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lui donne un ou deux labours, et ensuite on l'arrose avec du purin; après quoi on sème sur hersage.

« Après les féveroles, on déchaume et on donne un labour profond en billons, qui est répété au printemps et suivi d'un second labour à plat; on y répand des cendres qu'on enterre avec la herse, et on roule.

« Après le chanvre qui a été fortement fumé, le sol reçoit un labour en sillons avant l'hiver, et après, la terre se repose jusqu'en mars, époque à laquelle on laboure de nouveau les sillons élevés, et on y met du purin ou des vidanges. Quelquefois on applique des cendres ou de la chaux.

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« Lorsqu'on veut ensemencer en lin une prairie rompue, on lui donne un labour profond avant l'hiver et on la divise en billons pour faciliter l'écoulement de l'eau; au printemps, on donne encore un ou deux labours. On arrose, avec du purin, des vidanges ou des tourteaux délayés dans un des liquides précédents; on herse et on sème, ou bien on y répand de la chaux ou des cendres, selon la nature du sol.

«Quel que soit le mode de culture, la préparation du sol n'est complète qu'après qu'on y a passé une ou plusieurs fois le traîneau (fig. 384 et 385) et le rouleau, figurés dans Van Aelbroeck. »>

Choix des semences de lin. - Les graines de lin du commerce se distinguent en lin tonnelé ou expédié en tonnes, et lin ensaché ou expédié en sacs. On tire le premier du port de Riga, qui le reçoit de la Livonie et de la Lithuanie; on tire le second de la Zélande, province des Pays-Bas, qui le produit avec du lin de Riga. L'Amérique nous expédie aussi de la graine de lin à fleurs blanches; enfin, il nous arrive de semer deux ou trois années de suite, au plus, de la graine récoltée chez nous.

Les caractères d'une bonne graine de lin ont été indiqués dans plusieurs écrits: M. Thiébaut de Bernéaud nous dit : La bonne est courte, grosse, épaisse, rondelette, ferme, pesante, d'un brun clair et huileuse; celle qui est verte doit être rejetée comme semence, comme médicament, et même comme impropre à fournir de l'huile. Quand on manque d'habitude, et que l'on veut s'assurer si cette graine a les qualités voulues, voici ce qu'il faut faire pour savoir si la graine est ferme, prenez une forte poignée, serrez jusqu'à ce qu'elle glisse entre les doigts et le pouce; la promptitude avec laquelle elle s'échappe est une preuve de fermeté. Pour connaître le poids, jetezen dans un verre plein d'eau ; si elle est pesante, elle tombera de suite au fond. Est-elle huileuse? elle pétille et s'enflamme aussitôt qu'elle est mise au feu ou répandue sur un fer rougi. Je n'ignore pas que toute espèce de graine de lin pétille lorsqu'elle est dans un brasier, mais observez bien, et vous verrez qu'elle ne pétille pas sur-le-champ; celle qui retarde seulement de quelques secondes n'est point parfaite. Enfin, pour éprouver si elle est de bon aloi, si elle n'est pas trop vieille, on en sème sur couches, la chaleur la fait germer en quatre à cinq jours.

Il y aurait un grand service à rendre à nos cultivateurs ce serait de les décharger du lourd tribut qu'ils payent à la Russie pour ses graines de Riga. A cet effet, il serait utile de bien connaître les climats et la nature des terrains qui, en Livonie et en Lithuanie, produisent les meilleures semences, de chercher chez nous des climats analogues et des terrains qui s'en rapprochassent naturellement, ou que l'on modifierait pour le mieux à l'aide d'engrais convenables. C'est ce que rêva Schwerz pour l'Allemagne ; c'est ce que nous osons rêver pour la France. Schwerz prit des informations sur les méthodes suivies en Russie; mais les renseignements qu'il reçut de la Lithuanie et de la Courlande ont un caractère vague et, à notre avis,

