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Il faut que vous foyez inftruit même avant tous Des grands deffeins de Dieu fur fon peuple &

fur vous.

Armez-vous d'un courage & d'une foi nouvelle. Il eft temps de montrer cette ardeur & ce zele Qu'au fond de votre cœur mes foins ont cultivés, Et de payer à Dieu ce que vous lui deveź. Sentez-vous cette noble & généreuse envie?

JOA S.

Je me fens prêt, s'il veut,

de lui donner ma vie.

JOA D.

On vous a lu fouvent l'hiftoire de nos Rois;
Vous fouvient-il, mon fils, quelles étroites loix
Doit s'impofer un Roi digne du diadême ?

JOAS.

Un Roi fage, ainfi Dieu l'a prononcé lui-même (a),

Sur la richeffe & l'or ne met point son appui, Craint le Seigneur fon Dieu, fans ceffe a devant

lui

Ses préceptes, fes loix, fes jugemens féveres, Et d'injuftes fardeaux n'accable point fes freres. JOAD.

Mais fur l'un de ces Rois s'il falloit vous régler, A qui choifiriez-vous, mon fils, de reffembler ?

(a) Deutéronome, chap. 17, verf. 16,

JOA S.

David, pour le Seigneur plein d'un amour fidele,
Me paroît des grands Rois le plus parfait modele.
JOA D.

Ainfi dans leurs excès vous n'imiteriez pas
L'infidele Joram, l'impie Ochofias.

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Puiffe périr comme eux quiconque leur reffemble! (Joad fe profternant à fes pieds.) Mon pere, en quel état vous vois-je devant moi? JO A D.

Je vous rends le respect que je dois à mon Roi. De votre ayeul David, Joas, rendez-vous digne.

Joas, moi ?

JOA S.

JOAD, fe relevant.

Vous faurez par quelie grace infigne, D'une mere en fureur Dieu trompant le dessein, Quand déjà fon poignard étoit dans votre sein, Vous choifit, vous fauva du milieu du carnage. Vous n'êtes pas encore échappé de fa rage. Avec la même ardeur qu'elle voulut jadis Perdre en vous le dernier des enfans de fon fils, A vous faire périr fa cruauté s'attache,

Et

Et vous poursuit encor fous le nom qui vous

cache.

Mais fous vos étendards j'ai déjà fu ranger
Un peuple obéiffant & prompt à vous venger.
Entrez, généreux chefs des familles facrées,
Du miniftere faint tour-à-tour honorées.
Roi, voilà vos vengeurs contre vos ennemis.
Prêtres, voilà le Roi que je vous ai promis....
Mais je vois que déjà vous brûlez de me suivre.
Jurez donc avant tout fur cet augufte livre,
A ce Roi que le Ciel vous redonne aujourd'hui,
De vivre, de combattre & de mourir pour lui...
(A Joas)

Et vous, à cette loi, votre regle éternelle,
Roi, ne jurez-vous pas d'être toujours fidele?

JOA S.

Pourrois-je à cette loi ne pas me conformer ?
JOAD.

O mon fils! de ce nom j'ose encor vous nommer,
Souffrez cette tendreffe & pardonnez aux larmes
Que m'arrachent pour vous de trop juftes alar

mes.

Loin du trône nourri, de ce fatal honneur,
Hélas! vous ignorez le charme empoisonneur ;
De l'abfolu pouvoir vous ignorez l'ivreffe,
Et des lâches flatteurs la voix enchantereffe.
Bientôt ils vous diront que les plus faintes loix
Maîtreffes du vil peuple, obéiffent aux Rois ;
Qu'un Roi n'a d'autre frein que fa volonté même;
M

Qu'il doit immoler tout à fa grandeur suprême ; Qu'aux larmes, au travail le peuple eft condamné,

Et d'un fceptre de fer veut être gouverné ; Que s'il n'eft opprimé, tôt ou tard il opprime. Ainfi de piége en piége, & d'abîme en abîme, Corrompant de vos mœurs l'aimable pureté, Ils vous feront enfin hair la vérité,

Vous peindront la vertu fous une affreufe image. Hélas! ils ont des Rois égaré le plus fage. Promettez fur ce livre, & devant ces témoins, Que Dieu fera toujours le premier de vos foins; Que févere aux méchans & des bons le refuge, Entre le pauvre & vous vous prendrez Dieu pour juge,

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Vous fouvenant, mon fils, que caché fous ce lin, Comme eux vous futes pauvre, & comme eux orphelin.

JOAS, la main fur le livre.

Je promets d'obferver ce que la loi m'ordonne. Mon Dieu, puniffez-moi fi je vous abandonne. Extr. de la tragédie d'Athalie, laquelle paffe pour le chef-d'œuvre de Racine.

L'innocence calomniée.

Hippolyte fauffement accufé auprès de fon père Théfée, d'avoir voulu attenter à l'honneur de Phedre fa belle-mere, paroît devant lui, & fe juftifie de cette accufation.

THÉ SÉ E.

Ah! le voici, grand Dieu ! à ce, noble maintien
Quel œil ne feroit pas trompé comme le mien ?
Faut-il que fur le front d'un profane adultere
Brille de la vertu le facré caractere ?

Et ne devroit-on pas à des fignes certains
Reconnoître le cœur des perfides humains?

HIPPOL Y TE.

Puis-je vous demander quel funefte nuage,
Seigneur, a pu troubler votre augufte visage ?
N'olez-vous confier ce fecret à ma foi?

THÉ SÉ E.

Perfide, ofes-tu bien te montrer devant moi,
Monftre qu'a trop long-temps épargné le ton-

nerre,

Refte impur des brigands dont j'ai purgé la terre!
Après que le tranfport d'un amour plein d'hor-

reur

Jufqu'au lit de ton pere a porté ta fureur,
Tu m'ofes préfenter une tête ennemie !
Tu parois dans des lieux pleins de ton infamie,
Et ne vas pas chercher fous un ciel inconnu
Des pays où mon nom ne foit point parvenu!
Fuis, traître; ne viens point braver ici ma haine,
Et tenter un courroux que je retiens à peine....
HIPPOL Y T E.

D'un menfonge fi noir justement irrité,

M ij

TAYL

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