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Souvent il eft foibleffe, & toujours il eft crime.
La vie eft un dépôt conflé par le Ciel :
Ofer en difpofer, c'eft être criminel.

Du monde où m'a placé la fageffe immortelle,
J'attends que dans son sein son ordre me rappelle.
N'outrons point les vertus par la férocité,
Reftons dans la nature & dans l'humanité.
Edouard III, tragédie de Greffet.

Sur la vertu.

Qu'il ne faut pas s'expofer à la perdre. C'est Pauline, femme de Polyeucte, qui dé clare qu'elle ne verra plus Sévere dont elle

étoit aimée.

La vertu la plus ferme évite les hasards.

J'affure mon repos que troublent fes regards;
Et pour vous en parler d'une maniere ouverte >
Qui s'expofe au péril veut bien trouver fa perte.
Depuis qu'un vrai mérite a pu nous enflammer,
Sa préfence toujours a droit de nous charmer;
Outre qu'on doit rougir de s'en laiffer furprendre,
On fouffre à résister, on fouffre à s'en défendre;
Et bien que la vertu triomphe de ses feux,
La victoire eft pénible & le combat douteux.

Porus, Roi d'une partie des Indes, voyant Alexandre dans fes Etats, après avoir subjugué tous les autres, s'emporte avec une noble fierté contre l'ambition de ce fameux conquérant, & fait éclater des fentimens dignes d'un grand Roi.

Que vient chercher ici le Roi qui vous envoie ? Quel eft ce grand fecours que fon bras nous octroie ?

De quel front ofe-t-il prendre fous fon appui Des peuples qui n'ont point d'autre ennemi que lui?

Avant que fa fureur ravageât tout le monde,
L'Inde fe repofoit dans une paix profonde.....)
Vit-on jamais chez lui nos peuples en courroux
Défoler un pays inconnu parmi nous?

Faut-il que tant d'états, de déferts, de rivieres,
Soient entre nous & lui d'impuiffantes barrieres?
Et ne fauroit-on vivre au bout de l'univers,
Sans connoître fon nom & le poids de fes fers?
Quelle étrange valeur, qui, ne cherchant qu'à
nuire,

Embrâfe tout fi-tôt qu'elle commence à luire;
Qui n'a que fon orgueil pour regle & pour raifon;
Qui veut que l'univers ne foit qu'une prifon;
Et que, maître abfolu de tous tant que nous
fommes,

Ses esclaves en nombre égalent tous les hommes !
Plus d'Etats, plus de Rois : fes facrileges mains
Deffous un même rang rangent tous les humains.
Dans fon avide orgueil je fais qu'il nous dévore.
De tant de Souverains nous feuls régnons encore.
Mais que dis-je, nous feuls? Il ne refte que moi
Où l'on découvre encor les veftiges d'un Roi.
Mais c'est pour mon courage une illuftre matiere:
Je vois d'un œil content trembler la terre entiere,

Afin que par

moi feul les mortels fecourus, S'ils font libres, le foient de la main de Porus.

Alexandre, de Racine.

Il s'agit dans les vers fuivans d'un héros qui ayoit rendu de grands fervices à une Reine dans fa mauvaise fortune.

Qui vous aima fans fceptre & fe fit votre appui Quand vous le recouvrez, eft bien digne de lui.... Si le cœur a choifi, vous pouvez faire un Roi, Elle répond:

Madame, je fuis Reine, & dois régner fur moi.
Le rang que nous tenons, jaloux de notre gloire,
Souvent dans un tel choix nous défend de nous
croire,

Jette fur nos defirs un joug impérieux,
Et dédaigne l'avis & du cœur & des yeux.
Corneille, Dom Sanche d'Arragon

Sentimens de fidélité conjugale. Zénobie comptant de ne plus revoir Rhadamifte fon époux qui l'avoit jettée dans un fleuve après l'avoir poignardée, avoit commencé d'écouter les vœux du Prince Arfame, & à prendre du goût pour lui: mais à peine elle retrouve Rhadamifte, qu'elle ne fonge qu'à bannir de fon cœur une paffion naiffante Elle parle de la forte ;

Etouffons fans regret une honteuse flamme,
C'est à mon époux seul à régner fur mon ame

Tout barbare qu'il eft, c'est un préfent des dieux
Qu'il ne m'eft pas permis de trouver odieux.
Hélas! malgré mes vœux, malgré sa barbarie,
Je n'ai pu le revoir fans en être attendţie.
Que l'hymen eft puiffant fur les cœurs vertueux!
Rhadamifte, de Crébillon,

Sentimens de tendreffe.

Lufignan, Prince du fang des anciens Rois de Jérufalem, après avoir langui dans les prifons du Soudan de cette ville, en est retiré par Zaïre, efclave aimée du Soudan. A certains fignes, il reconnoît qu'elle eft fa fille; il apprend qu'elle fuit la Religion des Mu fulmans; il déplore fon malheur, & lui parle ainfi pour l'engager à fe faire chrétienne.

Ton Dieu que tu trahis, ton Dieu que tu blas phêmes,

Pour toi, pour l'univers eft mort en ces lieux mêmes,

En ces lieux où mon bras le fervit tant de fois,
En ces lieux où fon fang te parle par ma voix.
Vois ces murs, vois ce temple envahi par tes
maîtres :

Tout annonce le Dieu qu'ont vengé tes ancêtres.
Tourne les yeux : fa tombe eft près de ce palais.
C'est ici la montagne où, lavant nos forfaits,
Il voulut expirer fous les coups de l'Impie.
C'eft-là que de fa tombe il rappela fa vie.
Tu ne faurois marcher dans cet augufte lieu,

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Tu n'y peux faire un pas fans y trouver ton Dieu;
Et tu n'y peux refter fans renier ton pere,
Ton honneur qui te parle, & ton Dieu qui t'é-
claire.

Je te vois dans mes bras & pleurer & frémir;
Sur ton front pâlissant Dieu met le repentir.
Je vois la vérité dans ton cœur...

ZAYRE.

Ah! mon pere,

Cher auteur de mes jours, parlez, que dois-je faire?

LUSIG NA N.

M'ôter par un feul mot ma crainte & mes ennuis, Dire: Je fuis chrétienne.

ZAYRE.

Oui....Seigneur....je le fuis.

LUSIGNAN.

Dieu! reçois fon aveu du fein de ton empire

Zatre, de Voltaire,

Expreffion des fentimens de haine
& de vengeance.

Rodogune, Princeffe des Parthes, ayant appris que Cléopatre, dont elle étoit haïe mortellement, vouloit la faire périr, s'excite elle-même à la vengeance, & forme le deffein de la prévenir. Mais elle vouloit en mêmetemps venger la mort de Démétrius Nicanor

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