Tombe sur le festin, brise plats et flacons, Ce ne fut pas le pis: car, pour rendre complète Une poutre cassa les jambes à l'athlète, Pour la plupart estropiés. La renommée eut soin de publier l'affaire; Qui, les payant à qui mieux mieux, Je reviens à mon texte, et dis premièrement XV La Mort et le Malheureux. Un malheureux appelait tous les jours O Mort! lui disait-il, que tu me sembles belle! Qu'il est hideux! que sa rencontre Me cause d'horreur et d'effroi! N'approche pas, ô Mort! ô Mort, retire-toi! Mécénas 1 fut un galant homme; Il a dit quelque part : Qu'on me rende impotent, Ce sujet a été traité d'une autre façon par Esope, comme la fable suivante le fera voir. Je composai celle-ci pour une raison qui me contraignait de rendre la chose ainsi générale. Mais quelqu'un me fit connaître que j'eusse beaucoup mieux fait de suivre mon original, et que je laissais passer un des plus beaux traits qui fût daus Esope. Cela m'obligea d'y avoir recours. Nous ne saurions aller plus avant que les anciens : ils ne nous ont laissés pour notre part que la gloire de les bien suivre. Je joins toutefois ma fable à celle d'Esope, non que la mienne le mérite, mais à cause du mot de Mécénas que j'y fais entrer, et qui est si beau et si à propos, que je n'ai pas cru le devoir omettre. La Mort et le Bûcheron. Un pauvre bûcheron tout couvert de ramée, 1 Mécène, favori d'Auguste, ami de Virgile et d'Horace. 2 Les paroles de Mécène que traduit ici la Fontaine sont citées par Sénèque, qui les regarde comme « un monument odieux de la crainte la plus folle », lettre 101e. Elles expriment le sentiment le plus naturel à l'homme, l'amour de la vie; mais elles ne sont pas si belles que le prétend la Fontaine. Nous devons user de la vie de manière à être toujours prêts à la quitter. Gémissant et courbé, marchait à pas pesants, Lui font d'un malheureux la peinture achevée. A recharger ce bois; tu ne tarderas guère 4. Mais ne bougeons d'où nous sommes : C'est la devise des hommes 5. 1 Ces quatre vers sont pleins de poésie, d'harmonie, de vérité. 2 En la machine ronde, sur la terre. 3 Corvée, travail que l'Etat ou les seigneurs exigeaient comme une redevance. 4 C'est-à-dire cela ne te causera guère de retard. C'est le non est mora longa d'Horace, livre I, ode 23. 5 Boileau et J.-B. Rousseau, qui ont refait cette fable, sont restés bien au-dessous de la Fontaine. Compère 1 le renard se mit un jour en frais, Avait un brouet clair; il vivait chichement. A l'heure dite, il courut au logis 1 Compère, commère, sont des titres qui supposent une familiarité affectueuse. 2 Et retint à dîner. « Le renard fait les avances, ce qui rend l'affront fait à la cigogne plus piquant.» (Batteux.) 3 Pour toute besogne, c'est-à-dire pour tout mets. 4 Laper, boire en tirant avec sa langue. Il se dit de quelques quadrupedes, et particulièrement du chien.» (Acad.) De la cigogne son hôtesse; Trouva le diner cuit à point. Bon appétit surtout renards n'en manquent point. En un vase à long col et d'étroite embouchure. Honteux comme un renard qu'une poule aurait pris, XVIII L'Enfant et le Maître d'école. Dans ce récit je prétends faire voir 1 Choir, vieux verbe, synonyme de tomber, et qui n'est plus guère usité qu'à l'infinitif. 2 Babouin, espèce de singe. Ce mot se dit au figuré d'un enfant étourdi. |