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que

était d'une élégance trop affectée. Barbier d'Aucour en fit une critique, en seize lettres, l'on regarde encore aujourd'hui comme un chef-d'œuvre : aussi lui valut-elle une place à l'Académie française. Le père Bouhours mourut à Paris, en 1702.

Traité de la formation mécanique des langues et des principes physiques de l'étymologie; 2 vol. in-12, par Charles Desbrosses, premier président du parlement de Dijon.

Le mérite de cet ouvrage fut également senti des littérateurs français et des savants étrangers.

On y remarque à la fois de la profondeur dans les jugements, de l'originalité dans les vues, et des idées ingénieuses qui ressemblent à des vérités démontrées. L'auteur propose ses idées les plus heureuses, et ses conceptions les plus hardies avec un abandon et une indifférence qui attestent que son seul désir était de se rendre utile. On sait que les collaborateurs de l'Encyclopédie ont tiré le plus grand parti de son ouvrage. Ils étaient assez habiles pour apprécier son mérite, mais ils ne furent pas assez généreux pour lui en rapporter l'honneur.

Charles Desbrosses naquit à Dijon le 7 février 1709, et mourut à Paris, le mai 1778. II 7

était d'une stature au-dessous de la médiocre, et d'un tempérament très délicat. Mais il trouva dans une éducation mâle et soignée, toutes les ressources de la force de corps et d'esprit, dont il donna maintes preuves dans les emplois éminents où l'appelerent sa naissance et ses talents.

Traité des Tropes, par M. César Dumarsais.

L'auteur a prouvé dans cet excellent petit ouvrage, que la grammaire est une véritable science, et que la philosophie a présidé plus qu'on ne croit à l'art de la parole. M. Dumarsais, né à Marseille en 1696, mort à Paris en 1756, fut un homme vertueux, un philosophe pratique qui aima mieux passer une longue vie dans un état voisin de l'indigence, que de s'avilir, en mendiant les faveurs de la fortune.

Eléments de littérature, par M. Marmontel; 6 vol. in-12.

Cet ouvrage n'est pas assez connu, ni assez estimé, parce que l'auteur eut long-temps contre lui le parti des prêtres et des dévots, qui faisaient alors les réputations littéraires. Mais, en le lisant sans prévention, on voit que M. Marmontel connaissait parfaitement l'esprit de la littérature française, et qu'il joignait aú mérite de

penser avec justesse, celui de s'exprimer avec grâce. On est seulement faché de la forme alphabétique qu'il s'est cru obligé de lui donner. Si cette forme a facilité son travail, elle a d'un autre côté diminué de beaucoup l'intérêt qu'eût infailliblement inspiré un cours de leçons littéraires et critiques, aussi variées que les siennes, aussi bien écrites et aussi instructives,

HISTOIRE.

LES Français n'ont aucune bonne histoire de leur pays. La crainte qu'avaient les auteurs de dé plaire à des personnes puissantes, leur a fait souvent jeter un voile sur la vérité; voile qui est devenu encore plus épais en passant par la main des censeurs. La moins mauvaise est celle de l'abbé Vély, continuée par Villaret, ensuite par l'abbé Garnier,

L'Histoire de France par Mézerai n'est pas seulement fastidieuse, mais elle est remplie d'erreurs. Le père Pétau (1) lui ayant dit qu'il avait trouvé mille erreurs dans son ouvrage, Mézerai lui répondit: J'ai été plus sévère observateur que vous, car j'en ai trouvé dix mille. Son ́style est en général trop négligé, inégal, et sur- . tout trop diffus: les faits y sont étouffés par une

(1) Denis Pétau, célèbre savant de la société des jésuites, mourut en 1652.

multitude de phrases inutiles; mais il a quelquefois de l'énergie. En parlant de Henri III, il dit : «Son règne pourrait être appelé celui des favo>> ris; ils achevèrent d'énerver ce qu'il avait de » ferme, et de le dissoudre dans les voluptés. >>

L'Histoire de France du père Daniel, quoique corrigée et augmentée par le père Griffet (1), a beaucoup de défauts; elle est d'un style faible, sans noblesse, sans élégance. On accuse même l'auteur de manquer de véracité, en ce qu'il dénature quelquefois les faits qu'il rapporte. Le succès de cet ouvrage, quand il a paru, a été dú à la protection que Louis XIV lui accordait ; l'auteur avait pris le roi par son faible, en rapportant tout ce que l'histoire offre de favorable pour les bâtards appelés au trône dans les premières races. Voltaire a dit du père Daniel, qu'en lisant son histoire de Henri IV, on était tout étonné de ne pas trouver ce prince un grand homme. Des manoeuvres de guerre sèchement

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(1) Jésuite et prédicateur du roi. Après la destruction de sa société en France, il se retira à Bruxelles, où il mourut le 22 février 1775, à l'âge de soixante-dix-sept ans. L'ouvrage le plus estimé du père Griffet est son Traité des différentes sortes de preuves qui servent à établir la vérité de l'histoire.

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