Tous les mangeurs de gens ne font pas grands Seigneurs. Où la guêpe a paffé, le moucheron demeure. La Fontaine Sur les Fables morales. Les fables ne font point ce qu'elles femblent être. Le plus fimple animal nous y tient lieu de maître. Une morale nue apporte de l'ennui, Le conte fait paffer le précepte avec lui. En ces fortes de feintes il faut inftruire & plaire, Et conter pour conter me femble peu d'affaire. Fictions. Des fictions la vive liberté Idem. Peint fouvent mieux l'auftere vérité FORTUNE. Rouffeau. Sur les vains defirs des hommes pour la fortune. Qui ne court après la fortune? Je voudrois être en lieu d'où je puffe aifément Contempler la foule importune De ceux qui cherchent vainement Cette fille du fort de royaume en royaume. Fideles courti fans d'un voiage fantôme, Quand ils font prêts du bon moment, L'inconftante auffi-tôt à leurs defirs échappe Pauvres gens ! je les plains, car on a pour les foux Plus de pitié que de courroux. Cet homme, difent-ils, étoit planteur de choux, Et le voilà devenu Pape. Ne le valons-nous pas ? Vous valez cent fois mieux ; Mais que vous fert votre mérite? Et puis la papauté vaut-elle ce qu'on quitte Elle vous cherchera: bien des gens font ainfi. Sur le même fujet. Heureux qui vit chez foi! La Fontaine. De régler fes defirs faifant tout fon emploi, Ce que c'eft que la cour, le monde & ton empire, Fortune, qui nous fait paffer devant les yeux Des dignités, des biens que jusqu'au bout du monde On fuit fans que l'effet aux promeffes réponde. Déformais je ne bouge, & ferai cent fois mieux. Idem. Lorfque de quelque échec notre faute eft fuivie, Nous difons injures au fort, Chofe n'eft ici plus commune; Le bien nous le faifons, le mal c'est la fortune. On a toujours raison, le destin toujours tort. HAINE. Idem. Effets de la haine entre les Grands. La haine entre les grands fe calme rarement, La paix fouvent n'y fert que d'un amusement.... J'oublie & pleinement toute mon aventure. Mais une grande offense eft de cette nature, Que toujours fon auteur impute à l'offenfé Un vif reffentiment dont il le croit bleffé; Et quoiqu'en apparence on les réconcilie, Il le craint, il le hait, & jamais ne s'y fie. Rodogune, de Corneille. Même sujet. Ce n'eft pas tout-d'un-coup que tant d'orgueil trébuche. De qui fe rend trop tôt on doit craindre une embûche. Et c'eft mal démêler le cœur d'avec le front, Que prendre pour fincere un changement fi prompt. HISTOIRE. Idem. Rouffeau définit ingénieufement l'Hiftoire dans les vers fuivans: C'eft un théâtre, un spectacle nouveau Où tous les morts, fortant de leur tombeau, Se préfenter à nous dans un vrai luftre, Ce qu'il faut fuir, ce qu'il faut imiter (a); SUR L'HOMME. Diverfes réflexions fur l'Homme Qu'est-ce que l'homme ? Ariftote répond: Je n'en crois rien. S'il faut le définir à fond, (a) Hoc illud eft præcipuè in cognitione rerum falubre ac frugiferum, omnis te exempli documenta in illuftri pofita monumento intueri; indè tibi tuæque Reipublicæ quod imitére, capias ; indè fœdum inceptu, fœdum exitu, quod vites. Tic. Liv. tom. 1, P. 4. C'est un animal fot, fuperbe & miférable. S'exagere fa propre idée. Qui n'a pas plus d'une coudée. Orgueil de l'Homme. La Motte. J'ai vu quelquefois un enfant Pleurer d'être petit, en être inconfolable; L'élevoit-on fur une table, Le marmot penfoit être grand. Tout homme eft cet enfant les dignités, les places, La nobleffe, les biens, le luxe & la fplendeur, C'est la table du nain, ce font autant d'échafses Qu'il prend pour fa propre grandeur. Je demande à ce grand qui me regarde à peine, Et dont l'accueil même eft dédain, Qui peut fonder en lui cette fierté hautaine. Eft-ce fa trace > ou fon fang, ou fon train? Mais quoi! de tes ayeux la mémoire honorable, L'autorité de ton emploi, Ton palais, tes meubles, ta table, Tout cela, pauvre homme, eft-ce à toi ? Rien moins ; & puifqu'il faut qu'ici je t'apprécie, Un cœur bas, un efprit mal fait, |