieds de rechange dans un coin de votre planta

tion.

Le houblon, comme le lierre, a besoin d'un appui pour l'étreindre, l'enlacer de ses anneaux et le parer de son feuillage découpé comme celui de la vigne. Sans l'appui d'un compagnon solide, le houblon ramperait ou s'affaisserait sur lui-même. Il faut donc une tutelle, un protecteur à cet être faible condamné à vieillir dans une continuelle enfance. Rassurez-vous, dans sa sollicitude intéressée, le planteur a fait sa provision de perches. Ce sont, en effet, des perches à houblon que ces jeunes sapins, pins ou châtaigniers écorcés que vous apercevez disposés en faisceaux, et qui, vus de loin, donnent aux houblonnières alsaciennes, l'aspect d'un vaste camp, dont ces faisceaux seraient les tentes.

En Alsace et aux environs de Rambervillers, la perche est haute de 8 à 12 mètres; en Lorraine, où les plants sont plus rapprochés, le tuteur de la tige du houblon n'est qu'un grand échalas. Cependant la perche commence aussi à s'y répandre, à mesure que se propage la méthode de culture alsacienne popularisée par les ouvriers que les planteurs lorrains font venir de ce pays. Les grandes forêts de Haguenau fournissent la perche de pin; la chaîne des Vosges et surtout les montagnes de la forêt Noire, au delà du Rhin, donnent la perche de sapin, plus estimée, je crois, sans toutefois pouvoir l'affirmer. Celle de châtaignier, plus durable, mais moins haute, provient de semis.

La culture du pin a lieu aux environs de Haguenau, en vue de la production des perches. On sème donc très-dru, de manière à ce que les jeunes arbres, privés d'air latéralement, montent dans l'atmosphère pour pouvoir y respirer à l'aise, et s'étirent comme le caoutchouc, gagnant ainsi .en hauteur ce qu'ils perdent en circonférence. Après une révolution de dix ans à peu près, on fait une première éclaircie qui ne donne pas encore des perches, mais de hauts échalas. Quelques années après, on prélève un nouveau tribut; les

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sujets décimés peuvent déjà servir à une jeune houblonnière. Ces prélèvements successifs, faits au profit des arbres restants, permettent à ceux-ci d'acquérir bientôt les proportions de la vraie perche. A leur tour alors de tomber sous la hache du bûcheron, qui n'épargne que les sujets destinés à devenir de grands arbres, qui, un jour, donneront des planches, des solives injectées de sulfate de fer par le procédé Boucherie, et deviendront presque incorruptibles. Nous imaginóns que l'on procède de même pour le sapin, et nous en avons la certitude pour le châtaignier. La perche une fois coupée, on procède à la décortication soit sur place, soit dans des ateliers particuliers : les petits planteurs font la besogne eux-mêmes. On prétend que, privée de son écorce, la perche se conserve plus longtemps. C'est là un problè ne dont l'expérience a le mot; sans dire oui, sans opposer non, nous proclamons la méthode bonne, et voici pourquoi : Le bois mort est le rendez-vous d'une foule d'insectes, âpres à la curée de tout ce qui a une odeur de mort; tes ennemis de la perche à houblon trouveraient un logement tout meublé, entre le bois et l'écorce. Bien sot serait le planteur qui s'entendrait avec eux. Et les ennemis du houblon donc ! la légion en est grande, ils auraient là chambre garnie, à côté de la table et du couvert. Mais à notre avis, en se bornant à cette opération, on reste à moitié chemin. La perche coûte aujourd'hui assez cher pour qu'on songe à la préserver des injures de l'atmosphère; celles du temps, ce grand démolisseur, suffisent et au delà. Nous prenons donc la liberté de vous proposer l'essai suivant, sauf à vous de l'employer en grand, s'il vous réussit. Vous avez entendu parler, sans doute, du coaltar ou goudron de houille, produit qui fait grand bruit depuis un temps, à cause de ses propriétés antiputrides et de celle d'éloigner les insectes. Eh bien! prenez-moi de ce goudron qui ne coûte presque rien; habillez-en de noir votre perche, et voyez si cela ne sera point pour elle un préservatif, tout en favorisant la végétation, car, vous n'ignorez pas, sans doute, que la couleur noire absorbe le calorique de jour et le rend de nuit à l'atmosphère. On tient le fait de la bouche des savants; et certains ignorants regardent la chose comme certaine. Seconde remarque. Généralement on polit la perche, et on en supprime avec soin toutes les nodosités. Mauvaise pratique à notre modeste bon sens. Sans doute, à l'époque de la cueillette, la perche, ainsi traitée, dépose plus facilement sa tunique de feuillage et sort nue des tiges qui l'enroulent; mais, pendant la période de la végétation, les appendices et les protubérances sont autant de points d'appui au moyen desquels la tige, tournant en spirale, escalade sa perche et s'élève jusqu'à son sommet. Ce sont des attaches naturelles qui l'empêchent de glisser le long de son tuteur et de retomber sur elle-même comme cela arrive parfois. Tout plant victime de cet accident est un plant à peu près perdu. Quand il est encore très-jeune, on a recours à l'opération du recepage; mais c'est annuler le premier travail de la végétation, hâter l'épuisement du sol ainsi que de la plante, et la condamner à rester très en arrière des autres

