10 Et montra pour rimer des chemins tout nouveaux. Enfin Malherbe: vint, et, le premier en France, 15 20 25 1 Boileau connaissait fort mal cette poésie du XVI° siècle; il attribue beaucoup trop à Marot, et la postérité a désavoué le jugement sévère qui va suivre sur Ronsard (1524-1585). Ronsard était le principal poète de la Pléiade, brillant groupe d'écrivains de la Renaissance, et que Malherbe avait discrédité. 2 Desportes (1546–1606) et Bertaut (1570-1611), deux des meilleurs poètes de transition du xvi° au XVII° siècle. 3 C'est ici le passage connu auquel nous avons renvoyé, p. 5. Il est certains esprits, dont les sombres pensées Surtout qu'en vos écrits la langue révérée Travaillez à loisir, quelque ordre qui vous presse, C'est peu, qu'en un ouvrage où les fautes fourmillent, Que d'un art délicat les pièces assorties N'aille chercher trop loin quelque mot éclatant. Soyez-vous à vous-même un sévère critique. Qu'ils soient de vos écrits les confidents sincères, 10 Et de tous vos défauts les zélés adversaires. Dépouillez, devant eux, l'arrogance d'auteur. Aimez qu'on vous conseille, et non pas qu'on vous loue. 15 Un flatteur, aussitôt, cherche à se récrier: Chaque vers qu'il entend le fait extasier; Il vous comble partout d'éloges fastueux; ... 20 La vérité n'a point cet air impétueux. Un sage ami, toujours rigoureux, inflexible, Sur vos fautes jamais ne vous laisse paisible; Il ne pardonne point les endroits négligés; Il renvoie en leur lieu les vers mal arrangés; 25 Il réprime des mots l'ambitieuse emphase; Ici, le sens le choque, et plus loin, c'est la phrase; C'est ainsi que vous parle un ami véritable. A les protéger tous se croit intéréssé, «De ce vers, direz-vous, l'expression est basse. — Ah! monsieur, pour ce vers je vous demande grâce, Répondra-t-il d'abord. — Ce mot me semble froid, Je le retrancherais. — C'est le plus bel endroit! - Ce tour ne me plaît pas. – Tout le monde l'admire.) 5 Ainsi, toujours constant à ne se point dédire, Qu'un mot dans son ouvrage ait paru vous blesser, C'est un titre chez lui pour ne point l'effacer. Cependant, à l'entendre, il chérit la critique, Vous avez sur ses vers un pouvoir despotique ... LO Mais tout ce beau discours dont il vient vous flatter N'est rien qu'un piège adroit pour vous les réciter. Aussitôt il vous quitte; et, content de sa Muse, S'en va chercher ailleurs quelque fat qu'il abuse; Car souvent il en trouve ... Ainsi qu'en sots auteurs, 15 Notre siècle est fertile en sots admirateurs; Et, sans ceux que fournit la ville et la province, Il en est chez le duc, il en est chez le prince; L'ouvrage le plus plat a, chez les courtisans, De tout temps rencontré de zélés partisans; Et, pour finir enfin par un trait de satire, Un sot trouve toujours un plus sot qui l'admire. 20 CHANT III [Le passage de Boileau sur les trois unités au théâtre se trouve au Chant III. Voici les principaux vers — 39-46.) ... Que le lieu de la scène y soit fixe et marqué: Un rimeur, sans péril, delà les Pyrénées, 1 Les dramaturges espagnols ont inspiré maintes pièces de théâtre aux écrivains français du xvio siècle (Mairet, Rotrou, Corneille, Molière, etc.) et ils composaient leurs pièces d'une façon assez négligée, Sur la scène en un jour rassemble des années. 5 (Dans le même Chant, Boileau développe, à propos de la Poésie épique, sa théorie de la supériorité poétique du paganisme sur le christianisme — théorie qui prévaudra jusqu'à l'époque romantique. Chateaubriand la réfutera dans son Génie du Christianisme (1802). Vers 160-244.) ... D'un air plus grand encore la Poésie épique, Dans le vaste récit d'une longue action, 10 Se soutient par la fable et vit de fiction. Là, pour nous enchanter, tout est mis en usage; Minerve est la prudence, et Vénus la beauté; C'est Jupiter, armé pour effrayer la terre; Et trouve sous sa main des fleurs toujours écloses. 25 Qu’Énée et ses vaisseaux, par le vent écartés, 1 «Plus grand encore) = que la tragédie classique. 20 |