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insuffisant. En substance, il lui fut répondu que | lieu le 7 des ides de décembre. » Chez nous, qui de la semence de choix confiée à un riche terrain, ne jouissons pas du climat de la campagne de de consistance moyenne, ayant servi de pâturage Rome, on s'y prend un peu plus tôt, voilà tout; pendant plusieurs années, puis ayant été rompu autrement la graine ne lèverait pas avant l'hiver. à l'automne, hersé avant l'hiver, labouré au prin- M. Bodin nous dit dans ses Éléments d'agriculture : temps, produisait d'excellents porte-graines. Il « On cultive deux espèces de lin dans notre délui fut répondu encore qu'une défriche de trèfle partement (Ille-et-Vilaine); l'un se sème en aude deux ans, qu'un gazon rompu n'ayant jamais tomne et l'autre au printemps (mars ou avril). La porté de lin, qu'une bonne terre non fumée con- filasse du lin d'hiver est plus grossière que celle venaient aussi fort bien à des porte-graines, que du lin de printemps; mais cette espèce est moins les premiers jours de mai sont ceux pendant les- exigeante sur la nature du terrain. » De son côté, quels on fait ordinairement le semis, que ce semis M. Jamet nous dit dans son Cours d'agriculture: doit être très-clair, que les porte-graines ne doi« Le lin d'hiver craint moins les printemps secs, vent être arrachés que quand les capsules sont il donne une graine mieux nourrie, mais la filasse brunâtres et le grain d'une couleur jaune clair est plus grossière. Il faudrait le semer après une brillant, et que la dessiccation doit se faire natu- récolte de pommes de terre primes (précoces) ou rellement, non dans un four. M. Auerswald lui un fourrage d'été largement fumés. Malheureuseécrivit, de son côté, que les plus grandes tiges, qui ment, on le fait sur un chaume de grains, et la contiennent généralement la graine la plus mûre, récolte de lin qui salit et épuise beaucoup, devient doivent être écimées par un beau temps et éten- ruineuse pour la terre. » dues sur le terrain ou sur l'aire pour que la maturation s'y achève, que les capsules détachées des tiges, mais adhérentes encore à quelques filaments doivent être réunies et suspendues à des perches, en plein air, et que la semence obtenue ainsi est bien supérieure à celle du lin drégé, c'est-à-dire dépouillé de ses capsules au moyen d'un peigne. Tous les correspondants de Schwerz s'accordaient à reconnaître que la graine en capsules devait passer l'hiver dans des greniers bien aérés, mais que dans le cas où l'on faisait le battage en automne, il convenait de laisser la graine parmi les balles jusqu'au printemps, après quoi l'on pouvait cribler d'abord, puis employer le tarare pour achever le nettoyage. Ils ajoutaient que la graine fraichement battue et nettoyée fermente aisément et qu'il faut la remuer de temps en temps pour empêcher l'échauffement.

Ces recommandations ne présentent aucune difficulté. En résumé, d'après ce qui précède, l'art de produire la graine de lin consiste à s'approvisionner de semence de Riga, à la semer tardivement sur un gazon rompu avant l'hiver ou sur une bonne terre peu fumée, n'ayant jamais porté de lin, ou n'en ayant porté que depuis une date reculée, à écimer les tiges quand les capsules brunissent et quand la graine est jaune. Nous nous permettrons à ce propos de faire remarquer que le repiquage est un moyen employé contre la dégénérescence de la plupart des végétaux difficiles à maintenir, et que si le repiquage était possible avec les semenceaux de lin, on ferait peut-être bien de le pratiquer. Ce repiquage est-il possible? voilà la question. Ne l'ayant pas prévue, nous ne sommes point en mesure d'y répondre.

La graine fraîche, soit de l'année, soit au plus de l'année précédente, est préférable à la graine qui a vieilli en tonne ou en sac.