pieds de la houblonnière. Aussi, avant de recourir à ce moyen extrême, on essaie toujours de relever la tige et de la rattacher à la perche; chose à peu près impossible, lorsqu'elle a atteint toute sa croissance.

Fig. 435.

Jusqu'à présent, l'usage dans le nord-est de la France a été de planter et déplanter les perches au renouvellement et à la fin de chaque saison. Dernièrement, dans une notice sur la culture du houblon, communiquée au comice agricole de Thionville, M. Munich, planteur et brasseur à Malzéville, près Nancy, a recommandé la méthode d'échalassement fixe. Voici les renseignements qu'il donne sur l'emploi de ce procédé :

« Tremper le pied des perches dans du gou« dron; elles restent hiver et été dans le sol, et « durent de cinq à huit ans. Pour récolter, un « homme monte sur une échelle à large base; « arrivé au sommet, il étend le bras muni d'un « bâton portant à son extrémité une serpe. I coupe le sarment et fait glisser le houblon jus« qu'au pied de la perche. Par ce moyen, un seul « homme fournit de la besogne à quarante cueil« leuses; par le procédé ordinaire, il faut trois « hommes pour le même nombre de cueilleuses, « parce qu'ils sont obligés d'extraire les perches « et de les mettre en ordre. »

Ce passage, que nous copions textuellement, ne nous paraît pas très-clair. C'est notre faute peutêtre. Il nous semble pourtant qu'au lieu de couper les sarments, l'homme que M. Munich nous représente juché sur sa double échelle pourrait se contenter de couper les attaches si la perche était bien polie, et qu'au lieu de la serpe, il ferait mieux d'employer la classique serpette. Mais il est probable que nous ne différons que par les mots et que notre idée est la même. Les mots sont d'incorrigibles chicaneurs; sans leur pernicieuse intervention, la paix régnerait sur le pauvre monde.

Comme la perche coûte très-cher et dure peu; comme, en outre, elle prend chaque année faveur au détriment du planteur ou plutôt de son escarcelle, — ils ne font qu'un, on a cherché le moyen d'y suppléer. L'idée n'est pas jeune, car Mathieu de Dombasle en entretient ses lecteurs, dans son Calendrier du bon cultivateur. A l'éloquence avec laquelle il en parle, on serait tenté de croire qu'il est l'inventeur de la méthode du fil de fer appliquée aujourd'hui à la vigne dans une partie de la Lorraine. Nous renvoyons ceux de nos lecteurs qui seraient curieux de connaître en détail le système de l'illustre agronome, au neuvième volume des Annales agricoles de Roville, qui renferme un article étendu sur ce sujet.

M. de Dombasle prétend qu'une expérience de dix ans lui permet de recommander cette méthode qui consiste à substituer aux perches des fils de fer soutenus horizontalement à une hauteur d'environ 2 mètres par des chevalets placés de distance en distance. Malheureusement une expérience toute contraire a forcé les planteurs alsaciens à renoncer à un système incontestablement économique et qui n'a plus aujourd'hui pour partisans

que les fidèles quand même. Il a été généralement reconnu qu'en cas de rupture ou de renversement

Substitution du fil de fer aux perches pour soutenir le houblon. de la perche qui soutient les fils, le désastre est plus considérable que dans la méthode où chaque plant de houblon a sa perche individuelle; que les tiges qui grimpent le long de ces fils sont généralement moins chargées de cônes, enfin, que dans les tempêtes et par les vents violents, elles sont fréquemment coupées par le fil qu'elles enlacent. Voici du reste la description d'un appareil du même genre, mais disposé différemment. Il se compose d'une perche occupant le centre et de quatre fils de fer qui, placés à égale distance, forment un carré et viennent aboutir du poteau qui les retient au sommet de la perche centrale. Chaque appareil sert donc à cinq pieds de houblon, l'un s'enroulant autour de la perche, et les autres partant de la base des fils pour venir se réunir au sommet de la perche, point de rendezvous des diverses tiges. Ainsi disposées, les houblonnières offrent de loin l'aspect le plus pittoresque. Il semble voir autant de flèches aériennes se découpant dans le ciel, tout en laissant circuler l'air et la lumière à travers leurs pilastres de verdure. Malheureusement, heureusement voulions-nous dire, en agriculture, le beau c'est ce qui rapporte le plus d'écus. On nous dit à l'oreille qu'il en est un peu de même partout. C'est vrai, trop vrai. Est-ce que la beauté n'est pas à son tour une marchandise?

