» pas en général que les deftins dépendent » du Roi; il ne parle que du deftin de la » guerre. Comme le fyftême de fa pensée » eft tout poétique, il a droit de mettre la » fortune en jeu ; & comme la présence d'un » Prince auffi magnanime rendoit les fol» dats invincibles, c'eft comme s'il difoit : » Dès que Louis paroît, on eft affuré de la » victoire ». Et plus bas il dit encore: Quel plaifir de te fuivre aux rives du Scamandre, On ne peut rien de plus délicatement pensé que cette plainte que le même Poëte fait faire à la molleffe fur les travaux guerriers de ce grand Monarque: on peut dire que rien n'eft mieux imaginé, & que le tour eft nouveau. Voici l'endroit. Hélas! qu'eft devenu ce temps, cet heureux temps, Où les Rois s'honoroient du nom de Fainéans, S'endormoient fur le Trône, &, me fervant fans honte, Laiffoient leur Sceptre aux mains ou d'un Maire ou d'un Comte ? Aucun foin n'approchoit de leur paisible Cour: On repofoit la nuit, on dormoit tout le jour; Seulement au printemps, quand Flore dans les plaines Faifoit taire des vents les bruyantes haleines, Rien ne peut arrêter fa vigilante audace. L'été n'a point de feux, l'hyver n'a point de glace. Du Lutrin, Chant II. On doit dire à-peu-près la même chofe du morceau fuivant, fur-tout pour la délicateffe de la penfée. Boileau, dans une Epître à M. de Lamoignon, où il fait l'éloge de la vie champêtre, feint qu'à fon retour de la campagne, un de fes amis lui parle des victoires du Roi. Voici ce qu'il lui fait dire : Dieu fait comme les vers chez vous s'en vont couler, Dit d'abord un ami qui vient me cajoler, Et dans ce temps guerrier & fécond en Achilles, Croit que l'on fait les vers comme l'on prend les villes. Mais moi dont le génie eft mort en ce moment Pour moi qui fur ton nom déjà brûlant d'écrire, Le morceau fuivant ne le cede point en délicateffe à ceux qu'on vient de voir. C'est ici pareillement une maniere indirecte de louer Louis XIV. Le grand Corneille, dans fa Piece Héroïque de la Toifon d'Or, fait parler ainfi la France à la Déeffe de la Victoire : Ah! Vi&toire, pour fils n'ai-je que des foldats ? La gloire qui les couvre, à moi-même funefte, Sous mes plus beaux fuccès fait trembler tout le refte. Ils ne vont aux combats que pour me protéger, Ils tailles, prennent droit par là de ronger mes en trailles.... Mon Roi, que vous rendez le plus puissant des Rois, En goûte moins le fruit de fes propres exploits : Du même œil dont il voit fes plus nobles con quêtes, Il voit ce qu'il leur faut facrifier de têtes. pere, Ce cœur fe laiffe vaincre aux vœux que j'ai for més, Pour faire refpirer ce que vous opprimez. Le Pere du Cerceau s'adreffe à fa Mufe, & lui parle de la maniere fuivante dans une Epître pour Monfeigneur le Dauphin qui étoit alors dans la plus tendre enfance, & qui fut enfuite Louis XV. C'eft après l'avoir exhorté à n'approcher de l'augufte Prince qu'avec beaucoup de refpect. Le tour qu'il prend est tout-à-fait ingénieux, noble & délicat. ? Vous me direz: Prince, tant foit-il grand, Le noble instinct qui dans leur cœur domine, L'ame & le cœur du Dauphin fon ayeul, Le même Poëte, en faifant la defcription d'une campagne charmante, de laquelle on voit la Machine de Marly, prend occafion de faire un éloge poétique de cette célebre |