Semailles du lin. On sème le lin à deux époques différentes, en automne ou au printemps. Dans le Midi, dans l'Anjou et la Bretagne, on pratique souvent les semis d'automne, comme chez les Romains, au temps de Columelle qui nous dit: « On le sème depuis les calendes d'octobre jusqu'au lever de la constellation de l'Aigle, qui a

De ce qui précède, il résulte que, pour la qualité de la filasse, le lin d'été ou lin chaud est préférable au lin d'hiver ou lin froid. Nous traiterons donc spécialement des semis de printemps. On les commence en mars dans les terres légères, et on les finit aux premiers jours de mai. Dans les terres déjà vides c'est peut-être un peu tard. Les uns veulent de la filasse et de la graine, c'est-à-dire du lin de gros ou non ramé; les autres ne prennent point souci de la graine et tiennent par-dessus tout à la qualité de la filasse; donc, ils cultivent le lin de fin ou lin ramé. Le lin de gros doit être semé clair, et le lin de fin semé dru, conformément à ce proverbe des cultivateurs de l'Ouest : « Lin semé clair fait graine de commerce et toile de ménage ; lin semé dru fait linge fin. »

|
Schwerz pose en principe qu'un temps modéré-
ment humide est convenable à la semaille, mais
qu'un temps mouillé ne l'est jamais. Il rappelle
aussi que dans le comté de Ravensberg et dans le
pays de Juliers, la semaille se fait ordinairement
dans la matinée, parce que l'expérience a démon-
tré que le fin semé après midi ne fleurit pas d'une
manière uniforme. Nous le croyons sans peine,
mais en même temps nous pensons qu'une se-
maille du soir vaudrait celle du matin. Voici
pourquoi : quelque soin que l'on mette à recouvrir
les graines, il est évident que les unes sont plus
enterrées que les autres, et que les moins enter-
rées sont surprises par la chaleur du soleil avant
d'avoir pu s'imprégner de la fraîcheur de la terre.
Elles germent par conséquent moins vite que les
premières, poussent plus lentement et fleurissent
moins tôt. Or, on peut éviter cet inconvénient avec
la semaille du soir comme avec celle du matin.

Lorsque le terrain est bien préparé au semis par les hersages qui divisent et unissent le dernier labour, on pren i de la graine de pays ou de la graine de Zélande, et on la sème à raison de 170 kilos par hectare pour faire du lin de gros ou non rané. Pour le lin de fin ou ramé, on porte le chiffre à 230. On recouvre ensuite avec la herse dans tous les sens, et l'on roule fortement en terre légère. Au bout de 8 à 9 jours ordinairement, la levée se fait.

Soins à donner au lin pendant sa végétation. Lorsque la plante a de 3 à 5 centimètres de hauteur, par un temps couvert, ni mouillé ni précisément sec, on procède au premier sarclage du lin. A cet effet, on réunit le plus possible de femmes et de jeunes filles alertes qui ôtent souliers et sabots, s'agenouillent à contre-vent et sarclent à la main. En opérant ainsi à contre-vent, les tiges couchées ont moins de peine à se relever. Ce sarclage demande de la vivacité et de la rapidité, ce qui n'empêche point les ouvrières de s'arrêter à toute occasion et de ne pas laisser passer un convoi sur les chemins de fer sans faire une pause souvent trop prolongée.

Parfois le sarclage du lin doit être renouvelé jusqu'à trois fois et à de courts intervalles; après cela, on ne touche plus à la linière.

Le lin de fin est sarclé exactement comme le lin de gros, mais l'opération est plus difficile, à cause du rapprochement des tiges. En outre, une fois le sarclage terminé, il s'agit de ramer l'emblave. Cette opération consiste tout simplement à planter au bord des planches, à un mètre de distance, de petites fourches de 20 à 25 centimètres de hauteur, à étendre sur ces fourches des perchettes que l'on fixe avec des liens et de placer en travers des perchettes, soit de la ramille, soit des baguettes. Tout ceci forme un réseau qui soutient les tiges faibles du lin de fin contre les coups de vent et qui, si elles se couchent, les empêche de toucher le sol et facilite leur redressement. Quelquefois, mais rarement, on se contente d'étendre sur l'emblave des brins de fagots, comme nous faisons dans nos potagers, pour soustraire les planches ensemencées à la voracité des oiseaux, et l'on arrive au même résultat.