T

Mais revenons-en à nos perches, à la manière de les planter, s'entend. Elle se pratique à l'aide d'un instrument en forme de T, sorte d'épieu chaussé d'un éperon de fer qu'un vigoureux ouvrier lève de ses deux bras et laisse tomber tour à tour, jusqu'à ce qu'il ait pénétré assez profondément dans les entrailles du sol pour permettre d'y loger l'extrémité inférieure de la perche durcie au feu, de manière à ce qu'elle se trouve en état de supporter la plante et de résister au vent. La profondeur du trou doit varier selon la consistance du sol. Dans les sables de Haguenau et de Bischwiller, elle est en moyenne de 30 centimètres. Pas de règle à cet égard, mais une condition sine quâ non, c'est que la perche soit assez solidement établie pour pouvoir résister au vent qui s'est arrogé le pouvoir absolu dans le pays. Par précaution, vous la placerez à quelques mètres des tiges, dans la direction de ce tyran, comme un bouclier.

Fig. 436.-Pal en fer pour faire le trou des perches.

Il faut au houblon la moitié du mois d'avril, le mois de mai et celui de juin tout entiers pour

parcourir, dans les années ordinaires, les phases végétales qui précèdent la floraison.

La plante marche plus ou moins vite, selon les conditions atmosphériques qui lui sont faites; elle tourne autour de sa perche, allant toujours de gauche à droite comme le soleil. Nous ne savons si jamais on a essayé de la contrarier dans ses inclinations; il est douteux qu'on y réussît; elle aime tant son soleil ! C'est surtout pendant les nuits humides et chaudes que la végétation du houblon travaille avec une rapidité qui tient du prodige. Un planteur digne de foi nous affirmait, il y a quelques années, avoir vu une tige de houblon prendre, sous l'influence de cette température, au mois de juin, un développement de 60 centimètres dans l'espace de 24 heures. Ce fait exceptionnel et vraiment extraordinaire explique | les proportions considérables qu'acquiert la plante dans les trois ou quatre mois que renferme la période de son existence. En Alsace, nous l'avons dit, la longueur moyenne d'une perche est de 8 à 10 mètres. Après avoir monté jusqu'à son sommet en l'enroulant de leurs spirales, les tiges du houblon, ne trouvant plus de point d'appui, retombent ensuite en festons qui souvent descendent jusqu'à mi-hauteur de la perche en forme de saule pleureur. Il n'y a donc pas d'exagération à leur supposer une longueur triple de la perche, c'est-à-dire 25 à 30 mètres. Mais, au début, ces faibles tiges, au lieu de s'enlacer à leur protectrice, ramperaient à terre si la main de l'homme ne venait au secours de leur faiblesse. C'est donc lui qui, dans leur première enfance, doit en diriger l'ascension et déterminer l'enroulement. Il les maintient au moyen d'attaches de paille mouillée, d'osier, et mieux encore de joncs ou de petites tiges de chanvre assez solidement nouées autour du tuteur pour maintenir la plante, mais pas assez pour intercepter la circulation de la séve ou blesser la tige. Ces ligatures sont plus ou moins espacées selon l'âge des sarments et le poli du soutien. Quand les tiges ont atteint la moitié de la hauteur de leur appui, il est permis de les abandonner à elles-mêmes. Elles ont assez de vigueur, pour en gravir le reste. La ligature, dépassant la taille de l'homme, se fait au moyen de la double échelle placée dans l'intervalle des lignes. Quelquefois, par suite de négligence ou malgré les précautions, la plante s'affaisse sur elle-même, en glissant le long de la perche. Le premier moyen de combattre l'accident consiste à remettre sur ses pieds le pauvre éclopé. Mais si son piteux état ne le permet point, s'il y a eu fracture, alors, armez-vous de courage et d'une serpette; coupez avec pitié, mais d'une main ferme. Le recepage, si la saison n'est pas trop avancée, rendra une nouvelle tige à votre plant; fruit de la vieillesse et d'une mère déjà épuisée par un premier enfantement, elle n'aura pas la vigueur de son aînée, et fera de vains efforts pour combler la distance laissée entre elle et l'ensemble de la houblonnière. Heureux encore si le traînard n'est pas atteint par les ennemis qui viennent à sa suite et qui auront bon marché de lui, parce qu'il est plus jeune et plus faible. Nous avons dit qu'il existait une grande différence entre la hauteur des perches alsaciennes et

