J'en aime la chaleur & la nomme fans ceffe Mais je veux que la gloire anime fes ardeurs, Mort de Pompée, de Corneille. Les fentimens de gloire que donne aux Princes le haut rang où ils font élevés, font un grand frein pour réprimer leurs paffions. C'est cette même Cléopatre qui répond à ces paroles: L'amour, certes, fur vous a bien peu de puiffance. Les Princes ont cela de leur haute naissance: Et fi le peuple y voit quelques déréglemens, C'est quand l'avis d'autrui corrompt leurs fentimens. Camille, dame Romaine du temps de Tullus, un des premiers Rois de l'ancienne Rome,qui permit le combat des trois Horaces & des trois Curiaces, s'exprime ainsi : Les dieux à notre Prince ont inspiré ce choix, Et la voix du public n'eft pas toujours leur voix Ils-defcendent bien moins dans de fi bas étages, Horace, de Corneille. Sentimens de grandeur d'ame. Je fuis Reine fans fceptre, & n'en ai que le titre : Le pouvoir m'en est dû, le temps en est l'ar bitre. Si vous m'avez servie en généreux amant, Roi: Et je n'ai pas une ame affez baffe & commune Pour en faire l'appui de ma trifte fortune. Dom Sanche d'Arragon, de Corneille. Dans la Tragédie de Zaïre, on vient annoncer à Orofmane, Soudan de Jérusalem, le retour d'un esclave chrétien, qui avoit paflé en France fur fa foi, & qui demandoit audience. Orofmane dit qu'il peut entrer, & demande pourquoi il ne fe préfente pas: l'Of=ficier qui l'avoit annoncé dit ces paroles : Dans la premiere enceinte il arrête ses pas. maître, Dans ces auguftes lieux un chrétien pût paroître, Réponse d'Orofmane. : Qu'il paroiffe en tous lieux fans manque de respect, Chacun peut déformais jouir de mon afpect. Je vois avec mépris ces maximes terribles, Qui font de tant de Rois des tyrans invisibles. Zaïre, de Voltaire. Suite du même fujer. Orofmane parle ainfi à Néreftan, Chevalier François, qui lui apportoit la rançon de plufieurs de fes compatriotes, efclaves à Jérufalem. Chrétien, je fuis content de ton noble courage: Reprends ta liberté, remporte tes richesses, Ibid. (a) Les Lufignans avoient été Rois de Jérufalem. Erixe, Reine de Gétulie, parle ainfi au fujet de Mafinifla, Roi de Numidie. On peut dans cet endroit finguliérement, l'élévation des fentimens & la pompe des remarquer, vers. Je fais bien que des Rois la fiere destinée au cœur. Mais je fuis au-deffus de cette erreur commune : J'aime en lui fa perfonne autant que fa fortune; Et je n'en exigeai qu'il reprît fes Etats, Que de peur que mon peuple en fît trop peu de cas. Des actions des Rois, ce téméraire arbitre Dédaigne infolemment ceux qui n'ont que le titre : Jamais d'un Roi fans Trône il n'eut fouffert la Loi, Et ce mépris peut-être eut paffé jusqu'à mọi. Sophonifbe, de Corneille. L'Empereur Titus aimoit la Reine Bérénice, comme on a déjà dit : il auroit voulu l'époufer, mais il ne pouvoit le faire fans * foulever les Romains à qui ce choix déplaifoit. C'est à cette occafion qu'il tient ce langage: Moi qui n'ai que les dieux au-deffus de ma tête, Qui ne vois plus de rang digne de ma conquête, Du trône où je me fieds, puis-je afpirer à rien, Qu'à pofféder un cœur qui n'afpire qu'au mien? Mais c'eft à cette occafion que Flavian fon confident lui dit ces paroles: Quand aux feux les plus beaux un Monarque défere, Il s'en fait un plaifir, & non pas une affaire, Tite & Bérénice, de Corneille Le Poëte fait parler ainfi une Reine (a) aimée de deux Princes, & qui pouvoient lui être d'un grand fecours. Celles de ma naiffance ont horreur des baffeffes: Leur fang tout généreux hait ces molles adreffes. Quel que foit le fecours qu'ils (b) me puiffent offrir, (a) Rodogune, Princeffe des Parthès. (b) Antiochus & Séleucus, fils de Cléopatte, Reine de Syrie. |