C'est pour diminuer les frais de sarclage que l'on accorde tant d'attention aux labours préparatoires. Et en effet, mieux la terre est préparée, moins il en coûte de sarcler.

Maladies et ennemis du lin. Le lin souffre de temps à autre du feu ou charbon, de l'ététement, du miellat et du rouge. Le lin attaqué du feu noircit dans sa partie supérieure et jaunit à la partie inférieure. On attribue cette affection aux engrais pailleux et longs, aux tourteaux de colza et au retour trop précipité de la plante à la même place. L'étêtement que les Flamands appellent Weiswerden, fait incliner, puis tomber la sommité des tiges et provoque vers le milieu de ces tiges l'émission d'un nouveau bourgeon. Dans ce cas, et en temps de sécheresse, la filasse prend une mauvaise teinte. On ne dit pas la cause de cette maladie. Le miellat, dont Schwerz ne parle pas, se reconnaît, selon M. Demoor, aux feuilles qui se couvrent çà et là d'une matière visqueuse et sucrée, dont on accuse généralement le puceron. Cette maladie est très-rare. Le rouge consiste, en temps de sécheresse prolongée, en une teinte rougeâtre aux extrémités des tiges qui résistent, après cela, au rouissage.

Parmi les plantes parasites, la cuscute d'Europe est la seule qui attaque le lin. On conseille d'arroser les places attaquées avec une dissolution de sulfate de fer ou couperose verte (environ

| 300 grammes de sulfate de fer par litre d'eau. L'altise potagère et l'altise des bois, que nous désignons sous le nom de pures de terre, sont les seuls insectes redoutables pour le lin. On ne sait comment s'en débarrasser. Peut-être y réussiraiton en répandant sur les planches de la terre fine ou de la sciure de bois imprégnée de goudron de houille; cela vaudrait mieux que l'emploi de la puceronnière, instrument beaucoup trop recommandé. Il y a des cultivateurs flamands qui sèment de la moutarde dans leurs linières pour occuper les altises qui la préfèrent au lin.

Ajoutons, en terminant, que les taupes nuisent beaucoup à la culture du lin par leurs galeries souterraines.

Récolte du lin. ·

Le lin précoce fleurit vers la fin de juin ou au commencement de juillet; le lin tardif fleurit quelque temps après. On arrache la plante à des époques variables, selon le but qu'on se propose d'atteindre. Si l'on veut de la graine pour semence, il faut s'attendre à de la filasse très-grossière et n'arracher le lin que lorsque les feuilles sont tombées et les capsules bien brunies. Si l'on veut de la filasse médiocre et de la graine passable pour faire de l'huile, on arrache dès que le tiers inférieur des tiges est devenu jaune; si, enfin, comme avec le lin de fin ou ramé, on ne se préoccupe que de la qualité de la filasse, il faut arracher ce lin dès que les fleurs s'ouvrent et même plus tôt, ainsi que cela se fait en Silésie.

« L'arrachage du lin, avons-nous écrit dans le Dictionnaire d'agriculture pratique, n'est ni aussi difficile ni aussi compliqué qu'on pourrait le croire à la lecture des longues pages écrites par les agronomes: on s'y prend comme pour le chanvre, on l'arrache à la main; on en forme de petits paquets, autant que possible avec des brins de même hauteur; on les place trois par trois, les têtes réunies et les pieds écartés, ou bien on les dispose en pente de chaque côté d'une ligne de petites perches posées sur des fourches basses. Quelques cultivateurs, avant de les mettre en paquets, les laissent pendant vingt-quatre heures sur le sol, en javelles croisées; mais si nous en croyons M. de Dombasle, cette méthode est mauvaise en ce sens qu'elle détermine un commencement de rouissage irrégulier qui, dans la suite, au moment du rouissage définitif, a des résultats fâcheux. Lorsque les petits paquets de lin ont séché à l'air libre, on bat la tête contre un billot, ou bien encore on la frappe sur ce billot au moyen d'un maillet de bois ou d'une batte de laveuse, ou bien enfin on la dépouille à l'aide d'un peigne à dents de fer. On place ensuite les paquets de tiges desséchées dans un lieu sec, couvert et aéré, en attendant le moment de les porter au routoir.

