Hélas! l'état horrible où le Ciel me l'offrit, Je le pris tout fanglant. En baignant fon vifage, Du fidele David c'eft le précieux refte. Athalie, de Racine. Athalie raconte à Abner & à Mathan le fonge qu'elle a eu. Un fonge (me devrois-je inquiéter d'un fonge?)` Entretient dans mon cœur un chagrin qui le ronge. Je l'évite par-tout, par-tout il me poursuit. C'étoit pendant l'horreur d'une profonde nuit. Ma mere Jézabel devant moi s'eft montrée, Comme au jour de fa mort, pompeufement parée; Ses malheurs n'avoient point abattu fa fierté, Pour réparer des ans l'irréparable outrage. Des lambeaux pleins de fang & des membres affreux, Que des chiens dévorans fe difputoient entr'eux. Grand Dieu ! ABNER. ATHALIE. Dans ce défordre à mes yeux fe présente Un jeune enfant couvert d'une robe éclatante, Tels qu'on voit des Hébreux les Prêtres revêtus. Sa vue a ranimé mes efprits abattus. (a) Jézabel fut précipitée du haut d'une fenêtre par l'ordre de Jéhu. Son corps fut foulé aux pieds par des chevaux & dévoré des chiens. Elle avoit cruellement perfécuté tous les Prophetes du Seigneur, Mais lorsque, revenant de mon trouble funefte, A deux fois en dormant revu la même idée, Elle raconte enfuite que pour fe délivrer de cette funefte pensée, elle étoit allée dans le temple des Juifs pour appaifer leur Dieu. J'entre. Le peuple fuit. Le facrifice ceffe. Mais bientôt à ma vue on l'a fait difparoître. MATHA N. Ce fonge & ce rapport, tout me femble ef froyable. Athalie, de Racine. Peinture d'un cœur déchiré par les remords. C'eft Phedre qui parle à sa confidente c'est-à-dire, une Reine atteinte d'une fatale paffion, qui s'exprime ainfi au milieu des agitations que lui cause la honte d'un penchant criminel: J'ai conçu pour mon crime une jufte terreur. Et l'espoir malgré moi s'eft gliffé dans mon · cœur.... Moi, régner! Moi, ranger un état sous ma loi, Quand ma foible raifon ne regne plus fur moi, Lorfque j'ai de mes fens abandonné l'empire, Quand fous un joug honteux à peine je respire!.. .. Infenfée, où fuis-je ? & qu'ai-je dit? Où laiffé-je égarer mes vœux & mon esprit? Je l'ai perdu : les dieux m'en ont ravi l'usage, Enone, la rougeur me couvre le vifage. Je te laiffe trop voir mes honteufes douleurs, *Et Et mes yeux málgré moi fe rempliffent de pleurs.... Graces au Ciel, mes mains ne font point criminelles. Plut aux Dieux que mon cœur fût innocent comme elles!... ... Jufte Ciel ! qu'ai-je fait aujourd'hui ? Mon époux va paroître & fon fils avec lui.... Il fe tairoit en vain : je fais mes perfidies, none, & ne fuis point de ces femmes hardies, Qui, goûtant dans le crime une tranquille paix, Ont fu fe faire un front qui ne rougit jamais, Je connois mes fureurs, je les rappelle toutes. Il me femble déjà que ces murs, que ces voûtes Vont prendre la parole, &, prêts à m'accuser, Attendent mon époux pour le défabuser. Mourons. De tant d'horreurs qu'un trépas me délivre. Eft-ce un malheur fi grand que de ceffer de vivre? La mort aux malheureux ne cause point d'effroi, Je ne crains que le nom que je laiffe après moi. Et ailleurs elle dit: Mon époux eft vivant, & moi je brûle encore. Pour qui? Quel eft le cœur où prétendent mes vœux? Chaque mot fur mon front fait dreffer mes che yeux, Mes |