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celle des perches lorraines. M. Payen, qui n'est pas un Allemand, se prononce pour les perches à petite taille. Il prétend que le houblon sollicité par une longue perche, perd en énergie ce qu'il gagne en longueur. C'est l'effet que l'étirement produit sur le caoutchouc. Mais il est douteux que M. Payen persévérât dans son système d'opposition, à l'aspect des admirables houblonnières du Bas-Rhin. Nous préférons, nous, les hautes perches.

Dans le cours de la végétation, on donne ordinairement deux façons de culture: la première consiste dans un labour destiné à détruire les mauvaises herbes et à rendre le sol plus accessible aux influences atmosphériques; la seconde, plus sérieuse, consiste dans le buttage. Comme les trous dans lesquels se trouve la souche s'affaissent ordinairement à la suite de la décomposition du fumier, il faut les combler par une addition d'engrais, en évitant toutefois de le mettre en contact avec le plant ou ses racines, précaution qu'il est bon de prendre à l'égard de presque tous les végétaux. Si cet affaissement ne s'est pas produit, on établit un cercle d'engrais autour du plant, puis on le recouvre de terre. C'est ici peut-être qu'il convient surtout d'employer le guano et les autres engrais artificiels dont l'action est à la fois plus prompte et plus énergique que celle du fumier ordinaire. Au reste, cette addition d'engrais, nous ne la recommandons que pour les sols sablonneux d'Alsace, laissant aux planteurs dont le terrain est plus riche, le soin de juger si pour eux le buttage doit être accompagné de fumure. C'est vers la fin de mai, lorsque la plante a atteint la hauteur de 2 ou 3 mètres, que cette opération a ordinairement lieu; nous ne la voyons pas pratiquer en Lorraine où les plants sont d'ailleurs si rapprochés qu'elle serait difficile. On évitera, dans les cultures d'entretien, de faire pénétrer trop profondément l'instrument pour ne point offenser les racines, car si, d'un côté, elles plongent profondément dans le sol, de l'autre, elles rayonnent presque à la surface. La ratissoire est l'instrument qui nous paraît le plus commode pour le sarclage. Les buttes s'élèvent au moyen de terre prise à la surface du sol. Elles affectent tantôt la forme d'un demi-globe, tantôt celle d'un cratère ouvert au centre. On donnera la préférence à la dernière, si l'année n'est pas trop sèche, et si la solidité du tuteur ne se trouve pas compromise par la cavité laissée au centre de la butte, car elle livre passage à la pluie et aux principes fertilisants de l'air. Le volume des buttes varie en proportion de la consistance du sol et du caractère de la saison. En effet, elles ont pour objet de protéger les racines contre la sécheresse, non moins que d'affermir les perches dans les sols presque mouvants dont se compose le territoire de Haguenau, où nous avons spécialement étudié cette culture. L'addition d'engrais, indispensable dans ces sols dévorants, ne serait peut-être pas une bonne opération ailleurs. P. E. PERROT.

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blon se rapprochent beaucoup les uns des autres par les points essentiels. Ce qui a été dit du choix des terrains dans l'Est sera parfaitement accepté dans le Nord. Seulement, nous ferons remarquer que là on affectionne par-dessus tout les défriches de pâturages ou pâtures..

Pour la plantation, on prépare la terre du mois d'octobre au mois de décembre, au moyen de la bêche ou louchet, ou bien avec la charrue ordinaire, suivie d'une charrue fouilleuse. On profite de ce labour pour enterrer le fumier long, dont on a chargé le sol et lui donner ainsi le temps de pourrir. Très-exceptionnellement, lorsque l'on procède à la plantation dès l'automne, en vue de prendre une petite récolte l'année suivante, on se sert de fumier consumé au lieu de fumier long, afin d'obtenir un effet plus rapide. La profondeur du labour préparatoire varie entre 30 et 38 centimètres.

Le plus ordinairement, la plantation s'exécute dans la seconde quinzaine d'avril, avec des plants tirés d'une houblonnière de trois ans, c'est-à-dire en plein rapport. Les plants doivent être munis de chevelu ou petites racines. On tient pour bon le plant qui a trois nœuds, et dont l'écorce, jaune d'ocre en dehors, est blanche à l'intérieur. Les plants bruns ou verdâtres tachetés de noir, ceux qui sont tachés à l'intérieur ou d'un jaune brun, passent pour être sujets au chancre. Enfin, les plants tirés d'une jeune houblonnière en terre médiocre sont préférés à ceux d'une vieille houblonnière fortement fumée et établie en riche terrain.