Lorsque l'on a affaire à du lin semé surtout pour ses graines, on ne l'arrache qu'à la maturité complète, c'est-à-dire lorsqu'il est bien dépouillé de ses feuilles et que ses capsules brunissent. On le met en bottes comme le précédent; on le fait sécher de même; mais pour le dépouiller de ses graines, on ne le drége pas, autrement dit, on ne le peigne pas; on le frappe avec la batte.

Les graines qui se détachent avec leurs capsules et leurs pédoncules ou queues, doivent être conservées dans un endroit sec et aéré, ou dans des sacs ouverts, dans lesquels on ne les tasse point. Elles se conservent ainsi parfaitement et sont les meilleures pour semence.

Au rapport de Schwerz, un hectare de lin dans les Flandres belges donne en produit moyen de tiges brutes 4 000 kilogr. environ. M. Demoor estime qu'il varie entre 3 000 et 9 000 kilogrammes de tiges qui contiennent 12 à 18 p. 100 de fibres, et dont on retire de 360 à 800 kilogr. de filasse et au delà. Le lin, cultivé pour ses graines, rend de 250 à 700 kilogr. de se

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ce qui est préférable. Il faut de trois semaines à un mois, et souvent plus, pour que l'opération

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Fig. 386.

Rouissage du lin. - La besogne du cultivateur n'est pas achevée. Il lui arrive quelquefois, il est vrai, de vendre sa récolte de lin sur pied, et de laisser à d'autres le souci du rouissage, du teillage et du peignage; mais le plus souvent les choses ne se passent pas ainsi, et il se charge de ces dernières opérations. Parlons donc du rouissage d'abord. La filasse enveloppe la tige du lin comme elle enveloppe celle du chanvre, et se trouve collée autour de cette tige par une matière liante qui la tient bien. Il s'agit donc de se débarrasser de cette matière pour séparer la filasse de la chènevotte. Pour cela, il y a divers moyens, qui, en apparence, diffèrent plus ou moins, mais qui en réalité ont le même point de départ. Tous ont pour but de transformer la substance gommeuse et de la faire fondre dans l'eau, comme l'on dit vulgairement. A cet effet donc, dès que les tiges de lin sont sèches, on les expose sur un gazon pour qu'elles y reçoivent l'humidité des nuits, et on les retourne de temps en temps, ou bien, ce qui est plus expéditif, on forme avec les petits paquets, placés moitié dans un sens, moitié dans l'autre, de grosses bottes d'un diamètre égal sur toute leur longueur, et l'on expose ces bottes dans l'eau courante d'une rivière, ou dans l'eau dormante d'un routoir, de manière qu'elles y baignent entièrement, mais qu'elles n'en touchent ni le fond ni les bords. Ces bottes de lin sont quelquefois renfermées dans des caisses à jour, semblables à celles qui servent à l'emballage des gros meubles, mais ouvertes par le haut; d'autres fois, on les relie les unes aux autres, étage par étage, avec des ligatures d'osier, puis on les charge de paille et de grosses pierres pour qu'elles plongent suffisamment.

Quel que soit le mode de rouissage adopté, il y a fermentation et dissolution de la gomme. Ces deux résultats s'obtiennent lentement sur le pré, moins lentement dans l'eau courante et promptement dans l'eau stagnante. Le délai, d'ailleurs, est subordonné aussi à la température atmosphérique; plus cette température est élevée, plus le rouissage est rapide; plus elle est basse, plus il est lent.

