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l'Histoire à ceux qui ne l'ont jamais sue; que M. de Voltaire n'ait pas lu nos anciens capitulaires avec autant de patience que M. l'abbé de Mably, nous voulons bien le croire; mais en sera-t-il moins vrai que M. de Voltaire a porté en général, dans l'étude de l'Histoire, une critique très-sage et très - lumineuse; qu'il a eu peut-être plus qu'aucun autre l'art de rassembler avec intérêt les grands résultats qu'offre l'Histoire des révolutions de l'esprit et des mœurs des différens peuples; qu'enfin, s'il n'est pas pas l'historien le plus parfait, il n'en a pas moins écrit sur l'Histoire des ouvrages charmans, pleins d'instruction, de philosophie et d'humanité?

Beaucoup de gens ont remarqué avec surprise que la mauvaise humeur de M. l'Abbé ait attendu, pour éclater, que M. de Voltaire fût mort depuis quatre ans, bien sûrement mort; mais ce sont des gens qui ne voient pas àu bout de leur nez. Lui auraient-ils conseillé, ces gens avisés et prudens, d'attaquer M. de Voltaire lorsqu'il fallait le craindre, lorsqu'une pareille témérité l'eût exposé à se voir couvert d'un ridicule éternel? Non; l'on sait que les personnes même dont M. l'Abbé admire le plus la franchise et la respectable indépendance ne se permettent guère d'insulter d'honnêtes gens que lorsqu'ils se croient à l'abri de la correction, et ce calcul est, comme vous voyez, d'une pro-, fonde politique..

EPIGRAMME Sur madame Duvivier, ci-devant madame Denis.

L'hommasse et vieille Climène,
Plus informe qu'un paquet,
Prit époux tant soit peu laid,
Et passant la cinquantaine.
Un ouvrier en bonnet
Qui jamais ne l'avait vue,
A qui mainte somme est due,
Entre comme ils sont au lit,
Et sous cornette de nuit
Ne voyant ombre de femme,
Le sire, incertain, leur dit:
Qui de vous deux est Madame?

LETTRE du roi de Suède à M. le prince de Nassau.

De Stockholm, ce 21 Novembre 1782.

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Vous nous rappelez en tout point, M. le Prince, les temps de l'ancienne chevalerie; vous joignez à leur valeur leur courtoisie et deur générosité, da dernières action périlleuse que vous avez été chercher si loin en est une preuve, ainsi que les soins que vous avez pris de tous ceux qui vous ont suivi. Recevez-en mes complimens, surtout de l'intérêt que vous avez marqué à mes compatriotes. Je suis bien aise qu'ils se soient, par leur bonne conduite, rendus dignes de leur chef, et qu'ils aient si bien soutenu la réputation du nom suédois.

J'ai fait donner, à votre recommandation, une pension aux sœurs du brave Myrin, et je vous prie de vouloir bien donner, en mon nom, à

M. d'Armenfeld, la croix de mon Ordre militaire qu'il a si bien méritée; c'est y mettre un nouveau prix, sans doute, que de la lui faire recevoir des mains de son brave général.

C'est avec les sentimens de la plus parfaite considération que je suis, M. le Prince, votre affectionné. -Signé GUSTAVE.

L'Embarras des Richesses, comédie lyrique, en trois actes, représentée, pour la première fois, par l'Académie royale de Musique, le mardi 26 Novembre, a été jugée avec plus de sévérité qu'un ouvrage de ce genre ne semble en mériter. Les paroles sont de M. Lourdet de Santerre, auteur de Colinette à la Cour; la musique de Grétry. Le titre et le sujet du Poëme sont pris d'une ancienne Comédie du Théâtre italien, de Dalainval, qui, après avoir été fort riche lui-même, et après avoir fait l'Embarras des richesses, finit aller mourir très-philosophiquement à l'hô

par

pital.

La musique de l'Embarras des richesses est remplie de choses agréables; elle est peut-être mème plus soignée que celle de Colinette à la Cour; mais on y a trouvé plus de réminiscences et moins de varieté.

Voici un extrait du nouvel Opéra, qui peut suppléer à tout ce que nous avons oublié d'en dire.

Air de la Béquille du père Barnabas.

On donne à l'Opéra
L'Embarras des richesses;
Mais il rapportera,

Je crois, fort peu d'espèces.
Cet Opéra comique

Ne réussira pas,

Quoique l'auteur lyrique

Ait fait son embarras.

Embarras d'intérêts,

Embarras de paroles,
Embarras de ballets,
Embarras dans les rôles ;
Enfin de toute sorte,
On ne voit qu'embarras;
Mais allez à la porte,

Vous n'en trouverez pas.

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La Nouvelle Omphale, comédie en trois actes et en prose, mêlée d'ariettes, a été donnée, pour la première fois, sur le Théâtre de la Comédie italienne, le jeudi 22 Novembre. Les paroles sont de M. de Beaunoir, ci-devant connu sous le nom de l'abbé Robineau, attaché à la Bibliothèque du Roi : nous lui devons l'Amour quéteur et beaucoup d'autres chefs-d'œuvre qui ont fait et qui feront encore long-temps les délices du Théâtre de Nicolet et d'Audinot; la musique est du sieur Floquet.

C'est le Conte si connu de Senecé, intitulé Camille, ou la Manière de filer le parfait amour,

qui a fourni le sujet de la Nouvelle Omphale. Dans le Conte, la scène se passe au te mps de Charlemagne ; dans la Comédie, sous le règne de Henri IV. Il n'y est question ni de l'Enchanteur, ni de la Figure de cire blanche dont la couleur doit se conserver pure si Camille est sage, et devenir noire si elle devient infidèle; mais, à l'exception de ces circonstances qu'il eût été difficile de faire réussir au Théâtre, tout se passe àpeu-près dans le Drame comme dans le Conte. Le dénouement est fort adouci. Le jeune fat, au lieu d'être dépouillé de tous ses biens et promené dans le camp de Charlemagne une quenouille au côté, revient de son erreur, continue d'être l'ami du mari, de M. de Montandre, et Camille consent même à le. nommer son chevalier.

La marche du Poëme est froide et lente, le dénouement de nul effet; il est prévu, et n'en est pas plus heureusement amené. On a trouvé généralement le caractère de la musique trop uniforme; mais on y a remarqué différens morceaux qui sont au-dessus de tout ce que nous avons vu jusqu'ici de M. Floquet; la finale du second acte a eu le plus grand succès et nous a paru du meilleur genre.

C'est le lundi 16 Décembre qu'on a représenté, pour la première fois, au Théâtre français, le Vieux Garçon, comédie en cinq actes et en vers, par M. Dubuisson, auteur de Thamas Kouli

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