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Montre d'un vrai Romain la derniere vigueur, Et mérite mes pleurs au défaut de mon cœur. Cinna, de Corneille.

Pulchérie parle ainfi à Héraclius fon frere, que l'Empereur Phocas vouloit faire mourir; dans ce moment elle n'étoit pas entiérement convaincue qu'Héraclius fût fon frere, & on ne favoit pas encore qui étoit le véritable Héraclius.

Ah! Prince, il ne faut point d'afurance plus claire :

Si vous craignez la mort, vous n'êtes point mon

frere;

Ces indignes frayeurs vous ont trop découvert. Héraclius, de Corneille.

Cette Princeffe témoigne la même gran deur de fentimens par la fierté avec laquelle elle dit à Phocas qu'Héraclius voit le jour, & qu'il fe vengera fur lui de la mort de fon pere l'Empereur Maurice.

Au feul nom de Maurice il te fera trembler: Puifqu'il fe dit fon fils, il veut lui reflembler. Qui fe laiffe outrager, mérite qu'on l'outrage, Et l'audace impunie enfle trop un courage.

Ibid.

Le Comte de Gormas menacé de la colere de fon Prince, s'il refufoit de faire une fatisfaction à Dom Diegue, à qui il avoit

donné un foufflet, l'Officier envoyé de la part du Roi lui parle ainfi :

Mais fongez que les Rois veulent être abfolus.

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LE COM TE.

Le fort en eft jetté, Monfieur, n'en parlons plus. D. ARIA S.

'Adieu donc, puisqu'en vain je tâche à vous réfoudre :

Avec tous vos lauriers craignez encor la foudre.

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Nous verrons donc par-là Dom Diegue fatisfait.

(Seul.)

Qui ne craint point la mort, ne craint point les

menaces:

J'ai le cœur au-deffus des plus fieres difgraces; Et l'on peut me réduire à vivre fans bonheur, Mais non pas me réfoudre à vivre fans honneur. Cid, de Corneille.

Honorie, fœur de l'Empereur Valentinien, parle ainfi à Attila, Roi des Huns :

Quand je voudrai l'aimer, je le pourrai fans honte :

Il (a) eft Roi comme vous.

ATTIL A.

En effet, il eft Roi.

J'en demeure d'accord, mais non pas comme

moi.

Même splendeur de fang, même titre nous pare;
Mais de quelques degrés le pouvoir nous fépare...
A fes propres fujets il difpenfe mes loix;
Et s'il eft Roi des Goths, je fuis celui des Rois..

HONORI E.

Et j'ai de quoi le mettre au-deffus de ta tête,
Si-tôt que de ma main j'aurai fait fa conquête.
Tu n'as pour tout pouvoir que des droits ufurpés
Sur des peuples furpris & des Princes trompés;
Tu n'as d'autorité que ce qu'en font les crimes:
Mais il n'aura de moi que des droits légitimes;
Et fût-il fous ta rage à tes pieds abattu,
Il est plus grand.que toi, s'il a plus de vertu.
Attila, de Corneille.

Attila avoit eu la cruauté d'offrir pour époux à Ildione, fœur de Mérouée, Roi des Francs, Ardaric, Roi des Gépides, fous la condition qu'il tueroit Valamir, Roi des Of trogoths, & il avoit menacé Ardaric de le faire périr, s'il refufoit de commettre cette action noire. Voici ce qu'Ardaric & Ildione fe difent à cette occasion:

(a) Elle parle de Valamir, Roi des Oftrogoths.

ARDARI C.

Il me fait fon bourreau pour perdre un autre Roi,
A qui fa fureur fait la même offre qu'à moi.
Aux dépens de fa tête il veut qu'on vous obtienne,
On lui donne Honorie aux dépens de la mienne:
Sa cruelle faveur m'en a laifié le choix.

ILDION E.

Quel crime voit fa rage à punir en deux Rois? ARDARI C.

Le crime de tous deux, c'eft d'aimer deux Prin ceffes,

C'est d'avoir mieux que lui mérité leurs tendreffes.

De vos bontés

pour nous il nous fait un malheur, Et d'un fujet de joie un excès de douleur.

ILDION E.

Eft-il orgueil plus lâche ou lâcheté plus noire?
Il veut que je vous coûte u la vie ou la gloire,
Et ferve de prétexte au choix infortuné
D'affaffiner vous-même, ou d'être affaffiné!
Il vous offre ma main comme un bonheur infigne,
Mais à condition de vous en rendre indigne;
Et fi vous refufez par-là de m'acquérir,
Vous ne fauriez vous-même éviter de périr!

ARDARI C.

Il est beau de périr pour éviter un crime:

Quand on meurt pour la gloire, on revit dans

l'eftime;

Et triompher ainfi du plus rigoureux fort, - C'est s'immortalifer par une illuftre mort..... Vous vengerez ma mort, & mon ame ravie...

ILDION E.

Ah! venger une mort,

n'eft pas

rendre une vie.

Le tyran immolé me laisse mes malheurs,
Et fon fang répandu ne tarit pas mes pleurs.

Ibid.

Eurydice, fille d'Artabaze, Roi d'Arménie, aimoit Surena, grand homme de guerre, & Général de l'armée d'Orode, Roi des Parthes. Sa confidente lui repréfentant qu'elle devoit faire un choix plus digne d'elle, lui difoit ces paroles :

Il n'eft pas Roi, Madame.

Eurydice répond:

Il ne l'eft pas,

Mais il fait rétablir les Rois dans leurs Etats. Des Parthes le mieux fait d'efprit & de vifage, Le plus puiffant en biens, le plus grand en cou

rage,

Le plus noble; joins-y l'amour qu'il a pour moi, Et tout cela vaut bien un Roi qui n'est que Roi. Surena, de Corneille.

Pacorus, fils d'Orode, aimoit Eurydice: il apprit qu'il avoit un rival, mais il igno

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