Le rouissage sur le gazon ou à la rosée, s'exécute dans l'arrière-saison, ou en janvier et février,

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Peigne pour détacher les graines des tiges du lin. soit complète. Pendant les alternatives de pluie et de soleil, on doit retourner le lin fort souvent, sans quoi il pourrirait. Avec le rouissage dans le routoir, il faut de six à sept jours en août, de huit à dix en septembre et octobre; avec le rouissage dans l'eau courante, il faut de dix à quinze jours et quelquefois plus. On reconnaît que le lin est convenablement roui, lorsqu'en rompant un brin on peut détacher la filasse de la racine au sommet. C'est le moment de sortir les bottes de l'eau, de les défaire, de délier les paquets et de les mettre sécher. Aussitôt sec, on refait les paquets, puis les grosses bottes, et on rentre le lin à la ferme.

Le rouissage sur le gazon, sur le pré ou à la rosée, comme vous voudrez l'appeler, n'est à recommander que dans les localités où les autres méthodes ne peuvent être appliquées. Il ne donne qu'une filasse grisâtre, peu abondante, et, selon M. Demoor, fine mais étoupeuse. Le rouissage à l'eau stagnante rend une filasse abondante, jaunâtre, moelleuse et souple, mais qui n'a pas toute la force désirable. Le rouissage à l'eau courante (quand cette eau est claire et peu rapide), donne beaucoup de filasse, et cette filasse, presque blanche, est solide et très-estimée.

Généralement, on n'attend pas que le lin soit complétement roui pour le sortir de l'eau, afin de lui conserver plus de solidité, mais on achève l'opération en étendant ce lin sur la prairie lorsqu'il est bien sec, à partir du mois de mars jusqu'au milieu de mai, et pendant une quinzaine de jours. Cette opération complète le rouissage et blanchit la filasse.

Dans ces derniers temps, le rouissage du lin a pris les caractères d'une industrie spéciale. Ainsi, sur différents points, on a substitué le procédé dit américain, aux modes adoptés dans nos villages. Ce procédé, importé de l'Amérique et perfectionné par diverses personnes, consiste à établir plusieurs rangées de cuves, remplies d'eau et chauffées de 32 à 35° cent., dans lesquelles circule de la vapeur. Les paquets de lin sont placés dans ces cuves, et le rouissage s'opère ainsi à couvert et promptement. L'eau qui a servi au rouissage, ainsi que la vase du routoir, peut être employée à la fertilisation des champs qui ont

porté du lin. Une fois le rouissage terminé, on presse le lin pour en faire sortir une eau verdâtre, puis on le porte au séchoir.

On a essayé, en outre, de teiller d'abord la plante desséchée et de rouir la filasse. C'est le procédé de Claussen. Enfin, l'on a essayé de trois procédés chimiques : du procédé de Claussen, du procédé Blet et du procédé Terwangne qui font précéder le teillage par le rouissage. Dans le premier on traite la plante par le carbonate de soude d'abord, puis par un acide. Dans le second, on ajoute de l'urée à l'eau d'une cuve placée dans une chambre chauffée à 25° (5 kil. d'urée par 500 litres d'eau); on met le lin dans la cuve, on ferme, et, au bout de deux jours, on le retire, on le presse et on le porte au séchoir. Dans le troisième, qui est le procédé de M. Terwangne, on se rapproche de la méthode américaine, mais on opère la désinfection de l'eau de rouissage au moyen de la craie et du charbon de bois pulvérisé, ce qui est bien essentiel.

Ces différents modes de rouissage manufacturier sont fort peu répandus jusqu'à présent. Nous souhaitons qu'ils nous donnent une filasse d'aussi bonne qualité que les procédés ordinaires, et qu'ils nous délivrent des routoirs infects et insalubres. Le procédé de M. Terwangne offre, entre tous, les plus grandes chances de succès.

