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SERVICES.

Que les grands fervices font fouvent des

ingrats.

Un fervice au-deffus de toute récompenfe,
A force d'obliger, tient prefque lieu d'offense.
Il reproche en fecret tout ce qu'il a d'éclat,
Et livre tout un cœur au dépit d'être ingrat.

Corneille, dans Surena.

Plus on fert des ingrats, plus on s'en fait haïr: Tout ce qu'on fait pour eux, ne fait que nous trahir.

Idem.

Les bienfaits ne font pas toujours ce que l'on

pense.

D'une main odieuse, ils tiennent lieu d'offense. Plus nous en prodiguons. à qui peut nous hair, Plus d'armes nous donnons à qui nous veut trahir. Idem.

VÉRITÉ.

Quelle eft la force de la vérité? Qu'il faut être vrai en tout.

Du menfonge toujours le vrai demeure maître. Pour paroître honnête-homme, en un mot, il faut l'être :

Et jamais, quoi qu'il faffe, un mortel ici-bas Ne peut aux yeux du monde être ce qu'il n'eft

pas

En vain ce misantrope, aux yeux triftes & som

bres

Veut par fon air riant en éclaircir les ombres; Le ris fur fon visage eft en mauvaise humeur, L'agrément fuit fes traits, fes careffes font peur. Boileau.

Sur le même fujet.

Rien n'eft beau que le vrai : le vrai seul eft aimable.

Il doit régner par-tout, & même dans la fable. De toute fiction l'adroite fauffeté

Ne tend qu'à faire aux yeux briller la vérité. C'est par elle qu'on plaît & qu'on peut long-temps plaire.

L'efprit laffe aifément, fi le cœur n'eft fincere.
En vain par fa grimace un bouffon odieux
A table nous fait rire, & divertit nos yeux;
Ses bons mots ont befoin de farine & de plâtre.
Prenez-le tête-à-tête, ôtez-lui son théâtre,
Ce n'eft plus qu'un cœur bas, un coquin téné-
breux;

Son vifage effuyé n'a plus rien que d'affreux.

VERT U.

Eloge de la Vertu.

Idem.

La vertu qui n'admet que de fages plaisirs, Semble d'un ton trop dur gourmander nos defirs, Mais quoique pour la fuivre, il coûte quelques larmes,

Tout auftere qu'elle eft, nous admirons fes

charmes.

Jaloux de fes appas dont il est le témoin,
Le vice, fon rival, la refpecte de loin.
Sous fes nobles couleurs fouvent il fe déguife,
Pour confoler du moins l'ame qu'il a surprise.
Adorable vertu, que tes divins attraits
Dans un cœur qui te perd laiffent de longs re-
grets!

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De celui qui te hair ta vue est le supplice.
Parois : que le méchant te regarde & frémisse
La richeffe, il est vrai, la fortune te fuit:
Mais la paix t'accompagne, & la gloire te fuit;
Et perdant tout pour toi, l'heureux mortel qui

t'aime,

Sans biens, fans dignité, fe fuffit à lui-même. Racine, Poëme de la Religion.

Vers à chanter, fur la Vertu

O vertu charmante,

Que votre empire eft doux!

Avec vous, tout nous contente :

On n'eft point heureux fans vous.

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376 REFLEXIONS INGENIEUSES.

Fortune volage,
Laiffez-nous en paix.

Vous ne donnez jamais

Qu'un pompeux esclavage.

Tous vos biens n'ont que de faux attraits...
La vertu couronne

Ses amans conftans.

Heureux qui lui donne
Ses foins & fon temps !
Ses vœux feront contens.

Fortune volage, &c.

Prologue de Perfée, tragédie en musique.

VŒUX.

Que l'homme ne tient guère les vœux qu'il faits dans la crainte.

O combien le péril enrichiroit les dieux, Si nous nous fouvenions des voeux qu'il nous fait faire ?

On

Mais, le péril paffé, l'on ne se souvient guère
De ce qu'on a promis aux Cieux;
compte feulement ce qu'on doit à la terre.
Jupiter, dit l'Impie, eft un bon créancier,
Il ne fe fert jamais d'Huiffier.

Et qu'est-ce onc que le tonnerre?

FIN.

La Fontaine.

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