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des grands traits de l'Hiftoire de France, & de donner aux héros François le tribut de louanges que leurs actions leur ont mé

ritées.

Henri voit ces beaux lieux, & foudain à leur vue
Sent couler dans fon ame une joie inconnue.
Les foins, les paffions n'y troublent point les

cœurs;

La volupté tranquille y répand fes douceurs.... Là régnent les bons Roís qu'ont produit tous les âges;

Là font les vrais héros ; là vivent les vrais fages; Là, fur un trône d'or, Charlemagne & Clovis Veillent du haut des Cieux fur l'empire des lis, Les plus grands ennemis, les plus fiers adver

faires,

Réunis dans ces lieux, n'y font plus que des freres.

Le fage Louis douze au milieu de ces Rois
S'éleve comme un cedre, & leur donne des loix,
Ce Roi qu'à nos ayeux donna le Ciel propice,
Sur fon trône avec lui fit affeoir la justice.
Il pardonna fouvent; il régna fur les cœurs,
Et des yeux de fon peuple il effuya les pleurs.
D'Amboise eft à ses pieds, ce Miniftre fidele,
Qui feul aima la France, & fut feul aimé d'elle;
Tendre ami de fon maître, & qui dans ce haut
rang

Ne fouilla point fes mains de rapine & de fang.

Ó jours !ô mœurs! ô temps d'éternelle mémoire! Le peuple étoit heureux, le Roi couvert de gloire :

De fes aimables loix chacun goûtoit les fruits. Revenez, heureux temps, fous un autre Louis! Plus loin font les guerriers prodigues de leur vie, Qu'enflamma leur devoir & non pas leur furie. La Trimouille, Cliffon, Montmorenci, de Foix, Guefclin, le deftructeur & le vengeur des Rois; Le vertueux Baiard; & vous, brave Amazone(a), La honte des Anglois & le foutien du trône..... Vous, voyez, dit Louis, dans ce facré féjour, Les portraits des humains qui doivent naître un jour.

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Approchons-nous le Ciel te permet de con

noître

Les Rois & les héros qui de toi doivent naître. Le premier qui paroît, c'eft ton augufte fils (b): Il foutiendra long-temps la gloire de nos lis, Triomphateur heureux du Belge & de l'Ibere; Mais il n'égalera ni fon fils ni fon pere.

Henri dans ce moment voit fur des fleurs de lis Deux mortels.orgueilleux auprès du trône affis. Ils tiennent fous leurs pieds tout un peuple à la chaîne :

Tous deux font revêtus de la pourpre Romaine: Tous deux font entourés de gardes, de foldats.

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Il les prend pour des Rois. Vous ne vous trom

pez pas;

Ils le font, dit Louis, fans en avoir le titre :
Du Prince & de l'Etat l'un & l'autre eft l'arbitre.
Richelieu, Mazarin, ministres immortels,
Jufqu'au trône élevés de l'ombre des autels,
Enfans de la fortune & de la politique,
Marcheront à grands pas au pouvoir defpotique:
Richelieu, grand, fublime, implacable ennemi:
Mazarin, fouple, adroit & dangereux ami:
L'un fuyant avec art & cédant à l'orage,
L'autre aux flots irrités oppofant fon courage:
Des Princes de mon fang ennemis déclarés,
Tous deux haïs du peuple & tous deux admirés:
Enfin par leurs efforts ou par leur industrie,
Utiles à leurs Rois, cruels à la patrie.

Ciel! quel pompeux amas d'esclaves à genoux
Eft aux pieds de ce Roi qui les fait trembler tous!
Quels honneurs ! quels respects! jamais Roi dans
la France

N'accoutuma fon peuple à tant d'obéissance.
Je le vois comme vous par la gloire animé,
Mieux obéi, plus craint, peut-être moins aimé,
Je le vois éprouvant des fortunes diverses,
Trop fier en fes fuccès, mais ferme en fes tra-
verses;

De vingt peuples ligués bravant feul tout l'effort;
Admirable en fa vie, & plus grand dans fa mort.
Siecle heureux de Louis! fiecle que la nature
De fes plus beaux préfens doit combler fans me-

fure,

C'est toi qui dans la France amenes les beaux

arts;

Sur toi tout l'avenir va porter ses regards;
Les Mufes à jamais y fixent leur empire;
La toile eft animée, & le marbre refpire.
Quels fages (a) raffemblés dans ces auguftes
lieux,

Mefurent l'univers, & lifent dans les Cieux;
Et dans la nuit obfcure apportant la lumiere,
Sondent les profondeurs de la nature entiere !
L'erreur présomptueufe à leur afpect s'enfuit,
Et vers la vérité le doute les conduit.

Et toi, fille du Ciel, toi, puiffante harmonie,
Art charmant qui polis la Grece & l'Italie,
J'entends de tous côtés ton langage enchanteur,
Et tes fons, fouverains de l'oreille & du cœur.
François, vous favez vaincre & chanter vos con-
quêtes;

Il n'eft point de lauriers qui ne couvrent vos têtes,
Un peuple de héros va naître en ces climats.
Je vois tous les Bourbons voler dans les combats.
A travers mille feux je vois Condé paroître,
Tour à tour la terreur & l'appui de fon maître :
Turenne, de Condé le généreux rival,

Moins brillant, mais plus fage, & du moins fon égal.

Catinat réunit par un rare assemblage

Les talens du guerrier & les vertus du Sage.

(a) L'Académie des Sciences.

Celui-ci

2

Celui-ci, dont la main raffermit nos remparts,
C'est Vauban, c'est l'ami des vèrtus & des arts.
Mal eu eux à la cour, invincible à la
guerre,
Luxembourg de fon nom remplit toute la terre.
Regardez dans Denain l'audacieux Villars
Difputant le tonnerre à l'aigle des Céfars,
Arbitre de la paix que la victoire amene,
Digne appui de fon Roi, digne rival d'Eugene.
Quel est ce jeune Prince (a) en qui la majesté
Sur fon vifage aimable éclate fans fierté ?
D'un œil indifférent il regarde le trône.
Ciel quelle nuit foudaine à mes yeux l'envi-
ronne?

La mort autour de lui vole fans s'arrêter;

Il tombe au pied du trône étant prêt d'y monter. O mon fils! des François vous voyez le plus

jufte;

Les Cieux le formeront de votre fang augufte. Grand Dieu! ne faites-vous que montrer aux humains

Cette fleur paflagere, ouvrage de vos mains?
Hélas! que n'eût point fait cette ame vertueuse?
La France fous fon regne eût été trop heureuse.
Leût entretenu l'abondance & la paix;
Mon fils, il eût compté fes jours par fes bienfaits;
Il eût aimé fon peuple. O jours remplis d'alar-
îmes !

O combien les François vont répandre de larmes,

(a) M. le Duc de Bourgogne, pere de Louis XV.

G

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