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Opérations qui suivent le rouissage. Le lin roui et desséché à l'air, est ensuite desséché dans un four ou au-dessus d'une fosse abritée, au ford de laquelle on entretient du feu. C'est la torréfaction. Vient après cela le maillage, opération que nous n'enseignerons pas sur le papier et qui consiste à battre les tiges sur une aire, à l'aide d'un maillet échancré. Vient ensuite le macquage qui consiste à faire, au moyen d'une macque ou broye la séparation de la filasse de la chènevotte, opération que nous pratiquons encore sur beaucoup de points avec la main, et que nous appelons le teillage du chanvre. Puis arrive l'écangage qui consiste à lisser la filasse en la promenant sur des feuilles en bois à arêtes vives, et enfin le peignage ou affinage, qui a pour but de

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filasse de lin pour fabriquer des cordes qui ne valent pas celles de chanvre, des toiles ordinaires, des toiles fines et en grand renom. Qui est-ce qui n'a pas entendu parler des toiles de Hollande, de Courtrai, de Bruges, de Gand, d'Audenarde, des batistes, des dentelles de Malines et de Valenciennes? Toutes ces richesses sortent de la filasse du lin.

La farine de graine de lin est utilisée, en médecine, à titre d'émollient; on en fait des cataplasmes.

L'huile siccative de graine de lin remplit un rôle très-important dans les arts. On s'en sert pour préparer l'encre des imprimeurs et des lithographes, pour préparer les vernis gras, les taffetas gommés, les toiles cirées, les cuirs vernis.

Les classeurs à la pipée ou aux gluaux emploient l'huile de lin pour fabriquer une sorte de glu. Il suffit pour cela de la faire réduire sur le feu.

La graine de lin ne rend que 25 p. 100 d'huile au plus. Les tourteaux sont consommés par les animaux ou servent d'engrais. P. J.

CHANVRE (CANNABIS).

Origine et classification.-Le chanvre, que Linné avait placé dans la famille des Urticées et qui appartient aujourd'hui à la famille des Cannabinées, est, selon les uns, originaire de la haute Asie, selon les autres du nord de l'Europe et de la Nouvelle-Hollande. Donc, sous ce rapport, on est loin de s'entendre.

Les botanistes ne sont pas non plus d'accord entre eux. Ceux-ci ne reconnaissent qu'une seule espèce de chanvre qui est l'espèce cultivée le plus généralement, et ils y rattachent deux variétés; ceux-là veulent qu'il y ait trois espèces de chanvre; d'autres enfin en admettent deux, et nous partageons l'avis de ces derniers. Ces deux espèces sont le chanvre commun (cannabis sativa) et le chanvre de Chine (cannabis gigantea), qui diffère essentiellement du précédent par son port d'un aspect pleureur, et aussi parce qu'il ne donne pas de graines sous le climat de Paris. Le chanvre de Piémont, que l'on a voulu assimiler à celui de la Chine, n'est qu'une variété peu stable de l'espèce commune, dont elle a conservé le port. Ce chanvre de Piémont, remarquable par si taille, n'a point l'aspect pleureur du cannabis gigantea et donne des graines non-seulement sous le climat de Paris, mais en Belgique et autre part, en se dirigeant vers le Nord. Dans tout son développement, il a l'avantage de produire en abondance de grosse et forte filasse pour les cordages de la marine, mais il a le désavantage de dégénérer rapidement et de retourner en peu d'années aux proportions du chanvre ordinaire. On a essayé de tirer parti de cette inconstance et de le semer en terre médiocre pour obtenir ce que l'on obtient avec le chanvre commun en terrain riche. Le chanvre de Chine est peu répandu et ne fructifie que dans le Midi. Nous n'avons donc à nous occuper ici que de l'es

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Emploi du lin. Nous nous servons de la pèce commune.

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