Lorsque le moment de la plantation est venu, on prend un cordeau, on l'exécute en lignes, en quinconce, de manière à espacer les pieds de 2 mètres. On ouvre, à cet effet, des fosses de 16 à 20 centimètres de profondeur sur 27 de diamètre, et l'on fixe dans chacune d'elles trois ou quatre plants en ligne droite et à la distance de 5 à 8 centimètres l'un de l'autre ; puis on ramène la terre. dans la fosse, de manière que la sonimité des plants setrouve à fleur du sol; on tasse et on jette sur chaque touffe une pelletée de terre fine.

Peu de jours après la plantation, on arrose soit avec de eau dans laquelle on a délayé des tourteaux de colza, soit avec un mélange de purin de basse-cour et d'urine de vache, et l'on saupoudre❘ de terre sèche les parties arrosées, afin d'y conserver plus longtemps la fraîcheur.

Aussitôt que les jeunes pousses de houblon se montrent, on plante près de chaque touffe un tuteur de 2,50 à 3m,25 de hauteur, et dès qu'on le peut, on y attache les sarments de houblon avec du jonc ou de la paille mouillée, en ayant soin de les conduire en spirale de gauche à droite.

Dans la première quinzaine de juin, on butte à 10 ou 13 centimètres de hauteur. Si la plante donne du fruit, on fait la récolte débout sans coucher les perches ni couper les tiges. On laisse mourir ces tiges, et en novembre, on les coupe près de terre, on enlève les perches et on recouvre les touffes avec des plaques de gazon.

La première année de la plantation, quelques cultivateurs mettent des pommes de terre, des haricots, des navets ou des betteraves entre les

lignes de houblon, afin d'occuper le terrain avec profit. Il y en a même qui continuent ces récoltes intercalaires la seconde année, mais on ne saurait les proposer comme modèles à suivre.

Vers le milieu d'avril de la seconde année, on enlève les gazons de couverture et l'on taille ras de terre les pousses venues sous ces mottes. On fait peu de cas de ces pousses taillées qui en Belgique sont consommées sur les meilleures tables comme les asperges en petits pois. On recouvre ensuite les plaies avec de la terre légère. On taille de même la troisième année, la quatrième et les années suivantes, ras de terre quand les pieds sont bien enracinés, et à 2 ou 3 centimètres audessus du sol quand la plante paraît chétive et faiblement enracinée.

Après la taille, on met près des tiges ou du fumier d'étable ou deux poignées de cendres pour chacune d'elles, ou de la poudre de tourteau de lin et de colza, à raison d'un demi-kilogramme par touffe. On reproche au fumier d'attirer les pucerons, et l'on rejette le tourteau de caméline, parce que, dit-on, il prédispose le houblon au chancre.

Les tuteurs ou perches qui ont servi la première année, ne conviennent plus pour la seconde; on les remplace par des tuteurs de 8,20 à 9m,72 de hauteur, que l'on fiche en terre dès que les sarments de houblon sont à 10 ou 12 centimètres hors du sol, et du côté le plus exposé aux vents. On accole quatre tiges principales de même hauteur et ne portant point de pousses sur les côtés. On supprime les autres tiges, à l'exception de deux ou trois que l'on conserve quelque temps, afin de s'en servir au besoin comme tiges de remplacement, dans le cas où celles accolées à la perche seraient rompues dans leur jeunesse par un coup de vent ou par toute autre cause, ou dans le cas encore où elles viendraient à périr.

Quand les tiges principales sont à un mètre environ de hauteur, on fait disparaître les tiges de réserve, ainsi que celles qui ont poussé dans leur voisinage. On donne ensuite à chaque touffe deux ou trois pelletées de fumier très-pourri que l'on recouvre avec des buttes de 32 centimètres, formant l'entonnoir par le haut. Au commencement de juillet, on bêche la houblonnière dans les intervalles des buttes; on relève celles de ces buttes qui se sont affaissées et l'on verse dans chaque entonnoir soit de la courte graisse, soit du tourteau de colza délayé dans de l'eau, après quoi l'on jette une demi-pelletée de terre pour masquer cet engrais. Le houblon se ranime, fournit plus de cônes et aussi plus de petits rameaux qu'il faut élaguer à une hauteur d'environ 2 mètres à partir du sol.

Quand l'extrémité des cônes prend une teinte un peu brune, on fait la cueillette.

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